Tunisie : trois femmes d’influence dans la Constituante

http://platform.twitter.com/widgets/hub.1326407570.htmlMeherzia Labidi, Lobna     Jeribi et Maya Jribi. La première  est vice-présidente de la Constituante tunisienne, la deuxième députée de la  majorité (Ettakatol) et la troisième membre de l’opposition parlementaire. Leur  mot d’ordre commun : le respect de l’autre.

Lors de certaines séances de la Constituante tunisienne, une voix chantante,     teintée d’un accent  indéfinissable se fait entendre du haut du perchoir.     Il s’agit de Meherzia  Labidi, première vice-présidente de l’Assemblée, qui     remplace au pied levé  le président, Mustapha Ben Jaafar. Inconnue     jusqu’aux élections du  23 octobre dernier, cette binationale, tête de     liste d’Ennahdha dans la  circonscription France 1, a des allures     attendrissantes de mère poule, mais  n’en mène pas moins les débats avec     autorité. On est loin du cliché qui  voudrait que les élues du parti     islamiste soient des figures effacées,  propulsées à l’Assemblée pour cause     de parité obligatoire.

Meherzia Labidi, qui se déclare « Tunisienne d’ici     et  maintenant », est déterminée à agir pour le bien du pays : « Même si     les avis divergent, la Tunisie nous unit ; c’est une tâche suprême que de     participer à la rédaction de  la Constitution. »

Meherzia Labidi, Franco-Tunisienne de 49 ans,  députée d’Ennahda pour la circonscription France 1.

© Ons Abid

Elle encourage vivement     les Tunisiennes non seulement à entrer en  politique, mais à élargir leur     participation à la vie publique : « L’action ne s’exerce pas uniquement au     niveau du gouvernement. Les  femmes doivent s’engager aussi bien au sein     des partis que dans les  régions. » Avec une fermeté sereine, elle tempère     des débats parfois  houleux, car « il faut respecter tous les points de vue     sans que  l’émotion ne prenne le pas sur le dialogue. Notre mission est de     répondre  aussi aux attentes très fortes du peuple ». Optimiste, Meherzia     Labidi  a fait sien le dicton « Seul, on va plus vite, ensemble, on va plus      loin ».

Transparence

Agir ensemble est également un impératif pour Lobna     Jeribi, l’une des  députées d’Ettakatol, qui avait été pressentie pour être     secrétaire d’État  chargée des Technologies de l’information et de la     communication (TIC). « Au sein de l’Assemblée, le réseau de femmes est un     réel vecteur de  communication qui permet de prendre des initiatives de     manière concertée  afin d’infléchir des tendances », souligne celle qui est     entrée en  politique par patriotisme.

Lobna   Jeribi,  39 ans, députée d’Ettakatol, docteur en systèmes d’informatique,   a été  pressentie pour être secrétaire d’État chargée des Technologies   de  l’information et de la communication.

© Ons   Abid  pour J.A.

Dynamique et rayonnante, Lobna Jeribi     est à l’écoute de toutes les  opinions, tout en défendant bec et ongles     l’adoption par la Constituante du  principe d’Open Governance : « La     transparence et la démocratie  participative sont essentielles pour la     Constitution. Les données et le  contenu des débats doivent être     accessibles à tous. Il est primordial de  permettre aux citoyens d’accéder     aux informations qui les concernent.  N’oublions pas combien le peuple a     souffert de l’omerta en vigueur sous  l’ancien régime. » En synergie avec     des associations de la société civile,  Lobna Jeribi a rallié à cette cause     des membres de partis de tous bords. « Chaque formation a un noyau dur,     mais les jeunes compétences  apportent un nouveau souffle et constituent     une classe politique naissante,  animée par la volonté sincère d’asseoir le     pays sur des bases solides.  Ettakatol, critiqué pour avoir accepté de     faire partie de la troïka [avec le Congrès pour la République et Ennahdha,      NDLR], a une approche pertinente qui permet de dialoguer de l’intérieur,      d’impulser des orientations et de veiller à la sauvegarde des valeurs      démocratiques. La vigilance est l’affaire de tous, et la liberté      d’expression ne sera plus jamais confisquée. »

Contre-pouvoir

Face à ces     représentantes de la majorité, Maya Jribi s’est imposée comme  chef de     l’opposition parlementaire. Son éloquence et sa grande maîtrise du     discours politique font de chacune de ses prises de parole un temps fort      des débats. Candidate à la présidence de l’Assemblée, la secrétaire     générale  du Parti démocrate progressiste (PDP) a vu sa popularité  grimper     en flèche après avoir analysé publiquement l’échec de sa formation  aux     élections et soutenu les manifestants du Bardo venus réclamer un  meilleur     équilibre des pouvoirs.

Maya  Jribi,  biologiste de 52 ans, est la secrétaire-générale du PDP. Cette  ancienne  militante de la Ligue tunisienne des droits de l’homme (LTDH)  est la première  femme à diriger un parti politique tunisien.

© Ons Abid pour J.A

Militante dans l’âme, elle est convaincue que pour     remettre le processus  démocratique en marche il est indispensable de     travailler avec la société  civile. Elle est l’une des rares personnalités     politiques à avoir pointé  du doigt la question de la répartition des     pouvoirs et à dénoncer les  similitudes entre le discours d’Ennah­dha et     celui de l’ancien parti  au pouvoir. « L’opposition joue le rôle de     contre-pouvoir ; le temps de  l’opinion unique est révolu »,     martèle-t-elle. De même  s’inquiète-t-elle de la durée indéterminée de la     phase de transition. Sans  jamais se départir d’une grande dignité, elle     aborde ouvertement les sujets  qui fâchent, comme les intrusions des     salafistes sur la scène sociale, et  rappelle que « l’islam est censé être     modéré et tolérant » et que « l’on est censés vivre tous ensemble en dépit     de nos  différences ».

Meherzia, Lobna et Maya, figures phares de la     Constituante, combattent  sur de multiples fronts, parfois différents, et     peuvent même s’opposer, mais  toutes les trois sont unies par la défense de     la démocratie et la sauvegarde  des acquis sociétaux. Puissent leurs pairs     masculins en prendre de la  graine.

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Jeuneafrique.com par Frida Dahmani, à Tunis

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