
L’armée russe concentre désormais ses opérations dans la région du Donbass, après s’être retirée du nord du pays. Photo : Getty Images/Fadel Senna
« Tous les jours, il y a des victimes. Tous les jours, tes amis meurent », raconte Shadow, nom de terrain d’un ancien soldat canadien originaire de Sherbrooke, au Québec. Ses deux derniers mois en Ukraine ne ressemblent en rien à ce qu’il a connu durant ses années avec l’armée canadienne. Après avoir risqué sa vie plusieurs fois, il a pris sa décision : il ne retournera pas au front.
Il y a dix jours, Shadow a évité la mort de justesse, encore une fois. Avec son ami Wali, un tireur d’élite canadien qui s’est également porté volontaire en Ukraine, et deux soldats et amis ukrainiens, il était chargé de suivre un char russe dans la région du Donbass, dans l’est du pays.
Le quatuor croyait ne pas avoir été repéré. Les deux soldats ukrainiens sont même sortis de leur cachette pour fumer une cigarette et en ont offert aux Canadiens. Wali a refusé, mais Shadow était en train de les rejoindre quand le char russe s’est soudainement retourné et a tiré dans leur direction.
L’obus est arrivé exactement entre les deux soldats ukrainiens. L’explosion a repoussé Shadow dans la tranchée, sans blessure. Mais ses deux amis n’ont pas été aussi chanceux. L’un est mort sur le coup, l’autre quelques minutes plus tard.
« Il était à quelques pieds de moi, il respirait encore. On s’est regardés et il est mort sous mes yeux. Deux de mes amis sont morts sous mes yeux. »— Une citation de Shadow, vétéran canadien parti combattre en Ukraine
Shadow fait partie des milliers de volontaires d’un peu partout dans le monde qui ont répondu à l’appel à l’aide du président ukrainien, Volodymyr Zelensky. Photo: Radio-Canada/CBC
Les deux Canadiens, beaucoup moins nombreux et moins équipés que les Russes devant eux, n’avaient pas d’autres choix que de tenter de fuir. Ils ont réussi à s’éclipser, malgré les tirs ennemis.
« C’était ma dernière patrouille sur le front de l’est. Je n’ai qu’un mot pour le décrire : c’est l’enfer. »— Une citation de Shadow, vétéran canadien parti combattre en Ukraine
Tous les jours, il y a des victimes. Tous les jours, tes amis meurent. C’est jour après jour. J’ai des amis américains, des anciens marines, la plupart de leurs missions, c’était d’aller récupérer les corps morts [sic] de leurs amis tués en action. C’est ça la vie sur le front.
« C’était ma première fois »
Shadow et Wali font partie des milliers de volontaires d’un peu partout dans le monde qui ont répondu à l’appel à l’aide du président ukrainien, Volodymyr Zelensky.
Depuis leur arrivée, il y a environ deux mois, ils ont été témoins plusieurs fois de la nature capricieuse de la guerre, la façon dont chaque petit moment ordinaire peut soudainement devenir mortel.
C’est même arrivé à Shadow, qui n’a pas connu la guerre lors de ses années dans les Forces armées canadiennes, lors du tout premier combat de sa vie. Déployé à Irpin, près de Kiev, il devait assister Wali et porter ses munitions.
Son équipe a rapidement été prise d’assaut par les Russes, qui ont bombardé le bâtiment dans lequel ils se trouvaient.
La ville d’Irpin, près de Kiev, a été en partie détruite par les bombardements russes. Photo : Getty Images/Chris McGrath
On a été frappés par un char. Il a bombardé notre bâtiment, mais nous a manqué de quelques mètres. Après, les Russes ont commencé à tirer avec des armes plus légères, nous sommes sortis de notre cachette et [il y a eu] un énorme échange de tirs!
C’était ma première fois. Les Russes étaient à environ 50 mètres de nous, il y avait des balles qui fusaient de partout, partout. On ne pouvait rien faire, ils essayaient de nous encercler.
Un soldat ukrainien a finalement lancé une grenade, ce qui a donné le temps à l’équipe de Shadow de fuir. Ce gars nous a sauvé la vie.
« J’ai fait mon temps »
Après trop d’expériences du genre, Shadow ne retournera pas sur le front. Mais il ne peut pas non plus se résoudre à quitter l’Ukraine et ses citoyens. Pour l’instant, je vais m’engager dans l’aide humanitaire. Je vais rester à Lviv et être aussi utile que possible.
Depuis le début de l’invasion russe, le gouvernement du Canada recommande à ses citoyens d’éviter tout voyage en Ukraine. Si vous êtes en Ukraine, vous devriez vous abriter dans un endroit sécurisé, à moins que vous ne puissiez quitter le pays en toute sécurité
, conseillait Affaires mondiales Canada à la fin du mois de février.
Radio-Canada avec les informations de Murray Brewster et David Common, de CBC
Étiquettes : Canadien, enfer, guerre, Russie, Témoignage, Ukraine
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