Près de huit millions de personnes au Soudan du Sud, soit les deux tiers de la population, sont menacées d’insécurité alimentaire et de famine, a averti l’ONU dans un rapport publié jeudi.
« La faim et la malnutrition sont en hausse dans les zones du Soudan du Sud touchées par les inondations, la sécheresse et les conflits, et certaines communautés risquent de connaître la famine si l’aide humanitaire n’est pas maintenue et si les mesures d’adaptation au climat ne sont pas renforcées », indique le rapport.
Selon le rapport, 7,76 millions de personnes risquent une insécurité alimentaire aiguë pendant la période de soudure d’avril à juillet 2023, tandis que 1,4 million d’enfants souffriront de malnutrition.
Le rapport blâme une combinaison de conflits, de mauvaises conditions macroéconomiques, d’événements climatiques extrêmes et une spirale des coûts de la nourriture et du carburant, ainsi qu’une baisse du financement des programmes humanitaires.
« Nous avons été en mode prévention de la famine toute l’année et avons évité les pires résultats, mais cela ne suffit pas », affirme Makena Walker, directrice de pays par intérim du PAM au Soudan du Sud, dans un communiqué.
« Le Soudan du Sud est en première ligne de la crise climatique et, jour après jour, des familles perdent leurs maisons, leur bétail, leurs champs et leur espoir à cause de conditions météorologiques extrêmes », ajoute Mme Walker.
« Sans l’aide alimentaire humanitaire, des millions d’autres se retrouveront dans une situation de plus en plus désastreuse et dans l’incapacité de fournir la nourriture la plus élémentaire à leurs familles ».
« Si nous pouvons réellement parvenir à la paix à travers le pays, y compris dans les zones actuellement en tension, (…) nous serons à mi-chemin pour résoudre les problèmes de sécurité alimentaire, donc la consolidation de la paix est primordiale », a déclaré jeudi la ministre sud-soudanaise de l’Agriculture et de la Sécurité alimentaire, Joséphine Lagu, lors de la présentation du rapport.
La famine a été déclarée au Soudan du Sud en 2017 dans les comtés de Leer et de Mayendit dans l’État d’Unity, des régions qui ont souvent été un point chaud des violences.
Le mois dernier, le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (Ocha) a estimé qu’environ 909.000 personnes avaient été affectées par des inondations au Soudan du Sud, alors que des pluies torrentielles ravagent les cultures et détruisent les maisons.
Plus jeune pays au monde, le Soudan du Sud est aux prises avec des conflits meurtriers, des catastrophes naturelles, un malaise économique et des luttes politiques incessantes depuis qu’il a obtenu son indépendance du Soudan en 2011.
Il a passé plus de la moitié de sa vie en guerre, avec près de 400.000 personnes décédées pendant une guerre civile de cinq ans qui s’est terminée en 2018.
Les coûts opérationnels ont explosé pour le Programme alimentaire mondial. L’organisme avertit qu’il ne pourra pas réussir à nourrir toutes les personnes au bord de la famine, comme en Éthiopie. Photo: AP
La guerre entre l’Ukraine et la Russie – deux pays qui jouent un rôle majeur dans l’exportation de nombreuses céréales et cultures – commence à avoir un impact négatif sur la sécurité alimentaire mondiale. Le Programme alimentaire mondial (PAM), qui achetait 50 % de son blé en Ukraine, a dû commencer à couper les rations offertes aux plus démunis dans d’autres pays.
Le chef du Programme alimentaire mondialPAM, David Beasley, a par ailleurs déclaré mercredi au Conseil de sécurité des Nations unies que l’invasion de l’Ukraine pourrait entraîner la pire crise alimentaire mondiale depuis la Seconde Guerre mondiale.
Julie Marshall, porte-parole canadienne du Programme alimentaire mondialPAM, un organisme associé à l’Organisation des Nations uniesONU, précise qu’avant même la guerre en Ukraine, il y avait environ 44 millions de personnes au bord de la famine dans le monde.
Donc il s’agit déjà d’une période de besoins humanitaires sans précédent. Nous avons plusieurs conflits, les impacts des changements climatiques, la pandémie et la hausse du prix des aliments causée par l’inflation. Tout cela pousse de plus en plus de gens vers la faim. Le conflit en Ukraine va aggraver la situation et toucher les personnes les plus affamées du monde.
