Il y a 48 ans, Picasso expirait dans sa propriété de Mougins

Le Monde d’Avant. Avec la mort de Picasso disparaît un monstre de la peinture ayant illuminé le monde artistique depuis la France.

Pablo Picasso en 1973 a Vallauris.

On croyait le vieil homme immortel. Même si, en ce mois d’avril 1993, il continue à peindre chaque nuit de plus en plus frénétiquement, ses forces déclinent. Le colosse affiche déjà 91 ans. Depuis quelques années déjà, son corps lui donne du fil à retordre, ce qui l’a obligé à quitter son château de Vauvenargues, perché sur les pentes de la Sainte-Victoire, trop isolé, pour son mas de Notre-Dame-de-Vie, à Mougins, plus proche de ses médecins. Sa dernière épouse, Jacqueline Roque, de 44 ans sa cadette, le protège avec une détermination de tigresse, allant jusqu’à décourager les visites, même celles de ses enfants et petits-enfants.

Son fils Paulo, issu d’un précédent mariage, lui sert de secrétaire à Paris et, surtout, de souffre-douleur. Si Picasso éblouit le monde par son génie, dans l’intimité, il est odieux, il faut le dire. Il peut se montrer sadique et despotique avec son fils. Il l’humilie souvent, lui donne de quoi vivre au compte-gouttes. C’est un « être maléfique », dira bien plus tard sa petite-fille Marina.

Le 7 avril en fin d’après-midi, au moment de gagner son atelier, le « Soleil de Dieu », comme le surnommait Jacqueline, sent ses feux décliner. Il ne s’est jamais vraiment relevé d’une grippe attrapée quelques mois plus tôt et qui lui avait valu une hospitalisation. Son malaise inquiète Jacqueline, qui fait immédiatement venir de Mougins le docteur Georges Rance.

Le médecin diagnostique un œdème pulmonaire. Jacqueline passe un coup de fil au pneumologue parisien Bernal pour lui demander de venir au plus vite. Picasso a du mal à respirer, il tousse. Durant le dîner, le vieux peintre se montre de plus en plus faible. Le Soleil se couche une dernière fois.

« Vous devriez vous marier »

Le 8 avril au matin, Pablo se réveille à moitié mort. S’il conserve toute sa tête, son corps est en train de le lâcher. Il en a conscience. Sa vie ne tient plus qu’à un poil de pinceau. Jacqueline a fait venir son notaire, maître Antebi, au cas où il voudrait dicter ses dernières volontés. Sa fortune est immense, ses œuvres d’art innombrables et sa postérité assurée. Mais Picasso n’a que faire de ceci. Il s’est toujours moqué du chaos qu’il laissera derrière lui. Son âme maléfique s’en réjouit même. Le pneumologue accouru de Paris la veille ne peut qu’assister aux derniers instants sur terre du monstre sacré.

Le peintre moribond a encore la force de demander au pneumologue parisien s’il est marié. Comme celui-ci répond par la négative, il prend la main de Jacqueline, avant de lui dire « Vous devriez vous marier. C’est utile ! » Puis, se tournant vers sa femme, il adopte un ton sérieux : « Jacqueline, tu diras à Antebi… » La suite, on ne la connaîtra pas. Le Soleil de Dieu s’éteint à 11 h 35, victime d’une embolie pulmonaire.

Picasso avait fait connaître son désir d’être enterré dans sa propriété de Mougins, mais le maire de la commune refuse de délivrer l’indispensable dérogation pour « ce communiste milliardaire ». Finalement, le 10 avril, le cortège funèbre emporta le corps de Picasso jusqu’à sa propriété de Vauvenargues sous la neige. Il est inhumé dans le jardin de son château.

Avec Le Point par Frédéric Lewino

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