Faute d’accord avec l’armée russe pour mettre fin aux tirs, Kiev a suspendu l’évacuation des civils dans l’est de l’Ukraine.

Assiégée depuis des semaines par les troupes russes, la ville ukrainienne de Marioupol est en ruine. Photo : Getty Images/AFP/Andrey Borodulin
Les derniers combattants ukrainiens à Marioupol ont choisi de faire fi de l’ultimatum de la Russie, qui leur avait donné jusqu’à dimanche en début d’après-midi pour déposer les armes et pour quitter la ville. Un affrontement final se dessine entre les deux camps dans cette localité du Donbass, dont la chute paraît imminente.
Tous ceux qui abandonneront les armes auront la garantie d’avoir la vie sauve. C’est leur seule chance.
C’est en ces termes que le ministère russe de la Défense s’est adressé aux derniers défenseurs de Marioupol, retranchés dans le complexe métallurgique d’Azovstal. Ces combattants ont plutôt décidé de tenir promesse et de se battre jusqu’au bout même si le combat paraît pour eux sans issue.
Selon une récente publication Telegram de la Défense russe, à part cette poignée de résistants, l’entièreté du territoire de la ville de Marioupol a été débarrassée des militants de la formation nazie Azov, des mercenaires étrangers et des militaires ukrainiens
.
« La ville n’est pas tombée. Nos forces militaires, nos soldats y sont toujours. Ils combattront jusqu’au bout. »— Une citation de Denys Chmygal, premier ministre de l’Ukraine, en entrevue à la chaîne américaine ABC
Malgré leur refus de partir, la vice-première ministre ukrainienne Iryna Verechtchouk a exigé dimanche l’ouverture d’une voie d’évacuation pour les militaires blessés.

Des troupes russes en route pour Marioupol Photo : Reuters
L’état-major ukrainien a déjà signalé des frappes aériennes sur la ville ainsi que des opérations d’assaut près du port.
La Russie et ses supplétifs semblent se préparer à déclarer la victoire dans la bataille de Marioupol
, a indiqué l’Institut américain pour l’étude de la guerre (ISW).
La prise de cette ville portuaire du sud-est de l’Ukraine, inlassablement pilonnée par les forces russes depuis le début de l’invasion, le 24 février, constituerait un gain considérable pour Moscou.
Elle permettrait en effet à la Russie de consolider ses gains territoriaux le long de la mer d’Azov en reliant la région du Donbass à la Crimée, annexée en 2014.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a prévenu samedi que l’élimination des derniers soldats ukrainiens à Marioupol mettrait fin aux négociations de paix avec Moscou. Il a une fois de plus demandé aux pays occidentaux de fournir des armes lourdes à ses troupes pour qu’elles puissent défendre cette ville où des milliers d’habitants vivent dans des conditions inhumaines
.
Il n’y a ni nourriture, ni eau, ni médicaments
, a lancé M. Zelensky, qui a aussi accusé les Russes de refuser
l’ouverture de couloirs humanitaires.
Selon le directeur général du Programme alimentaire mondial, David Beasley, plus de 100 000 civils sont au bord de la famine à Marioupol.
Deuxième ville en importance au Donbass, Marioupol comptait 441 000 habitants avant l’invasion russe.

La ville de Marioupol a été ravagée par l’offensive russe. Photo: Reuters/Alexander Ermochenko
La vice-première ministre ukrainienne Iryna Verechtchouk a annoncé dimanche la suspension des couloirs humanitaires pour l’évacuation des civils dans l’est de l’Ukraine, faute d’accord avec l’armée russe pour mettre fin aux tirs.
Nous n’avons pas réussi à négocier un cessez-le-feu sur les itinéraires d’évacuation avec les occupants. C’est pourquoi, malheureusement, nous n’allons pas ouvrir de couloirs humanitaires aujourd’hui
, a indiqué Mme Verechtchouk sur Telegram. Nous ne ménageons aucun effort pour que les couloirs humanitaires soient rouverts le plus rapidement possible.
Afin de soutenir les efforts humanitaires en Ukraine et dans certains pays voisins qui accueillent des réfugiés, l’Union européenne a annoncé l’octroi de 50 millions d’euros supplémentaires.
Toujours debout
En ce 53e jour d’affrontements, le premier ministre ukrainien Denys Chmygal a catégoriquement rejeté les affirmations de Vladimir Poutine selon lesquelles l’armée russe était en train de remporter la guerre.
« Pas une seule grande ville n’est tombée. Seule [la ville de] Kherson est sous contrôle des forces russes, mais toutes les autres villes sont sous contrôle ukrainien. »— Une citation de Denys Chmygal, premier ministre de l’Ukraine
Selon ses informations, plus de 900 municipalités ukrainiennes, dont Kiev, étaient libres de toute occupation russe.
Nous combattons actuellement dans la région du Donbass et nous n’avons pas l’intention de nous rendre
, a-t-il ajouté.

Le premier ministre ukrainien Denys Chmyhal Photo : Reuters
Pour sa part, Volodymyr Zelensky a balayé l’hypothèse selon laquelle il laisserait Moscou s’emparer du Donbass et d’une partie de l’est de l’Ukraine pour arrêter le bain de sang.
L’Ukraine et son peuple sont clairs : nous n’avons aucune revendication sur les territoires de quelqu’un d’autre, mais nous n’allons pas abandonner le nôtre
, a-t-il affirmé en entrevue à CNN.
Nouvelles frappes à Kiev
Les forces russes ont poursuivi leurs frappes dans la région Kiev dimanche. Le ministère russe de la Défense a annoncé avoir bombardé un autre complexe militaire situé non loin de la capitale ukrainienne.
Cette fois-ci, c’est une usine de munitions près de Brovary qui a été la cible des missiles russes. Le maire de la localité, Igor Sapojko, a affirmé que certains éléments d’infrastructures ont été touchés au début de la nuit.
Au cours des trois derniers jours, les forces russes ont mené plusieurs frappes sur des usines militaires à Kiev et dans sa région pour venger le naufrage du vaisseau amiral Moskva.
Samedi, une frappe russe avait visé une usine de matériel militaire, où sont notamment construits des chars, dans le district de Darnytsky. L’attaque a fait un mort et plusieurs blessés.

Une voiture fuit l’explosion d’une raffinerie de pétrole à Lyssytchansk. Photo: Reuters/Marko Djurica
Cette même journée, une raffinerie de pétrole en périphérie de la ville de Lyssytchansk, tout près de la ligne de front dans l’est de l’Ukraine, a été la cible de bombardements.
Le ministère russe de la Défense avait aussi affirmé avoir abattu, dans la région d’Odessa, un avion de transport militaire ukrainien qui livrait un important lot d’armes fourni par des pays occidentaux
.
Selon l’Institut américain pour l’étude de la guerre, les Russes ont poursuivi leurs offensives près d’Izyoum et de Popasna ainsi que dans la région de Roubijné et de Severodonetsk.
Du côté de Kharkiv, cinq personnes ont été tuées et 13 autres blessées dimanche dans une série de frappes, selon les services de secours.
Le Haut-Commissariat pour les réfugiés de l’ONU (HCR) estime que cinq millions de personnes ont fui l’Ukraine depuis le début de la guerre, qui a aussi fait plus de sept millions de personnes déplacées à l’intérieur du pays.
Radio-Canada avec les informations de Agence France-Presse
Étiquettes : Bombardements, guerre, Kiev, Marioupol, Russie, Ukraine
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