À la fin du huitième congrès du Parti communiste cubain (PCC), lundi prochain, et pour la première fois depuis 1959, Cuba n’aura plus à sa tête un Castro.
© /Radio-Canada La génération historique des Castro passe le flambeau. Le secrétaire général du parti, Miguel Diaz Canel, sera le président.
La «génération historique» passe ainsi le flambeau. Le président Miguel Diaz Canel succédera à Raul Castro à titre de secrétaire général du parti.
Dans l’ombre du grand frère
Fidel Castro aura régné sans partage sur l’île communiste à compter de la révolution de 1959. Il avait cependant confié à son frère Raul la direction de l’armée, un poste clé.
Lorsqu’il tombe malade, en 2006, Fidel se retire peu à peu et cède le pouvoir à Raul, même s’il reste très présent dans les grandes affaires d’État jusqu’à sa mort, en 2016, à l’âge de 90 ans.
Raul Castro devient officiellement président en 2008 tout en étant secrétaire général du Parti communiste cubain, où réside le vrai pouvoir. Même après son arrivée officielle à la tête de l’État, il est toujours resté dans l’ombre de Fidel.
Raul Castro a été au centre du développement du tourisme à Cuba, un de ses rares succès économiques.
© /Radio-Canada Fidel et Raoul Castro chantant l’Internationale socialiste.
Il cède la présidence à Miguel Diaz Canel au septième congrès du PCC en 2016, mais demeure secrétaire général.
Miguel Diaz Canel cumulera à son tour les deux postes lors de la dernière journée du congrès, lundi. Pour la première fois, Cuba sera gouverné par un civil, et les derniers membres de la génération historique du parti feront également leurs adieux.
Une situation économique catastrophique
Les Cubains ont l’impression de revivre les années noires de la «période spéciale en temps de paix» des années 1990, après la chute de l’Empire soviétique et la fin de l’aide de l’URSS.
Pénuries et files d’attente sont de nouveau à l’ordre du jour. Cette fois-ci, c’est l’aide – et surtout le pétrole – du Venezuela, pays en faillite, qui n’arrive plus. La COVID-19 a forcé la fermeture de l’île et les devises des touristes se sont taries.
© /Radio-Canada Les plages sont désertées par les touristes à Cuba.
La détente des années de Barack Obama paraît bien loin : Donald Trump a rétabli et même renforcé les sanctions américaines que son prédécesseur avait levées. Ainsi, l’argent que les Cubains de Miami envoyaient à leurs familles sur l’île n’arrive plus.
Et malgré ses promesses, Joe Biden ne semble pas pressé de lever ces sanctions. Ce n’est pas une priorité, a-t-il fait savoir.
Des réformes difficiles
Cuba s’est résigné à lancer des réformes douloureuses et longtemps repoussées, comme l’unification des monnaies. Le CUC (Convertible Unit Currency) n’existe plus, il ne reste que le peso cubain. Au taux officiel, le dollar américain vaut 24 pesos cubains. Sur le marché noir, beaucoup plus.
La baisse du pouvoir d’achat aggrave la situation de pénurie. Le secteur privé a été ouvert à davantage de métiers et devrait déboucher sur la création de petites entreprises et l’accès à des marchés de gros.
© /Radio-Canada Une rue commerçante achalandée avant la pandémie
Petite révolution dans les campagnes : pour la première fois depuis 1963, les fermiers cubains pourront consommer et commercialiser de la viande de bœuf, qui était jusqu’ici monopole d’État, pourvu que les quotas de production soient respectés.
Les vaches étaient sacrées à Cuba et on disait même en plaisantant qu’il était moins grave d’écraser un humain qu’une vache sur les routes.
L’espoir des vaccins
La fermeture de l’île, les contrôles sanitaires stricts et les confinements ont permis à Cuba de limiter les dommages de la COVID-19.
On y recense jusqu’ici 90 000 cas et 491 décès seulement.
© /Radio-Canada Un vaccin contre la COVID-19 fait à Cuba
Cuba est en train de mettre au point ses propres vaccins. Deux d’entre eux, Soberana 2 et Abdala, sont en phase 3 et ont déjà été inoculés à une partie de la population.
Ils seront fin prêts en juin et seront exportés puis offerts aux touristes, ont assuré les autorités.
Et la dissidence?
L’accès à Internet sur téléphone mobile est en train de tout changer à Cuba.
Des artistes ont formé le groupe de San Isidro et ont protesté contre le manque de liberté. Un groupe de rappeurs a composé une chanson intitulée Patria y Vida (la patrie et la vie), qui fait un malheur sur les réseaux sociaux. Elle parodie le slogan révolutionnaire cubain Patria o Muerte (la patrie ou la mort).
Les manifestations sont réprimées, mais de façon plus «légère». Elles sont considérées comme de la subversion, mais elles sont commentées et débattues dans les organes d’État, journaux et chaînes de télévision. Une première.
Jusqu’où ira la tolérance? La question est à l’ordre du jour au congrès du PCC.
Avec Radio-Canada par Jean-Michel Leprince