Face à la crise des déchets qui frappe Sfax, les responsables se renvoient la balle et n’ont d’autre parade que des solutions à court terme.
Depuis quarante jours, la deuxième ville de Tunisie, Sfax (Centre Est), suffoque et croule sous les déchets. Une crise qui a atteint son paroxysme le 7 novembre avec un soulèvement populaire et des affrontements à Agareb, localité située à une vingtaine de kilomètres à l’ouest de Sfax, qui refuse la réouverture de la décharge d’El-Guenna, dont elle a obtenu la fermeture en 2019 par un jugement.
Les protestataires estiment que ce centre de traitement des ordures leur a occasionné de nombreux problèmes de santé et qu’il faut s’en tenir à la sentence des magistrats.
Le précédent de Djerba
Les autorités tunisiennes, dont le ministère de l’Environnement, ont fait fi de la décision judiciaire et souhaitent que le site accueille les ordures de Sfax, au moins à titre temporaire. Elles ont même suggéré qu’une décharge sauvage soit installée dans le voisinage de l’oliveraie de Chaal, la plus vaste d’Afrique.
« À vouloir éteindre un feu, ils en allument d’autres, encore plus dommageables. Il ne manque plus à notre région qu’une contamination de la nappe phréatique », s’emporte un régisseur du domaine oléicole de Chaal.
Des décisionnaires de l’environnement pris au dépourvu et un service public totalement paralysé : ce n’est pas la première fois que pareille situation se produit depuis la révolution de 2011.
Oubliée de tous, la crise similaire qui a immobilisé l’île de Djerba en 2014 après la fermeture de la décharge contrôlée de Guellala a été simplement « résolue » avec l’exploitation d’une décharge sauvage à Telbet, à quelques kilomètres d’une zone industrielle où 15 hectares avaient été attribués au développement d’un centre de traitement, de valorisation et de recyclage des déchets et de production d’énergies renouvelables. Le projet est encore dans les cartons sans que les études aient abouti.
« La situation actuelle peut provoquer la même crise qu’en 2014 », selon le maire de Houmt Souk (Djerba), Houcine Jared. Qui rappelle que « les municipalités sont chargées de la collecte des déchets qu’elles déposent auprès d’un centre de transfert de l’Agence nationale de gestion des déchets [Anged], laquelle pourvoie à leur transport et enfouissement. »
Sur le papier, la politique publique privilégie la valorisation et le recyclage des déchets à l’enfouissement. Mais cela reste un vœu pieu et le problème des ordures devient endémique. Raouf Ellouze, agriculteur et acteur de la société civile, s’indigne : « Le problème des déchets est à l’image de la situation du pays. Les Anged ne servent à rien d’autre qu’à entretenir des ronds de cuir. Depuis 2007, aussi bien la société Eolia que la ville de Grenoble [jumelée avec Sfax, NDLR] ont tenté de sensibiliser les autorités locales au traitement et à la valorisation des déchets. »
LOIN DE CONSIDÉRER QU’IL S’AGIT D’UN PROBLÈME DE GOUVERNANCE, KAÏS SAÏED Y VOIT PLUTÔT L’EFFET D’ACTIONS MALVEILLANTES
Mais là encore, rien n’a été fait et la municipalité de Sfax, malgré ses plus de 260 000 habitants, n’a pas anticipé la crise, qui pourtant était prévisible au vu de l’abandon et du délabrement progressif de la ville la plus productive de Tunisie.
« Tunis ne saurait prétendre traiter seul la gestion des déchets, il s’agit d’un service de proximité et c’est de fait une question de développement local. Les communes devraient prendre les choses en main », commente Samir Meddeb, consultant en environnement et développement durable. Aujourd’hui, la crise d’Agareb illustre les défaillances des politiques publiques.
Difficile pourtant d’admettre que l’État, aussi démuni soit-il, en est réduit à user de violence et à envoyer en première ligne les forces de l’ordre pour contenir la colère des habitants d’Agareb. « C’est inadmissible », assène Romdhane Ben Amor, porte-parole du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES), qui estime que l’action collective est essentielle pour les territoires.
