
Marjorie Michel avec le premier ministre Justin Trudeau, le député Greg Fergus et l’ambassadeur canadien aux Nations unies Bob Rae. Photo : Cabinet du Premier Ministre/Adam Scotti
La nomination de la première femme noire au poste de sous-ministre de la Justice et sous-procureure générale du Canada met en lumière le fait que les femmes noires sont peu nombreuses à accéder à des postes dans la haute fonction publique.
Le 10 février est une date que Shalene Curtis-Micallef ne risque pas d’oublier de sitôt. Après une carrière de près de 25 ans comme avocate au ministère de la Justice, le premier ministre Justin Trudeau l’a nommée sous-ministre de la Justice et sous-procureure générale du Canada. J’étais complètement émue
, dit-elle, c’était tout un honneur d’être nommée à ce poste-là.
En devenant la numéro deux du ministère de la Justice du Canada, Shalene Curtis-Micallef a écrit une page d’histoire : elle est la première femme noire à accéder à ce poste. Je prends cette responsabilité comme un privilège
, confie-t-elle.
Une autre femme noire a récemment marqué l’histoire au Canada en devenant cheffe de cabinet adjointe du premier ministre Justin Trudeau. Marjorie Michel n’avait pas imaginé qu’elle occuperait un jour cet emploi.
C’est sûr que c’est un poste, évidemment surtout dans le regard des autres, [qui leur fait dire] : « Oh, mon Dieu, tu es arrivée là ». Oui, c’est vrai, mais c’est d’abord un poste de service qui vient avec beaucoup de responsabilités
, explique-t-elle.
Tracer son chemin en dépit des obstacles
Shalene Curtis-Micallef est devenue sous-ministre de la Justice et sous-procureure générale du Canada après une longue carrière dans la fonction publique. Photo : Radio-Canada/Jonathan Dupaul
En pensant à tout ce qu’elles souhaitent accomplir, pour créer entre autres des environnements de travail inclusifs pour tous, Shalene Curtis-Micallef et Marjorie Michel n’oublient pas pour autant le chemin parcouru. Elles ont à certaines occasions vécu du racisme et de la discrimination.
La sous-procureure générale du Canada explique que lorsqu’elle a été embauchée comme avocate stagiaire dans la fonction publique durant les années 1990, le ministère de la Justice était un milieu de travail différent. Marjorie Michel qui évolue en politique depuis le début des années 2000 parle d’incidents subtils. Toutes les deux ont choisi d’avancer malgré tout.
J’ai commencé la vie avec une mère immigrante résiliente, incroyable, qui a travaillé fort et qui m’a instauré une confiance en moi
, explique Shalene Curtis-Micallef. Pour moi c’est vraiment de faire de mon mieux […] je reconnais lorsque les systèmes ne sont pas justes, mais j’ancre ma personnalité, ma confiance dans ce que je suis capable de faire.
« J’ai eu la chance d’avoir été construite avec beaucoup de confiance en ce que je suis et de ne jamais laisser les autres me définir. »— Une citation de Marjorie Michel, cheffe de cabinet adjointe, du premier ministre Justin Trudeau
Une demande d’action collective devant les tribunaux
Si ces deux femmes ont réussi à progresser en dépit des obstacles, un groupe allègue que des milliers de Noirs, particulièrement des femmes, ont vu leur progression bloquée dans la fonction publique au cours des 50 dernières années en raison du racisme systémique et de la discrimination.
Selon les données compilées par le groupe Recours Collectif Noir, sur les 6717 cadres supérieurs dans la fonction publique, 150 sont noirs; hommes et femmes confondus. C’est moins de 2 % des effectifs.
En décembre 2020, les plaignants ont déposé une demande d’action collective en Cour fédérale au nom de ces employés fédéraux.
Sans commenter le dossier, puisqu’il est devant les tribunaux, la sous-ministre reconnaît qu’il y a du travail à faire et qu’il a été entamé.
Marjorie Michel constate tout de même qu’il y a eu du progrès parmi le personnel politique depuis qu’elle a commencé à travailler sur la colline Parlementaire en 2016. On est au-dessus d’une quarantaine [d’employés noirs], on n’était pas cinq quand je suis arrivée
, explique-t-elle.
Ouvrir des portes pour les générations à venir
Créer des milieux de travail inclusifs est l’affaire de tous, disent les deux femmes, et le mentorat fait partie de la solution.
« J’ai une responsabilité envers ma communauté et envers tous les Canadiens de normaliser le fait que les femmes noires peuvent accéder à des postes qui sont importants dans notre société. »— Une citation de Shalene Curtis-Micallef, sous-ministre de la Justice du Canada et sous-procureure générale du Canada
Marjorie Michel juge important d’être à l’écoute. Je suis quand même cheffe du cabinet adjointe. D’avoir des conversations avec ces femmes pour leur donner de la place, savoir quels sont les enjeux et c’est tout le monde ensemble qui amenons [les solutions] sur la table; moi parfois, je suis un véhicule pour faire avancer les idées parce que, c’est sûr, je suis plus près du centre.
Shalene Curtis-Micallef et Marjorie Michel sont fières d’avoir ouvert la voie. Ce qu’elles souhaitent pour la suite, c’est que d’autres femmes comme elles rejoignent leurs rangs.
Avec Radio-Canada par Valérie-Micaela Bain
Étiquettes : cadre supérieur, CANADA, Défi, Fonction publique
Votre commentaire