La procédure de dépôt de bilan du quotidien a été lancée le 6 avril. Les intellectuels dénoncent la fin de l’un des derniers médias critiques du pouvoir.
Depuis plusieurs années, des mouvements populaires et citoyens tentent de faire bouger l’Algérie. Le départ du président Bouteflika n’y a rien fait, pas plus, bien sûr, que les premières années mortifères du règne d’Abdelmadjid Tebboune. L’Algérie ne va nulle part et, pour éviter que cela ne se voie trop, elle se mure dans le silence. Pourtant, on l’observe, et on ne peut que désespérer de ce beau pays.
Pour étouffer les voix dissonantes, le pouvoir coupe les dernières sources d’information qui essayent d’offrir un son de cloche différent, de réveiller les consciences et de ressusciter un chouïa d’espoir dans le plus grand pays d’Afrique.
La disparition programmée du quotidien Liberté en est le nouvel exemple, peut-être le dernier. Le Hirak mort et enterré par la pandémie et la répression, ce média était l’un des derniers à témoigner d’un espoir de changement.
Contre l’intégrisme et la corruption
Voir un journal qui est une référence en matière de combat pour la liberté d’expression délibérément sabordé tant par l’actionnaire que par le pouvoir est inadmissible. Nous sommes tous épris de Liberté : dénonçons sa fermeture !
Quotidien créé en 1992 à Alger par trois journalistes, Liberté tire à près de 115 000 exemplaires chaque jour dans tout le pays. Journal généraliste de langue française, il est connu à l’international pour la publication des caricatures d’Ali Dilem.
APRÈS LA GUERRE CIVILE, LE JOURNAL SERA TOUJOURS UNE ÉPINE DANS LE PIED DU POUVOIR
Liberté se confond avec l’histoire de l’Algérie contemporaine : dans un contexte de libération de la parole et d’espoir démocratique face à la montée des islamistes en 1988, le titre apporte du sang neuf, une autre façon de lutter contre l’intégrisme.
Au point d’en payer le prix pendant la décennie noire avec l’assassinat de quatre employés, dont deux membres de la rédaction : Hamid Mahiout et Zineddine Aliou Salah. Après la guerre civile, le journal sera toujours une épine dans le pied du pouvoir car l’islamisme n’est pas le seul adversaire du quotidien, il y a aussi la corruption. En août 2003, il est suspendu avec cinq autres journaux.
Depuis, Liberté dénonce l’immutabilité des dirigeants algériens tout comme le mur dans lequel ils conduisent l’Algérie depuis trop d’années. Le 6 avril, la procédure de dépôt de bilan a débuté. Une pétition a été mise en ligne sur le site du journal.
« Nous, intellectuels, universitaires, chercheurs et artistes algériens, profondément attachés au pluralisme médiatique, ne pouvons rester insensibles au risque de la disparition d’un titre qui porte la voix plurielle de l’Algérie. C’est parce qu’un journal est un espace d’échange et de transmission des idées, des valeurs et d’expression citoyenne nécessaire à la vitalité démocratique d’un pays, qu’il faut le préserver, le défendre et le faire vivre. »
« Il faut se battre ! »
Des écrivains – parmi lesquels Yasmina Khadra, Boualem Sansal, Kamel Daoud –, des sociologues, des acteurs, des comédiens comme Fellag, des universitaires, d’anciens ambassadeurs, le recteur de la Grande Mosquée de Paris, Chems-eddine Hafiz, des journalistes, des artistes, des économistes, des scientifiques : tout ce que le pays compte d’intellectuels dénonce ce scandale qui renforce un peu plus encore le repli de l’Algérie sur elle-même.
Plus de voix dissidentes, plus d’autre option politique, plus d’espoir démocratique pour 44 millions d’Algériens : pour que Liberté résiste, pour que Liberté demeure, il faut se battre ! On ne noircit pas un pays avec du pétrole, on le noircit avec de l’encre pour l’embellir et le faire vivre.
Le président ukrainien s’est adressé au Conseil de sécurité de l’ONU, le 5 avril 2022. Photo : AFP via Getty Images/Timothy A. Clary
Une réforme du système de sécurité internationale, c’est ce qu’a réclamé mardi le président ukrainien tandis qu’il s’adressait au Conseil de sécurité de l’ONU pour la première fois depuis l’invasion de son pays par la Russie.
Le Conseil de sécurité existe pour maintenir la sécurité. Mais où est la paix aujourd’hui? Où sont les garanties que les Nations unies sont censées apporter? a demandé Volodymyr Zelensky aux membres du Conseil réunis d’urgence – incluant la Russie – pour se pencher sur les exactions qui ont été commises à Boutcha, en banlieue de Kiev, par l’armée russe.
