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CPI : Dominic Ongwen, l’ex-enfant soldat devenu chef de guerre, condamné à 25 de prison

mai 6, 2021
Dominic Ongwen à la Cour pénale internationale de La Haye le 6 décembre 2016.

La Cour pénale internationale a rendu son verdict, le 6 mai. Reconnu coupable de crimes de guerre et crimes contre l’humanité, l’Ougandais purgera une peine de 25 ans de prison.

Les souvenirs d’Hellen sont encore très précis. C’était le 29 avril 2004. La nuit commençait à tomber lorsque des rebelles ont attaqué. Une trentaine d’éléments de l’Armée de résistance du Seigneur (la LRA de Joseph Kony) ont fait irruption dans le camp d’Odek, dans le nord de l’Ouganda, où vivaient entre 2 000 et 3 000 personnes déplacées. Certains des assaillants avaient moins de 15 ans.

Dès qu’elle a entendu les premiers coups de feu, Hellen Adong s’est réfugiée dans sa maison avec ses enfants. Mais un soldat de la LRA parvient à enfoncer la porte et la force à quitter le camp. Enlevée pendant 24 heures, elle finira par rentrer chez elle. L’un de ses enfants, un nouveau-né trop éprouvé par l’absence, mourra quelques jours plus tard.

Au total, dix civils seront tués au cours de cette attaque, et une quarantaine enlevés. Certains sous les yeux d’Hellen Adong, qui fait partie des quelque 130 personnes qui ont témoigné au procès de Dominic Ongwen devant la Cour pénale internationale (CPI). Celui-ci s’était ouvert le 6 décembre 2016 à La Haye.

Commandant du groupe rebelle

Les hommes qui ont attaqué le camp d’Odek, ont établi les juges de la CPI, agissaient sous les ordres de Dominic Ongwen, alors âgé de 29 ans. C’est lui qui a organisé l’assaut, ordonnant à enlèvements et pillages. Selon la Cour, il obéissait lui-même aux ordres de Joseph Kony, qui estimait que les habitants d’Odek devaient être punis « pour leur manque de soutien de la LRA ».

L’Ougandais purgera une peine de 25 années de prison pour cette attaque et celles d’autres camps de réfugiés. Le 4 février dernier, la chambre de première instance de la Cour l’avait reconnu coupable de 61 crimes au total pour des faits commis entre le 1er juillet 2002 et le 31 décembre 2005, alors qu’il était le commandant de la brigade Sinia de la LRA. Il a notamment été reconnu coupable de crimes sexuels et du crime de grossesse forcée, une première dans l’histoire de la CPI.

Le procès aura aussi permis de démontrer que Dominic Ongwen a recruté et utilisé des enfants soldats. Lui-même avait été kidnappé par la LRA sur le chemin de l’école alors qu’il n’était qu’un enfant. Sa mère aurait été tuée au cours de son enlèvement. Ongwen s’était finalement enfui du groupe rebelle en 2014, avant de se rendre aux membres de la Seleka, en Centrafrique, qui l’avait elle-même remis aux Américains. Il avait ensuite été transféré à La Haye en janvier 2015.

Victime et bourreau

La défense de ses avocats a précisément reposé sur l’histoire si particulière de l’accusé, à la fois victime de la LRA et responsable de crimes commis par la LRA. « La condamnation qui sera prononcée fera jurisprudence dans la manière dont la justice sera rendue pour les anciens enfants soldats », affirmait à Jeune Afrique l’un de ses conseils, Charles Taku, à quelques jours du verdict.

Le chef de guerre Joseph Kony, le 31 juillet 2006.

« Dominic Ongwen a souffert pendant des années de l’emprise de Joseph Kony, avait eu soin d’ajouter l’avocat. Son transfert à La Haye n’est que la continuation de tout ce qu’il a subi. » Pour ses défenseurs, les problèmes de santé mentale dont souffre leur client sont également à prendre en compte. Dominic Ongwen, qui a plusieurs fois menacé de se suicider au cours de son incarcération et qui souffre de stress post-traumatique, demeure très fragile psychologiquement, affirme Charles Taku, qui avait affirmé qu’il n’était pas en état d’assister au procès.