De son côté, loin de considérer qu’il s’agit là d’un problème de gouvernance, le président Kaïs Saïed y voit plutôt l’effet d’actions malveillantes, au risque d’alimenter la polémique. Il assure ainsi que « certains refusent de ramasser les déchets pour noyer la Tunisie sous les poubelles ».
Des gaz toxiques émis par une décharge de déchets polluants non loin de Moscou ont entraîné la prise en charge médicale d’une cinquantaine d’enfants, provoquant une colère d’une rare virulence des habitants contre des autorités russes jugées indifférentes face à la situation écologique.
« Ne tuez pas nos enfants! » ou encore « Je veux respirer! Je veux vivre! », pouvait-on lire sur les pancartes de quelque 200 personnes rassemblées mercredi après-midi devant l’hôpital de Volokolamsk, à une centaine de kilomètres au nord-ouest de la capitale russe.
Depuis des semaines, des habitants dénoncent les désagréments liés à la décharge voisine de Iadrovo, mise en exploitation en 1979. Leurs protestations ont conduit les autorités à promettre de la recouvrir de terre d’ici la fin du mois et d’installer un système de dégazage en juin.
Mais la situation s’est encore aggravée mercredi avec l’apparition d’une odeur nauséabonde, l’air devenant difficilement respirable, particulièrement aux abords de la décharge comme l’a constaté un journaliste de l’AFP.
Au total, 57 enfants ont demandé une assistance médicale essentiellement en raison de vertiges, et cinq d’entre eux ont été hospitalisés, selon un communiqué de l’administration régionale.
« On se réveille chaque nuit à cause de cette odeur. Et qu’est-ce qu’on va faire en été? Comment peut-on vivre comme ça? », a dit à l’AFP Anna Louzova, écolière de 10 ans.
Le maire de la ville, Piotr Lazarev, a aussitôt mis en cause la décharge d’Iadrovo, située à trois kilomètres de Volokolamsk, déjà dans le collimateur des riverains. Ces derniers ont manifesté régulièrement ces dernières semaines, donnant lieu en pleine campagne pour la présidentielle à des scènes devenues rares en Russie ces dernières années, tant toute protestation est accueillie avec fermeté.
« La situation devient de pire en pire chaque jour qui passe (…), notamment à cause de rejets des gaz de décharge », a affirmé M. Lazarev dans une interview à la radio Business FM. « Ces odeurs ont un effet néfaste sur les habitants de Volokolamsk, et beaucoup d’enfants ont dû être soignés aujourd’hui (…), parce qu’il y avait cette odeur forte ».
– ‘Assassin’ –
Rassurantes, les autorités locales ont identifié un fuite du gaz toxique à Iadrovo mais assuré que la situation était maîtrisée.
Dans son bulletin quotidien sur l’état de l’air dans la région de Moscou, le ministère russe des Situations d’urgence a désigné la décharge de Iadrovo, comme « source de pollution de l’air » à Volokolamsk et ses environs.
Cependant, après analyse de la qualité de l’air mercredi, « aucune concentration de substances polluantes dans l’air dépassant les normes n’a été constatée. (…) Aucune menace pour les habitants de la ville n’a été détectée », a affirmé ce ministère.
Mais les habitants de Volokolamsk, qui ont été nombreux mercredi à se plaindre sur les réseaux sociaux de l’odeur nauséabonde dans les rues de la ville, ont perdu patience.
Dans l’après-midi, près de 200 personnes étaient réunies près de l’hôpital central de Volokolamsk.
« Cela fait deux mois que l’air ici est irrespirable. Nos enfants souffrent de nausées et d’hypertension », a déclaré à l’AFP une habitante locale, Anna Grapé, 50 ans.
Accueilli aux cris de « Honte! » et « Assassin! », le gouverneur de la région de Moscou, Andreï Vorobiov, a promis d’accélérer la fermeture de la décharge.