M. Zelensky a dénoncé la paralysie du Conseil de sécurité devant une guerre qui viole clairement l’article 1 de la Charte des Nations unies, celui-là même qui érige le maintien de la paix et la sécurité internationale comme le but premier de l’organisation.
« Aujourd’hui, la Charte est bafouée. […] Le droit de veto devient un droit de tuer. »— Une citation de Volodymyr Zelensky, président de l’Ukraine
Les crimes les plus horribles ont été perpétrés dans notre pays depuis la Seconde Guerre mondiale, a dénoncé M. Zelensky. Je m’adresse à vous au nom de ceux qui sont morts à Boutcha, qui ont pris des balles dans le dos, dans la rue, dans leurs appartements, dans leurs maisons.
D’autres ont été jetés dans un puits, certains ont été tués dans leur voiture alors qu’ils tentaient de fuir, des femmes ont été violées devant leurs enfants, on a décapité certaines personnes, a poursuivi le président ukrainien.
Tout cela a été fait par un membre du Conseil de sécurité des Nations unies.
Des cadavres dans les rues de Boutcha, près de Kiev, lors du retrait des Russes au début avril 2022. La ville était assiégée par les Russes depuis le 27 février. Photo : AFP via Getty Images/Ronaldo Schemidt
Si ça continue, on ne pourra dépendre que des armes pour assurer notre sécurité et non plus du droit international, a mis en garde M. Zelensky. Êtes-vous prêts à laisser tomber le droit international?
Le président ukrainien a ainsi réclamé une réforme du Conseil de sécurité qui permettrait d’éviter qu’un membre ne puisse bloquer des décisions concernant une intervention militaire qu’il a lui-même lancée.
Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis, la Chine, la Russie, la France et le Royaume-Uni sont les cinq membres permanents du Conseil de sécurité et disposent d’un droit de veto sur toutes les résolutions de cette instance, la plus puissante de l’ONU.
Washington et l’OTAN ont condamné dimanche la décision « irresponsable » du président russe Vladimir Poutine d’ordonner la mise en alerte de la force nucléaire russe. Face à cette escalade, la Maison-Blanche a déclaré qu’elle n’excluait pas de sanctionner le secteur de l’énergie russe, crucial pour Moscou.
Dans un entretien avec ses chefs militaires retransmis à la télévision, M. Poutine a ordonné la mise en alerte des forces de dissuasion de l’armée russe – qui comportent un volet nucléaire – invoquant des sanctions illégitimes prises contre la Russie par les Occidentaux et des déclarations belliqueuses de l’OTAN.
Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a rejeté toute responsabilité. C’est la Russie qui a engagé la guerre, qui mène une invasion militaire à grande échelle d’une nation souveraine et pacifique, donc il n’y a aucun doute que la Russie est responsable. Le président Poutine est responsable de ce conflit, a-t-il insisté, dénonçant une rhétorique dangereuse.
Le ministre russe de la Défense Sergei Shoigu (à droite) et chef d’état-major Valery Gerasimov ont participé à un entretien avec le président Vladimir Poutine dimanche lors duquel il leur a demandé de mettre en alerte la force de dissuasion russe. Photo : AFP/Alexey Nikolsky
M. Poutine fabrique des menaces qui n’existent pas, a pour sa part dénoncé dimanche la porte-parole de la Maison-Blanche, Jen Psaki. À aucun moment la Russie n’a été menacée par l’OTAN ou l’Ukraine […] Nous allons résister à cela. Nous avons la capacité de nous défendre, a-t-elle ajouté.
Les États-Unis n’écartent pas la possibilité d’infliger de nouvelles sanctions contre la Russie, cette fois dans le secteur de l’énergie, selon Mme Psaki.
Les sanctions énergétiques font certainement partie des mesures que nous évaluons. Nous ne les avons pas retirées. Mais nous voulons nous assurer que nous minimisons l’impact sur le marché mondial et aller de l’avant de manière concertée, a déclaré Jen Psaki.
Par ailleurs, les États-Unis sont disposés à offrir de nouvelles aides financières à l’Ukraine, a ajouté Mme Psaki. Le secrétaire d’État américain Antony Blinken a annoncé dimanche une aide humanitaire de 54 millions de dollars américains, qui s’ajoute à l’une aide militaire de 350 millions de dollars.
