Son comité d’accueil a annoncé que l’ancien ministre de Laurent Gbagbo rentrerait « sobrement » à Abidjan et a demandé à ses partisans de ne pas se rendre à l’aéroport. Acquitté en 2021 par la CPI, il n’était pas revenu en Côte d’Ivoire depuis son transfert à La Haye, il y a huit ans.
Charles Blé Goudé fera le 26 novembre au matin un retour « sobre » dans son pays natal, neuf ans après avoir été arrêté au Ghana puis transféré à la Cour pénale internationale, a assuré ce 24 novembre Gervais Boga Sako, le président de son comité d’accueil. « Le comité d’accueil invite les amis, les parents, les militants, les admirateurs ou les sympathisants à respecter scrupuleusement les consignes sécuritaires et la volonté de Charles Blé Goudé afin de faciliter ce retour qui s’inscrit dans le cadre de la réconciliation et de la cohésion nationale. Ça ne sert à rien d’aller à l’aéroport ! » a-t-il poursuivi.
Simone Gbagbo pour l’accueillir
L’ancien ministre de la Jeunesse de Laurent Gbagbo est attendu à l’aéroport d’Abidjan par un vol commercial qui doit atterrir à 11 h 25 heure locale. « Il ne passera pas par un pavillon ministériel ou présidentiel. Il vient par le hall ordinaire de l’aéroport », a précisé Boga Sako. Une dizaine de personnalités doivent l’y accueillir, parmi lesquelles l’ancienne Première dame Simone Gbagbo, devenue rivale politique de son mari. Il doit ensuite se rendre à Yopougon, une commune populaire d’Abidjan pour « une fête, pas un meeting », a insisté Boga Sako qui ne veut pas faire de cet évènement une question « politique ».
Ce retour se fait avec l’aval des autorités ivoiriennes qui ont remis en mai un passeport à Charles Blé Goudé, âgé de 50 ans. Au côté de Laurent Gbagbo, il avait été définitivement acquitté au mois de mars 2021 par la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye de crimes présumés pendant la crise post-électorale de 2010-2011. Mais alors que Laurent Gbagbo a pu rentrer au mois de juin 2021, Blé Goudé n’avait pas pu retourner à Abidjan, faute de passeport. Il reste sous le coup d’une condamnation à 20 ans de prison en Côte d’Ivoire pour des faits liés à la crise post-électorale.
Définitivement acquitté par la CPI de crimes contre l’humanité le 31 mars 2021, l’ancien ministre de Laurent Gbagbo vient de se voir délivrer un passeport par les autorités ivoiriennes. Mais aucune date de retour n’est fixée.
Debout devant le portrait officiel du président Alassane Ouattara et un drapeau ivoirien, en costume cravate bleu et un grand sourire aux lèvres, Charles Blé Goudé tient à la main le précieux sésame vert. Un peu plus d’un an après son acquittement définitif par la Cour pénale internationale (CPI) qui le poursuivait pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité durant la crise postélectorale de 2010-2011 en Côte d’Ivoire, les autorités ivoiriennes viennent de délivrer un passeport à l’ancien ministre de la Jeunesse de Laurent Gbagbo. L’ex-leader des Jeunes patriotes, transféré dans le pénitencier de Scheveningen le 22 mars 2014 et en libération conditionnelle depuis le 1er février 2019, en formulait la demande depuis plusieurs mois.
Il l’a donc finalement obtenu ce 30 mai au matin, dans les locaux de l’ambassade de Côte d’Ivoire aux Pays-Bas, des mains de l’ambassadeur Hamza Sallah, en présence du Consul général de Côte d’Ivoire à Paris, Issiaka Konaté, et entouré de l’un de ses avocats Zokou Seri Simplice, de son directeur de cabinet Hyacinthe Nogbou, de son conseiller spécial Anthony Guina et de Patrice Saraka, le secrétaire général de son parti, le Congrès panafricain pour la justice et l’égalité des peuples (Cojep).
« Pas de précipitation »
« Ce passeport est une première étape pour son retour », a assuré ce dernier quelques instants après la remise officielle. Mais pas question de hâter les choses. « Après ce qu’il a vécu, il n’est plus dans la précipitation mais dans la patience. Le plus important est que ce retour soit bien organisé, en étroite collaboration avec les autorités ivoiriennes. Ce retour doit favoriser la paix et la réconciliation, il doit rassembler et rassurer ». Son avocat N’Dry Claver assure également que « le fil du dialogue avec les autorités ivoiriennes » sera maintenu « pour convenir d’un calendrier de retour (….) ».
