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Niger : le redéploiement de l’armée française au cœur d’un débat au Parlement

avril 21, 2022

À l’heure où la France prépare le transfert du Mali au Niger d’une partie de l’opération « Barkhane », les députés nigériens débattront et voteront ce vendredi 22 avril.

La présidence nigérienne a décidé de porter la question de la présence des forces étrangères devant le Parlement.© DAPHNE BENOIT / AFP

Le résultat du vote laisse peu de place au doute, le parti au pouvoir du président Mohamed Bazoum disposant d’une écrasante majorité à l’Assemblée nationale. Mais à l’heure où la France prépare le transfert du Mali au Niger d’une partie de son dispositif de lutte antiterroriste au Sahel, son arrivée est déjà dénoncée par des ONG locales. « Le débat suivi d’un vote sur la présence des forces étrangères dans notre pays dans le cadre de la lutte contre le terrorisme se tiendra demain vendredi (22 avril) », a indiqué une source gouvernementale.

Mutualiser les forces face à une menace grandissante

Le document soumis aux députés, consulté par l’AFP, souligne que le Niger « est quasiment encerclé par les groupes terroristes. Malgré les efforts déployés pour contenir la menace aux abords de nos frontières, le bilan humain et économique est lourd ». Il ajoute que « l’évolution de la situation sécuritaire requiert un engagement commun des gouvernements de notre pays et d’autres nations pour une lutte efficace contre le terrorisme, dans le cadre de coopérations bilatérales ou multilatérales existantes ou futures ».

« Les forces spéciales des pays amis seront déployées » et « installées sur les territoires dans les pays membres de la Cedeao (Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest) affectés par la menace », dont « le Bénin, le Ghana, le Niger et la Côte d’Ivoire », indique le texte.Si des forces spéciales étrangères de la France et des États-Unis sont déjà présentes au Niger qui s’est déclaré prêt à en accueillir d’autres, leur présence future n’a jamais été officiellement évoquée dans les trois autres pays.

En annonçant en février le retrait de leurs forces du Mali, la France et ses partenaires européens avaient souhaité rester engagés dans la région sahélienne et « étendre leur soutien aux pays voisins du golfe de Guinée et d’Afrique de l’Ouest » pour contenir la menace djihadiste. Les « paramètres » de cette réorganisation seront arrêtés « d’ici juin 2022 », avaient-ils indiqué.

Le nord du Bénin et de la Côte d’Ivoire ont été la cible depuis 2020 d’attaques djihadistes meurtrières et la crainte est de les voir se multiplier et s’étendre à d’autres pays ouest-africains.Le document soumis aux élus précise qu’au Niger « qui abrite déjà des bases de forces étrangères, de nouvelles implantations seront créées plus près des théâtres des opérations » au Mali et « les lieux de stationnement, les modalités d’opérations » seront discutés « avec la hiérarchie militaire ».

Des oppositions

Dans un communiqué, les partis d’opposition ont estimé que la démarche du gouvernement vise « à contourner l’obligation de communiquer aux députés nationaux les textes relatifs aux accords de défense et de sécurité, au titre de la régularisation du redéploiement des forces Barkhane et Takuba au Niger ». Hassoumi Massoudou, ministre nigérien des Affaires étrangères, a récemment soutenu que son pays souhaitait « un accroissement de l’intervention de nos partenaires », car « avec le départ des forces françaises du nord du Mali, nous nous attendons à ce qu’il ait une plus grande pression des terroristes sur notre pays ». Dans sa lutte contre les mouvements djihadistes liés à Al-Qaïda et au groupe État islamique (EI), le Niger bénéficie du soutien de plusieurs pays occidentaux, dont la France et les États-Unis, qui ont des bases militaires à Niamey et dans la région d’Agadez (Nord). Mais des ONG nigériennes dénoncent cette présence de militaires étrangers qu’elles considèrent comme « des forces d’occupation » et « une menace pour la souveraineté du pays ».