Le ciel se rétrécit pour la Russie
La principale compagnie aérienne russe, Aeroflot, franchit plusieurs fois par jour le ciel au-dessus du Canada pour ses vols aux États-Unis. Photo : Reuters/Maxim Shemetov
Le Canada, l’Allemagne, l’Espagne, la Belgique, la Finlande et le Danemark ont annoncé dimanche la fermeture de leur espace aérien aux compagnies russes en représailles à l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
En vigueur immédiatement, l’espace aérien canadien est fermé à tous les exploitants d’aéronefs russes, a indiqué à 9 h (HNE) sur Twitter le ministre canadien des Transports, Omar Alghabra. Nous tiendrons la Russie responsable de ses attaques non provoquées contre l’Ukraine.
Cette interdiction vise les avions et les exploitants d’avions russes pour trois mois, mais ne concerne pas d’éventuels vols humanitaires, a précisé le ministère des Transports, qui emboîte le pas à d’autres pays européens, dont la Finlande, qui a une frontière de plus de 1300 kilomètres avec la Russie.
Avec les nombreux pays ayant déjà fermé ou annoncé la fermeture de leur espace aérien comme la Pologne, la République tchèque et la Bulgarie, la Russie se retrouve avec une importante zone de non-survol en Europe, qui l’obligera à effectuer d’importants détours.
L’interdiction d’accès à l’espace aérien canadien ajoute son lot de complications. La principale compagnie aérienne russe, Aeroflot, franchit plusieurs fois par jour le ciel au-dessus du Canada pour ses vols aux États-Unis.
En revanche, Moscou a commencé à interdire le survol de son territoire à plusieurs pays.
Ces mesures viennent s’ajouter aux sanctions entreprises contre Moscou, dont l’exclusion de nombreuses banques russes de la plateforme interbancaire SWIFT.
Ce réseau interbancaire SWIFT a annoncé tard samedi se préparer à mettre en œuvre dans les prochains jours les nouvelles mesures décidées par les puissances occidentales.
Avec les informations de Agence France-Presse, Reuters et La Presse canadienne
Un demi-millier de Tibétains ont manifesté jeudi devant le siège du Comité international olympique (CIO) à Lausanne (Suisse), conduits par un activiste chaussé de skis et traînant le drapeau chinois derrière lui, pour protester contre l’organisation des Jeux olympiques d’hiver à Pékin.
Venus de toute l’Europe, les manifestants ont parcouru les trois kilomètres séparant le siège du CIO au musée olympique à la veille de la cérémonie d’ouverture des JO d’hiver à Pékin vendredi.
Plusieurs portaient des drapeaux tibétains et des masques à ses couleurs, défilant sous des bannières appelant au boycott des Jeux, dénonçant les « Jeux de la honte » et proclamant « Arrêtez les violations des droits humains au Tibet« .
Une affiche brandie dans le cortège représentait un skieur se tenant devant un char dont les chenilles étaient remplacées par les anneaux olympiques, allusion visuelle à la célèbre photographie d’un manifestant bloquant seul une colonne de blindés lors de la répression du mouvement démocratique de la place Tiananmen en 1989 à Pékin.
Une autre réclamait: « Que Pékin 2022 ne devienne pas Berlin 1936 ».
L’artiste tibétain Loten Namling, qui vit en Suisse depuis 32 ans, menait la manifestation sur des skis sur lesquels était peint le mot « liberté ».
« La raison pour laquelle je traîne le drapeau chinois est que la Chine a détruit mon pays, la Chine a détruit ma culture. Qu’ils réalisent combien c’est dur pour nous », a-t-il déclaré.
« Jamais il ne faudrait octroyer l’organisation des Jeux olympiques à des meurtriers de masse et des dictateurs. Il est temps de dire d’arrêter. »
Les opposants tibétains dénoncent la mainmise de Pékin sur la région himalayenne qui a été rattachée de facto à la Chine en 1951 et accusent le gouvernement central chinois de mener une répression religieuse et culturelle.
Les manifestants ont défilé en scandant les slogans « Pas de droits, pas de Jeux » et « Jeux de Pékin, jeux du génocide ».
Plusieurs d’entre eux sont montés sur le toit surplombant l’entrée du siège du CIO, où ils ont déployé une bannière noire portant l’inscription « Non à Pékin 2022 ».
A l’origine de ce rassemblement, Karma Choekyi, présidente de la communauté des Tibétains de Suisse, a reproché au mouvement olympique et à ses partenaires financiers d’avoir fermé les yeux sur la situation des libertés civiques en Chine.
« Le régime communiste chinois est renforcé et estime que ces Jeux légitiment son droit à réprimer les droits humains (…) », a-t-elle ajouté.
« Nous condamnons le CIO et les sponsors pour avoir permis que cela se produise. »
Une manifestation a également mobilisé une cinquantaine de personnes à Los Angeles devant le consulat de Chine.
