Bagdad – Les combattants jihadistes avançaient jeudi vers la capitale Bagdad après s’être emparés de larges territoires du nord-ouest de l’Irak face à une armée en déroute, les États-Unis n’excluant pas de frappes aériennes pour enrayer l’offensive extrémiste.
Craignant un assaut contre Kirkouk, les forces kurdes ont pris le contrôle total de cette ville pétrolière multiethnique située à 240 km au nord de Bagdad et de ses alentours après le retrait de l’armée irakienne.
Le Parlement a annulé, faute de quorum, sa réunion visant à décréter, à l’appel du gouvernement du chiite Nouri al-Maliki, l’état d’urgence dans le pays, plongé dans la tourmente depuis la prise mardi de la deuxième ville d’Irak, Mossoul, de sa province, Ninive, et de régions des provinces voisines de Kirkouk et Salaheddine.
Face à cette offensive d’envergure de l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL), et l’impuissance de l’armée à la contenir, le Conseil de sécurité de l’ONU se réunit à huis clos à partir de 15H30 GMT, avec une intervention de l’envoyé spécial de l’ONU en Irak, Nickolay Mladenov, par vidéo-conférence.
Dans un enregistrement sonore mercredi, l’un des dirigeants de l’EIIL, Abou Mohammed al-Adnani, a appelé les insurgés à marcher sur Bagdad et les villes saintes chiites de Kerbala et Najaf (centre) critiquant M. Maliki pour son incompétence.
Jeudi, les jihadistes étaient à 90 km au nord de Bagdad, après s’être emparés de Dhoulouiya en contournant la cité de Samarra qu’ils n’ont pu prendre, selon un policier et des habitants. Les hommes armés sillonnaient les rues et la police y étaient absents.
– Kirkouk sous contrôle kurde –
L’EIIL a en outre avancé vers la province de Diyala (centre), voisine de celle de Bagdad, en prenant plusieurs villages aux alentours, ont précisé des responsables.
Selon des experts, l’EIIL est constitué en grande partie en Irak d’ex-cadres et membres des services de sécurité du président Saddam Hussein, renversé après l’invasion américaine en 2003.
Alors que l’armée ne parvient le plus souvent pas à stopper la progression fulgurante des extrémistes, M. Maliki, honni par les jihadistes, a appelé toutes les tribus à former des unités de volontaires pour combattre avec ses forces les insurgés.
Outre des territoires du nord, les combattants aguerris de l’EIIL, considéré comme l’un des groupes les plus dangereux au monde par les États-Unis, contrôlent déjà des régions de la province occidentale d’Al-Anbar depuis janvier.
A Mossoul, l’EIIL continuait de détenir une cinquantaine de citoyens turcs pris en otages au consulat, de même que 31 chauffeurs turcs dans la province.
Environ un demi-million d’habitants de Mossoul ont fui leurs foyers, craignant pour leur vie.
A Kirkouk, c’est la première fois que les forces kurdes contrôlent totalement la ville où normalement la sécurité est assurée par une force de police conjointe formée d’éléments arabes, kurdes et turkmènes.
Nos forces ont achevé leur déploiement autour de Kirkouk et nous contrôlons désormais toute la ville, a dit un commandant des peshmergas, en assurant qu’elles ne permettraient pas l’entrée d’un seul membre de l’EIIL.
En vue d’enrayer l’offensive islamiste, les États-Unis qui ont retiré fin 2011 leurs troupes d’Irak au terme d’un très lourd engagement militaire pendant huit ans, envisagent plusieurs options pour aider Bagdad, dont des frappes menées par des drones, selon un responsable américain.
– ‘Echec total’ de Washington –
La diplomatie américaine s’est défendue d’avoir été prise par surprise, affirmant avoir exprimé depuis des mois ses inquiétudes sur la menace terroriste de l’EIIL et a dit que Washington se tient prêt à venir en aide à Bagdad.
Mais Washington et Londres ont exclu de renvoyer des troupes au sol dans ce pays.
Pour la Russie, les développements en Irak illustrent l’échec total de l’intervention américaine et britannique dans ce pays.
Allié de M. Maliki, l’Iran chiite, par la voix de son président Hassan Rohani, a promis de lutter contre le terrorisme en Irak, sans en dire plus sur les actions qu’il pourrait entreprendre.
L’EIIL, qui ambitionne d’installer un État islamique, a l’appui de tribus anti-gouvernementales et jouit d’un certain soutien parmi la minorité sunnite qui s’estime marginalisée par le pouvoir chiite.
Basé dans l’ouest irakien, il s’est infiltré en Syrie voisine via la frontière très poreuse, où il combat aujourd’hui d’autres groupes rebelles qui l’accusent de multiples abus -rapts et exécutions. Il tient en Syrie de larges secteurs de la province pétrolière de Deir Ezzor (nord-est), faisant craindre une unité territoriale avec le nord-ouest irakien.
Les troupes irakiennes, formées par les États-Unis à partir de zéro et après l’exclusion des soldats sous Saddam Hussein, n’ont jamais réussi à devenir une véritable force armée et faire cesser les attentats qui ensanglantent le pays depuis un an et demi.
Romandie.com avec(©AFP / 12 juin 2014 13h23)
Étiquettes : Kirkouk
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