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« Ils sont là, à côté » : les Finlandais craignent leurs voisins russes

mars 4, 2022
Alexander Stubb au bord d'un lac

L’ancien premier ministre finlandais Alexander Stubb est professeur à la European University Institute. Photo : Radio-Canada/Raphaël Bouvier-Auclair

La guerre en Ukraine a eu des conséquences géopolitiques importantes en Finlande. Pour la première fois cette semaine, un sondage montrait qu’une majorité de la population était favorable à l’idée d’adhérer à l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), alliance militaire dont le pays, tout comme la Suède, ne fait pas partie.

L’ancien premier ministre finlandais Alexander Stubb, aujourd’hui professeur à la European University Institute, nous offre son regard sur les relations avec l’Organisation du traité de l’Atlantique nordOTAN, mais aussi avec la Russie, voisine de son pays.

Nous l’avons rencontré près d’Helsinki, la capitale de la Finlande.

Raphaël Bouvier-Auclair : Comment le débat sur la relation entre la Finlande et l’OTAN a-t-il évolué au cours des dernières semaines?

Alexander Stubb : Je dirais au cours des derniers jours! C’est vraiment une révolution. Normalement, on était à peu près à 50 % contre l’adhésion à l’OTAN et 20 % pour. Maintenant c’est complètement bouleversé. On a vu un sondage d’opinion de 53 % en faveur, moins de 30 % contre et à peu près 19 % des gens qui n’ont pas encore décidé. C’est un changement historique.

Question : Est-ce que ce changement dans l’opinion publique va forcer les politiciens, y compris ceux qui sont plutôt réfractaires à adhérer à l’OTAN, à repenser leur position?

Réponse : Certainement, mais ce n’est pas la raison. Moi, je trouve que la raison, c’est que la situation de sécurité en Europe a complètement changé. C’est un moment comme en 1989, c’est un moment comme en 1939. C’est pour ça qu’il faut analyser notre situation de sécurité. Je crois que la population finlandaise a vraiment peur et c’est pour ça que la réaction a été assez forte. Donc oui, ça va pousser notre président, notre première ministre, notre ministre des Affaires étrangères et de la Défense à peut-être trouver un chemin pour devenir membre de l’OTAN.

Question : Vous êtes favorable depuis longtemps à l’idée d’une adhésion à l’alliance…

Réponse Oui, j’étais déjà favorable dans les années 1990. Mais maintenant, à mon avis, ce n’est pas l’heure. Il ne faut pas seulement faire une analyse, il faut rester calme. Il faut être vraiment Finlandais. Parce qu’on a maintenant en Russie un président vachement agressif. Il ne faut pas un autre conflit ici en Finlande ou en Suède. Donc, il faut trouver un chemin. Il faut trouver la date et obtenir une sorte de garantie de sécurité alternative. Et, enfin, on pourra être membre.

Le Téléjournal avec Céline Galipeau

La violence de la Russie fait peur à la Finlande

Le reportage de Raphaël Bouvier-Auclair

Question : Justement, le Kremlin a averti la Finlande et la Suède, qui ne fait pas non plus partie de l’alliance, qu’il y aura des conséquences si ces pays se joignent à l’OTAN. Il faut prendre ces menaces au sérieux?

Réponse Oui, parce que maintenant Vladimir Poutine a trois demandes. La première est de prendre l’Ukraine et la Crimée. La deuxième : trouver une solution en matière de sécurité dans l’est de l’Europe. Et la troisième est de ne pas menacer la Russie dans le nord, avec la Finlande et la Suède. C’est pour ça qu’il faut rester calme. La situation est vraiment critique. Il faut penser que nous partageons 1300 km de frontière avec la Russie. Ils sont là, à côté. Donc, c’est difficile.

Question : Quelle est la situation de la Finlande en matière de défense?

Réponse Nous sommes assez en sécurité. Nous avons une défense indépendante et forte. Nous avons plus de 60 avions de chasse F-18 et nous avons acheté 64 engins F-35. Nous sommes complètement compatibles avec l’OTAN, puisque nous faisons beaucoup d’exercices avec eux. Oui, la situation sécuritaire en Finlande est critique, mais en même temps nous sommes bien préparés. Nous avons apporté notre contribution en matière de défense.

Question : Vous soulignez la collaboration qui existe déjà entre votre pays et l’OTAN. Qu’est-ce qu’une adhésion viendrait concrètement changer?