Kevin Young, membre des « Amis du Tibet » de la ville californienne de Santa Barbara, a déclaré que les JO d’hiver à Pékin étaient destinés à faire oublier les abus du gouvernement chinois.
« Je ne veux pas que les violations des droits humains, la torture au Tibet, à Hong Kong, contre les Ouïghours, soient minimisées à cause de ces Jeux olympiques », a-t-il dit à l’AFP.
« Nous ne voulons pas rester silencieux face à l’oppression du régime » communiste, a ajouté le manifestant.
Des militantes féministes afghanes ont expliqué jeudi à l’AFP devoir se cacher pour préserver leur sécurité et ont dénoncé la répression croissante des talibans, quelques jours après la dispersion d’une de leurs manifestations avec des sprays lacrymogènes.
Au moins une participante de la manifestation de dimanche a été arrêtée mercredi soir, selon quatre militantes, qui assurent que leur mouvement est visé par une série de descentes policières et craignent pour leur propre sécurité.
Une autre manifestante a posté sur les réseaux sociaux une vidéo d’elle en panique mercredi soir, en affirmant que des combattants talibans frappaient à sa porte.
Les deux militantes restaient introuvables jeudi. Contacté par l’AFP, un porte-parole du gouvernement taliban n’a fait aucun commentaire.
Si les talibans assurent s’être modernisés depuis leur précédent règne entre 1996 et 2001, ils ont progressivement exclu les femmes de la vie publique depuis leur retour au pouvoir en août, suscitant l’inquiétude de la communauté internationale.
Les femmes restent ainsi largement exclues des emplois publics, ne sont pas autorisées à faire de longs trajets sans être accompagnées par un homme de leur famille, et les écoles secondaires pour filles restent pour la plupart fermées.
La vidéo publiée sur les réseaux sociaux « a provoqué beaucoup d’affolement », a confié une militante, qui souhaite rester anonyme.
Une autre militante a raconté à l’AFP que des talibans se sont rendus à son domicile mercredi, mais n’ont pas pu la trouver car elle était dehors avec un proche.
« Nous ne pouvons pas rester chez nous, même la nuit », a dénoncé une autre manifestante, sous couvert d’anonymat.
Ces militantes, qui manifestent régulièrement dans Kaboul et sont très actives sur les réseaux sociaux, changeaient déjà régulièrement de numéros de téléphone. Depuis la manifestation de dimanche, certaines s’astreignent à changer quotidiennement de domicile.
Ce jour-là, des combattants talibans ont aspergées une vingtaine de manifestantes avec des aérosols lacrymogènes et certaines assurent avoir été suivies.
Après ce rassemblement, Human Rights Watch a dénoncé la « répression violente » de l’opposition. Cela « marque une intensification alarmante et illégale des efforts pour empêcher les manifestations pacifiques et la liberté d’expression en Afghanistan« , a estimé l’ONG américaine mardi.
D’autres signaux suggèrent un durcissement du régime actuel: plusieurs journalistes afghans ont été arrêtés ces derniers mois et un professeur d’université ouvertement critique envers le pouvoir a été emprisonné quatre jours début janvier. Il a été relâché après une campagne sur les réseaux sociaux réclamant sa libération.
Les avocats de l’ancien président dénoncent une campagne « d’intoxication et de diabolisation » orchestrée par des médias internationaux, après la publication d’une vaste enquête sur des détournements de fonds durant ses années au pouvoir.
Il aura fallu attendre plus d’un mois après le début des révélations de « Congo Hold-up » pour que Joseph Kabila réponde aux accusations lancées contre lui. C’est par la voix d’un collectif d’avocats spécialement constitué qu’il a choisi de le faire.
Dans leur viseur, une enquête menée par dix-neuf médias internationaux basée sur la fuite de 3,5 millions de documents. Jour après jour, entre fin novembre et début décembre, ce consortium a affirmé dévoiler comment le régime de l’ancien président congolais avait détourné des sommes faramineuses au profit de certains de ses proches. Plus de 140 millions de dollars auraient ainsi échappé à l’État entre 2013 et 2018.
Complot
Des accusations que le collectif d’avocats de Joseph Kabila a niées en bloc. C’est « une enquête sans aucun fondement, calomnieuse et soutenue par aucune preuve fiable et crédible », ont-ils dénoncé. « Aucune transaction, aucun compte en banque à son nom n’a été présenté », soulignent-ils, en regrettant « un complot d’intoxication et de diabolisation » visant à « intensifier la crise politique » en RDC.
