ALERTE. Elles ont été enlevées jeudi et vendredi par des djihadistes présumés à Arbinda, dans le nord. C’est le premier enlèvement de cette ampleur dans ce pays.

Les recherches sont toujours en cours pour retrouver une cinquantaine de femmes enlevées jeudi et vendredi dans deux localités au nord et à l’ouest de la commune d’Arbinda, située dans le nord du pays, par des djihadistes présumés. « Dès leur disparition signalée, des recherches ont été entreprises en vue de retrouver l’ensemble de ces victimes innocentes, saines et sauves », a précisé le lieutenant-colonel Rodolphe Sorgho, le gouverneur de la région du Sahel, dans un communiqué. « Tous les moyens sont mis en œuvre, sur le plan terrestre et aérien, pour retrouver ces femmes », a indiqué à l’AFP une source sécuritaire, assurant que « des aéronefs survolent la zone pour détecter tout mouvement suspect ».
Arbinda et ses environs sont régulièrement le théâtre d’attaques djihadistes meurtrières (80 morts en août 2021, 42 fin 2019). Mais des enlèvements d’une telle ampleur, en particulier visant des femmes, constituent une nouveauté au Burkina, selon plusieurs observateurs.
Ce que l’on sait
Selon le témoignage de plusieurs habitants et de responsables locaux souhaitant rester anonymes, un premier groupe d’une quarantaine de femmes a été enlevé jeudi, et un autre d’une vingtaine le lendemain. Certaines ont pu s’échapper et regagner leur village pour témoigner, une cinquantaine ne sont pas revenues. « Nous pensons que les ravisseurs les ont emmenées dans leurs différentes bases », a affirmé un habitant d’Arbinda. « C’est le premier enlèvement massif depuis le début de la crise sécuritaire et il faudra bien gérer cette situation pour éviter tout drame ou une récidive », a déclaré pour sa part un officier supérieur, proche de l’état-major.
Une ville sous blocus
La commune d’Arbinda se situe dans la région du Sahel, une zone sous blocus de groupes djihadistes et qui est difficilement ravitaillée en vivres. Près d’un million de personnes vivent actuellement dans des zones sous blocus, dans le nord ou l’est du pays, selon les Nations unies. Le Burkina Faso, en particulier dans sa moitié nord, est confronté depuis 2015 aux attaques de groupes djihadistes liés à Al-Qaïda et à l’État islamique qui se multiplient. Elles ont fait des milliers de morts et au moins deux millions de déplacés. Le capitaine Ibrahim Traoré, président de transition issu d’un coup d’État militaire le 30 septembre – le deuxième en huit mois –, s’est donné pour objectif « la reconquête du territoire occupé par ces hordes de terroristes ».
Les enlèvements massifs, une nouvelle stratégie des groupes armés ?
« C’est la première fois qu’on voit un enlèvement de plusieurs dizaines de femmes. On avait enregistré des cas isolés, mais aujourd’hui c’est comme s’il y avait une nouvelle donne dans l’insécurité », abonde Daouda Diallo, secrétaire général du Collectif contre l’impunité et la stigmatisation des communautés, une association de défense des droits de l’homme.
« Avant, les femmes étaient épargnées. Ce sont les hommes qui étaient traqués. Si on enlève maintenant ces femmes qui pouvaient sortir pour rapporter quelque chose à manger, que va-t-il se passer ? C’est la mort assurée pour tout le monde, car c’est la famine en ce moment. On n’a rien à manger », a expliqué un habitant d’Arbinda, joint lundi par l’AFP. « Depuis que l’information de l’enlèvement s’est propagée, personne n’ose s’aventurer hors de la ville. Si ce ne sont pas les terroristes, c’est la faim qui va nous tuer », ajoute un autre résident.
Lundi, le haut-commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, Volker Türk, a exigé « la libération immédiate et inconditionnelle de toutes les femmes enlevées », appelant les autorités burkinabées à « mener rapidement une enquête efficace, impartiale et indépendante pour identifier les responsables et leur demander de rendre des comptes ».
La France a condamné lundi cet enlèvement « avec la plus grande fermeté », et a appelé « à leur libération immédiate ». Dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères, Paris a réaffirmé « sa solidarité ainsi que son engagement aux côtés du Burkina Faso ».
On se souvient qu’au Nigeria, en 2014, le groupe djihadiste Boko Haram avait enlevé près de 300 adolescentes à Chibok (Nord-Est), suscitant une émotion mondiale avec le slogan « Bring Back Our Girls » (« Ramenez-nous nos filles »), relayé à l’époque jusqu’à la Maison-Blanche. Plus de cent sont toujours portées disparues.
Par Le Point avec AFP
Étiquettes : Arbinda, Burkina Faso, Femmes, Rapt
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