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Le discours de Poutine a laissé beaucoup de Russes sur leur faim

février 21, 2023

L’allocution du président, diffusée en direct sur toutes les chaînes d’État ce mardi, était très attendue par la population.

Le president russe Vladimir Poutine prononce son discours annuel sur l'etat de la nation au centre de conference Gostiny Dvor, a Moscou, le 21 fevrier 2023.
Le président russe Vladimir Poutine prononce son discours annuel sur l’état de la nation au centre de conférence Gostiny Dvor, à Moscou, le 21 février 2023.© Dmitry Astakhov/Sputnik/AFP

« D’un côté, je suis rassurée que le président n’ait rien dit à propos d’une nouvelle vague de mobilisation ou d’une participation plus évidente de nous tous, ici en Russie, à cette guerre », avoue Lara, 26 ans, commerciale dans une banque d’État. « Mais, de l’autre, les buts de cette guerre ne sont toujours pas clairs et on ne sait même pas quand on s’en sortira ! » soupire-t-elle, agacée.

Comme de nombreux Moscovites, Lara a regardé avec attention l’allocution de Vladimir Poutine sur son téléphone portable depuis son lieu de travail. À l’instar d’une majorité de la population russe inquiète et désarçonnée par l’invasion de l’Ukraine, il y a un an, la jeune femme attendait avec angoisse ce discours devant les deux chambres du Parlement, d’autant qu’il n’avait pas eu lieu à la fin 2022, comme l’exigeait pourtant la Constitution.

« Citoyens de deuxième catégorie »

Le discours-fleuve – le plus long de toutes ses allocutions aux deux Chambres – n’a guère apporté d’éléments nouveaux, sauf à la fin, quand le chef de l’État, à la voix enrouée mais à la mine et au ton énergiques, a annoncé que la Russie suspendait sa participation à l’accord New Start avec les États-Unis sur le désarmement nucléaire stratégique.

Il a justifié sa décision par les vols de drones – « modernisés avec l’aide de l’Occident » – au-dessus de deux aéroports russes en décembre, celui d’Engels et celui de Ryazan. Pour ajouter, presque malicieux et sûr de son effet, que si les États-Unis s’apprêtaient à procéder les premiers à de nouveaux essais nucléaires, la Russie se réservait également le droit d’y procéder. « Ce moment-là m’a marquée, souligne Lara, parce que c’est comme si le président évoquait la guerre froide… »

La jeune femme a été étonnée par l’insistance du président à diviser, en permanence, la société russe entre « les nôtres » et « les autres ». Il l’a fait notamment à propos des hommes d’affaires qui ont quitté le pays à la suite de la guerre. « Personne ne va les plaindre d’avoir perdu l’argent qu’ils ont déposé sur des comptes en banque en Occident » où ils ne sont, finalement, que « des citoyens de deuxième catégorie », a affirmé Vladimir Poutine, qui ne perd plus une occasion de montrer sa satisfaction vis-à-vis de la « purification » de la société russe induite par cette guerre.

Nouvelles élites

Autre moment révélateur : quand le président russe, quasi hors de lui, a évoqué le nom d’une nouvelle brigade de chasseurs alpins ukrainiens officiellement nommée « Edelweiss » (le nom d’une fleur de montagne), selon lui en référence à la division nazie qui portait le même nom. Selon Lara, beaucoup de Russes, même contre la guerre, peuvent se demander pourquoi cette dénomination a été choisie par le président ukrainien.

Au grand dam de la jeune femme, et de toute une population jeune et éloignée de la politique, Vladimir Poutine n’a pas soufflé mot sur les moyens de stopper cette guerre, ni sur ce qu’il proposait pour réussir à vivre sous ces conditions radicalement différentes.

Dans la salle où s’exprimait le président, de très nombreux invalides de guerre et militaires en uniforme, leurs médailles bien visibles, ont été montrés à plusieurs reprises lors de la retransmission télévisée en direct sur toutes les chaînes d’État, comme illustrant ce changement des élites que Poutine appelle de ses vœux.

Les anciennes élites, trop libérales dans les années 1990 – quand « des conseillers occidentaux venaient nous donner des leçons, vous vous en souvenez ? », a-t-il glissé –, se sont, selon Poutine, trompées et n’ont pas été assez patriotes. Voici les nouvelles élites, semblait dire le chef d’État russe, dont les propos étaient immédiatement illustrés par le réalisateur de la retransmission.

Aucune mention du coût humain du conflit

Assis aux côtés du ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, son collègue de la Défense Sergueï Choïgou a gardé un visage fermé et impassible tout au long de l’allocution. Ramzan Kadyrov, le président de la Tchétchénie, fort disert sur son fil Twitter, ne semblait pas être présent, alors qu’il avait été annoncé.

Le maire de Moscou Sergueï Sobianine, soupçonné de ne pas être un chantre de la guerre, et qui a tout fait pour que sa ville envoie très peu de mobilisés participer à « l’opération militaire spéciale », n’a pas été montré non plus.

Aucune mention n’a été faite, par Vladimir Poutine, du coût humain du conflit, sauf pour remercier celles et ceux qui, « héroïquement », en souffrent. Si certains semblent avoir apprécié que l’allocution n’ait été ni trop belliqueuse ni trop jusqu’au-boutiste, les « turbopatriotes », eux, l’ont immédiatement critiquée sur certaines chaînes Telegram. Hier dans l’expectative, les marchés boursiers russes avaient accusé une baisse. En signe de confiance, ce mardi, ils sont remontés pendant l’allocution du président.

L’agence de presse officielle RIA-Novosti a fait les comptes : la salle a applaudi 53 fois et s’est levée à 4 reprises. Mais pas quand Vladimir Poutine a subitement évoqué la suspension de l’accord nucléaire. À ce moment précis, un seul homme, en uniforme militaire et filmé de dos par le réalisateur, s’est levé de son siège, mais il n’a pas été suivi par la salle, preuve que l’ambiance était à la circonspection.

Avec Le Point.fr par l’envoyée spéciale à Moscou, Anne Nivat

Abdoulaye Maïga : le président Bazoum qualifié d’étranger, la junte joue avec le feu

septembre 28, 2022

L’ex-ministre centrafricain Adrien Poussou considère que le discours incendiaire du Premier ministre malien par intérim contre le président nigérien, porte les germes d’un prochain affrontement fratricide entre les deux pays.