Réponse Concrètement, il y a deux changements. D’abord être un membre permet d’être protégé par l’article 5 de la charte de l’OTAN et d’avoir une garantie de sécurité. L’autre élément est de faire partie d’un système de sécurité politique et en matière de défense. Je pense que l’Europe sera divisée en deux et que la Russie sera complètement isolée. Dans ce cas-là, la Russie va agir d’une manière très agressive. Il faut donc choisir d’avoir une sécurité maximale. Et la sécurité maximale pour la Finlande, c’est l’OTAN.

Question : La Finlande et la Russie ont développé des relations dans plusieurs dossiers au cours des dernières décennies. Est-ce que vous allez devoir revoir votre relation avec votre voisin?

Réponse Aujourd’hui, au début de mars, on n’a pas de relation avec la Russie. Il faut comprendre cela. On ne peut pas discuter avec Poutine. C’est très difficile d’envoyer des messages. On va voir un pays qui est complètement, complètement isolé. Avant, nous avions développé des bases en matière de sécurité. C’est-à-dire, une bonne relation avec la Russie, mais également une bonne relation avec l’Union européenne, l’OTAN, les États-Unis et le Canada. Tout cela, bien sûr, en ayant aussi une défense indépendante. Mais maintenant, un de ces piliers a été détruit : notre relation avec la Russie. C’est pour cela qu’il faut commencer une analyse de notre sécurité.

Radio-Canada avec Raphaël Bouvier-Auclair

Certains propos ont été synthétisés à des fins de compréhension.

Finlande: les Verts quittent le gouvernement à cause du nucléaire

septembre 18, 2014

Helsinki – Les Verts finlandais ont annoncé jeudi leur départ du gouvernement à cause de l’accord donné par l’exécutif à un projet de centrale nucléaire que doit construire le russe Rosatom.

Les Verts sont opposés à cette centrale nucléaire à Pyhäjoki, sur la côte ouest du pays, qui sera exploitée par le groupe de nucléaire finlandais Fennovoima, auquel le gouvernement a donné son autorisation.

Mon état d’esprit est que j’en ai gros sur le coeur et que je suis déçu (…) Je propose que nous quittions le gouvernement samedi, a affirmé à la presse à Helsinki le président du parti des Verts et ministre de l’Environnement, Ville Niinistö.

Les Verts doivent encore entériner la décision par un vote qui semble une formalité, sachant la vigueur avec laquelle ils ont critiqué le projet non seulement parce qu’ils sont opposés au développement du nucléaire, mais aussi à cause de la présence de Rosatom, fournisseur de la centrale et actionnaire à 34% de Fennovoima.

Il s’agit d’un choix entre si on investit sur les énergies renouvelables nationales (..) ou si on mise sur un projet nucléaire mené par Rosatom, qui opère sous la direction de l’état Russe, avait souligné M. Niinistö déjà lundi.

Le premier ministre conservateur Alexander Stubb a qualifié le projet de Fennovoima de très important et rejeté les objections soulevées par la participation russe.

Je comprends les inquiétudes mais je veux assurer qu’on va agir selon les lois finlandaises, a-t-il répondu lors d’une conférence de presse.

Après le vote serré du gouvernement (10 pour, 7 contre), le dossier retourne maintenant au Parlement, qui doit voter sur le projet pour une deuxième fois, pour l’adopter définitivement.

Le projet a connu des péripéties, dans un pays qui croit à l’avenir du nucléaire.

En juillet 2013, Fennovoima avait choisi Rosatom pour construire la centrale, alors que cette société ne figurait pas sur la liste des fournisseurs potentiels en 2010.

En décembre, Fennovoima annonçait qu’une filiale de Rosatom, Rusatom Overseas, entrerait dans son capital, à hauteur de 34%, à la suite du désengagement en 2012 l’allemand EON, qui avait détenu la même part.

Le gouvernement souhaite que le capital de Fennovoima soit entre les mains d’investisseurs finlandais ou européens à hauteur de 60% minimum.

Du fait du départ des Verts, le gouvernement voit sa majorité affaiblir davantage, à désormais 102 sièges sur les 200 du Parlement.

En mars, la Ligue de gauche, un autre parti minoritaire, avait déjà quitté le gouvernement pour protester contre des coupes budgétaires.

Les partis restant au gouvernement sont le parti conservateur du Premier ministre Alexander Stubb, les sociaux-démocrates qui détiennent le ministère des Finances, le parti des suédophones et les chrétiens-démocrates.

Le projet de Fennovoima a aussi causé des tiraillements au sein des partis restants au gouvernement. Quatre des six ministres sociaux-démocrates ont voté contre la proposition, selon les médias finlandais.

Romandie.com avec(©AFP / 18 septembre 2014 14h26)