Face à la multiplication des plaintes de Russes mécontents dans tout le pays ces derniers mois, les autorités ont reconnu que le système de mesure de la qualité de l’air était défaillant. Faute de financements, ce système est tout simplement absent ou caduc faute d’avoir été modernisé depuis la chute de l’URSS.
Addis Abeba – Au moins 24 personnes ont été tuées et 28 autres blessées par un immense éboulement dans une des principales décharges d’ordures du pays, en périphérie de la capitale éthiopienne Addis Abeba, ont annoncé dimanche les autorités.
L’éboulement s’est produit samedi soir, la masse d’ordures déplacée emportant notamment une trentaine d’habitations de fortune de personnes vivant sur la décharge de Koshe, a indiqué à l’AFP Dagmawit Moges, un porte-parole de la municipalité d’Addis Abeba.
« Nous nous attendons à ce que le nombre de victimes augmente », a-t-il ajouté, expliquant que l’éboulement avait touché une zone « relativement grande ».
La décharge de Koshe existe depuis plus de 40 ans et est une des principales décharges de la périphérie d’Addis Abeba, capitale de 4 millions d’habitants à la croissance démographique galopante.
La plupart des victimes de l’éboulement sont des « squatteurs » qui fouillent sans relâche les montagnes de déchets à la recherche d’objets pouvant avoir de la valeur, selon M. Moges.
La décharge du Bois des singes. Crédits : JOSIANE KOUAGHEUC’est une odeur qui colle au corps comme la poix. Elle agresse les narines : un mélange d’œuf pourri et d’excréments humains. Devant une grande cour boueuse, un camion déverse une lourde substance noire. L’exercice dure une vingtaine de minutes, sous l’œil vigilant du vidangeur. La pestilence le laisse de marbre. Gaston Nguepi n’a ni cache-nez, ni mouchoir pour se protéger : « Cela fait neuf années que je déverse les déchets des toilettes ici. Depuis ce matin, j’ai déjà fait cinq tours à la décharge. »
A un jet de bille, deux petits garçons qui rentrent de l’école vêtus de leur uniforme scolaire hâtent le pas. « Ah les cacasnoirs ! », s’exclame l’un d’eux en courant, cartable sur le dos. « Ce que ça sent aujourd’hui ! » Gaston sourit, retourne à son camion et démarre en trombe. Un autre véhicule arrive, déverse ses « cacas noirs » et s’en va. Puis un trosième, un quatrième, un huitième… A la décharge du Bois des singes, à Douala, capitale économique du Cameroun, les excréments humains se répandent dans la nature, depuis plus de deux décennies, sans traitement préalable.
Des mouches et des hommes
Le site sis à Youpwè, dans une zone de mangrove sur les rives du fleuve Wouri, a été construit dans les années 1990, pour faire face au boom démographique. C’est dans ce lit filtrant, sorte de station artisanale constituée d’une grande fosse, que les camions déposent leur chargement issu des fosses sceptiques. Du sable est censé être versé par-dessus. Mais les pluies diluviennes qui arrosent Douala ont eu raison du procédé.
« Ça ne pouvait pas tenir, car tous les déchets sont vidés directement dans cette décharge. C’est l’unique de la ville, explique Germain Sontzia, pelle à la main. Je travaille ici depuis plus de vingt ans et, chaque jour, au moins trente camions desservent le site. Chaque camion fait entre quatre et six tours par jour. » Le vieil homme de 65 ans au dos voûté et à la démarche lourde est l’un des deux éboueurs engagés par la communauté urbaine de Douala (CUD), gestionnaire du site. Leur rôle ? Trier et en extraire papier hygiénique, slips, vêtements… Mais où va donc le liquide ? Germain pointe du doigt un point imaginaire au lointain. « Dans le Wouri,là-bas. »
Mais avant de se déverser dans le plus long fleuve de la capitale économique, les excréments passent d’abord entre les maisons qui jouxtent la décharge. Aucune canalisation n’a été aménagée. « Chacun se débrouille comme il peut pour éviter que les cacas l’envahissent, explique en soupirant Esther, une habitante dont la maison est construite en matériaux provisoires. J’ai été obligée de creuser. » Sa fille de 7 ans nous tire par la main pour nous mener derrière la baraque. Dans un long canal, une pâte boueuse. Mouches et insectes rôdent. L’eau noire suinte et se déverse dans la cour. L’odeur est vraiment insoutenable. « Parfois je ne parviens même pas à dormir parce que ça sent trop », lâche la fillette, la main droite sur le nez.