Contrairement à ce que certains prédisaient, aucune plainte n’a été déposée contre les auteurs de l’enquête, mais « nous nous en réservons le droit », explique le collectif d’avocats. En revanche, la guerre de communication est lancée. Face à une enquête révélant les dérives d’un régime, les avocats de Joseph Kabila encensent un président arrivé au sommet de l’État en 2001 dans des conditions « difficiles » et qui s’est « battu pour la pacification du pays ». Désormais retiré du pouvoir, l’homme a choisi de « vivre modestement parmi les siens » plutôt que dans de riches villas à l’étranger, ajoutent-ils.
Après avoir quitté la présidence début 2019, Joseph Kabila a vu sa majorité parlementaire renversée et son alliance avec Félix Tshisekedi voler en éclat. Désormais dans l’opposition, à la tête d’un mouvement politique affaibli, il se fait discret, alternant les séjours dans sa ferme de Lubumbashi, dans le sud-est du pays, ou dans celle de Kingakati, non loin de Kinshasa. Ce n’est que de nuit, à l’abri du tumulte et des regards, qu’il se déplace jusqu’à sa résidence de la Gombe, dans la capitale.
Si ses proches se sont dits outrés par les révélations de « Congo Hold-up », l’ancien président n’a rien laissé paraitre de ses émotions. Son entourage l’assure : il reste « serein ». Et mutique.
Le gouvernement Legault, appuyé par les partis d’opposition, ne digère pas la volonté d’Immigration Canada de recruter, au Québec, des agents anglophones pour répondre aux questions des immigrants.
« C’est un manque de respect », clame Simon Jolin-Barrette, ministre de la Justice et responsable de la Langue française.
Dans une déclaration transmise à Radio-Canada, l’élu caquiste ne mâche pas ses mots contre la décision d’Immigration Canada de modifier ses critères d’embauche.
Désormais, Ottawa va aller de l’avant avec le recrutement d’agents parlant exclusivement anglais pour son Centre de service à la clientèle, basé à Montréal, responsable de répondre aux questions des immigrants installés dans l’ensemble du pays.
Une mesure « inacceptable », juge Simon Jolin-Barrette.
Les critiques sont unanimes à Québec.
C’est choquant. C’est un signal vraiment honteux», affirme le chef du Parti québécois (PQ), Paul St-Pierre Plamondon.
Que ce soit Air Canada, Immigration Canada ou l’ensemble de la fonction publique canadienne, c’est un faux bilinguisme. C’est un bilinguisme de façade», dénonce-t-il.
Nous sommes en droit de nous attendre à ce que le gouvernement du Canada donne l’exemple quant à l’importance et à l’exigence du français à Montréal et au Québec», note la porte-parole libérale pour la protection de la langue française, Hélène David, sur Twitter.
La députée de Québec solidaire Ruba Ghazal a fait adopter unanimement, jeudi à l’Assemblée nationale, une motion visant à défendre la langue française au travail». La Charte de la langue française doit s’appliquer aux ministères fédéraux», assure l’élue montréalaise, qui doute de l’argumentation d’Immigration Canada.
Pour justifier sa décision, le ministère fédéral de l’Immigration dit avoir des difficultés pour recruter des agents qualifiés bilingues, tout en expliquant qu’une grande majorité d’appels se font en anglais.
Ça ne tient pas la route, c’est un recul incroyable», lance Mme Ghazal.
Nous ne pouvons pas croire qu’au Québec, où la majorité de la population est francophone, il soit impossible pour Immigration Canada de recruter des employés compétents maîtrisant le français», ajoute le ministre Jolin-Barrette.
Invité à réagir, le ministre fédéral et lieutenant du Québec pour le gouvernement de Justin Trudeau, Pablo Rodriguez, n’a pas caché son malaise.
Je m’attends à ce que tout francophone qui appelle [à Immigration Canada] soit servi en français. C’est clair», a-t-il déclaré sur les ondes de Midi info.
Ce dernier aura, a-t-il indiqué, une discussion» avec le nouveau ministre fédéral de l’Immigration, Sean Fraser.
« Au bord des terrains, c’est bien souvent un triste spectacle de parents hystériques qui perdent toute mesure. Une faute non sifflée sur leur enfant, et ce sont toutes les insultes du monde (quand ce ne sont pas les coups) qui s’abattent sur un arbitre, même pas encore majeur parfois. Un entraîneur qui remplace un enfant, et là, ce sont les parents qui voient rouge parce qu’il paraît qu’il y avait (peut-être) un recruteur au bord du terrain et que le train de la richesse est en train de filer à cause de l’éducateur. » Yacine Hamened est un homme en colère. Ancien responsable de la formation du FC Évian Thonon-Gaillard (des moins de 6 ans aux moins de 15 ans), l’éducateur publie Les Hors-Jeu du football français (éd. Talent Sport), un livre coup de poing qui dénonce les dérives de l’écosystème du sport le plus populaire dans l’Hexagone.
