Certains gardent cependant toujours un attachement profond à la monarchie. Photo: Reuters/Hannah Mckay
Alors que le récent décès de la reine Élisabeth II suscite une vague d’émotions dans le monde, mais également au pays, certains Canadiens, parmi ceux issus de l’immigration, réclament « l’indépendance » du pays vis-à-vis de la Couronne, affirmant que la mort de la reine est une occasion de repenser les liens avec la monarchie.
Le président de l’Association Inde Canada, Parmod Chhabra, affirme qu’il respectait la reine en tant que souveraine du Canada, mais estime qu’il est temps pour le pays de rompre les liens avec la Couronne.
Je pense que le temps est venu pour la monarchie de se retirer
, explique-t-il, rappelant les atrocités commises contre les Indiens lorsque l’Empire britannique dirigeait leur pays.
« Nous devrions faire avancer la réflexion et penser à la liberté totale, au lieu d’avoir à notre tête [le souverain] que nous n’élisons pas. »— Une citation de Parmod Chhabra, président de l’Association Inde Canada
Plus de 50 pays ayant des liens historiques avec la Grande-Bretagne font partie du Commonwealth, dont la reine Élisabeth II a été la cheffe tout au long de son règne.
Sa mort survient au moment où un nombre croissant de pays débattent de leur relation avec la Couronne britannique. Certains de ces pays demandent que la Couronne britannique s’excuse pour les abus commis durant la période coloniale et qu’elle accorde à ses anciennes colonies des réparations pour l’esclavage.
Vers une indépendance véritable ?
Le président du Conseil national bangladais-canadien, Monir Hossain, abonde dans le même sens que M. Chhabra. Il affirme que le Canada devrait être un pays pleinement indépendant comme d’autres à travers le monde.
Je pense que nous voulons tous l’indépendance ces jours-ci. […] Le monde évolue
, précise-t-il.
Ce ne sont cependant pas tous les Canadiens, parmi ceux issus de l’immigration, qui s’opposent à la reine et à la monarchie.
Reuben Wong est âgé de 73 ans et réside à Richmond, en Colombie-Britannique. Il a grandi à Hong Kong avant d’immigrer au Canada dans les années 1970. Il affirme qu’il ne serait pas là où il est aujourd’hui sans la reine et le système britannique.
L’esprit de la reine vit dans mon sang
, indique M. Wong qui dit avoir vécu à Hong Kong dans un village sans eau ni électricité et qui se félicite de l’éducation gratuite dispensée par les autorités coloniales britanniques, grâce à laquelle il a pu immigrer et se lancer dans une carrière de fonctionnaire.
« Quand je regarde en arrière, je suis reconnaissant envers le système britannique à Hong Kong et la reine. »— Une citation de Reuben Wong, résident de Richmond
Hong Kong ne fait plus partie du Commonwealth depuis la rétrocession à la Chine en 1997.
Vers l’effondrement ?
La famille royale a fait face à de multiples controverses cette année, relatives au rôle de la Couronne dans les anciennes colonies britanniques, au moment où des membres de la famille royale voyageaient pour célébrer le jubilé de platine de la reine, qui marquait ses 70 ans sur le trône.
En mars, il a été vivement reproché au prince William et à la duchesse de Cambridge leur surdité
à l’égard des préoccupations du moment. Il leur a également été reproché de perpétuer des images de la domination coloniale britannique lors d’une tournée au Belize, en Jamaïque et aux Bahamas.
Le mois suivant, le comte et la comtesse de Wessex – Edward, le plus jeune fils de la reine, et sa femme Sophie – ont reporté l’étape de la Grenade d’une tournée dans les Caraïbes à la veille d’un voyage de sept jours après des consultations avec le gouvernement de la Grenade et le gouverneur général, le représentant de la reine sur l’île.
Ils étaient susceptibles d’y faire face à des demandes similaires à celles formulées notamment en Jamaïque; des militants avaient même demandé une audience avec le couple royal.
La Barbade a rompu ses liens avec la monarchie en novembre, et la Jamaïque a déclaré qu’elle ferait de même.
De l’utilité de la monarchie ?
Si la mort de la reine est susceptible d’alimenter des conversations sur la fin des liens avec la monarchie au Canada, certains répondront que le système du pays fonctionne bien et serait trop difficile à changer, selon Jonathan Malloy, professeur de sciences politiques à l’Université Carleton.
La longévité de la reine nous a permis de retarder peut-être certaines conversations. […] Certains verront son décès comme une opportunité de changement
, explique-t-il.
« La monarchie est anachronique et représente des valeurs qui ne correspondent plus à la direction du Canada, mais le système fonctionne en fait assez bien […] et il serait extrêmement difficile de le changer. »— Une citation de Jonathan Malloy, professeur de sciences politiques à l’Université Carleton
Pour M. Malloy, la Couronne est au cœur de nos systèmes juridiques et politiques, et rompre les liens avec elle minerait, entre autres, les traités conclus avec les nations autochtones.
Il ajoute qu’il y aurait également des problèmes liés à la manière de sélectionner un nouveau chef d’État et un risque que la suppression de la Couronne ouvre la porte à d’autres tentatives de modification de la Constitution.
Aucun gouvernement ne veut être absorbé par des pourparlers et des changements constitutionnels
, indique-t-il, soulignant les crises constitutionnelles du lac Meech et de Charlottetown il y a plusieurs décennies.
Radio-Canada avec les informations de La Presse canadienne
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