Le Premier ministre de la République du Mali, Abdoulaye Maiga, à la 77e session de l’Assemblée générale des Nations Unies à New York, le 24 septembre 2022. © Eduardo Munoz/Reuters

« Tout ce qui est excessif est insignifiant. » Voilà ce que l’on pourrait rétorquer au Premier ministre malien par intérim, Abdoulaye Maïga, qui a multiplié les critiques virulentes à la tribune de l’Assemblée générale des Nations unies, notamment à l’égard du président nigérien, Mohamed Bazoum.

Le colonel Abdoulaye Maïga n’a pas été tendre avec ceux qui exigent un calendrier raisonnable pour la fin de la transition et indiquent la porte de sortie à la junte malienne. Il a ainsi tenu un discours au lance-flammes contre le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, auquel il a dénié la qualité de « chef d’État » ; contre le président bissau-guinéen et président en exercice de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao), Umaro Sissoco Embaló ; et contre le président ivoirien Alassane Ouattara. Mais le Premier ministre malien a réservé sa charge la plus violente au président nigérien, Mohamed Bazoum, qualifié « d’étranger qui se réclame du Niger ». Un comble.

Son seul péché est d’avoir exhumé un secret de polichinelle : la montée en puissance des jihadistes depuis le retrait du Mali de la force française Barkhane, et le risque, réel, de voir la ville de Ménaka, frontalière de son pays, passer sous le contrôle des terroristes. À mots à peine couverts, Mohamed Bazoum a pointé l’incapacité de la junte malienne à obtenir des résultats probants en matière de sécurité, laquelle a servi de prétexte au double coup d’État. Il a également fustigé l’inefficacité des mercenaires de Wagner dans la lutte contre le terrorisme, en dépit de leur déploiement sur le terrain aux côtés des Forces armées maliennes (FAMA).

Surenchère langagière

On se souvient qu’en juillet 2021, le président nigérien avait vertement critiqué la propension des colonels maliens à renverser les régimes démocratiquement élus, après des revers militaires. « Il ne faut pas permettre que les militaires prennent le pouvoir parce qu’ils ont des déboires sur le front […], que les colonels deviennent des ministres ou des chefs d’État », avait-il déclaré lors d’une conférence de presse commune avec son homologue français Emmanuel Macron. Des propos qui avaient suscité la « vive protestation » des autorités maliennes.

Manifestement, les critiques du président nigérien leur sont restées en travers de la gorge, et elles cherchaient l’occasion de lui rendre la pareille. En le qualifiant « d’étranger qui se réclame du Niger », Abdoulaye Maïga persiste dans la surenchère langagière à laquelle il nous a habitués, au mépris des sacro-saintes règles de bienséance qui caractérisent les relations entre les pays « frères » d’Afrique. Au-delà du fait que ce discours incendiaire va malheureusement à l’encontre des « solides relations d’amitié et de fraternité » entre les peuples nigérien et malien, il porte surtout les germes d’un prochain affrontement fratricide entre les deux pays.

Pseudo-nationalistes

On s’étonne que des gens qui se proclament panafricanistes à longueur de discours en soient réduits à traiter d’autres Africains « d’étrangers ». En vérité, le panafricanisme bruyant dont se targuent les militaires maliens, ainsi que leurs soutiens stipendiés par les Russes, se heurte ainsi à leur véritable nature : ce sont de pseudo-nationalistes assoiffés de pouvoir.

Nous sommes d’autant moins surpris que des sources bien informées nous ont indiqué qu’en prenant connaissance du communiqué final publié à l’issue du sommet extraordinaire de la Cedeao, le 22 septembre dernier à New York, le chef de la junte malienne, Assimi Goïta, aurait exulté. Comme un caïd de cours de récréation, le président de la transition aurait été manifestement content d’apprendre l’annonce de la venue prochaine de trois chefs d’État pour tenter d’obtenir la libération des 46 soldats ivoiriens toujours détenus à Bamako.

Instabilité chronique

Ni la condamnation, « avec fermeté », de l’incarcération de ces militaires ivoiriens par la Conférence des chefs d’État et de Gouvernement de la Cedeao, ni la dénonciation du « chantage » exercé par les Maliens dans cette affaire, n’ont gâché son plaisir. Bien au contraire : le plus important pour lui, c’est que de vrais chefs d’État, qui n’ont pas eu besoin d’usurper la souveraineté nationale chez eux, feront le déplacement de Bamako pour le supplier de libérer les « militaires otages », selon la terminologie des officiels ivoiriens. Lui qui entend troquer son uniforme militaire contre un costume respectable de président élu à la faveur d’une farce électorale qu’il compte organiser à l’issue de la transition.

Les militaires au pouvoir au Mali oublient une chose : les pays de la Cedeao auxquels ils ont pris l’habitude de s’attaquer avec virulence ont suffisamment de leviers pour créer, et entretenir, une instabilité chronique au Mali. Parce que des  millions de Maliens vivent dans ces pays-là, le pouvoir malien aurait tort de considérer le refus de l’escalade des autres chefs d’État comme une faiblesse. Personne n’a intérêt à ce que la situation dégénère, ou se transforme en une guerre de pauvres.

Avec Jeune Afrique

Adrien Poussou

Par Adrien Poussou

Ancien ministre centrafricain de la Communication.

France: Zemmour accusé d’avoir laissé scander « Macron assassin » condamne les propos de la foule

mars 27, 2022
Zemmour accusé d’avoir laissé scander « Macron assassin » condamne les propos de la foule© AFP/JULIEN DE ROSA

Eric Zemmour, accusé par une partie de la classe politique d’avoir laissé la foule scander « Macron assassin » pendant son meeting dimanche à Paris, a finalement « condamné » ces propos visant le chef de l’Etat, selon son entourage.

Le slogan a été scandé sur l’esplanade du Trocadéro une dizaine de fois après que le candidat de Reconquête ! a déclaré: « Certains s’indignent de ma fermeté. Ce qui m’indigne moi, ce ne sont pas les mots et les concepts, ce sont les drames quotidiens que vous subissez. Ce qui m’indigne moi, c’est qu’on ne rendra jamais la paix à Evelyne Reybert, maman de Julien, massacré » à Romans-sur-Isère. Ce qui m’indigne, moi, c’est qu’on ne consolera jamais les enfants de Sarah Halimi ou de Mireille Knoll. On ne rendra jamais justice à tous ceux que l’Etat n’a pas su protéger ».

Eric Zemmour a alors fait une pause dans son discours tandis que montaient les cris, sans toutefois intervenir.