Un système d’exportation perturbé
Rappelons d’abord que l’Ukraine et la Russie sont parmi les cinq premiers exportateurs mondiaux de blé et de maïs. Ensemble, les deux pays fournissent 30 % du blé et 20 % du maïs aux marchés mondiaux. Normalement, les producteurs agricoles ukrainiens nourrissent plus de 400 millions de personnes dans le monde.
Mais depuis le début du conflit, des millions de tonnes de grains demeurent stockés dans des silos en Ukraine et en Russie; les combats et les sanctions imposées à la Russie font en sorte que cette nourriture ne peut plus être exportée.Le Programme alimentaire mondialPAM estime que 13,5 millions de tonnes de blé et 16 millions de tonnes de maïs sont retenues en Russie et en Ukraine, soit 23 % et 43 % de leurs exportations prévues en 2021-2022.
De nombreux agriculteurs ukrainiens ne pourront pas planter leurs cultures ce printemps en raison des combats. Ici, un agriculteur ukrainien laboure sa terre à Husakiv dans l’ouest du pays. Photo : AP/Nariman El-Mofty
La guerre a non seulement mis un frein à la majorité des exportations ukrainiennes et russes, mais les combats auront un impact majeur sur la saison des semences en Ukraine, qui doit commencer sous peu. De plus, il faut rappeler que la Russie – sous le coup de sanctions internationales – est le plus gros exportateur mondial d’engrais. Selon M. Beasly, sans engrais, les récoltes ukrainiennes pourraient être réduites de moitié.
Par ailleurs, en ce moment, il est extrêmement difficile d’exporter quoi que ce soit par le biais de la mer Noire, puisque les assureurs exigent désormais des primes de guerre de plusieurs centaines de milliers de dollars pour assurer les navires.
Si la situation n’était pas assez compliquée, le prix des grains, qui était déjà à des niveaux records en raison de l’inflation et des contrecoups de la pandémie, continue de monter en flèche. Et tout cela a un impact direct sur le PAM et les millions de personnes sans nourriture, dit Mme Marshall.
Le PAM évalue maintenant où il trouvera des ressources si le conflit perdure.
« L’effet à long terme [de la guerre en Ukraine] est que nous devrons acheter les récoltes ailleurs. Cela coûtera plus d’argent de les faire venir de plus loin. »— Une citation de Julie Marshall, porte-parole canadienne du PAM
Par exemple, exporter du blé du Canada vers l’autre côté de l’océan serait probablement une option trop coûteuse.
D’ailleurs, le PAM fait désormais face à des coûts supplémentaires de 71 millions de dollars par mois pour ses opérations mondiales par rapport à 2019, soit une augmentation de 50 %.
Quelles régions seront les plus touchées?
Distribution de pains à Kharkiv dans une station de métro en Ukraine. Photo: PAM
Le PAM estime que 45 % des habitants de l’Ukraine craignent de ne pas trouver suffisamment à manger. L’organisme a d’ailleurs déployé suffisamment de vivres pour aider 3 millions de personnes à l’intérieur de l’Ukraine pendant un mois. D’ici le mois de juin, nous pourrons aider jusqu’à 4 millions d’Ukrainiens, précise Mme Marshall.
Au-delà de l’Ukraine, les régions du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord seront particulièrement touchées par cette crise alimentaire, parce que de nombreux pays dépendent fortement de la Russie et de l’Ukraine pour leurs importations de grains. Par exemple, en 2021, 80 % des importations de blé de l’Égypte provenaient de la Russie et de l’Ukraine. La situation est également très fragile au Liban et en Libye, des pays qui dépendent de l’Ukraine pour environ 50 % de leur approvisionnement total en blé.
L’Afghanistan, l’Éthiopie, la Syrie et le Yémen – qui sont déjà aux prises avec des conflits majeurs et un niveau de pauvreté élevé – sont aussi très dépendants des importations de blé.
Au Yémen et en Syrie, plus de 29 millions de personnes ont besoin d’une aide alimentaire et le PAM soutient près de 19 millions de personnes dans ces deux pays. Le PAM ne dispose actuellement que de 24 % du financement nécessaire en Syrie et de 31 % de ce dont il a besoin au Yémen.
Dans les 40 pays où opère le PAM, 30 % de l’énergie alimentaire de la population provient de l’importation de céréales comme le blé et le maïs.
Des Afghans attendent de recevoir des rations alimentaires organisées par le Programme alimentaire mondial à Pul-e-Alam, la capitale de la province de Logar, dans l’est du pays. Environ 9 millions d’Afghans sont au bord de la famine, estime l’ONU. Photo : AP/Zubair Abassi
Puisque les prix des aliments grimpent sans que l’aide financière augmente, le PAM a dû réduire les rations alimentaires dans ces deux pays.