« On devait y construire une forêt de récréation »
L’odeur ne dissuade pourtant pas des centaines d’habitants de s’installer chaque année sur ce site appartenant au domaine privé de l’Etat du Cameroun. Dans une ville de plus de 3 millions d’habitants, l’accès au foncier est un réel problème. « Nous n’avons pas d’endroits où rester. J’ai 58 ans et j’ai passé toute ma vie à enchaîner les petits boulots. Je n’ai pas eu l’argent pour acheter, se désole Jean-Gaston. J’ai été obligé de venir ici où les terrains sont moins chers. Si on avait où loger, on ne serait pas restés ici. »
Crédits : Josiane Kouagheu
Dans son bureau climatisé où il nous reçoit dans son smoking taillé sur mesure, Engels Ombolo Tassi a du mal à masquer son inquiétude face à un « dossier qui donne des insomnies » au gouvernement. « C’est un désastre écologique. On a 40 hectares de réserve forestière, toute la réserve du Bois de singes, entièrement détruits par la population, qui a même remblayé la mangrove. L’espace des Bois des singes est le domaine privé de l’Etat. On devait y construire une forêt de récréation, un jardin botanique ou zoobotanique. C’est un espace vert où on ne devrait rien construire. Les terrains ne sont pas à vendre », insiste le chef du Service régional des forêts du littoral qui se lève de son fauteuil pour retirer d’un coffre un dossier volumineux dont certaines pages ont jauni. L’air concentré, il feuillette.
A la date de mai 2015, on dénombrait sur le site de la réserve forestière, 151 maisons (en matériaux définitifs ou provisoires), une école maternelle et primaire, un centre de santé, des mosquées, des églises et des organisations non gouvernementales. « Je n’ai jamais vu un tel degré d’incivisme dans la capitale économique, lâche comme s’il n’y croyait toujours pas Engels Ombolo Tassi. Nous avons mené des campagnes de sensibilisation pour expliquer à la population qu’elle était installée sur un site vert, une forêt utile pour tout le pays. En vain. Nous avons placé des plaques d’avertissement qu’ils ont détruites. »
« Cette odeur est devenue notre parfum »
Les habitants, eux, sont unanimes sur deux points : ils ont trouvé la décharge et ont acheté les terrains sur lesquels ils sont installés. A qui ? Silence. « Vous pensez que nous pouvons encore quitter ce site ?, demande, hilare, un voisin. Cela fait huit ans que je vis ici. Même l’odeur est devenue notre parfum. Nous sommes des damnés. Nous acceptons notre sort, faute de mieux. » Pour ce quadra, au lieu de chercher à les déloger, le gouvernement devrait plutôt penser à construire une décharge « digne du pays, leader de l’Afrique centrale ». « Quand ils déversent, les selles à l’état brut se retrouvent sur la route.Ils doivent les traiter avant », implore Ruth Maleng, une habitante.
Sidi Baré, le délégué régional de l’environnement et de la protection de la nature, n’aime pas les mots « excréments », « cacas » ou « selles ». Il préfère parler de « boues de vidange ». « Ce sont des déchets organiques non toxiques. C’est la concentration, la régularité et la densité des dépotages qui font en sorte qu’on se retrouve avec certains paramètres au-delà de ce qui est normal, détaille-t-il. Du coup, la nappe phréatique ainsi que la biodiversité aquatique sont atteintes. La mangrove a totalement péri. Les arbres sont finis. » En dehors de ce problème environnemental « global » qui touche une superficie de plus de 40 hectares, le patron de l’environnement dans la région explique que les eaux de consommation de la population utilisées pour la boisson ou les travaux domestiques issues du site sont « souillées ». Plus grave, « en cas de remontée des eaux du Wouri, ce quartier pourra être complètement englouti », prévient Sidi Baré.