« Il ne l’a pas entendu » et « il condamne ce qu’a dit la foule à ce moment-là ». « Il ne reprend pas l’expression à son compte. Il n’a jamais utilisé un tel terme et ne l’a jamais laissé entendre dans son discours », a affirmé son entourage, interrogé à plusieurs reprises sur cet épisode.

« E. Zemmour laisse une foule crier +Macron assassin+. Je combats avec force le président sortant mais laisser traiter un adversaire de meurtrier, c’est dangereux pour la République », avait auparavant déploré Valérie Pécresse dans un tweet.

« Ce n’est certainement pas ça la droite ! Ce n’est pas ça ma France ! », a ajouté la candidate LR, alors qu’Eric Zemmour s’est présenté pendant son meeting comme « seul candidat de droite ».

« C’est une honte pour la démocratie et la République d’entendre de tels propos », a abondé le président des députés LR Damien Abad à propos du slogan entendu.

« Quand on veut être président de la République, on doit d’abord la faire respecter par ses propres militants ! », a renchéri le président de la région Paca Renaud Muselier, qui a quitté LR.

De Guadeloupe où elle fait campagne, Marine Le Pen, a elle estimé qu’il y avait « une forme d’outrance qui répond à une forme d’outrance ».

« C’est un propos tout à fait outrancier. C’est regrettable. On a suffisamement de choses à reprocher à Emmanuel Macron pour ne pas tomber dans ce type d’outrance », a-t-elle dit. Elle a aussi jugé « pas raisonnable » de la part de son concurrent d’extrême droite « de continuer à diviser les patriotes », critiquant une « fuite en avant d’Eric Zemmour qui perd de vue l’intérêt général, l’intérêt supérieur du pays ».

Dans la majorité présidentielle, le président du groupe LREM à l’Assemblée nationale Christophe Castaner a qualifié d' »irresponsable » l’attitude du candidat, qui « a laissé faire ». L’ancien ministre a considéré qu’il avait même « fait la démonstration cet après-midi de son empêchement présidentiel ».

Ce n’est pas non plus « la droite républicaine; jamais la droite républicaine ne ferait cela. Par contre l’extrême droite, oui, depuis longtemps », a-t-il ajouté.

L’ancien Premier ministre socialiste Manuel Valls, qui a appelé à voter Emmanuel Macron, s’est inquiété du « niveau des intentions de vote de l’extrême droite », estimant qu' »au Trocadéro un nouveau degré a été franchi » dans « la violence des discours ».

Par Le Point avec AFP

RDC : ce qu’il faut retenir du discours de Félix Tshisekedi sur l’état de la nation

décembre 13, 2021
Le président de la RDC, Félix Tshisekedi, lors de son adresse à la nation, le 13 décembre 2021, à Kinshasa. © Hereward Holland/REUTERS

Élections, sécurité, rôle à l’international… À mi-mandat, le président congolais délivrait son traditionnel discours sur l’état de la nation devant le Congrès, ce lundi 13 décembre. L’occasion pour Tshisekedi, qui est déjà candidat à sa réélection, de défendre son bilan.

Changement d’année, changement d’ambiance. En 2020, lorsque Félix Tshisekedi s’était présenté devant le Congrès, c’était un bilan empreint d’échec et de colère qu’il avait dressé. Le président venait de sonner la rupture avec son encombrant alliéJoseph Kabila. Et avait rendu le Front commun pour le Congo (FCC) responsable de l’immobilisme de l’État.

Un an plus tard, le voici devant deux chambres acquises à sa cause. Au Sénat, comme à l’Assemblée nationale, les majorités ont été renversées et sont maintenant largement constituées d’élus fidèles à l’Union sacrée. Ils n’ont pas manqué de le faire entendre, par des acclamations parfois dissipées et bruyantes durant le discours du chef de l’État, ce lundi 13 décembre.

1h15 de monologue pour un long satisfecit, et quelques attaques à l’attention de ses adversaires. À mi-mandat, et alors qu’il ne cache pas sa volonté d’être réélu en 2023, Félix Tshisekedi est revenu sur tous les sujets majeurs de l’année écoulée.

Des élections « dans les délais »

La préparation des prochaines élections, d’abord. Alors que le pays sort d’une séquence longue et tendue entre le pouvoir d’une part et l’opposition et les religieux de l’autre autour de la désignation de Denis Kadima comme président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), Félix Tshisekedi s’est félicité de l’avancée du processus. Il a pressé ceux qui n’ont pas encore nommé leurs représentants au sein de la Ceni de le faire au plus vite. Un appel appuyé à ses adversaires du FCC, qui refusent toujours de s’y plier, dénonçant l’absence de « consensus ».

Des blocages qui ne semblent pas ébranler la volonté du président d’éviter tout « glissement » et d’organiser les élections comme prévu en 2023. Encourageant les élus à débloquer des « moyens conséquents » pour faire avancer le processus, il l’a réaffirmé : « mon engagement à faire du Congo un État démocratique ne peut se faire sans l’organisation dans les délais impartis des élections. »

Justice et sécurité comme priorités

La sécurité ensuite : il a longuement défendu le bien-fondé de l’état de siège décrété en Ituri et au Nord-Kivu en mai dernier, et sans cesse reconduit depuis. Malgré les critiques sur son efficacité, il en a souligné les réussites. Les militaires « ont réussi à faire bouger les lignes et à reprendre plusieurs bastions jadis occupés par l’ennemi. Des chefs de bandes ont été neutralisés et plusieurs éléments se sont rendus », a-t-il déclaré, dénonçant « la campagne de dénigrement et de démobilisation menée par une infime minorité » de Congolais.

Il s’est aussi employé à justifier le feu vert donné fin novembre à l’Ouganda pour mener des opérations armées sur le sol congolais. Face aux craintes d’une répétition des exactions passées, le chef de l’État a promis « de veiller à limiter strictement à ces opérations la présence de l’armée ougandaise sur notre sol ».

Félix Tshisekedi est également revenu sur l’un de ses principaux leitmotiv : la lutte contre la corruption. Il a salué les efforts déployés par l’Inspection générale des finances (IGF), « dont le travail était auparavant peu sensible », a-t-il taclé, alors même que Joseph Kabila et ses proches sont depuis plusieurs semaines sous le coup d’accusations de détournement de fonds d’ampleur par l’enquête Congo Hold-up. Il a dans le même temps promis de renforcer la justice, dont le rôle « ne peut être remplacé dans l’assainissement des finances publiques ». Il a annoncé qu’il rendrait « opérationnelle dans les tous prochains jours » la Cour des comptes, qui sera la plus haute instance de contrôle des finances publiques, promettant une justice pour tous, « nantis ou pas, faibles ou puissants ».