L’indice des prix alimentaires de la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) avait déjà atteint un niveau record en février 2022.
Depuis l’invasion russe, les prix mondiaux du blé ont augmenté d’environ 21 %, l’orge de 33 % et certains engrais jusqu’à 40 %. Le prix de l’huile de cuisson est en hausse de 36 % au Yémen et de 39 % en Syrie. Le prix de la farine de blé est en hausse de 47 % au Liban, de 15 % en Libye et de 14 % en Palestine.
De nouvelles réductions des rations, combinées à une explosion du coût de la vie, risquent de pousser les gens vers la famine et vers la migration, craint Mme Marshall.
Le PAM aidait 13 millions [de personnes au Yémen]. Mais à cause du manque de financement, nous avons dû réduire les rations à 8 millions de personnes. Et ça, c’était avant le début du conflit en Ukraine. Cela signifie donc que les enfants auront droit à moins d’un bol de céréales par jour, dit Mme Marshall, qui ajoute que le PAM devra probablement couper davantage les rations si l’aide financière n’augmente pas.
« Même si les pays ont été plus généreux au cours des dernières années, l’écart entre les besoins et les ressources se creuse de plus en plus. »— Une citation de Julie Marshall, porte-parole du PAM
M. Beasly a par ailleurs déclaré au Conseil de sécurité de l’ONU que si le conflit en Ukraine perdure, le monde paiera un prix élevé. La dernière chose que nous voulons faire au PAM est de prendre de la nourriture à des enfants affamés pour la donner à d’autres enfants affamés.
Les conflits au cœur des famines
Le conflit reste le principal moteur de la faim, affirme Julie Marshall. En fait, 60 % des personnes souffrant de la faim dans le monde vivent dans des régions touchées par la guerre et la violence.
Nous n’allons pas arriver à éradiquer les famines tant que nous n’arrêterons pas les conflits, comme ceux en Ukraine, dans le Soudan du Sud, au Yémen, en Afghanistan. Là où il y a de l’insécurité et des conflits, c’est là où il y a de la faim. Sans guerre, les gens n’auraient pas aussi faim, dit Julie Marshall. Son organisme plaide auprès de pays comme le Canada afin qu’ils utilisent leur influence et leurs ressources pour en finir avec les conflits à travers le monde.
Mme Marshall ajoute qu’il y a suffisamment de nourriture sur la planète pour nourrir tout le monde. Le problème est l’accès et l’argent.
Elle ajoute que si le monde ignore ces crises alimentaires, il verra des migrations de masse dans les prochains mois.
MONTRÉAL — L’impact de la pandémie de coronavirus pourrait être ressenti pendant encore plusieurs années dans les pays défavorisés et possiblement y causer une grave famine, redoute une responsable de l’organisation humanitaire Mission Inclusion.
«Avec la crise de la COVID-19, la crise alimentaire, les changements climatiques, même les conflits armés dans certains pays où on intervient… ce cocktail de crises accentue encore davantage la vulnérabilité des personnes, a résumé Frédérique Thomas, la directrice des programmes de ce qu’on appelait anciennement l’Œuvre Léger.
«Ce qu’on craint, en fait, c’est l’après-crise. Il y a eu des impacts présentement, mais on craint aussi des impacts dans le futur.»
Plusieurs habitants des pays en voie de développement travaillent dans ce que Mme Thomas appelle les «secteurs informels», ce qui veut dire qu’ils dépendent souvent de l’argent qu’ils gagneront cette journée-là pour survivre jusqu’au lendemain.
Mais avec la crise de la COVID-19, plusieurs de ces emplois — qu’il s’agisse par exemple de travailler dans les champs ou de se rendre au marché vendre des marchandises — se sont évaporés.
«Ces personnes font face vraiment à une crise alimentaire, et on prévoit qu’il y en aura une encore plus grande dans le futur parce que dans certains pays, comme au Burkina Faso (en Afrique de l’Ouest) par exemple, la crise est arrivée exactement lors de la préparation des sols pour planter les semences qui vont permettre les récoltes pour l’année prochaine», a-t-elle dit.
Pas de filet social
D’autant plus que les gouvernements des pays en voie de développement «n’ont pas nécessairement (la) capacité financière de sortir de l’argent pour aider toute la population», ajoute-t-elle.
