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Ariel Henry, Premier ministre haïtien à la part d’ombre grandissante

février 8, 2022
Ariel Henry, Premier ministre haitien a la part d'ombre grandissante
Ariel Henry, Premier ministre haïtien à la part d’ombre grandissante© AFP/Valerie Baeriswyl

Médecin réputé mais responsable politique critiqué, Ariel Henry s’est emparé des rênes du pouvoir en Haïti après l’assassinat il y a sept mois du président Jovenel Moïse. Aujourd’hui le Premier ministre s’accroche à son poste malgré les soupçons qui le lient à cet attentat.

Agé de 72 ans, Ariel Henry s’est fait un nom en Haïti au fil de son parcours professionnel de neurologue. Après des études de médecine à l’université française de Montpellier, il prend la tête du service de neurochirurgie d’un des hôpitaux privés les plus réputés d’Haïti.

Enseignant dans les universités d’Etat de la capitale Port-au-Prince, Ariel Henry n’embrasse que tardivement une carrière politique.

En janvier 2015, le chef de l’Etat Michel Martelly le nomme ministre de l’Intérieur, un poste qu’il occupe moins de huit mois.

Après un changement à la tête du gouvernement en septembre 2015, il prend le portefeuille des Affaires sociales et du Travail pour un peu plus de six mois, avant de quitter la scène politique plus de cinq années.

En juillet 2021, il fait son retour quand le président Jovenel Moïse le choisit comme son septième Premier ministre.

« Tapage orchestré »

Mais deux jours seulement après cette nomination, le 7 juillet, Jovenel Moïse est assassiné dans sa résidence privée par un commando armé composé d’anciens militaires colombiens.

L’attentat plonge le pays, déjà fragile sur le plan politique, dans une confusion totale, au détriment d’Ariel Henry qui n’avait pas eu le temps de prendre officiellement ses fonctions.

Après deux semaines de flou et sous la pression des ambassades étrangères, il est finalement installé à la tête du gouvernement, souffrant déjà d’un déficit de légitimité.

L’enquête sur l’assassinat du président va accroître la défiance à son égard: la nuit du meurtre, Ariel Henry a eu plusieurs appels téléphoniques avec l’un des principaux suspects.

Face à ces accusations, il fustige un « tapage orchestré au niveau national et international autour des conversations téléphoniques », et dénonce une « diversion ».

S’il n’a pas nié avoir eu des échanges avec Joseph Félix Badio, qui aurait été géolocalisé deux heures après le meurtre dans le quartier où se trouve la résidence de Jovenel Moïse, Ariel Henry annonce qu’il lui est difficile de se rappeler les noms de tous ceux l’ayant appelé et la nature des conversations qu’il avait eues ce jour-là.

Mainmise des gangs

Alors que la société civile et une partie de l’opposition politique peinent à s’entendre pour offrir une alternative, le Premier ministre conserve le contrôle de l’Etat, sans grands résultats face aux crises qui secouent le pays.

Bien avant la mort du président Jovenel Moïse, les gangs avaient étendu leur mainmise sur le territoire haïtien, multipliant détournements de marchandises et enlèvements crapuleux.

Contrôlant une large partie de Port-au-Prince, et rendant impossible le transport routier sécurisé vers toute la moitié sud du pays, les bandes armées empêchent l’accès aux bureaux de la Primature: c’est depuis sa résidence officielle qu’Ariel Henry organise réunions et conseils du gouvernement.

Le 1er janvier, le Premier ministre a même été contraint de fuir, sous des rafales de tirs, la cérémonie de la fête nationale organisée dans la ville des Gonaïves.

Soupçons du juge

Cette « tentative d’assassinat », qu’il dénonce avec fermeté, n’empêche pas Ariel Henry de garder son agenda politique, similaire à celui de feu Jovenel Moïse, à savoir l’organisation d’élections et l’adoption d’une nouvelle constitution.

Sans assise populaire et contesté, le Premier ministre bénéficie encore du soutien de la communauté internationale, qui prêche cependant depuis l’assassinat de Jovenel Moïse pour une entente entre tous les acteurs de la scène politique.