L’ancien syndicaliste étudiant, aujourd’hui âgé de 50 ans, a assuré Alassane Ouattara de « toute sa gratitude et de sa reconnaissance pour son implication personnelle dans le processus de son retour en Côte d’Ivoire dont une étape importante vient d’être franchie ».
Au début du mois d’avril, le chef de cabinet d’Alassane Ouattara, Claude Sahi, avait rencontré Charles Blé Goudé à La Haye pour évoquer ces questions. Charles Blé Goudé est par ailleurs en contact avec Kouadio Konan Bertin, le ministre de la Réconciliation nationale, qu’il décrit comme un « ami ».
Sous le coup d’une condamnation
S’il est blanchi par la Cour pénale internationale, « le général de la rue » reste sous le coup d’une condamnation prononcée en son absence fin 2019 à Abidjan à 20 ans de prison, 10 ans de privation de ses droits civiques et 200 millions de francs CFA (300 000 €) de dommages et intérêts à verser aux victimes. Il est accusé par la justice ivoirienne d’« actes de torture, homicides volontaires et viol » durant la crise postélectorale de 2010-2011.
Une condamnation par la justice ivoirienne à 20 ans de prison dans l’affaire dite du « casse de la BECEAO » n’avait pas empêché le retour en Côte d’Ivoire de Laurent Gbagbo, acquitté comme lui par la CPI. L’ancien président ivoirien a foulé le sol ivoirien il y a presque un an jour pour jour, le 17 juin 2021, accueilli par des milliers de ses partisans. Depuis, il a pris la présidence d’une nouvelle formation politique, le PPA-CI, pour marquer une rupture définitive avec son ancienne formation, le Front populaire ivoirien (FPI).
Définitivement acquitté de crimes contre l’humanité le 31 mars dernier, l’ancien ministre de Laurent Gbagbo réclamait jusqu’à 819 300 euros de dommages et intérêts.
Pour justifier le rejet de la demande d’indemnisation de Charles Blé Goudé, les trois juges chargés de statuer ont estimé que les droits à un procès équitable avait été « garantis, et non pas enfreints, au cours de la procédure pénale intentée à son encontre ». Selon eux, il n’y a pas eu « des preuves concrètes d’une violation si grave et exceptionnelle que la bonne administration de la justice en a été mise en cause ». « À chaque étape de la procédure, une chambre a supervisé le processus, et les actions de l’accusation ont été minutieusement examinées », écrivent les juges. En bref, « aucune erreur judiciaire grave et manifeste » n’aurait été commise.
Pour chiffrer leur demande à 819 300 euros, la défense de Charles Blé Goudé avait effectué plusieurs calculs. Ils avaient d’abord recensé le nombre de jours (1 778) que l’ancien accusé de la Cour pénale internationale (CPI) a passé derrière les barreaux entre son transfert dans le pénitencier de Scheveningen, le 22 mars 2014, et sa libération conditionnelle, le 1er février 2019. Puis le temps écoulé jusqu’à son acquittement définitif, le 31 mars 2021 (790 jours), et enfin le nombre de jours écoulés depuis (163). Au total, 2 731 jours, qu’ils souhaitaient voir indemnisés à hauteur de 300 euros.
Ils proposaient également un autre calcul, qui ne faisait débuter les « graves et manifestes erreurs de la justice » qu’en 2018, lorsque le procureur de la CPI avait refusé d’abandonner le dossier, ce qui les avaient amenés à réclamer 381 900 euros. Aucune de ces deux demandes n’a donc été acceptée par les juges de la CPI.
Charles Blé Goudé, pilier du pouvoir de l’ex-président Laurent Gbagbo dont le retour en Côte d’Ivoire a été retardé faute de passeport, a été reçu vendredi à l’ambassade ivoirienne à la Haye pour l’établissement de son document de voyage.
« J’ai été reçu par le consul de l’ambassade de mon pays pour l’établissement de mon passeport » a expliqué Charles Blé Goudé depuis La Haye où il vit actuellement. « Cette rencontre a eu pour objet de procéder à l’enrôlement de monsieur Charles Blé Goudé en vue de la délivrance de son passeport ordinaire » a confirmé, de son côté, son avocat, Claver N’Dry.
