Berlin accueille Charles III en grande pompe

Après l’annulation de son voyage à Paris, l’Allemagne est devenue le premier pays étranger visité par le souverain. La capitale le reçoit avec les honneurs.

La femme du president allemand, Elke Budenbender, la reine consort Camilla, Charles III et le president allemand Frank-Walter Steinmeier devant la porte de Brandenburg, le 29 mars a Berlin.
La femme du président allemand, Elke Büdenbender, la reine consort Camilla, Charles III et le président allemand Frank-Walter Steinmeier devant la porte de Brandenburg, le 29 mars à Berlin.© RONNY HARTMANN / AFP

Il vient d’abord chez nous ! se réjouissent les Berlinois qui ont été nombreux à attendre pendant des heures dans le froid l’arrivée du roi Charles III devant la porte de Brandebourg, première étape de cette visite d’État de trois jours. Un lieu hautement symbolique puisque l’ambassade de France et celle de Grande-Bretagne se font face sur la place adjacente à la porte.

Les Berlinois en sont bien conscients : c’est uniquement parce que la visite du roi Charles III a dû être annulée à Paris pour cause de mouvements sociaux que la capitale allemande a droit à cet honneur. Il faut avouer que le spectacle de la rue est autrement paisible à Berlin. Pas d’ordures sur les trottoirs, pas de poubelles en feu, pas de manifestations ni de castagne. Une grève d’avertissement dans les transports en commun a bien eu lieu lundi, mais pour une journée seulement et dans la plus grande discipline. « Même ceux qui étaient chargés de dérouler le tapis rouge à Paris étaient en grève ! » s’amusait le service d’ordre devant l’hôtel Adlon où séjourne le couple royal.

Le convoi royal venu de l’aéroport BER a donc traversé une ville vaquant à ses occupations. Peu de foule en liesse sur son passage. En début d’après-midi, la plupart des Berlinois ignoraient pourquoi soudain leur centre-ville était bloqué par la police. Un millier de policiers et vingt chiens étaient mobilisés pour assurer la sécurité du couple royal.

Déjà 40 visites en Allemagne

C’est la première visite à l’étranger du souverain quelques semaines avant son couronnement, qui aura lieu le 6 mai à Londres. Charles est un routinier de l’Allemagne. Il y a déjà effectué plus de 40 visites en tant que prince. La première fois, en 1962, il avait 13 ans. Il accompagnait son père le prince Philip venu rendre visite à sa famille allemande. C’est Philip qui pilota l’avion venu de Londres. En 1987 à Munich, il était accompagné de son ex-épouse, Diana, et d’une vague de spéculations sur leurs difficultés conjugales et de rumeurs sur un divorce imminent. Aujourd’hui, c’est la reine Camilla qui est à ses côtés.

En 1995, le prince Charles avait été invité dans une cité de Hellersdorf dans l’ancien Berlin-Est. Il y avait rencontré les employées du salon de coiffure Chez Moni et était ensuite allé boire un verre de Rotkäppchen, le mousseux très sucré made in RDA, chez un couple d’habitants d’une des barres HLM. Une foule de curieux s’était massée devant la porte de l’immeuble. « Avant les gens étaient convoqués de force pour venir applaudir les chefs d’État des pays de l’Est de passage, aujourd’hui ils accourent de leur plein gré, enchantés », avait commenté un journal.

L’Allemagne reçoit le nouveau roi avec un zèle tout particulier. Une première dans la longue histoire des visites d’État, les honneurs militaires ne lui ont pas été rendus au château de Bellevue, siège du président allemand, mais à la porte de Brandebourg qui jusqu’en 1989 sépara l’est de l’ouest. Cette dérogation à la règle montre l’importance que Berlin octroie à cette visite. Son point d’orgue : jeudi 30 mars à la mi-journée, le roi Charles prononcera un discours devant le Bundestag. C’est la première fois qu’un monarque est autorisé à s’exprimer devant le Parlement allemand. Il sera accueilli dans l’hémicycle par le chancelier Scholz. Le discours sera retransmis en direct à la télévision. Une date hautement symbolique puisque c’est le 29 mars 2017, il y a tout juste six ans, que le gouvernement britannique annonça au Conseil européen sa décision d’enclencher le Brexit. Après ces années de tensions et de turbulences, ce voyage, espère-t-on à Berlin, devrait marquer le début d’une amélioration des relations entre l’Union européenne et la Grande-Bretagne.

Le couple royal séjourne dans une suite de l’hôtel Adlon avec vue sur la porte de Brandebourg illuminée la nuit. Cet établissement légendaire avait été réduit à un tas de ruines à la fin de la guerre et reconstruit de toutes pièces après l’unification. La partie cérémonielle se tiendra mercredi soir au Palais Bellevue, siège de la présidence. Un château bien modeste si on le compare à Versailles. Le président Frank-Walter Steinmeier, un social-démocrate, a convié des responsables dans le domaine de la transition énergétique à une réception. Elle sera suivie d’un banquet au Palais Bellevue. Cent trente invités, frac pour les hommes et robes longues pour les dames, y participeront. Un faste dont la très sobre Allemagne n’a pas l’habitude. Le roi Charles portera un toast en allemand.

Ukraine et climat

L’Ukraine et le climat seront les deux thèmes centraux de cette visite. Le roi Charles se rendra au centre d’accueil pour les réfugiés ukrainiens établi dans l’ancien aéroport désaffecté de Tegel. Il ira aussi dans le Brandebourg, la région qui encercle Berlin. Lui qui se passionne depuis des années pour l’environnement, rendra visite à une exploitation d’agriculture biologique. Ses exploitants invitent le roi à fabriquer avec eux 150 meules de fromage. Elles seront frappées d’un sceau représentant une couronne et mis en vente.

Vendredi, le roi Charles et la reine Camilla emprunteront l’ICE, le train à grande vitesse tristement réputé pour ses retards incessants, pour se rendre à Hambourg, une étape dédiée à l’histoire douloureuse. À leur arrivée à la gare de Dammtor, ils iront se recueillir sur le mémorial commémorant les convois d’enfants juifs envoyés en Grande-Bretagne pour les protéger des persécutions nazies. Le couple royal britannique visitera le monument à la mémoire des milliers d’enfants juifs envoyés par convoi et ira ensuite déposer une gerbe devant l’église Saint-Nicolas, bombardée pendant la guerre par les alliés britanniques et américains en 1943.

Avec Le Point de la correspondante à Berlin, Pascale Hugues

Étiquettes : , , , , ,

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s


%d blogueurs aiment cette page :