Le 7 février aurait dû être jour de passation du pouvoir présidentiel. En fait, Haïti entame, avec Ariel Henry à sa tête, le quatrième régime de transition de l’histoire de sa jeune démocratie, née à la suite de la chute de la dictature des Duvalier en 1986.

Mais les doutes grandissants quant à son éventuelle implication dans l’attentat contre le président Moïse fragilisent la position déjà précaire du dirigeant.

Dans un document audio révélé par CNN et circulant mardi sur les réseaux sociaux, on entend un homme, identifié par de nombreux Haïtiens crédibles comme le juge qui était en charge de l’instruction du dossier (avant d’être écarté en raison d’accusations de corruption), parler des relations d’Ariel Henry « avec le moteur, l’initiateur de l’assassinat qui est son ami et qui a planifié avec lui, le jour de l’assassinat ».

Avec Jeune Afrique avec AFP

Haïti: le procureur demande l’inculpation du Premier ministre

septembre 14, 2021
Haiti: le procureur demande l'inculpation du Premier ministre
Haïti: le procureur demande l’inculpation du Premier ministre© AFP/Archives/HECTOR RETAMAL

Le chef du parquet de Port-au-Prince a demandé mardi au juge enquêtant sur l’assassinat du président Jovenel Moïse d’inculper le Premier ministre Ariel Henry, en raison d’appels téléphoniques qu’il aurait eus avec l’un des principaux suspects du meurtre.

Bed-Ford Claude, le commissaire du gouvernement de Port-au-Prince –équivalent du procureur– a par ailleurs demandé que M. Henry soit interdit de quitter le territoire haïtien « en raison de la gravité des faits exposés ».

Le président Moïse a été abattu le 7 juillet par un commando armé à son domicile de Port-au-Prince.

Dans une lettre adressée au tribunal de première instance de Port-au-Prince, Bed-Ford Claude assure qu’il « existe suffisamment d’éléments compromettants qui forment sa conviction sur l’opportunité de poursuivre Monsieur Henry et de demander son inculpation pure et simple ».

Dans un second courrier, envoyé au directeur de l’administration migratoire, le commissaire du gouvernement justifie l’interdiction demandée de sortie du territoire à l’encontre d’Ariel Henry « pour des présomptions graves d’assassinat sur le président de la République ».

Vendredi soir, Bed-Ford Claude avait déjà invité le chef du gouvernement à se présenter mardi au parquet, affirmant que M. Henry avait eu, quelques heures après le meurtre de Jovenel Moïse, des conversations téléphoniques avec l’une des personnes activement recherchées dans le cadre de l’enquête.

Ancien cadre de l’unité de lutte contre la corruption, dépendante du ministère de la justice, Joseph Félix Badio aurait été géolocalisé dans le quartier où se situe la résidence privée de Jovenel Moïse lors des appels passés à Ariel Henry à 04h03 puis 04h20 la nuit de l’attentat.

Samedi, le Premier ministre avait alors dénoncé la démarche du procureur, la qualifiant de diversion.

« Les manoeuvres de diversion pour semer la confusion et empêcher la justice de faire sereinement son travail ne passeront pas », avait réagi Ariel Henry.

« Les vrais coupables, les auteurs intellectuels et les commanditaires de l’assassinat odieux du président Jovenel Moïse seront trouvés, traduits en justice et punis pour leur forfait », a-t-il ajouté.

Quarante-quatre personnes, dont 18 Colombiens et deux Américains d’origine haïtienne, ont déjà été arrêtées dans le cadre de l’enquête sur le meurtre de Jovenel Moïse, commis à son domicile sans qu’aucun policier de sa sécurité rapprochée ne soit blessé.

Par Le Point avec AFP

La lutte pour le pouvoir en Haïti s’enclenche

juillet 8, 2021

Au lendemain de l’assassinat du président haïtien Jovenel Moïse, la légitimité du premier ministre sortant Claude Joseph à gouverner est déjà contestée.