CHARLES BLÉ GOUDÉ SALUE LA « VOLONTÉ DE DÉCRISPATION » DU PRÉSIDENT ALASSANE OUATTARA
De son côté, le parti de Laurent Gbagbo, le Front populaire ivoirien, a appelé vendredi le gouvernement dans un communiqué à « délivrer diligemment » à Charles Blé Goudé, « son passeport afin qu’il regagne, dans les meilleurs délais, son pays « au nom de la réconciliation nationale ».
Arrêté en 2013 au Ghana, Charles Blé Goudé – surnommé « le général de la rue » pour sa capacité à mobiliser les foules et notamment la jeunesse – avait été transféré à la CPI à La Haye en 2014. Ses détracteurs et certaines ONG internationales le considèrent comme un de ceux qui ont le plus contribué aux violences pendant la crise post-électorale de 2010-2011.
Comme Laurent Gbagbo, Charles Blé Goudé a été condamné par contumace en Côte d’Ivoire à 20 ans de prison pour des faits liés à cette crise. Si le gouvernement a laissé entendre que la peine prononcée contre Laurent Gbagbo pourrait être abandonnée, il n’a rien dit concernant celle de Charles Blé Goudé.
Le 17 juin, l’ex-président Gbagbo, acquitté par la justice internationale, est rentré dans son pays. L’événement, aussi historique soit-il, ne suffira pas à permettre la réconciliation nationale tant attendue. Les adversaires d’hier doivent faire leur aggiornamento.
En matière de trajectoires politiques nationales, le pire n’est jamais sûr et le meilleur rarement garanti. Ce n’est que bien après les événements – même censément historiques comme le retour d’un ex-président acquitté par la justice internationale – que l’on constate, avec le recul, si telle ou telle période remarquable fut un véritable point d’inflexion…
Enivrée ou traumatisée par le retour au pays natal du « Christ de Mama », la Côte d’Ivoire de 2021 inaugurera-t-elle « l’Éburnie d’après » ? Après le péché originel d’un balayeur balayé. Après le retour chaotique à l’autostrade démocratique. Après les 3 000 morts d’une crise post-électorale mal digérée. Après le jugement maladroit d’un clan et le bilan tronqué des responsabilités d’un autre. Après l’élection légale d’un président à un troisième mandat qui nie la légitimité de l’arithmétique. Après le sable imbibé d’hémoglobine de Grand-Bassam. Après la mise sur la touche de fils spirituels – Guillaume Soro et Blé Goudé. Après les décès surinterprétés de deux Premiers ministres en moins de neuf mois. Après le coronavirus…
Parler moins, écouter davantage
Vœu pieux ou condition sine qua non ? Comme de bien entendu, les adversaires d’hier appellent aujourd’hui à la « réconciliation nationale ». Si d’anciennes victimes des deux camps déclarent souffrir d’un manque de cette vérité que l’on dit indispensable au pardon – vérité notamment sur les commanditaires des violences –, les cravatés psalmodient leur absence de ressentiment et appellent de leurs vœux des amnisties pourtant peu originales.
La réconciliation n’est pas qu’une incantation et ne concerne pas que le tragique dérapage du fractionnement géographique des années 2000. C’est à tous les niveaux que les gestionnaires passagers de pouvoir doivent faire leur aggiornamento. Pas seulement les trois monopolisateurs de la politique qui sont tous âgés de plus de 75 ans. Pas seulement un bloc « pro-Ouattara » et un bloc « pro-Gbagbo ». Au fil du temps, l’opportunisme politicien ivoirien a tissé toutes les combinaisons possibles – RDR-FPI, FPI-PDCI/RDA ou RHDP – et rares sont les formations politiques qui ont échappé totalement à l’attraction militariste ou aux dissensions internes.
Les politiques devront moins parler et davantage écouter ce qu’il reste de plaies mal cicatrisées et de rancœurs citoyennes parfois compréhensibles. Et ceci en s’appuyant sur les relais sociaux traditionnels que ne peuvent impressionner le trompe-l’œil inabouti d’une trop ambitieuse Commission dialogue, vérité et réconciliation (CDVR) d’un Charles Konan Banny.
Que la richesse culturelle bigarrée des régions ivoiriennes, le talent satirique consensuel d’un Gbich !, « l’ambiance facile » conscientisée d’un Magic System ou le ressort économique manifeste du poumon économique d’Afrique de l’Ouest francophone président à l’esprit nouveau tant attendu. D’où il est, le « canonisé » Félix Houphouët-Boigny saura reconnaître les siens.