« Le vent en poupe »

Souvent critiqué pour ses multiples, longs et coûteux voyages à l’étranger, Félix Tshisekedi s’est aussi employé à défendre son action sur la scène internationale. Alors qu’il s’apprête à passer la charge de président de l’Union africaine à Macky Sall, il a énuméré ses combats internationaux : le lobbying pour que l’Afrique obtienne quatre sièges au sein du Conseil de sécurité des Nations unies ; la défense des intérêts africains dans la lutte contre la pandémie de Covid-19, notamment en demandant que des vaccins soient produits sur le continent ; les engagements écologiques lors du G20 à Rome ou récemment lors de la COP26 de Glasgow ; la médiation dans des conflits africains, tel celui qui oppose l’Égypte, l’Éthiopie et le Soudan autour du grand barrage de la Renaissance

« J’ai fait du retour de la RDC sur la scène internationale l’une de mes priorités, avec un objectif clair : celui de briser son isolement diplomatique, a-t-il déclaré. La réintégration de notre pays dans le concert des nations est ainsi devenue une réalité. La RDC s’est ouverte au monde comme un lotus et elle a aujourd’hui le vent en poupe. » Une ultime attaque à l’égard de son prédécesseur, à laquelle ses adversaires politiques n’ont pas encore répondu.

Avec Jeune Afrique par Anna Sylvestre-Treiner

Francis Akindès : « Il y a une ambiguïté dans le discours de Laurent Gbagbo »

octobre 23, 2021
Laurent Gbagbo, lors du lancement de son nouveau parti, le PPA-CI, à Abidjan, le 17 octobre 2021. © SIA KAMBOU/AFP

L’ACTU VUE PAR… Chaque samedi « Jeune Afrique » invite une personnalité à décrypter un sujet d’actualité. Le chercheur Francis Akindès analyse la manière dont le retour sur le devant de la scène politique de l’ancien président ivoirien rebat les cartes.

L’élection de Laurent Gbagbo à la tête de sa nouvelle formation politique, le Parti des peuples africains – Côte d’Ivoire (PPA-CI), et les prises de parole de l’ancien président ivoirien, en tribune ou dans la presse, marquent le retour sur le devant de la scène d’un animal politique. Quatre mois après son retour à Abidjan, suite à son acquittement par la Cour pénale internationale (CPI) au terme d’une décennie de procédure, l’ancien président ivoirien laisse planer le doute sur ses intentions de se lancer dans la course à la présidentielle, quitte à considérer que l’éventuelle instauration d’une limite d’âge pour les candidats ne le concerne pas.P

De ses demandes portant sur le retour des exilés à ses positions vis-à-vis d’Alassane Ouattara et d’Henri Konan Bédié, en passant par les conséquences politiques de la rupture de ses relations avec l’ancienne première dame Simone Gbagbo et l’épée de Damoclès que constitue sa condamnation à 20 ans de prison dans l’affaire du « casse de la BCEAO », Francis Akindès, sociologue et enseignant à l’Université de Bouaké, décrypte les conséquences du retour de l’ancien président, bien décidé selon lui à prendre « une revanche personnelle ».

Francis Akindes.
Francis Akindes. © DR

Jeune Afrique : Que vous inspire le retour en politique de l’ancien président ivoirien, quatre mois après être rentré à Abidjan et après dix ans d’absence ?

Francis Akindès : Cela correspond à deux choses. D’abord, Laurent Gbagbo montre son intérêt pour le champ politique dont il a été l’un des principaux animateurs pendant plusieurs décennies. Par son absence, pour les raisons que l’on connaît, un vide s’est créé. Il a manqué à l’opposition, dont il est resté une figure tutélaire. Il revient donc prendre la place qu’il considère être la sienne.

La deuxième chose est qu’il a une revanche personnelle à prendre. Primo, par rapport à son extraction brutale de l’arène politique en 2010 ; secondo, vis-à-vis de son ancien colistier, Pascal Affi N’Guessan, qui a repris les rênes du Front populaire ivoirien (FPI). Comme il l’a dit lui-même, il lui laisse « l’enveloppe » FPI… Et tertio, à l’ancienne première dame Simone Gbagbo, il entend montrer que c’est lui, le chef.

Simone Gbagbo, qui n’a pas été associée à la création de ce nouveau parti, a depuis lancé son propre mouvement. Quelle conséquence, pour Laurent Gbagbo ? 

Ce que Laurent Gbagbo aura d’abord à gérer, c’est le morcellement notable du mouvement qui l’a accompagné jusque-là. Le PPA n’hérite pas de toutes les composantes du FPI historique, car Affi N’Guessan va en prendre une partie. Et Simone Gbagbo également, car une frange de l’électorat lui est favorable et lui restera fidèle.

Le nouveau parti de Laurent Gbagbo part avec des boulets au pied, puisqu’il ne profite pas de la mécanique et du système du FPI, constitué initialement par ces trois protagonistes. Cela a un coût politique que Laurent Gbagbo devra gérer.

Lors de ce congrès, le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI, d’Henri Konan Bédié) et le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP, d’Alassane Ouattara) étaient représentés. Faut-il y voir une étape importante dans le processus de réconciliation ou une entente de façade ?

On peut lire la chose de deux manières. La première est que chacun des partis politiques fait l’effort, et montre des signes en faveur de ce processus de réconciliation. Mais en même temps, ils ne perdent pas le nord. Chacun a son agenda politique et son couteau dans le dos… Le moment venu, malgré le fait que l’on se réunisse dans le même lieu, le temps d’un week-end pour se congratuler, les dissensions et les oppositions vont renaître et le combat continuer.

LE RENOUVELLEMENT DES GÉNÉRATIONS EST UNE PROBLÉMATIQUE MAJEURE AU SEIN DE LA CLASSE POLITIQUE IVOIRIENNE QUI PEINE À FAIRE PLACE AUX PLUS JEUNES

Laurent Gbagbo a de nouveau réclamé le retour des exilés et la libération des « prisonniers politiques ». Il a également affirmé que rien, pas même une limitation de l’âge à 75 ans pour être candidat à la présidentielle, ne l’empêcherait de concourir s’il le souhaitait… Ce positionnement ne risque-t-il pas de fragiliser les signes d’un apaisement avec Alassane Ouattara, observés depuis le retour de l’ancien président ?

La question du retour des exilés et celle de la libération des prisonniers ont été mises sur la table dès la rencontre entre Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo, le 26 juillet. Il n’y a rien de nouveau.

