Posts Tagged ‘Agathe Habyarimana’

Femmes de l’ombre… et de pouvoir

décembre 27, 2022

Toutes ont été premières dames et connu la vie de palais. Souvent dans l’ombre, elles ont exercé leur influence en coulisse auprès de leur époux. Et connu des fortunes diverses jusqu’à, pour certaines, tomber en disgrâce.

De gauche à droite : Olive Lembe, Leila Ben Ali, Hinda Déby, Henriette Konan-Bédié, Agathe Habyarimana. © Montage JA; AFP; Sipa; MaxPPP; Riva Press

En Afrique, une première dame peut en cacher une autre, et la diversité de leurs profils est à l’image des soubresauts qui agitent leurs pays.

Il y a, bien sûr, les First Ladies « à l’ancienne », sosies africaines des premières dames de la droite française de la Ve République, d’Yvonne de Gaulle à Bernadette Chirac. Discrète, assumant de ne pas s’occuper de politique, Henriette Konan Bédié est de celles-là, limitant son rôle à l’accompagnement de son époux lors des meetings et compensant le caractère réservé de ce dernier lors des dîners, afin de mettre ses hôtes à l’aise. Comme nombre de ses « homologues », elle anime une fondation caritative, offrant ainsi à son mari un vernis social qui vient lisser les rugosités de la vie politique.

Éminence grise et intermédiaire discrète

Olive Lembe, l’épouse de Joseph Kabila, n’entre pas dans cette catégorie même si elle a, elle aussi, lancé sa fondation. Depuis que son époux s’est retiré du devant de la scène, c’est elle qui, à coups de déclarations publiques plus ou moins subliminales, semble l’inciter à effectuer son come-back. Parfois éminence grise du temps où il était président, aujourd’hui intermédiaire discrète auprès de certains responsables de l’opposition, Olive Lembe s’essaie à la diplomatie sur le subtil échiquier politique congolais.

Quatrième épouse de l’ancien président tchadien décédé en avril 2021, Hinda Déby n’en deviendra pas moins la première dame officielle depuis leur mariage, en 2005. Considérée comme une conseillère officieuse, elle sera parvenue à placer plusieurs de ses frères à des postes influents. À la mort de son époux, elle a quitté le pays et fait le choix d’une retraite dorée en région parisienne.

Rôle condamnable

Les affaires de famille, Leïla Ben Ali les connaît bien. Toute puissante en Tunisie durant les vingt-trois années de règne de son époux, Zine el Abidine Ben Ali, elle avait favorisé l’accession des membres de sa famille, les Trabelsi, à des postes clés du secteur économique, où ils se sont copieusement enrichis. Jusqu’à la Révolution de jasmin de janvier 2011 et le départ du couple en Arabie saoudite, où Leïla coule des jours paisibles – et où l’ancien président est décédé en 2019. Avec, toutefois, l’interdiction édictée par les autorités locales qui lui versent une rente, de se mêler de politique. En échange, Ryad refuse de l’extrader vers la Tunisie, où la justice l’a déjà condamnée par contumace à une lourde peine.

Agathe Habyarimana aura eu moins de chance. La veuve du président rwandais Juvénal Habyarimana – assassiné en avril 1994 –, soupçonnée d’avoir joué un rôle dans le génocide des Tutsi, est toujours mise en cause par la justice française. Depuis 1998, elle réside en banlieue parisienne, sans statut légal. Tolérée, mais jamais régularisée ni extradée vers le Rwanda… Tout comme Leïla Ben Ali, elle n’a jamais pu retourner dans son pays. Les deux femmes savent que la justice les y attend de pied ferme.

Avec Jeune Afrique

Rwanda : la demande de non-lieu d’Agathe Habyarimana jugée « irrecevable »

août 30, 2021
Agathe Habyarimana, veuve de l’ancien président rwandais Juvenal Habyarimana, au Palais de justice de Paris, le 10 janvier 2012.

La veuve de l’ancien président rwandais Juvénal Habyarimana, assassiné le 6 avril 1994, est visée depuis 2008 par une enquête sur son rôle lors du génocide des Tutsi.

La Cour d’appel de Paris a jugé lundi « irrecevable » la demande de non-lieu d’Agathe Habyarimana, soupçonnée d’être impliquée dans le génocide commis contre les Tutsi au Rwanda en 1994 et visée par une enquête en France depuis treize ans.

Cette requête a été jugée irrecevable pour des questions de forme, a précisé à l’AFP une source judiciaire. « On occulte le débat au fond pour s’en tenir à des arguties juridiques », a regretté ce 30 août son avocat, Me Philippe Meilhac.

Agathe Kanziga, veuve de Juvénal Habyarimana, le président hutu dont l’assassinat, le 6 avril 1994, avait donné le signal de départ au génocide contre les Tutsi, est visée depuis 2008 par une information judiciaire en France portant sur son rôle lors du génocide, initiée par une plainte du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR).

Témoin assisté

Dans cette procédure, elle a été placée en 2016 sous le statut de témoin assisté, intermédiaire entre témoin et mis en examen, et n’a plus été interrogée depuis sur les faits.

Aujourd’hui âgée de 78 ans, elle invoquait le « délai déraisonnable » de l’enquête pour demander aux juges d’instruction de clore leurs investigations. Ceux-ci ont rejeté sa demande en novembre, faisant notamment valoir que des actes d’instruction étaient « en cours ». Elle a alors interjeté appel de leur décision.

C’EST UNE SITUATION DÉPLORABLE CAR CELA BLOQUE TOUTE POSSIBILITÉ DE RÉGULARISER SA SITUATION ADMINISTRATIVE

« C’est un dossier dans lequel on n’a aucun élément nouveau depuis cinq ans et pas davantage depuis sa demande de non-lieu [l’an dernier], a souligné Me Meilhac. C’est une situation déplorable car cela bloque toute possibilité de régulariser sa situation administrative. »

Contacté par l’AFP, Alain Gauthier, cofondateur du CPCR, s’est « réjoui » de la décision de la Cour d’appel. « Mais le principal n’est pas dit, a-t-il ajouté. Quelle suite va être donnée à l’information judiciaire dans cette affaire ? Est-ce que la justice française va encore traîner des pieds pendant des années et attendre que Mme Habyarimana disparaisse, comme ça le dossier s’éteindra ? »

En France depuis 1998

Installée en France depuis 1998, Agathe Habyarimana est, de facto, sans statut légal puisque les autorités de ce pays ont refusé de l’extrader vers le Rwanda en 2011, sans toutefois lui accorder l’asile en raison des soupçons sur le rôle qu’elle a pu jouer dans l’une des pires tragédies du XXe siècle.

Elle est souvent présentée par ses accusateurs comme l’une des dirigeantes de l’ »akazu », le premier cercle du pouvoir hutu qui a planifié et orchestré le génocide pendant lequel quelque 1 million de personnes, essentiellement tutsi, ont été tuées. Un rôle qu’Agathe Habyarimana a toujours contesté.

Par Jeune Afrique avec AFP