Par Le Point avec AFP

Burkina Faso: L’armée française tue 40 jihadistes impliqués dans les attaques au Bénin

février 13, 2022
Les soldats français de l’opération Barkhane. © FLORENT VERGNES – AFP/Archives

Les soldats français de l’opération Barkhane ont abattu des jihadistes impliqués dans les récentes attaques dans le nord du Bénin voisin qui ont fait neuf morts, dont un ancien militaire français, a annoncé samedi l’état-major dans un communiqué.

Après ces trois attaques à la bombe artisanale ayant fait également douze blessés parmi les équipes chargées de la sécurité du parc naturel W, la force Barkhane, « alertée par ses partenaires béninois et burkinabè, a engagé des capacités aériennes de renseignement pour localiser ce groupe armé » responsable des attentats avant d’effectuer jeudi des frappes aériennes dans lesquelles 40 jihadistes ont été tués, détaille le communiqué.

« Dans la matinée du 10 février, après avoir localisé et identifié une première colonne de terroristes se déplaçant à moto, en accord et en coordination permanente avec les autorités burkinabè, une première frappe aérienne a été effectuée par un drone Reaper alors que la colonne venait de pénétrer sur le territoire burkinabè », et « une dizaine de terroristes ont été neutralisés », selon l’état-major.

« L’engagement d’une patrouille de chasseurs Mirage 2000 a permis de procéder à trois nouvelles frappes visant des regroupements de terroristes à proximité du lieu de la première frappe », au cours desquelles « plus d’une trentaine de terroristes ont été neutralisés, un pick-up et plus d’une dizaine de motos ont été détruits », ajoute le communiqué.

Une lutte prioritaire pour la France

Le Bénin était jusqu’à récemment considéré comme un îlot de stabilité en Afrique de l’Ouest, région où opèrent de nombreux groupes jihadistes liés à Al-Qaïda et à l’organisation État islamique (EI). Mais une récente série de raids frontaliers dans les pays situés au sud du Sahel a confirmé les craintes que des groupes jihadistes sévissant au Mali, au Niger et au Burkina Faso cherchent à progresser vers la côte.

La France, qui combat les groupes jihadistes au Sahel depuis neuf ans, pourrait bien annoncer dans les prochains jours le retrait de ses troupes du Mali, alors que la junte au pouvoir à Bamako témoigne d’une hostilité croissante à l’égard de la présence française.

Paris conserve néanmoins la ferme intention de continuer à lutter contre la propagation du jihadisme dans la région. L’état-major français souhaite y renforcer ses activités de coopération et fournir des capacités-clés aux état-majors locaux, selon des sources concordantes.

La priorité de la France reste de « poursuivre la lutte contre le terrorisme » aux côtés des pays africains, a souligné mardi le chef d’état-major des armées françaises, le général Thierry Burkhard, lors d’une visite en Côte d’Ivoire.

Par Jeune Afrique avec AFP

Mali: l’armée française a tué ou capturé une vingtaine de jihadistes

avril 30, 2017

Des militaires maliens lors d’une visite du président français François Hollande à Gao, le 13 janvier 2017 / © AFP / STEPHANE DE SAKUTIN

La force française Barkhane a tué ou capturé une vingtaine de jihadistes ce week-end, au sud-ouest de Gao (Mali), dans zone où un soldat français avait été tué le 5 avril près de la frontière avec le Burkina Faso, a annoncé dimanche l’état-major dans un communiqué.

« Depuis samedi 29 avril, la force Barkhane est engagée dans une opération qui a permis de neutraliser près d’une vingtaine de terroristes dans la forêt de Foulsaré à proximité de la frontière entre le Mali et le Burkina Faso, au sud-ouest de Gao », a-t-il indiqué.

Ils ont été tués ou capturés, a déclaré à l’AFP le porte-parole de l’état-major, le colonel Patrik Steiger, sans plus de précisions.

Des avions de chasse Mirage 2000 ont d’abord effectué des frappes sur des dépôts logistiques repérés lors d’une récente opération dans la forêt, considérée comme une refuge de groupes terroristes armés.