Celle sur la la limitation de l’âge des candidats à la présidentielle, probablement à 75 ans, cela avait été annoncé par le président Ouattara juste après sa réélection. Si cette hypothèse de limite d’âge était entérinée, cela signifierait que les trois leaders, Gbagbo, Bédié et Ouattara sortent de la course politique. Et l’on assistera, de fait, au renouvellement des générations politiques tant attendu par les Ivoiriens, fatigués de voir les mêmes visages de « frères » ennemis politiques depuis plus de trente ans.

Déjà, Alassane Ouattara envoie des signaux en faveur du renouvellement, en promouvant des jeunes dans les différents appareils politiques et administratifs et en rajeunissant son gouvernement. Il avait lui-même fait la promesse de ne pas se représenter, échaudé qu’il fut par cette affaire de troisième mandat – qu’il dit avoir assumé malgré lui – et que ses partisans qualifient plutôt de « premier mandat de la troisième République ». La nuance est importante.

Du côté du PDCI et du FPI, ce renouvellement a beaucoup plus de mal à s’opérer. C’est une problématique majeure au sein de la classe politique ivoirienne. Tous partis politiques confondus, celle-ci laisse le sentiment d’éprouver des difficultés à faire de la place aux plus jeunes, surtout à la porte du pouvoir exécutif. Gbagbo s’est dit prêt à passer le flambeau à une autre génération tout en affirmant qu’il fera de la politique jusqu’à sa mort. Quel paradoxe ! Surtout que l’ancien président n’a pas habitué ses militants à faire de la politique en deuxième ligne. C’est une véritable ambiguïté dans son discours, de nature à poser quelques problèmes.

IL VA FALLOIR QUE LE PPA-CI NOUS EXPLIQUE CE QU’IL MET DANS LE MOT SOCIALISME

Comment qualifieriez-vous la nature des relations entre Laurent Gbagbo et Henri Konan Bédié ?

Ils tentaient déjà, alors que l’ex-président était en prison, un rapprochement. Mais il ne faut pas qu’ils fassent de la politique sur des malentendus. Je ne vois pas comment des activités politiques peuvent être menées dans le cadre d’une promesse d’alliance aussi floue. Ils se voient, mettent en scène leurs rencontres. Mais, pour l’instant, il n’y a rien de concret. Rien n’est politiquement lisible.

Et dans l’histoire politique récente de ce pays, on nous a habitués aux alliances qui se font et se défont au gré des intérêts du court terme.

Laurent Gbagbo a une épée de Damoclès au-dessus de la tête : sa condamnation à 20 ans de prison dans l’affaire dite du « braquage de la BECEAO ». Il n’a, pour le moment pas bénéficié d’une amnistie, pourtant souvent évoquée. Cela vous étonne-t-il ?

Selon le pouvoir, la justice a tranché. Et elle a la possibilité d’exhumer cette décision pour bloquer toutes avancées de Laurent Gbagbo en cas de débordements. Tous les analystes de la scène politique ivoirienne le savent. Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara, sur cette question, se regardent en chiens de faïence, en attendant qui dégainera le premier. La question des usages politiques possibles de cette décision de justice est un non-dit dans leur relation.

Le PPA-CI insiste sur sa dimension panafricaniste. Est-ce un positionnement qui relève de la stratégie politique en opposition au libéralisme du gouvernement ou d’une réelle conviction pour Laurent Gbagbo ?

Je n’ai pas compris l’alignement de ces trois mots au PPA : socialisme, panafricanisme et souverainisme. D’abord, que veut dire être socialiste aujourd’hui dans un monde où cette idéologie, intrinsèquement en perte de vitesse quasiment partout dans le monde, ne permet plus de penser et d’organiser l’action politique ? Les mots, en politique, ont une importance. Il va bien falloir que le PPA-CI nous explique ce qu’il met dans son socialisme, alors que les politiques économiques en Côte d’Ivoire, même du temps de la gouvernance de Laurent Gbagbo, entre 2000 et 2010, ont toujours été d’inspiration néolibérale.

Idem pour le panafricanisme et le souverainisme. Quel lien le PPA fait-il entre panafricanisme et souverainisme ? Ce sont des mots qui ont vraiment besoin d’être clarifiés, car on a l’impression d’avancer dans un clair-obscur. Et puis, que veulent dire ces termes dans le contexte politique ivoirien actuel ? On aimerait bien le savoir.

Avec Jeune Afrique par Florence Richard – à Abidjan

Congo: Discours du président Sassou Nguesso à l’occasion du 61e anniversaire de l’indépendance

août 14, 2021

Avec Agences

RDC/Discours sur l’état de la nation : Félix Tshisekedi évalue son action en 2020

décembre 14, 2020

Le deuxième discours sur l’état de la nation du chef de l’Etat, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, devant le Parlement réuni en congrès, le 14 décembre, était une occasion pour lui de partager avec ses compatriotes sa détermination à poursuivre les réformes nécessaires engagées dans tous les secteurs de la vie nationale aux fins d’améliorer le vécu quotidien de la population suivant le leitmotiv « Le peuple d’abord ».

L’occasion était donnée au cinquième président du Congo indépendant de faire le bilan de son action durant l’année 2020 en passe de se terminer. Retraçant les moments-clés ayant ponctué la vie de la nation tout au long de l’année en cours, le chef de l’Etat a, tout en rappelant le contexte ayant prévalu à la mise en œuvre de la coalition FCC-Cach considérée alors comme un cadre politique et institutionnel propice à la matérialisation des réformes à engager, conclu à l’inefficience de ce partenariat politique. « Malgré les efforts que j’ai déployés, les sacrifices que j’ai consentis et les humiliations que j’ai tolérées, cela n’a pas suffi à faire fonctionner harmonieusement cette coalition », a-t-il regretté. Ses espérances de voir cette coalition relever les défis de tous ordres qui s’imposaient au pays ont été vite déçues par la réalité des faits.

FCC-Cach, rupture confirmée

 Face à la situation qui menaçait à la longue le fonctionnement normal des institutions dont il est le garant, il lui fallait agir. Ce qui a été fait en trois temps : Appel au rassemblement dans une Union sacrée de la nation, initiation des larges consultations des forces vives de la nation et publication des décisions prises. La nécessité de rompre avec une coalition FCC-Cach devenue paralysante pour l’action  du gouvernement aura constitué, ainsi qu’il l’a reconnu, l’un des points majeurs de convergence entre la très large majorité des personnes consultées et lui. Et d’égrener les prochaines étapes à franchir : nomination d’un informateur aux fins d’identifier une coalition conformément à l’article 78 de la Constitution – formation d’un gouvernement de l’Union sacrée de la nation censée travailler en harmonie avec le chef de l’Etat et mise en œuvre des réformes issues des consultations.