L’ex-chef de l’État ivoirien Henri Konan Bédié a souhaité samedi un retour « dans les meilleurs délais » de l’ancien président Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé, après leur acquitement de crimes contre l’humanité par la justice internationale.
« Je me réjouis (…) de l’acquittement définitif du président Laurent Gbagbo et du ministre Charles Blé Goudé », a déclaré Henri Konan Bédié dans un discours à Abidjan, à l’occasion du 75e anniversaire du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) qu’il préside. « Je souhaite que le gouvernement prenne toutes les dispositions nécessaires pour favoriser leur retour en Côte d’Ivoire dans les meilleurs délais et dans des conditions sécurisées », a-t-il ajouté.PUBLICITÉ
« Libres de rentrer quand ils le souhaitent »
Il a affirmé que son parti continuerait « sans relâche toutes les actions avec l’ensemble de l’opposition en vue de créer les conditions d’un climat politique apaisé, propice à la réconciliation et à la reconstruction d’un État de droit ». Le PDCI a « construit » la Côte d’Ivoire « sur des bases solides qui ont permis et permettent encore aujourd’hui à notre pays, de plier sans fléchir sous les crises politiques, les crises économiques et sociales depuis trois décennies », a-t-il estimé.
Le chef de l’État ivoirien a indiqué que l’ex-président et son ancien ministre de la Jeunesse peuvent désormais rentrer « quand ils le souhaitent » et que l’État prendra en charge les frais du retour de Laurent Gbagbo.
L’ex-président ivoirien et son ancien ministre de la Jeunesse ont été définitivement acquittés par la chambre d’appel de la Cour pénale internationale (CPI), le 31 mars, des faits de crimes contre l’humanité et crimes de guerre commis entre 2010 et 2011. Début décembre, Laurent Gbagbo, qui vit actuellement en Belgique, s’était déjà vu remettre deux passeports, l’un diplomatique, l’autre ordinaire.
Statut d’ancien président
« Des dispositions seront prises pour que Laurent Gbagbo bénéficie, conformément aux textes en vigueur, des avantages et indemnités dus aux anciens présidents de la République », a par ailleurs indiqué Alassane Ouattara.
Interrogé sur la condamnation de Laurent Gbagbo, en 2019, par la justice ivoirienne à vingt ans de réclusion et à une amende de 329 milliards de F CFA dans l’affaire du « braquage de la BCEAO », le nouveau porte-parole du gouvernement, Amadou Coulibaly, a botté en touche. Il a indiqué s’en tenir aux propos du chef de l’État, « qui a dit que Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé pouvaient rentrer quand ils le voudraient ».
Faut-il alors s’attendre à une grâce présidentielle, voire à une amnistie ? Selon nos informations, des négociations sont en cours pour une levée de toutes les condamnations de Laurent Gbagbo en Côte d’Ivoire. Alassane Ouattara « reste bienveillant quant à la situation des victimes qui continueront à bénéficier du soutien de la Côte d’Ivoire », a tenu à préciser le porte-parole du gouvernement.
Avec Jeune Afrique par Florence Richard – à Abidjan
Le chef de l’État ivoirien a indiqué que l’ex-président et son ancien ministre de la Jeunesse peuvent désormais rentrer « quand ils le souhaitent » et que l’État prendra en charge les frais du retour de Laurent Gbagbo.
L’ex-président ivoirien et son ancien ministre de la Jeunesse ont été définitivement acquittés par la chambre d’appel de la Cour pénale internationale (CPI), le 31 mars, des faits de crimes contre l’humanité et crimes de guerre commis entre 2010 et 2011. Début décembre, Laurent Gbagbo, qui vit actuellement en Belgique, s’était déjà vu remettre deux passeports, l’un diplomatique, l’autre ordinaire.
Statut d’ancien président
« Des dispositions seront prises pour que Laurent Gbagbo bénéficie, conformément aux textes en vigueur, des avantages et indemnités dus aux anciens présidents de la République », a par ailleurs indiqué Alassane Ouattara.
Interrogé sur la condamnation de Laurent Gbagbo, en 2019, par la justice ivoirienne à vingt ans de réclusion et à une amende de 329 milliards de F CFA dans l’affaire du « braquage de la BCEAO », le nouveau porte-parole du gouvernement, Amadou Coulibaly, a botté en touche. Il a indiqué s’en tenir aux propos du chef de l’État, « qui a dit que Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé pouvaient rentrer quand ils le voudraient ».