«La crise de la COVID-19 a eu le même impact dans les pays en voie de développement qu’ici au Canada, a dit Mme Thomas. Mais évidemment, ici les gouvernements ont sorti des programmes pour essayer d’atténuer l’impact sur les populations, ce qui n’est pas nécessairement le cas dans tous les pays en voie de développement.»
Il revient donc à des organismes humanitaires et communautaires comme ceux que Mission Inclusion accompagne de prendre le relais et de raccommoder tant bien que mal les mailles d’un filet social qui est souvent criblé de trous.
Mme Thomas cite en exemple des organisations philippines qui ont dû ravitailler la population, après que la promesse du gouvernement de fournir suffisamment de vivres pour deux semaines ne se soit jamais concrétisée.
Freiner le virus
Ces organisations tentent aussi de freiner la propagation du virus dans des pays où on ne peut même pas envisager de respecter la distanciation sociale recommandée par les experts.
«Les organismes que l’on appuie (…) ont mis des programmes en place pour pouvoir faire de la sensibilisation au lavage des mains, la mise en place de kits sanitaires, donc des stations d’eau, du savon, des masques, pour que les gens puissent respecter au moins ce genre de mesures quand on n’est pas capables de respecter la distanciation sociale», a-t-elle expliqué.
Cela étant dit, plusieurs de ces organismes peinent à répondre à une accentuation de la demande à un moment où le coronavirus entrave leurs efforts de financement et où la pandémie les contraint à renvoyer plusieurs travailleurs à la maison pour des raisons de sécurité.
On leur demande en d’autres mots de faire plus, mais avec encore moins de main d’oeuvre et de moyens financiers.
«On pense que la crise va avoir des impacts à plus long terme, après 2020, surtout 2021, 2022 et 2023 où on va sûrement avoir une famine qui va se poindre à l’horizon, a conclu Mme Thomas. Les besoins vont s’exacerber.»
Plus de 11 millions d’enfants ont désespérément besoin d’aide humanitaire au Yémen, pays en guerre et en proie à la famine, a alerté dimanche le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef).
« Aujourd’hui, il est juste de dire que le Yémen est l’un des pires endroits sur terre pour être un enfant », a affirmé Geert Cappelaere, directeur régional de l’Unicef pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord.
« Deux millions d’enfants au Yémen souffrent de malnutrition aiguë (et) presque tous les petits garçons et filles yéménites » ont désespérément d’assistance humanitaire, a-t-il indiqué lors d’une conférence de presse dans la capitale jordanienne Amman.
« Nous estimons que toutes les 10 minutes un enfant meurt au Yémen de maladies pouvant être évitées », a ajouté le représentant onusien.
Depuis l’intervention au Yémen en mars 2015 d’une coalition arabe sous commandement saoudien pour stopper la progression des rebelles Houthis face aux forces gouvernementales, le conflit a fait plus de 8.750 morts et 50.600 blessés, selon les Nations unies.
L’ONU, qui dit craindre « la plus grande famine » de ces dernières décennies au Yémen, a appelé cette coalition à lever rapidement le blocus qu’elle impose à ce pays, faute de quoi « des milliers de victimes innocentes » vont « mourir ».
Samedi, un avion chargé d’aide humanitaire affrété par l’Unicef a atterri à Sanaa, pour la première fois depuis le renforcement début novembre du blocus en réponse à un tir de missile des Houthis intercepté au-dessus de Ryad.
Mais le port de Hodeida (ouest), par où transitent les cargaisons de nourriture et de médicaments, reste fermé, déplorent des responsables de l’ONU.
« La guerre au Yémen est malheureusement une guerre contre les enfants », a indiqué M. Cappelaere, soulignant que près de 5.000 enfants avaient été tués ou gravement blessés depuis mars 2015.
« Des milliers d’écoles et de centres de santé ont été endommagés ou entièrement détruits », a-t-il ajouté.
Plus d’un million d’enfants sont menacés de malnutrition aiguë cette année en Somalie, pays au bord de la famine, et courent des risques très élevés de mourir, a averti mardi le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef).
« La projection du nombre d’enfants qui souffrent ou souffriront de malnutrition aiguë a augmenté de 50% depuis le début de l’année, à 1,4 million », a déclaré une porte-parole de l’Unicef, Marixie Mercado, précisant qu’il s’agissait de projections pour 2017.
Plus de 275.000 d’entre eux « souffrent ou souffriront de malnutrition aiguë sévère en 2017 », a-t-elle précisé lors d’un point de presse.