Faisant un clin d’œil aux députés dont il a loué le sens patriotique élevé tout en les exhortant à implémenter un nouveau mode de gouvernance pour un Congo pacifié, plus démocratique et plus solidaire, le chef de l’Etat a invité le prochain bureau à se pencher sur « la revalorisation de la mission parlementaire tout en veillant à un meilleur traitement des élus du peuple ». Le moment est venu, a-t-il indiqué, faisant sans doute allusion à la perspective du renouvellement du bureau à la chambre basse, « de comprendre qu’il n’y a pas d’alternative à la construction démocratique que dans la paix et la concorde nationale, aussi laborieuse soit-elle ».

Rapatriement des reliques de Patrice Lumumba 

Saluant le processus de maturation de la démocratie en RDC, à ses yeux irréversible, le chef de l’Etat a annoncé le rapatriement en marge de la célébration des soixante et un an d’indépendance en juin 2021 – des reliques de Patrice Emery Lumumba, un des héros nationaux, à qui la patrie compte, enfin, donner une sépulture digne. Abordant le chapitre sécuritaire, le président de la République a déploré la persistance de l‘insécurité dans la partie est du pays perpétrée par des forces négatives en proie actuellement à une traque assidue des Fardc. Plaidant pour le rétablissement de l‘autorité de l’Etat dans ce coin du pays pour lequel il sollicite un soutien populaire, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo s’est voulu rassurant quant à la capacité des forces loyalistes à défendre l‘intégrité du territoire national.

2020 aura aussi été l’année de la formalisation de la reprise de la coopération militaire avec les Etats-Unis, laquelle coopération a été matérialisée par la signature d’un mémorandum d’entente, a indiqué le président de la République. Et d’annoncer, cette fois-ci dans le cadre de la coopération avec la France, la création d’une école de guerre en RDC d’ici l’année prochaine, en vue d’assurer la remise à niveau des officiers militaires dans tous les domaines. Entre-temps, les travaux de construction de l’académie de police  et du ministère de la Défense pourront débuter dès 2021 sur financement de l’Union européenne, a-t-il ajouté.  

Eau et électricité, une priorité

Le chef de l‘Etat a égrené plusieurs autres réformes ayant émaillé son action  en 2020 notamment dans le domaine de la desserte en électricité et en eau potable. Deux usines de production d’eau potable sont actuellement en construction pour résorber le déficit en cette matière dans la ville-province de Kinshasa, a-t-il indiqué. Il s’agit de l’Usine de Lemba-Imbu dont la production finale sera de 220.000 mètres cubes/jour et de Binza Ozone qui produira à terme 300.000 mètres cubes/jour. Concernant le projet Grand Inga, le chef de l’Etat a indiqué que son financement est en passe d’être bouclé avant d’ajouter que l’Autorité de régulation du secteur de l’électricité, l’Agence nationale d’électrification ainsi que le service énergétique en milieu rural et périurbain sont pleinement opérationnels depuis la désignation de leurs animateurs.

Au plan environnemental, Félix Tshisekedi a indiqué avoir instruit la formalisation du premier document de politique forestière devant poser les jalons de la révision du Code forestier. De la riposte à la covid-19 pour laquelle il a exhorté ses compatriotes au respect des règles édictées par les autorités sanitaires à la gratuité de l’enseignement de base qui a vu plus de 4 millions d’enfants intégrer ou réintégrer le système éducatif, en passant par le retour de la RDC dans le concert des nations, Félix-Antoine Tshisekedi aura ressassé, dans un discours minuté, ses principales réalisations en 2020 avec l’espoir d’en faire encore un peu plus l’année prochaine, l’année de sa mandature à la tête de l’Union africaine.  

Avec Adiac-Congo par Alain Diasso

Congo-Brazzaville : pour Denis Sassou Nguesso, « la récession est derrière nous »

décembre 18, 2019

Le président congolais, Denis Sassou-Nguesso, en 2012.

Le président congolais, Denis Sassou-Nguesso, en 2012. © Maxim Shipenkov/AP/SIPA

 

Dans son discours sur l’état de la nation, le 17 décembre, le président congolais s’est voulu optimiste sur la sortie de crise économique et financière. Tout en appelant, une fois de plus, à « traquer la corruption et les antivaleurs ».

« Il ne s’agit pas de se donner beaucoup de mal pour se dire beaucoup de bien », a prévenu le chef de l’État congolais Denis Sassou Nguesso en ouverture de son traditionnel discours de fin d’année devant le Parlement réuni en congrès à Brazzaville. Pendant plus d’une heure, mardi 17 décembre au matin, DSN s’est donc employé à discerner les motifs de satisfaction des sujets de mécontentement.

Au chapitre des soulagements : le léger rebond du taux de croissance en 2019 – significatif selon lui du fait que « la récession est derrière nous » – et surtout la conclusion en juillet dernier d’une facilité élargie de crédit avec le Fonds monétaire international (FMI), génératrice d’aides corrélatives. Même si le FMI, qui estime que la partie congolaise n’a pas suffisamment avancé dans le rééchelonnement de sa dette envers les traders pétroliers, a décidé il y a une semaine de reporter le versement, prévu en janvier, de la deuxième tranche de son prêt sur trois ans, le président se dit déterminé « à tout mettre en œuvre pour tenir les conditionnalités contenues dans ce programme ».

Quasi lyrique sur ce point, DSN a adressé au président chinois Xi Jinping « le témoignage de notre profonde gratitude » pour son aide à la restructuration de la dette bilatérale, ses « remerciements les plus sincères » au Français Emmanuel Macron pour avoir « tenu son engagement de soutenir le Congo en termes d’appui budgétaire » et ses « sentiments les plus gratifiants » envers la Banque africaine de développement (BAD) qui, le 14 décembre, a accordé au Congo un prêt de 183 millions d’euros.

Lutte contre la corruption

Surfant sur cette vague volontariste, le président congolais a annoncé la reprise de recrutements ciblés dans la fonction publique (éducation et services sociaux), l’ouverture de « centres de rééducation et de réinsertion » pour les bandes de jeunes délinquants « Bébés noirs », « Kulunas » et autres « Arabes » qui sévissent dans les quartiers de Brazzaville, ainsi que la poursuite de grands projets structurants comme l’oléoduc Pointe Noire – Brazzaville – Ouesso, la zone économique spéciale de Pointe Noire, le barrage de Sounda et le pont route-rail au-dessus du fleuve Congo.