Les juges ont toutefois décidé que l’enfance de Dominic Ongwen ne l’exonérait pas de sa culpabilité, tout en reconnaissant qu’il avait «  beaucoup souffert ». « Nous ne nions pas que Dominic Ongwen a été victime d’un enlèvement lui-même, avait déclaré le premier substitut de la procureure, Benjamin Gumpert. Mais il ne peut être exonéré de ses crimes pour autant. » Le substitut avait alors dressé un parallèle avec les victimes de crimes sexuels qui se rendaient coupables, par la suite, de crimes similaires.

Dans une déclaration adressée à la Cour, l’accusé avait nié les crimes dont on l’accusait. « Je ne peux pas demander pardon à quiconque dans le nord de l’Ouganda alors que d’autres que moi étaient corrompus et encourageaient [cette guerre] », avait-il lancé.

Pouvoirs surnaturels

Autant d’arguments rejetés par les victimes. « Dans son jugement, la chambre indique clairement que Dominic Ongwen était capable de savoir ce qu’il faisait et l’implication de ses ordres », rappelle Paolina Massidda, qui représente plus de 1 500 victimes. Elle insiste sur la « cruauté » dont Dominic Ongwen a fait preuve : « Bien sûr, les traumatismes vécus enfant peuvent affecter les personnes adultes, mais chacun peut choisir d’y répondre d’une certaine manière. La gravité des crimes qu’il a commis doit être le seul élément pris en compte par la chambre. »

Pour ses avocats, Dominic Ongwen peut d’autant moins être reconnu coupable des crimes dont on l’accuse qu’il était persuadé, comme nombre de combattants de la LRA, que Joseph Kony disposait de pouvoirs surnaturels. « Il croyait que son chef était un esprit, qu’il pouvait lire les pensées des autres hommes ou entendre certaines conversations. Parfois, on lisait la peur dans ses yeux, j’imagine qu’il se disait alors que son chef était capable d’entendre ce qu’il nous racontait », a relevé l’un des experts chargé de l’analyse psychiatrique de l’accusé au cours du procès.

Charismatique, tout-puissant, Joseph Kony, qui exerçait une réelle emprise sur ses hommes, affirmait être possédé par des esprits supérieurs, lui permettant de prévoir le futur ou de guérir les malades. Selon les Nations unies, la LRA aurait tué plus de 100 000 personnes en Afrique centrale et enlevé plus de 60 000 enfants. Dominic Ongwen est le seul membre du groupe rebelle à avoir été jugé.

Joseph Kony est, quant à lui, considéré comme étant toujours en fuite et il fait l’objet d’un mandat d’arrêt de la CPI. Dans le cas d’Ongwen, la défense a déjà annoncé qu’elle allait faire appel.

Avec Jeune Afrique par Marième Soumaré

CPI : Dominic Ongwen, ex-chef de la LRA, condamné pour crimes de guerre

février 4, 2021
Dominic Ongwen à La Haye (Pays-Bas), le 6 décembre 2016.

La Cour pénale internationale (CPI) a rendu son verdict jeudi sur cet ancien enfant soldat ougandais devenu l’un des chefs de l’Armée de résistance du seigneur (LRA) de Joseph Kony.

« Sa culpabilité a été établie au-delà de tout doute raisonnable », a déclaré le président de la cour Bertram Schmitt, en prononçant le verdict à l’encontre de Dominic Ongwen, 45 ans, qui était visé par 70 chefs d’accusation, parmi lesquels le meurtre, le viol, l’esclavage sexuel et la conscription d’enfants soldats.

Au total, la chambre de première instance IX de la Cour a déclaré l’accusé coupable de 61 crimes commis dans le nord de l’Ouganda entre le 1er juillet 2002 et le 31 décembre 2005.

Lieutenant de Joseph Kony

Surnommé la « fourmi blanche », il était poursuivi pour son implication dans une série de massacres perpétrés dans les années 2000 par l’Armée de résistance du Seigneur (LRA), alors dirigée par Joseph Kony.

Depuis sa création, la LRA aurait tué plus de 100 000 personnes en Afrique centrale et enlevé plus de 60 000 enfants selon l’ONU. Dominic Ongwen est le premier chef de ce groupe rebelle a être jugé devant la Cour de La Haye.