Faut-il alors s’attendre à une grâce présidentielle, voire à une amnistie ? Selon nos informations, des négociations sont en cours pour une levée de toutes les condamnations de Laurent Gbagbo en Côte d’Ivoire. Alassane Ouattara « reste bienveillant quant à la situation des victimes qui continueront à bénéficier du soutien de la Côte d’Ivoire », a tenu à préciser le porte-parole du gouvernement.
La chambre d’appel de la CPI a confirmé l’acquittement de Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé, prononcé en première instance le 15 janvier 2019. Cette décision ouvre la voie au retour de l’ancien président ivoirien dans son pays.
Il a levé les deux pouces en l’air en direction de son avocate à l’énoncé du verdict. Pour Laurent Gbagbo, c’en est terminé : après une décennie de procès devant la Cour pénale internationale (CPI), il est définitivement libre. Ce mercredi 31 mars, la chambre d’appel de la juridiction internationale a confirmé son acquittement ainsi que celui de Charles Blé Goudé, prononcé en première instance le 15 janvier 2019. Les deux hommes étaient accusés de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité durant la crise postélectorale de 2010-2011 en Côte d’Ivoire, qui avait fait plus de 3 000 morts.
« La chambre d’appel rejette l’appel du procureur et confirme la décision de la chambre de première instance », a déclaré le juge nigérian Chile Eboe-Osuji, président de la chambre et ancien président de la CPI, au terme d’un long exposé d’une heure, durant lequel il est revenu sur les différentes étapes de la procédure. La chambre d’appel a également décidé de révoquer toutes les conditions de la mise en liberté de Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé, qui sont désormais libres de leurs mouvements.
« Dix ans presque jour pour jour après le début de cette procédure, cette décision est la victoire de la justice, mais aussi la victoire d’un homme, celle du président Laurent Gbagbo, injustement accusé et qui voit aujourd’hui son innocence pleinement reconnue, se félicite son avocat, Me Emmanuel Altit. Ce 31 mars restera aussi comme une date importante pour la Côte d’Ivoire, car cette décision va dans le sens de la réconciliation nationale. »
Massés devant l’entrée principale de la cour, à La Haye, les dizaines de partisans de l’ex-président et de l’ex-leader des Jeunes patriotes ont laissé exploser leur joie à l’annonce de leur acquittement définitif. « Nous y sommes enfin, s’enthousiasme Prisca Digbeu, venue spécialement de France pour l’occasion. En 2011, nous étions en pleurs quand Laurent Gbagbo est entré à la CPI, car on ne savait pas quand il allait en ressortir. Dix ans plus tard, nous sommes heureux et émus. L’heure est venue pour lui de rentrer en Côte d’Ivoire pour participer à la réconciliation nationale. »
Une décennie de procédure
Après le verdict, Laurent Gbagbo s’est isolé avec son épouse, Nady Bamba, et ses avocats dans un salon du tribunal. L’ancien chef de l’État, 75 ans, affaibli par ses huit années de détention, était pendu au téléphone mais n’a pas souhaité réagir publiquement.
En début d’après-midi, il avait fait son arrivée dans une CPI déserte en raison de la situation sanitaire. Costume-cravate sombre, lunettes de soleil sur le nez, il s’était dit « confiant » quant à l’issue de la procédure. Et avait ajouté, sourire en coin en pénétrant dans le hall principal de la CPI : « C’est la première fois que je passe par ici et non par l’entrée des prisonniers ! »
Pour le bureau de la procureure, Fatou Bensouda, qui avait fait appel de l’acquittement des deux hommes en septembre 2019, cette décision est un nouveau désaveu cinglant. En janvier 2019, les juges avaient pointé le manque de preuve de l’accusation – le président de la chambre allant même jusqu’à évoquer la « faiblesse exceptionnelle » du dossier de la procureure. Alors qu’elle s’apprête à passer la main au Britannique Karim Khan en juin, nul doute que cette affaire restera comme le principal échec de la magistrate gambienne durant son mandat à la CPI.
Pour Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé, c’est la fin d’un long combat judiciaire. Après plusieurs années de détention à la prison de Scheveningen, ils avaient été remis en liberté sous conditions après leur acquittement en première instance. Contraints de rester à proximité de la CPI et de demeurer à sa disposition, l’ancien chef de l’État s’était installé à Bruxelles, en compagnie de Nady Bamba, tandis que Charles Blé Goudé avait choisi de rester à La Haye.
