Editorial. Selon l’ONU, 20 millions de personnes ont aujourd’hui besoin d’une assistance alimentaire d’urgence dans sept pays.
Il faut sonner l’état d’urgence, bien sûr. Mais il y a aussi quelque chose de désespérant – d’obscène ? – à devoir constater la réapparition récurrente de la famine dans un monde qui, de façon chronique, déborde de surplus alimentaires dont on ne sait que faire. Bien sûr, la question est plus complexe. Elle ne se limite pas à la production de denrées alimentaires.
Mais tout de même, en situation extrême, comme aujourd’hui en Afrique de l’Est, les ressources devraient être faciles à dégager, même si la distribution de l’aide pose des problèmes spécifiques. Les moyens financiers ne devraient pas être trop difficiles à réunir. Bref, la répétition du drame de 2011 dans la Corne de l’Afrique, quand la sécheresse a fait quelque 260 000 victimes en Somalie, aurait quelque chose d’intolérable.
Sécheresse et guerres
Sept pays sont concernés : Djibouti, Ethiopie, Kenya, Ouganda, Somalie, Soudan du Sud et, dans une moindre mesure, Tanzanie. La sécheresse n’est pas la seule coupable, même si elle affecte tout le monde. La guerre doit aussi être incriminée au Soudan du Sud, de même que Boko Haram, cette puissante secte djihadiste armée, et Al-Qaida en Somalie avec les groupes de Chabab, l’ensemble bien souvent sur fond d’Etats faillis.
En tout, 20 millions de personnes, selon l’ONU, ont aujourd’hui besoin d’une assistance alimentaire d’urgence en Afrique de l’Est. Les éléments d’un drame humanitaire de grande ampleur sont réunis.
Lire aussi : La famine menace à nouveau l’Afrique de l’Est
La sécheresse ne devrait surprendre personne. Quoi qu’en pensent les Etats-Unis de Donald Trump – en plein négationnisme scientifique –, le réchauffement climatique frappe l’Afrique en première ligne. Et plus durement qu’ailleurs. « Les sécheresses y seront nombreuses, plus régulières et plus intenses », avait prévenu le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat).
L’incapacité du gouvernement central du Nigeria à venir à bout de Boko Haram affecte aussi toute la région du lac Tchad. Au Soudan du Sud, quatre ans d’une guerre civile atroce ont déplacé des centaines de milliers de personnes et provoqué la famine dans le nord du pays – où 100 000 personnes pourraient mourir de faim si elles ne sont pas aidées dans les jours qui viennent.
Pour l’ensemble de l’Afrique de l’Est, les sommes requises tourneraient autour de 2 milliards de dollars. C’est une petite levée de fonds dans un monde où quelque 4 000 milliards de dollars sont échangés tous les jours. Mais la distribution de l’aide est périlleuse en zone de guerre, où la question de l’accès aux populations est primordiale : « Si l’on s’y prend mal, tout cet argent peut finir dans les poches de responsables corrompus et avoir des effets pervers », prévient un expert humanitaire.
Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a eu les mots qu’il fallait : « Nous sommes face à une tragédie, nous devons éviter qu’elle devienne une catastrophe. »
Lemonde.fr
Étiquettes : Djibouti, Ethiopie, Famine, KENYA, Ouganda, Somalie, Soudan du sud, Tanzanie
Votre commentaire