Le Point : Votre livre s’appelle « Les Hors-Jeu du football français ». Que voulez-vous dire par là ?
Yacine Hamened : J’ai voulu montrer que, malgré certains résultats – notamment le titre de champions du monde –, il y a des dysfonctionnements dans notre football. Structurels, administratifs, comportementaux… On peut faire beaucoup mieux.
Guy Roux expliquait au Point au mois de mai : « L’équipe de France va bien, mais le football français va mal. » Vous êtes sur la même ligne ?
Les premières journées de L1 cette saison sont un contre-exemple puisqu’elles tendent vers une évolution. Globalement, sur les dix dernières années, l’équipe de France va bien, pas les clubs.
Quand on vous lit, on n’a presque plus envie d’inscrire son enfant au foot…
Je suis passionné de football, mais mon fils fait du tennis… Malheureusement, je ne grossis pas le trait. Ce sont des faits. Ça pose problème. Beaucoup de parents se détournent du football à cause de l’environnement néfaste, violent. Quand on inscrit son enfant au sport, le premier but doit rester le plaisir, la passion. D’autres sports sont plus sains et plus adéquats à l’épanouissement de l’enfant, plutôt que la recherche de la réussite absolue.
Dans votre livre coup de gueule, vous expliquez qu’il y a deux alternatives : soit les enfants sont forts et deviennent des proies, soit ils sont moyens et personne ne veut les faire jouer. Que doit-on faire pour que le foot redevienne un jeu ?
Les clubs et leurs éducateurs doivent comprendre que leur première mission n’est pas de fabriquer des professionnels. Il y a plus de 15 000 clubs en France. Si on retire les 40 clubs de L1 et L2, ça fait 15 000 clubs qui ne font pas ce qu’il faut, en termes d’accueil, d’éducatif. Le problème est aussi structurel. Les ligues laissent faire, car ça les arrange de créer des clubs élites et de fabriquer ce rêve. Elles autorisent des mutations tous les ans. En CM2, des enfants de 10 ans prennent le bus trois fois par semaine pour aller jouer dans le meilleur club du secteur au lieu de jouer avec leur copain d’école ou de quartier.
Vous parlez aussi de « faux » agents qui promettent des millions aux parents alors qu’ils sont… commerciaux ou chauffeurs VTC !
Je comprends que chacun ait envie de réussir socialement, financièrement. Le football est une solution de facilité, car il ne nécessite pas de diplôme ou de compétences particulières. Si on a un peu de tchatche et des relations… Alors, on pense que tout le monde peut être agent et gérer la carrière d’un joueur. C’est faux ! Il faut connaître les règlements, les contrats, mais aussi le football. Pour certains, c’est comme s’ils étaient vendeurs d’aspirateurs ou de tapis. Beaucoup de gens s’engouffrent dans cette brèche – car elle existe – et le font au détriment des enfants. Ils contactent énormément de joueurs et de familles. Si les jeunes réussissent, tant mieux. Sinon, ils sont laissés de côté…
Bientôt, les enfants de 8 ans auront des agents officieux.
On a l’impression que vous parlez de joueurs de 16 ou 17 ans. Mais, en fait, les footballeurs sont « recrutés » de plus en plus tôt !
L’explication est simple. L’Île-de-France est un vivier mondial. Les clubs étrangers y font du scoutisme. Un règlement interdit aux clubs étrangers de recruter un enfant français avant ses 16 ans. Donc, les clubs français les contactent dès l’âge de 12 ans pour éviter la concurrence. Mais à 12 ans, les enfants ont déjà un « conseiller pseudo-agent ». Donc il faut commencer encore plus tôt. C’est à l’infini ! Bientôt, les enfants de 8 ans auront des agents officieux.
Est-ce spécifique à la France ? Comment ça se passe dans les autres pays ?
La France est un marché très spécial. Nous avons un vivier de joueurs unique. La concurrence est exacerbée, et il y a très peu d’identité club. On joue exactement le même football à Montrouge, à l’ACBB ou à Torcy. On fabrique des joueurs individualistes, en se basant sur des qualités athlétiques. Dans les autres pays, où la culture club est plus forte, chaque club a son identité, sa façon de jouer, et les enfants ne changent pas de club chaque année. Le seul pays qui se rapproche de la France est – à une moindre échelle – la Belgique.
Vous dites qu’on ne « forme » pas, mais qu’on « fabrique » des footballeurs. C’est-à-dire ?