C’est lors de cette opération que le caporal-chef du 6è régiment du génie d’Angers, Julien Barbé, avait été tué, victime de tirs directs.

Deux hélicoptères d’attaque Tigre sont ensuite intervenus pour sécuriser la zone et permettre de poser de commandos montagne par hélicoptère Caïman.

« Au lever du jour, vers 05h30, les commandos montagne rejoints par des commandos parachutistes et des équipes opérationnelles de déminage ont procédé à la fouille de la zone d’opération », a ajouté l’état-major.

« De l’armement, des munitions, des lance-roquettes et des composants destinés à la fabrication d’engins explosifs ont été découverts en quantités importantes » et détuits, a-t-il poursuivi.

La force Barkhane mobilise 4.000 soldats français sur cinq pays du Sahel (Mali, Niger, Burkina Faso, Tchad et Mauritanie).

Elle a pour mission « d’appuyer les forces armées des pays partenaires » dans leur lutte contreterroriste et de « favoriser une appropriation africaine de la gestion des crises », souligne le communiqué.

Les jihadistes ont été en grande partie chassés du nord du Mali par l’intervention française Serval en 2013. Mais des zones entières du pays échappent toujours au contrôle des forces maliennes, françaises et de l’ONU, régulièrement visées par des attaques malgré la signature en mai-juin 2015 d’un accord de paix, censé isoler définitivement les jihadistes.

Le caporal-chef Barbé avait été tué lors d’une opération conjointe avec les forces maliennes et burkinabés. Lors de cette opération,menée du 27 mars au 10 avril, deux jihadistes ont été tués, huit capturés et « plusieurs dizaines de suspects » remis aux autorités burkinabés, selon l’état-major français.

Romandie.com avec(©AFP / 30 avril 2017 23h58)

Avec le départ de l’armée française, la Centrafrique peut-elle sombrer dans l’abîme ?

octobre 28, 2016

Des soldats français de l’opération Sangaris s’adressant au ministre Jean-Yves Le Drian. © Rebecca Blackwell/AP/SIPA

L’opération militaire française en Centrafrique, Sangaris, prend fin officiellement ce dimanche, avec le déplacement à Bangui du ministre de la Défense Jean-Yves le Drian. Dans la capitale centrafricaine, ils sont nombreux à craindre les conséquences de ce départ.

Un repli longtemps différé

Définitivement officialisé avec le déplacement du ministre français de la Défense, Jean-Yves le Drian, les 30 et 31 octobre, le départ des soldats de l’opération Sangaris, déclenchée en décembre 2013 après des massacres de civils à Bangui, était prévu depuis de longs mois. Il a été plusieurs fois différé à cause de l’évolution de la situation sur le terrain et les reports successifs des élections présidentielle et législatives. Entre 300 et 350 hommes, équipés de drones d’observation, demeureront dans la capitale centrafricaine. Cet effectif comprend les troupes affectées à la Minusca et à la mission EUTM-RCA.

La France conservera « une capacité d’intervention militaire sur court préavis », précise-t-on à la Présidence. « Ce contingent pourra être mobilisé à la demande du gouvernement centrafricain, en cas de menace sérieuse contre la paix ou les institutions du pays ».

Une situation sécuritaire instable

L’amélioration de la situation sécuritaire après l’élection du Président Faustin-Archange Touadéra aura duré quelques mois. C’est d’abord à Bangui que la violence s’est exprimée après l’assassinat le 4 octobre 2016 du commandant Marcel Mombéka, ancien garde du corps de Catherine Samba-Panza. Une semaine plus tard, Kaga Bandoro sombre dans le chaos. Les premiers échauffourées surviennent après le démantèlement de deux barrages – un appartenant aux anti-balaka, l’autre à l’ex-Séléka -. Des maisons sont brûlées, des manifestations contre la Minusca organisées.