Le poisson que la population mange
Pas besoin d’en arriver là pour s’interroger sur les conséquences sanitaires d’une telle situation. Pour le toxicologue Mokmbashagle Ismella, responsable du centre de santé Ismaël, situé non loin de la décharge, les habitants sont exposés au choléra, à la dysenterie, à différents types de vers intestinaux et à toutes sortes de bactéries. « On ne peut même pas exclure les maladies comme la typhoïde, regrette avec tristesse Mokmbashagle Ismella. Voyez comment tout descend entre les maisons et rejoint la mer. Et c’est cette mer-là qui produit le poisson que la population mange. » Et le médecin de rappeler que « beaucoup pensentpar ignorance que les selles sont un engrais biologique pour la culture du manioc. Des gaz très toxiques sont émis lors de la putréfaction des matières fécales qui infectent la terre. »
Chaque semaine, le centre de santé reçoit au minimum 30 patients. Parmi eux, plus de 70 % sont des cas « confirmés » de paludisme. Un record selon le toxicologue. « Avant, j’étais à Ngangue, l’un des quartiers les plus insalubres de Douala. Pourtant le taux de prévalence du paludisme n’était pas aussi élevé. »
Assise à même le sol dans son salon et les deux mains occupées à découper un drap immaculé, Jacqueline Kouam Tcheundem est l’une des patientes de celui qu’elle appelle affectueusement « Doc Ismael ». Cette femme imposante, surnommée « Madame le Maire », est la présidente du développement du quartier et de l’association des Femmes dynamiques des Bois de singes : « Ces cacas sont parfois déversés en pleine route, peste-t-elle. Il faut traiter ces selles comme en France.Ils ne doivent pas aller dans la mer. Comment pouvons-nous encore manger du poisson ? » Il y a deux ans, Jacqueline Kouam Tcheundem ainsi que de nombreux habitants ont organisé des mouvements de protestation pour exiger que la décharge soit délocalisée. Interpellés par les forces de l’ordre, les habitants ont fini par se lasser. « Nous savons bien que nous sommes installés sur un terrain “vert”, mais nous n’avons nulle part où aller ! Nous sommes aujourd’hui près de 4 000 habitants. Il est trop tard. »
Acheter la paix sociale
Que faire ? Depuis quelques années, la communauté urbaine de Douala (CUD) annonce la construction de deux stations d’épuration, pour le traitement de ces « boues de vidange ». Mais le projet traîne. Déloger les populations en attendant ? Une solution pas du tout envisageable pour l’instant. « Le problème est devenu beaucoup plus complexe. On parle peut-être déjà des milliers de personnes. Des ONG de défense des droits humains sont déjà à l’affût. Il y a des enjeux de paix sociale », reconnaît Engels Ombolo Tassi. Il n’a pas tort. « Plutôt mourir que de quitter ma maison. J’ai dépensé plus de 2 millions de francs CFA [3 000 euros] pour l’achat du terrain et la construction, jure Etienne, agent commercial. Nous supportons les odeurs, nous supportons le paludisme qui nous menace chaque jour à cause des moustiques. On n’ira nulle partsans dédommagement. »
A la décharge, les deux éboueurs, Germain Sontzia et Jean-Daniel Ebongué (48 ans et employé depuis quinze ans), ont aussi une doléance : ils supplient la CUD d’augmenter leur salaire. « Nous aspirons les odeurs les plus violentes, nous nettoyons le site, mais nous touchons seulement 50 000 francs CFA par mois [76 euros]. Avec cet argent, nous achetons le lait pour notre santé, énumère Germain. C’est insuffisant pour nourrir notre famille et envoyer nos enfants à l’école. » Un camion arrive, Germain s’interrompt et accourt, pelle à la main. Trente minutes plus tard, les deux compères, dos courbés, nettoient le site puant.
Lemonde.fr par Josiane Kouagheu, Contributrice Le Monde Afrique, Douala