Si on forme, on met en place quelque chose, un projet. En France, on fabrique pour vendre. C’est comme du textile chinois. Un produit standard, pas forcément de grande qualité. En France, on fait des numéros 6 (milieu de terrain défensif, NDLR) travailleurs et destructeurs. Ça marche, car peu de pays ont ce genre de profil. Devant, on produit des joueurs rapides, avec une bonne technique, capables d’éliminer.
Quelles solutions proposez-vous ?
Il faut ouvrir le football à d’autres milieux. Intégrer dans les instances dirigeantes des gens qui ont vu les incohérences sur le terrain. Le football français est très consanguin. À de rares exceptions près, les entraîneurs sont tous d’anciens joueurs professionnels, donc ils reproduisent le même modèle. Au Portugal, la formation d’entraîneur est ouverte à tous et ressemble à un diplôme universitaire. Les Allemands ont des entraîneurs comme Nagelsmann, qui n’est pas un ancien professionnel et qui a une vision très moderne du foot.
En refermant votre livre, certains vont malgré tout dire : oui, mais Kylian Mbappé est français, formé en France et la France est championne du monde.
On va toujours nous raconter cette histoire du petit Français de tel quartier qui réussit. Finalement, combien de joueurs français sont des titulaires indiscutables dans le top 8 européen ? Au lieu d’ouvrir les yeux, on ramène toujours à deux choses : Mbappé et la Coupe du monde.
À l’issue de votre ouvrage, vous remerciez « les éducateurs qui ont envie d’être là pour les enfants plus que pour eux ». Cela veut-il dire que les entraîneurs d’équipes d’enfants se prennent tous pour Guardiola ou Mourinho ?
Ils cherchent la visibilité. On leur fait croire qu’ils vont devenir « quelqu’un ». Je vous donne l’exemple de Montrouge, qui a atteint la finale du championnat de France des moins de 17 ans. Mais c’est grâce à son recrutement, pas grâce à la génération des enfants de Montrouge. Ils fabriquent de grosses équipes. Moi, ce n’est pas mon travail. On doit être là pour les enfants, les éduquer à un sport collectif, des règles de vie.
Les Hors-Jeu du football français, coup de gueule d’un éducateur. Talent Sport, 14,90 €.
L’ONG dénonce les politiques européennes de retour forcé de migrants vers la Libye, où ils sont enfermés dans des centres de détention où des violences sont commises en toute impunité.
Des migrants secourus attendent devant un bateau des gardes-côtes dans la ville de Khoms, dans le nord-ouest de la Libye, le 1er octobre 2019. HAZEM AHMED / AP
Amnesty international a dénoncé le traitement « atroce » subi par des migrants interceptés en Méditerranée et envoyés de force dans des centres de détention en Libye, avec l’aide « honteuse » des Européens, dans un rapport publié jeudi 15 juillet.
Plongée dans le chaos depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011, la Libye est devenue une voie privilégiée pour des dizaines de milliers de migrants, qui tentent de rejoindre l’Europe par la mer au risque de leur vie.
Les agences des Nations unies et les organisations non gouvernementales (ONG) opérant en Méditerranée dénoncent régulièrement les politiques européennes de retour forcé de migrants vers la Libye, où ils sont enfermés dans des centres de détention, dans des conditions très dures.about:
Dans son rapport, Amnesty International affirme qu’à la fin de 2020 la direction libyenne de lutte contre les migrations illégales (DCIM, dépendant du ministère de l’intérieur) a « légitimé » ces violations des droits humains en prenant le contrôle de deux centres de détention gérés par des milices, où des centaines de réfugiés et de migrants ont fait l’objet de disparitions forcées au cours de ces dernières années.
Torture, violences sexuelles, travail forcé
Dans l’un de ces centres, des témoins ont fait état de viols sur des femmes par des gardiens. Ces derniers les forçaient à avoir des relations sexuelles « en échange de nourriture ou de leur liberté », selon l’ONG.
« Ce rapport effroyable jette une nouvelle lumière sur les souffrances des personnes interceptées en mer et renvoyées en Libye, où elles sont immédiatement détenues arbitrairement et systématiquement soumises à des actes de torture, des violences sexuelles, au travail forcé et à d’autres formes d’exploitation, en toute impunité », a indiqué Diana Eltahawy, directrice régionale adjointe d’Amnesty pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord. « Dans le même temps, les autorités libyennes ont récompensé ceux qui étaient (…) soupçonnés d’avoir commis de telles violations avec (…) des promotions », a-t-elle ajouté.
L’ONG a appelé les autorités libyennes à fermer « immédiatement » ces centres de détention. Elle a, par ailleurs, dénoncé « la complicité des Etats européens, qui continuent honteusement d’aider les garde-côtes libyens à capturer des personnes en mer et à les renvoyer de force dans l’enfer de la détention en Libye ».