Le Woody de Mama et l’ex-« général de la rue » avaient ensuite vu leur régime de liberté conditionnelle allégé en mai 2020. Concrètement, ils étaient depuis autorisés à changer de lieu de résidence et à vivre où ils le voulaient, à condition d’obtenir l’accord des autorités du pays concerné. Immédiatement, les partisans de Gbagbo s’étaient mis à rêver d’un retour imminent de leur mentor en Côte d’Ivoire.
Tractations pour un retour
Mais malgré cette volonté affichée de rentrer à Abidjan, le retour de Gbagbo est sans cesse reporté. Dépourvu de passeport, recalé à la présidentielle du 31 octobre 2020… L’ancien président rencontre de nombreux obstacles. Ses proches accusent les autorités ivoiriennes de tout faire pour l’empêcher de rentrer. De leur côté, Alassane Ouattara et son entourage assurent qu’ils sont disposés à permettre son retour, mais uniquement lorsque la CPI aura définitivement statué sur son sort.
ALORS QUE LES TRACTATIONS ENTRE LES DEUX CAMPS SE TENAIENT JUSQUE-LÀ EN COULISSES, ELLES SONT DÉSORMAIS OFFICIALISÉES
Après sa réélection pour un troisième mandat en octobre dernier, au terme d’une élection marquée par des violences et le « boycott actif » d’une partie des candidats de l’opposition, le chef de l’État entrouvre davantage la porte au retour de son prédécesseur. Alors que les tractations entre les deux camps se tenaient jusque-là en coulisses entre discrets émissaires, elles sont désormais officialisées.
Début janvier, le Premier ministre Hamed Bakayoko – décédé depuis – reçoit ainsi officiellement Assoa Adou, le secrétaire général du Front populaire ivoirien (FPI), pour évoquer formellement les modalités du retour de l’ex-président à Abidjan. Parmi les obstacles restant notamment à lever : sa condamnation par la justice ivoirienne, en janvier 2018, à vingt ans de prison dans l’affaire du « braquage » de l’agence nationale ivoirienne de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO). De son côté, Alassane Ouattara, bien que peu pressé de voir son ancien rival rentrer, a toutefois répété qu’il était prêt à permettre son retour en Côte d’Ivoire une fois qu’il serait définitivement acquitté par la CPI. C’est désormais chose faite.
Avec Jeune Afrique par Benjamin Roger – Envoyé spécial à La Haye
Le parti de Charles Blé Goudé, ex-chef des Jeunes patriotes ivoiriens actuellement en liberté conditionnelle à La Haye, a annoncé lundi son retrait d’une coalition de l’opposition en dénonçant « des guerres de positionnement », sans préciser s’il participerait ou non aux législatives de mars.
Les deux principaux partis d’opposition, le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) de l’ex-président Henri Konan Bédié, et le Front populaire ivoirien (FPI) de l’ancien président Laurent Gbagbo, avaient annoncé début janvier avec leurs alliés leur participation au scrutin du 6 mars. Le parti de l’ancien président de l’Assemblée nationale Guillaume Soro, qui vit en exil, a en revanche annoncé mi-janvier qu’il n’y participerait pas.
Pour le Cojep, ces élections devaient être vues comme « une opportunité pour renforcer la cohésion et l’unité de l’opposition », mais ont « malheureusement mis au grand jour les appétits et autres guerres de positionnement entre des entités pourtant supposées être des partenaires ».
Ambitions présidentielles
Charles Blé Goudé, surnommé le « général de la rue » pour sa capacité à mobiliser ses partisans, avait fui la Côte d’Ivoire après la crise post-électorale de 2010-11. Il avait ensuite été arrêté en 2013 au Ghana, puis transféré à la CPI en 2014, pour être jugé aux côtés de Laurent Gbagbo.
Les deux hommes ont été acquittés en janvier 2019 mais doivent attendre la décision sur un éventuel procès en appel, en liberté conditionnelle. Ses détracteurs et plusieurs ONG internationales le considèrent comme l’un de ceux qui ont contribué aux violences pendant la crise post-électorale.
Charles Blé Goudé a indiqué à plusieurs reprises nourrir des ambitions pour la présidentielle de 2025. « Un jour, j’aimerais diriger mon pays. Mais j’ai tout mon temps. Je sais que la Côte d’Ivoire m’attend », disait-il à Jeune Afrique en juin 2019