Très attendu par l’opinion publique mais aussi par le FMI dans le domaine de la lutte contre la corruption, DSN a fustigé la tendance, courante chez les ministres, préfets et autres hauts responsables, à « couvrir » les actes délictueux de leurs affidés : « Assumer des fonctions appelle des décisions disciplinaires à prendre et à faire appliquer. Ceux qui veulent diriger en restant innocents n’ont pas leur place là où ils se trouvent. Quand on veut toujours se faire applaudir, il faut aller ailleurs ».

Denis Sassou Nguesso s’est également emporté contre les actes de « sabotage » et de « vandalisme » dont sont victimes, à travers le pays, des biens collectifs tels les forages d’eau, les panneaux solaires, les lampadaires et même l’université en construction de Kintélé, avant de fustiger l’habitat anarchique synonyme à ses yeux d’ « inconscience » et d’ « irresponsabilité ». « Fort bien. Mais nous attendons que l’on passe des paroles aux actes », a commenté le chef de file de l’opposition, Pascal Tsatsy Mabiala.

Liberté d’expression

Tout en s’affirmant attaché à la liberté d’expression « garantie par la constitution », DSN a par ailleurs dénoncé « la cabale médiatique d’une rare violence faite de dénigrements et de calomnies » menée selon lui « par certains organes de la presse écrite nationale contre le Président de la République, contre les institutions, contre la famille présidentielle » – accusation visant sans doute plus certains sites internet proches de l’opposition radicale, que les journaux indépendants stricto sensu.

Des hommes politiques sont jugés régulièrement et détenus pour des délits de droit commun, cela ne fait pas d’eux pour autant, des prisonniers politiques ou d’opinion

Même s’il a assuré qu’il « ne fermera jamais la porte au dialogue », Denis Sassou Nguesso n’a guère laissé d’espoir (pour l’instant) à ceux qui réclament la libération des deux anciens candidats à la présidentielle de 2016, Jean-Marie Michel Mokoko et André Okombi Salissa, condamnés à 20 ans de prison pour atteinte à la sûreté de l’État. Sans les citer nommément, DSN a estimé que lorsque « des hommes politiques sont jugés régulièrement et détenus pour des délits de droit commun, cela ne fait pas d’eux pour autant, des prisonniers politiques ou d’opinion. Ne faisons pas d’amalgame inutile ».

À cet égard, la petite phrase du Ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, affirmant en septembre dernier qu’il avait demandé « avec fermeté » au président congolais « des actes » en faveur de ces détenus, semble avoir eu l’effet inverse. Soucieux néanmoins de ne pas fermer complètement la porte à une éventuelle libération anticipée, DSN a appelé ces « hommes politiques » au « repentir » et à « l’humilité ».

Par Jeuneafrqiue.com

France: Macron rend hommage à Chirac, «homme d’État que nous aimions autant qu’il nous aimait»

septembre 26, 2019

FILE PHOTO: French President Emmanuel Macron delivers a speech at the Elysee Palace in Paris

Une prise de parole historique où chaque détail compte. En témoigne le seul objet décorant le bureau: un portrait du Général de Gaulle, offert par Jacques Chirac.

Le président de la République, Emmanuel Macron, s’est exprimé ce jeudi soir à 20 heures, pour rendre hommage à son lointain prédécesseur. L’allocution du chef de l’État, qui a duré une dizaine de minutes, a été diffusée à la radio et sur toutes les chaînes de télévision après avoir été enregistrée un peu plus tôt à l’Élysée.Revenant sur les «plus de quarante années de vie politique» qui en ont fait «un visage familier», Emmanuel Macron a affirmé que «nous nous reconnaissions tous en cet homme qui nous ressemblait et nous rassemblait». Et ce que l’on «partage ou non ses idées». Louant un homme qui n’a «jamais oublié ses racines», il a ensuite salué le «chef qui sut représenter la Nation dans sa diversité et sa complexité», et qui «incarna une certaine idée de la France». «Une France dont il a constamment veillé à l’unité, à la cohésion, et qu’il a protégée courageusement contre les extrêmes et la haine», a-t-il poursuivi. Manière de rappeler leur combat commun contre le Front national, qu’ils ont tous les deux affronté au second tour de la présidentielle.

Le locataire de l’Élysée a enfin insisté sur plusieurs engagements de Jacques Chirac qui trouvent une résonance particulièrement actuelle. Sa vision de l’Europe, d’abord, son attachement à l’amitié franco-allemande, ensuite, mais surtout son action pour le climat, dont il s’est saisi très «tôt car (il) était habité par la conscience du temps long». «“Notre maison brûle”: ce cri d’alerte qu’il poussa pour inviter les dirigeants du monde à agir pour la protection de l’environnement et contre le réchauffement climatique, ne fut pas seulement celui d’un chef d’État se hissant à la hauteur de l’Histoire. Mais celui d’un homme parmi les hommes, refusant de tout son être que soit menacée la pérennité de notre planète», a-t-il analysé. «Notre pays est fait de ces transmissions qui portent leur mystère et nous dépassent», a finalement glissé Emmanuel Macron, après avoir brièvement commenté la relation qu’entretenait Jacques Chirac avec chacun de ses prédécesseurs, à savoir le Général de Gaulle et Georges Pompidou, ainsi que Valéry Giscard d’Estaing puis François Mitterrand. «Je veux en votre nom dire à Madame Chirac, notre amitié et notre respect, dire nos condoléances à sa fille, son petit-fils et sa famille et à tous ses amis et ses proches. Ils ont accompagné tant de ses combats et l’ont tant protégé. (…) Il entre dans l’Histoire et manquera à chacun d’entre nous désormais», a-t-il conclu.