Les Etats européens « doivent suspendre leur coopération sur les migrations et les contrôles des frontières avec la Libye », et aider « de façon urgente des milliers de personnes coincées là-bas et ayant besoin d’être protégées », a indiqué Amnesty.
L’élue fédérale reste incrédule. Elle ne comprend pas les raisons d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC), qui empêche des enfants de résidents temporaires de revenir au pays, après un séjour à l’étranger.
Considérés comme des visiteurs» s’ils ne sont pas nés au Canada, ces jeunes – contrairement à leurs parents – doivent obtenir une autorisation écrite de la part du gouvernement pour remettre les pieds au Canada. Or, cette mesure est méconnue et de nombreuses familles d’immigrants ont débuté un séjour, principalement pour voir des proches, sans avoir demandé un tel document.
Cette autorisation a néanmoins été refusée, à plusieurs reprises, tel que l’a raconté Radio-Canada. Selon IRCC, l’arrivée de ces enfants, même s’ils sont scolarisés et vivent au Canada depuis plusieurs années, est de nature facultative ou discrétionnaire».
Lorsqu’il s’agit de revenir à l’école et de revoir ses parents, c’est tout sauf un voyage discrétionnaire. Permettre aux enfants de revenir ici, c’est juste le gros bon sens. Leur vie est ici, il n’y a aucune raison qu’ils ne reviennent pas ici», déplore Christine Normandin.
C’est absurde et c’est absolument sans queue ni tête», dénonce de son côté le député du Nouveau Parti démocratique (NPD) Alexandre Boulerice, qui ne mâche pas ses mots contre le ministère de l’Immigration.
Quand on répond à des parents que la venue de leur enfant est non essentielle et facultative, c’est de la bureaucratie idiote», lâche-t-il.
Interrogé par Radio-Canada en marge d’une conférence de presse pour faire la promotion, au Nouveau-Brunswick, de l’immigration francophone, le ministre de l’Immigration, Marco Mendicino, a justifié ces décisions en mettant de l’avant la situation sanitaire.
J’ai beaucoup de sympathie pour les familles dont les voyages ont été interrompus par la pandémie, mais en même temps, nous avons introduit des mesures à la frontière pour protéger la sécurité et la santé de tous les Canadiens», soutient-il.
Pourquoi séparer des familles ou interdire le retour des enfants? Le ministre Mendicino n’a pas directement répondu à ces questions.
Alors que le Bloc québécois veut carrément abolir» cette exigence d’une autorisation écrite pour les enfants, le NPD demande au ministre Mendicino de faire son travail».
Il peut donner une directive claire et il pourrait régler le dossier en 5 minutes. Mais, malheureusement, on a un ministre de l’Immigration qui est absolument inefficace et qui ne sert à rien», juge Alexandre Boulerice.
Une solution» doit être trouvée, lance un représentant français
Cette situation inquiète également le conseiller consulaire français, basé à Montréal, Yan Chantrel.
Malgré la pandémie, il faudrait faire preuve d’humanité. Les autorités devraient mettre fin à ce type de situation», assure l’élu français.
Ce dernier a eu vent d’une grande anxiété» de la part de nombreux parents français, résidents temporaires, qui, selon les règles actuelles canadiennes, n’ont pas le droit de faire venir leur famille proche au Canada.
Ils ne peuvent pas recevoir leur famille, mais maintenant, ils ne peuvent même pas aller la voir, car ils ont peur de ne pas pouvoir revenir. Il faut trouver une solution», lance Yan Chantrel.
Une solution, rapide, c’est justement ce que réclame Laurence Lacroix, coincée avec sa fille de 14 ans en Franche-Comté. Fin juin, cette restauratrice du Saguenay–Lac-Saint-Jean, présente au Québec depuis 4 ans, est rentrée en France voir son père, malade.
Début juillet, l’embarquement pour revenir à Montréal lui est refusé. Sa fille n’avait pas l’autorisation écrite d’IRCC. Je n’étais pas au courant», se défend-elle. Sa demande a été envoyée, mais la procédure prend, selon Ottawa, 14 jours ouvrables.
Ces derniers jours, Laurence Lacroix a créé un groupe Facebook pour partager son expérience et prévenir les parents et résidents temporaires. Plus de 200 familles y font part, désormais, de leurs craintes et angoisses.
Je ne m’y attendais pas du tout, raconte Laurence Lacroix. Il faut rappeler que nous, on ne part pas faire du tourisme. On va voir un parent malade, un père, un grand-parent. On ne parle pas de vacances au soleil.»
Par Romain Schué avec la collaboration de Nancy Caouette et Alix Villeneuve