Le 11 octobre, des membres du MPC (une faction de l’ex-Séléka dirigée par le général Mahamat AlKhatim) tente de dérober le générateur d’une radio locale dans un camp de réfugiés. Ils rencontrent une forte résistance et l’un deux meurt après avoir reçu un coup de hache en pleine tête. Le lendemain, la ville est mise à sac. Il y a des accrochages avec la Minusca, des braquages, des ONG visées et au moins 37 morts. La ville est désormais coupée en deux. Trois jours plus tard, treize personnes sont tuées dont un enfant, et une dizaine d’autres blessées, dans l’attaque d’un camp de réfugiés dans la localité de Ngakobo proche de la ville de Bambari.

Enfin, une journée ville morte était organisée lundi 24 octobre à Bangui, à l’appel du groupe de travail de la société civile, pour demander le départ de la mission de l’ONU en Centrafrique (Minusca) a dégénéré. Au moins quatre personnes ont été tuées.

La Minusca critiquée

Seule force d’interposition après la fin de l’opération Sangaris, la mission de l’ONU et ses 12 000 hommes, est sous le feu des critiques. La population et le gouvernement leur reprochent leur attentisme, les groupes armés leur parti pris. Le comportement de certains contingents inquiètent jusqu’au siège de l’ONU, à New York.

Lors des manifestations qui ont accompagnées la journée ville morte du 24 octobre à Bangui, la Minusca a été accusées par la société civile d’avoir tiré sur la foule. Des accusations démenties par l’ONU. De fait, les patrouilles de l’ONU ont bien été prises pour cibles – caillassages et tirs – alors qu’elles tentaient d’enlever les barricades, avant de répliquer à balles réelles. Cinq Casques bleus ont d’ailleurs été blessés.

Pour certains observateurs, les difficultés de la Minusca sont utilisées dans le but de déstabiliser le pays. Si l’appel à la journée ville morte se voulait pacifique, il semble que certaines personnalités politico-militaires aient profité de la situation. « Des jeunes armés placés en retrait derrière les barricades ont provoqué la Minusca pour la forcer à riposter », explique une source sécuritaire française qui pointe du doigt le rôle de leaders anti-balaka.

« Il y a aussi beaucoup d’instrumentalisation », nuance-t-elle. « La Minusca sera toujours visée par des critiques, car il faut un bouc émissaires. C’est une opération de maintien de la paix qui n’est pas là pour faire la guerre et réconcilier les communautés. Ça, c’est le rôle des autorités. »

Un régime fragilisé

L’état de grâce qui a suivi l’élection de Touadéra est désormais terminé. Beaucoup à Bangui, comme au sein de la communauté internationale, doutent de sa capacité à restaurer une paix durable. « Il n’y arrive pas. Il semble à bout de force », estime un fin connaisseur du pays. Une autre source proche des cercles du pouvoir évoque « un amateurisme écœurant ». Plus que le chef de l’État lui-même, c’est le travail de certains membres du gouvernement et de son cabinet qui est pointé du doigt. « Ils ne sont pas au niveau ! », juge un habitué des arcanes du pouvoir à Bangui. Seront-ils à-même de mener un processus DDR (désarmement, démobilisation, réinsertion) de plus en plus menacé ?

Jeuneafrique.com par Vincent Duhem

Centrafrique: les accusations de viol, « extrêmement graves » pour l’armée française

mai 19, 2015

Centrafrique: les accusations de viol, 'extrêmement graves' pour l'armée française
Centrafrique: les accusations de viol, « extrêmement graves » pour l’armée française © AFP

Le chef d’état-major de l’armée de Terre, le général Jean-Pierre Bosser, a estimé mardi que les accusations de viols d’enfants portées contre des militaires français en Centrafrique auraient des conséquences « extrêmement graves », qu’elles soient avérées ou non.

« Soit ces affaires sont avérées, auquel cas c’est extrêmement grave parce qu’on touche à l’intégrité physique et morale de jeunes enfants », a-t-il déclaré lors d’une rencontre avec l’Association des Journalistes de Défense (AJD). « Et c’est toute une armée qui en prend plein la figure ».