  • Alors que ses détracteurs lui instruisent régulièrement un procès en arrogance, Emmanuel Macron a conclu son allocution par un éloge de la personnalité du Corrézien. «Lui qui attirait la sympathie de l’agriculteur et du capitaine d’industrie, lui qui prenait le temps d’échanger longuement avec l’ouvrier d’usine comme avec les plus grands artistes, aimait profondément les gens, dans toute la diversité de leurs convictions, de leurs professions, de leurs conditions. Il aimait les Français pour les saluer, leur parler, leur sourire… les embrasser. Les plus humbles, les plus fragiles, les plus faibles furent sa grande cause. (…) Pour Jacques Chirac, nulle hiérarchie entre les parcours, entre les histoires. Simplement des femmes et des hommes, des vies qui toutes méritent une égale attention, une égale affection», a-t-il énuméré.
  • De même, Emmanuel Macron a souligné que Jacques Chirac incarnait à ses yeux «une France qui regarde son histoire en face», puisqu’il «sut (en) reconnaître les responsabilités dans les heures les plus sombres de la Seconde Guerre mondiale». Il a ensuite applaudi ses principaux faits d’armes sur la scène internationale et diplomatique. À commencer par son refus, en 2003, de s’engager au côté des États-Unis dans «l’invasion de l’Irak sans mandat des Nations unies», faisant ainsi de la France une Nation «indépendante et fière, capable de s’élever contre une intervention militaire injustifiée». «Le président Chirac incarna une certaine idée du monde» et «une France qui assume son rôle historique de conscience universelle», a-t-il ajouté.
  • «C’est avec beaucoup de tristesse et d’émotion que je m’adresse à vous ce soir. Le président Jacques Chirac nous a quittés ce matin. Nous, Français, perdons un homme d’État que nous aimions autant qu’il nous aimait», a-t-il entamé, avec un ton particulièrement grave.
  • Le président s’est exprimé ce jeudi soir, lors d’une allocution enregistrée à l’Élysée et diffusée à 20 heures. «Nous, Français, perdons un homme d’État que nous aimions autant qu’il nous aimait», a-t-il regretté.
  • Emmanuel Macron à l’Élysée, le 26 septembre 2019. Capture d’écran France 2

Le Figaro.fr par Arthur Berdah

 

France/Immigration: comment Macron a durci son discours

septembre 17, 2019

FILE PHOTO: French President Emmanuel Macron delivers a speech at the Elysee Palace in Paris

POOL New/REUTERS

– La position de fermeté adoptée par le chef de l’État contraste avec la bienveillance affichée sur le sujet pendant la campagne présidentielle.

S’agit-il vraiment de la même personne? Alors qu’Emmanuel Macron a lancé lundi soir un appel à la fermeté sur l’immigration, une plongée rapide dans les archives permet de constater le changement de ton du chef de l’État sur cette question sensible. Pour en saisir l’ampleur, il faut remonter à septembre 2015, lorsqu’Emmanuel Macron, alors ministre de l’Économie de François Hollande, aborde publiquement le sujet pour la première fois. Alors que le flux de migrants entrant sur le sol européen est en sensible augmentation, il déclare à la chaîne israélienne i24 : «Je crois que si cela est fait dans le bon ordre, de manière intelligente, c’est une opportunité pour nous. (…) C’est d’abord notre dignité mais c’est aussi une opportunité économique, car ce sont ces hommes et des femmes qui ont des qualifications remarquables.»

Pour le candidat Macron, «l’immigration est une chance»

Pour Emmanuel Macron, le contexte politique est évidemment différent d’aujourd’hui: il s’agit alors pour lui de se distinguer de Manuel Valls, autre challenger de François Hollande au sein du gouvernement en vue de la présidentielle de 2017. Le premier ministre multiplie alors les messages de fermeté sur la question migratoire: début 2016, alors que la crise des migrants bat son plein, il s’oppose à Angela Merkel et son accueil inconditionnel des migrants. «Les réfugiés sont une force», réplique Emmanuel Macron en avril 2016, dans un entretien au quotidien belge Le Soir . Puis, en janvier 2017, le candidat enfonce le clou dans une tribune au Monde : «La chancelière Merkel et la société allemande dans son ensemble ont été à la hauteur de nos valeurs communes (…) en accueillant des réfugiés en détresse» , assure-t-il, dénonçant l’«abjecte simplification» de ceux qui affirment qu’«en ouvrant ses frontières aux migrants, la chancelière aurait exposé l’Europe aux pires dangers».

C’est probablement dans son interview à l’hebdomadaire protestant Réforme , le 2 mars 2017, que le candidat Macron est le plus clair. «Contrairement à ce que certains disent, nous ne sommes pas confrontés à une vague d’immigration. (…) Le sujet de l’immigration ne devrait pas inquiéter la population française. […] L’immigration fait partie du monde dans lequel nous vivons.(…) De surcroît, l’immigration se révèle être une chance d’un point de vue économique, culturel, social», juge-t-il.

Un changement de ton amorcé dès le début du quinquennat

Une position bien éloignée de celle défendue ce lundi soir par le président de la République devant les parlementaires de la majorité. «En prétendant être humaniste, on est parfois trop laxiste», a averti le chef de l’État. «Nous n’avons pas le droit de ne pas regarder le sujet (de l’immigration) en face». «Les bourgeois n’ont pas de problème avec (l’immigration): ils ne la croisent pas. Les classes populaires vivent avec. La gauche n’a pas voulu regarder ce problème pendant des décennies», a-t-il poursuivi. Avec ce virage rhétorique, le président, qui se place déjà dans la perspective de la présidentielle de 2022, espère fracturer un peu plus la droite et endiguer l’essor du Rassemblement national.

Si la volte-face est spectaculaire par rapport à la campagne présidentielle, elle est en réalité l’aboutissement d’un changement de ton amorcé dès les premiers mois du quinquennat. Début 2018, le président défend avec la loi Collomb une refonte de la politique d’immigration. En visite à Calais, en janvier, il prononce un discours de fermeté, chargeant les associations qui «encouragent les migrants à l’installer dans l’illégalité» et les «contrevérités» des «commentateurs». Le même mois, à Rome, il assure que sur la question migratoire, il «faut se garder des faux bons sentiments».

L’année sera ensuite marquée par l’épisode de l’Aquarius, puis par la crise des «gilets jaunes», au cours de laquelle Emmanuel Macron a identifié un besoin de clarification sur le sujet de l’immigration. «Je veux aussi que nous mettions d’accord la Nation avec elle-même sur ce qu’est son identité profonde, que nous abordions la question de l’immigration. Il nous faut l’affronter», avait-il assuré le 10 décembre dans une allocution destinée à présenter le grand débat national. À l’époque, l’idée avait provoqué des crispations à Matignon, et le thème de l’immigration avait supprimé de la consultation. C’était sans compter la volonté du chef de l’État de replacer ce sujet au cœur des débats, à l’occasion, notamment, d’un débat organisé le 30 septembre prochain à l’Assemblée

Par Le Figaro.fr par Jim Jarrassé