Une lutte pour le pouvoir se dessine à Haïti entre le premier ministre nommé, Ariel Henry, et le premier ministre sortant, Claude Joseph.

© /Reuters Une lutte pour le pouvoir se dessine à Haïti entre le premier ministre nommé, Ariel Henry, et le premier ministre sortant, Claude Joseph.

M. Joseph semble vouloir remplir le vide laissé par la mort du dirigeant. C’est lui qui, flanqué des têtes dirigeantes des forces de l’ordre, s’est adressé mercredi à la population haïtienne pour tenter de la rassurer.

Mais Claude Joseph devait normalement quitter son poste, qu’il occupe par intérim depuis avril dernier. Son successeur, le docteur Ariel Henry, avait été nommé par Jovenel Moïse environ 24 heures avant qu’il tombe sous les balles de ses assaillants.

En entrevue avec le journaliste Robenson Geffrard du quotidien haïtien Le Nouvelliste, Ariel Henry semble déterminé à faire valoir son droit à diriger le pays.

Selon moi, [Claude Joseph] n’est plus premier ministre», a-t-il affirmé au quotidien. Je suis un premier ministre nommé, Claude a été un premier ministre intérimaire qui a repris ses positions de ministre des Affaires étrangères. Je pense qu’il faut qu’on se parle. Claude était censé rester dans le gouvernement que moi j’allais avoir.» Il a ajouté que, selon lui, M. Joseph fait désormais partie de son» gouvernement.

La Constitution haïtienne, amendée en 2012, prévoit qu’en cas de vacance de la présidence, la direction du pays soit assurée par le premier ministre en fonction.

Nommé le 5 juillet, Ariel Henry n’a pas eu le temps de former son gouvernement avant les événements du 7 juillet. J’étais en train de choisir les membres de mon Cabinet, on était même très avancé», a dit le premier ministre nommé. Il faut que je continue, mais dans le contexte actuel, je pense qu’il y a une opportunité de dialogue pour arriver à un accord qui nous permettra d’aller dans un meilleur climat aux élections et d’avoir un gouvernement aussi qui pourrait créer ce climat.»

M. Henry a notamment critiqué la décision de son prédécesseur d’imposer l’état de siège dans le pays. Je ne pense pas qu’on soit dans une situation qui nécessite l’état de siège. Je pense que c’est un peu précipité. C’est mon point de vue », a-t-il dit.

Claude Joseph n’a pas donné d’indications quant à une éventuelle passation du pouvoir. Ariel Henry affirme toutefois que les deux hommes sont en contact constant».

Des membres du corps policier en Haïti étaient à la recherche de preuves près de la résidence présidentielle le 7 juillet 2021.

© VALERIE BAERISWYL/AFP Des membres du corps policier en Haïti étaient à la recherche de preuves près de la résidence présidentielle le 7 juillet 2021.

Ce que l’on sait des événements

Vers 1 h mercredi matin, un groupe armé a fait irruption dans la résidence du président haïtien Jovenel Moïse. Les assassins ont criblé l’homme d’État d’au moins 12 balles, et ont également grièvement blessé sa femme, Martine Moïse. Cette dernière a été transportée vers un hôpital de la Floride pour que soient traitées ses blessures.

Peu de choses sont connues pour l’instant à propos des assaillants. Selon le premier ministre sortant Claude Joseph, les membres de ce commando» seraient des étrangers» qui parleraient anglais et espagnol». À cette heure, le pouvoir n’a fourni aucune preuve pour appuyer ces affirmations.

Le chef de la police nationale haïtienne a annoncé que ses hommes avaient tué quatre responsables présumés de l’attaque, en plus d’en blesser deux autres.

Claude Joseph a déclaré hier l’état de siège» dans le pays pour 15 jours. Ces mesures spéciales permettent entre autres aux autorités de procéder à des perquisitions sans mandat ainsi que d’ instaurer des mesures de sûreté spéciales».

Par  Jean-François Thériault avec des informations du Nouvelliste