« Si jamais ce n’est pas avéré, c’est aussi grave (. . . ) Cela veut dire qu’il n’y a pas de présomption d’innocence pour le groupe, pour la communauté militaire. Tous nos soldats sont assimilés à des violeurs d’enfants », a-t-il ajouté.

L’affaire a été révélée en avril par le quotidien britannique The Guardian sur la base d’un rapport de l’ONU contenant des témoignages d’enfants qui affirment avoir été violés par des militaires français au début de l’intervention française en Centrafrique, entre décembre 2013 et juin 2014.

Le ministère français de la Défense a confirmé avoir été saisi de ces témoignages par le Haut-commissaire aux droits de l’Homme de l’ONU en juillet 2014 et avoir immédiatement saisi la justice. Mais il n’avait pas alors rendu publique l’affaire, un silence qui suscite a posteriori un certain nombre de critiques.

« Ce qu’il faut en tirer comme enseignement, je n’en sais rien (. . . ) mais j’avoue qu’on a du mal à comprendre pourquoi ce sujet nous colle comme cela à la peau alors que l’enquête est en cours », a indiqué le général Bosser.

« Est-ce que ce sont des relents d’antimilitarisme qui ressortent parce que l’armée de Terre a été mise sur un piédestal avec Serval (opération française au Mali)? Est-ce qu’on n’a pas idéalisé l’armée en disant c’est encore elle qui porte un certain nombre de valeurs ? », s’est-il interrogé.

Selon une source judiciaire française, 14 soldats français sont mis en cause, dont trois ont été identifiés, dans cette affaire potentiellement désastreuse pour l’image de la France et de son armée en Afrique.

« La chose dont on est sûr aujourd’hui c’est qu’il n’y avait pas de système organisé. C’est d’ailleurs ce que dit l’enquête », a relevé le général Bosser.

Jeuneafrique.com

Centrafrique: l’armée française menacée d’un scandale potentiellement dévastateur

mai 1, 2015

Centrafrique: l'armée française menacée d'un scandale potentiellement dévastateur
Centrafrique: l’armée française menacée d’un scandale potentiellement dévastateur © AFP

L’armée française, habituée aux interventions en Afrique, fait face à un scandale aux effets potentiellement dévastateurs à la suite d’accusations d’enfants selon lesquels des soldats les ont violés lors de l’opération Sangaris en 2014 en Centrafrique.

« Si certains militaires se sont mal comportés, je serai implacable », a réagi jeudi le président François Hollande, alors que le ministère de la Défense et l’armée, sur la défensive, ont multiplié les déclarations pour souligner ne vouloir rien cacher.

Les témoignages circonstanciés des enfants, contenus dans un rapport de l’ONU, portent sur une période allant de décembre 2013 à juin 2014 et ont justifié l’ouverture d’une enquête préliminaire en juillet 2014 à Paris restée secrète jusqu’à ce qu’un article du quotidien britannique The Guardian révèle l’affaire mercredi.

Jeudi, une source judiciaire française a précisé que 14 soldats français étaient mis en cause et que « très peu » avaient été identifiés par l’enquête, toujours en cours.

Selon l’ONG américaine Aids-Free World, trois soldats du Tchad et deux de Guinée Equatoriale sont aussi accusés dans un rapport de l’ONU d’abus sexuels sur des enfants en Centrafrique.

A Bangui, le procureur de la République, Ghislain Grésenguet a regretté n’avoir pas été informé de cette affaire « extrêmement grave » et de l’ouverture d’enquêtes : « Des ONG et des organes de l’ONU sont descendus sur le terrain sans nous informer, nous n’avons pas compris pourquoi », a-t-il dit, précisant avoir « immédiatement » ouvert une enquête.