L’accusé a nié « au nom de Dieu » les accusations portées contre lui, et ses avocats avaient plaidé l’acquittement, soulignant qu’il a lui-même été victime de la brutalité du groupe rebelle, dès son plus jeune âge.

Victime ou bourreau ?

Le procès en cours depuis cinq ans à la Cour pénale internationale est unique, car c’est la première fois que comparaît une personne à la fois victime et auteur présumé de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, Dominic Ongwen ayant été enlevé enfant par la LRA alors qu’il se rendait à l’école.

« La chambre est consciente qu’il a beaucoup souffert », a déclaré le juge Schmitt. « Cependant, il s’agit dans cette affaire de crimes commis par Dominic Ongwen en tant qu’adulte responsable et commandant de l’Armée de résistance du Seigneur. »

La peine imposée par la Chambre n’a pas encore été définie. L’accusé dispose de la possibilité de faire appel de ce jugement sous trente jours.

Par Jeune Afrique avec AFP

Ongwen, un chef de la rébellion ougandaise (LRA), en route vers La Haye

janvier 20, 2015

La Haye – Dominic Ongwen, l’un des principaux chefs de la sanguinaire rébellion ougandaise de la LRA qui s’est rendu début janvier, est en route vers le centre de détention de la Cour pénale internationale (CPI) à La Haye, a-t-on appris mardi auprès de la Cour.

L’avion transportant Dominic Ongwen a décollé vers 17H00 GMT et devrait arriver demain dans la matinée, a déclaré à l’AFP le porte-parole de la Cour, Fadi El Abdallah.

Dans un communiqué, la Cour a précisé que Dominic Ongwen était accompagné par une délégation de la CPI, rappelant qu’il avait été remis samedi à la garde de la Cour.

Dominic Ongwen s’était rendu début janvier en Centrafrique, portant un coup sévère à l’Armée de résistance du Seigneur commandée par Joseph Kony qui a semé la terreur pendant une trentaine d’années dans plusieurs pays d’Afrique centrale.

Il était recherché depuis près de dix ans par la CPI pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre. Les Etats-Unis offraient cinq millions de dollars pour sa capture.

À son arrivée, M. Ongwen recevra une visite médicale et comparaîtra, le plus tôt possible, devant les juges en présence d’un avocat de la défense, a précisé la CPI, soulignant que la date de l’audience n’avait pas encore été fixée.

Cette audience est destinée à confirmer son identité, vérifier la langue utilisée pour les procédures et à informer le suspect des charges retenues à son encontre.

Les juges doivent également fixer la date de l’audience de confirmation des charges, étape préalable à l’ouverture d’un éventuel procès.

Le Sénégalais Sidiki Kaba, président de l’assemblée des Etats parties au Statut de Rome, le traité fondateur de la CPI, a affirmé que ce transfert était un succès important.

Les communautés affectées auront désormais l’opportunité de voir la justice internationale aborder l’horrible violence ayant eu lieu en Ouganda, a-t-il ajouté, cité dans le communiqué..

Créée aux alentours de 1987, la LRA opérait alors dans le nord de l’Ouganda, où elle a multiplié les exactions – enlèvements d’enfants transformés en soldats et en esclaves, mutilations et massacres de civils. Elle en a été chassée au milieu des années 2000 par l’armée ougandaise, avant de s’éparpiller dans les forêts équatoriales des pays alentour, dont la Centrafrique.

Dominic Ongwen est lui-même un ancien enfant soldat.

Le mandat d’arrêt de la CPI, délivré en 2005, énumère sept chefs d’accusation.

M. Ongwen se serait ainsi rendu coupable de trois chefs de crimes contre l’humanité : le meurtre, la réduction en esclavage et des actes inhumains causant de grandes souffrances.

Il est également soupçonné de quatre chefs de crimes de guerre, dont des meurtres, des traitements cruels, le fait de diriger intentionnellement une attaque contre une population civile et des pillages.

Selon l’ONU, la rébellion a, depuis sa création, tué plus de 100.000 personnes en Afrique centrale et enlevé plus de 60.000 enfants.

Joseph Kony reste le dernier dirigeant de la milice toujours en liberté, selon l’armée ougandaise. La LRA ne compterait plus que 150 hommes environ.

Romandie.com avec(©AFP / 20 janvier 2015 19h54)