C’est en juillet 2014 que le ministère français de la Défense reçoit un rapport établi par des personnels du Haut-commissariat aux droits de l’Homme de l’ONU positionnés en Centrafrique, où l’armée française s’est déployée dans le cadre de l’opération Sangaris, destinée à empêcher une guerre civile: une dizaine d’enfants – le plus jeune a neuf ans – affirment qu’en échange de nourriture ou sous la menace, des soldats français ont abusé d’eux sexuellement.

Ces témoignages « retracent des faits qui auraient été commis sur une dizaine d’enfants, sur le site de l’aéroport de M’Poko (à Bangui), entre décembre 2013 et juin 2014 », a précisé mercredi le ministère de la Défense, assurant avoir « pris toutes les mesures nécessaires pour permettre la manifestation de la vérité ».

– ‘Double crime’ –

Conscient de la gravité des accusations et de leur portée, le ministère a affirmé que « si les faits étaient avérés, il veillera à ce que les sanctions les plus fermes soient prononcées à l’égard des responsables de ce qui serait une atteinte intolérable aux valeurs du soldat ».

Jeudi, il a souligné, par la voix de son porte-parole Pierre Bayle, qu’il « vérifiait la réalité » des accusations et assuré n’avoir « aucune volonté de cacher quoi que ce soit (. . . ) L’indulgence zéro veut bien dire que ce genre de fait n’est pas couvert. On n’est pas en train de cacher les faits, on est en train de vérifier les faits ».

Le ministère de la Défense a précisé avoir saisi, dès qu’il a été alerté par le rapport onusien, le Parquet de Paris qui a ouvert une enquête. Des membres de la gendarmerie prévôtale, composée de militaires disposant de prérogatives judiciaires et placés sous le contrôle du procureur de Paris, sont partis une première fois en août 2014 en Centrafrique pour y commencer leur enquête. Ils y sont depuis retournés pour la poursuivre.

Ces accusations ont été révélées mercredi par le quotidien britannique The Guardian, à qui la codirectrice de l’ONG américaine Aids-Free World, Paula Donovan, a communiqué le rapport.

Le document rassemble les témoignages de six enfants âgés de 9 à 15 ans, jugés très crédibles. Les soldats français auraient échangé de la nourriture, et parfois de petites sommes d’argent, contre des faveurs sexuelles.

« Les enfants ont témoigné qu’ils avaient faim et qu’ils pensaient pouvoir se procurer de la nourriture auprès des soldats », a expliqué à l’AFP Mme Donovan. La réponse des soldats était « si tu fais ça, alors je te donnerai à manger ».

Certains disent avoir été violés, d’autres abusés et d’autres assurent avoir assisté au viol de leurs camarades. Certains ont été capables de donner de leurs agresseurs présumés une description précise, d’autres des surnoms.

Interrogée jeudi matin, la secrétaire d?État française en charge de la Famille, Laurence Rossignol, a estimé qu’il s’agissait, s’ils étaient avérés, de « faits extrêmement graves ». Ceux qui sont là pour protéger, notamment les femmes et les enfants, « seraient eux-mêmes des prédateurs. D’un certain point de vue c’est un double crime ».

Anders Kompass, directeur des opérations de terrain au Haut-Commissariat de l’ONU pour les droits humains, qui a transmis à Paris le rapport intitulé « Abus sexuels sur des enfants par les forces armées internationales », l’a fait en réaction à ce qu’il a considéré être l’inaction de l’ONU dans ce dossier. Depuis, il a été suspendu de ses fonctions et fait l’objet d’une enquête interne.

Dans un communiqué jeudi soir, Amnesty International (AI) a appelé les autorités françaises et les Nations unies à conduire en urgence devant la justice « tous ceux suspectés de responsabilité criminelle sur la base d’une enquête rapide, impartiale et indépendante ».

« Ces allégations ne sont pas les premières contre des forces de paix en Centrafrique ces deux dernières années et renforcent la nécessité de mettre un terme à l’impunité (. . . ) quels que soient ceux suspectés », a ajouté Stephen Cockburn, directeur régional adjoint d’AI pour l’Afrique centrale et occidentale.

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