La malnutrition aiguë sévère est la forme la plus visible et la plus extrême de la dénutrition. Elle est illustrée par « un enfant fragile et squelettique qui a besoin d’un traitement urgent pour survivre », selon l’Unicef.
Les enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère courent des risques neuf fois plus élevés de mourir que les enfants bien nourris.
En 2011, la dernière famine en date en Somalie a tué au moins 260.000 personnes, dont la moitié d’enfants de moins de 5 ans, selon le Programme alimentaire mondial (PAM).
La Corne de l’Afrique est touchée par une grave sécheresse, qui a déplacé plus de 615.000 personnes en Somalie depuis novembre dernier, alors que le pays comptait déjà quelque 1,1 million de déplacés, selon l’ONU.
« La combinaison sécheresse, maladies et déplacements est mortelle pour les enfants, et nous avons besoin de faire beaucoup plus, et plus rapidement, pour sauver des vies », a affirmé le représentant de l’Unicef en Somalie, Steven Lauwerier, cité dans le communiqué.
L’Unicef déplore également que « les femmes et enfants qui se déplacent, bien souvent à pied, vers des lieux où ils espèrent trouver de l’assistance, sont souvent victimes de vol ou pire, tant durant le trajet que dans les camps ».
L’appel de fonds d’urgence de l’ONU de 720 millions de dollars (660 millions d’euros) pour la Somalie est financé à hauteur de 58%, a indiqué mardi un porte-parole du Bureau de coordination des Affaires humanitaires de l’ONU, Jens Laerke.
Le secrétaire général de l’ONU a lancé mardi un cri d’alarme sur la situation au Yémen, appelant la communauté internationale à financer l’aide humanitaire dans ce pays en guerre afin de mettre un terme à la plus grande crise alimentaire au monde.
« La famine peut être évitée si nous agissons rapidement », a déclaré Antonio Guterres, à l’ouverture d’une réunion sur la crise humanitaire au Yémen, organisée au siège de l’ONU de Genève avec le soutien de la Suisse et de la Suède.
« Nous voyons une génération entière qui est affamée. Nous devons agir maintenant, pour sauver des vies », a-t-il ajouté.
L’ONU a réclamé début février 2,1 milliards de dollars (2 milliards d’euros) pour aider cette année 12 millions de personnes affectées par le conflit, mais cet appel de fonds n’est financé qu’à hauteur de 15%, a expliqué le chef de l’ONU.
« Le Yémen est la plus grande crise humanitaire actuellement », a affirmé de son côté le patron des opérations humanitaires de l’ONU, Stephen O’Brien, insistant sur le « risque de famine ».
« Nous pouvons éviter la famine », a-t-il dit, appelant à davantage de générosité des donateurs et à une cessation des hostilités.
Environ 19 millions de personnes au Yémen, soit environ deux tiers de la population, ont un besoin urgent d’aide humanitaire, a souligné Antonio Guterres. Quelque 17 millions souffrent de la faim, ce qui fait de ce pays « la plus grande crise alimentaire au monde », a-t-il noté. Le sort des enfants est des plus sombres: « un enfant de moins de 5 ans meurt au Yémen toutes les 10 minutes de causes évitables », a-t-il déploré.
Le pays est déchiré par un conflit depuis qu’une coalition arabe menée par l’Arabie saoudite a commencé en mars 2015 une campagne de bombardements pour repousser les rebelles houthis, soutenus par l’Iran, qui avaient pris le contrôle de la capitale Sanaa et d’autres parties du pays.
Le Yémen est presque entièrement dépendant des importations, dont une grosse partie arrive par le port de Hodeida. Les Nations unies ont appelé la coalition militaire arabe à ne pas bombarder ce port stratégique contrôlé par les Houthis.
« Si ce port devient inaccessible, fût-ce pour une période limitée, la situation humanitaire continuera de se détériorer, en particulier dans le nord du Yémen », a souligné mardi le ministre des Affaires étrangères suisse, Didier Burkhlater.
En quelques jours, la star du web Jérôme Jarre a levé plus de 2 millions d’euros pour lutter contre la famine en Somalie. Un premier avion rempli de nourriture doit décoller lundi.
Alimentée par plus de 80 000 dons, la cagnotte grossit d’heure en heure. Une semaine après son lancement, elle atteint désormais plus de 2 300 000 euros sur la plateforme GoFundMe. Une coquette somme destinée à affréter des avions chargés de nourriture vers la Somalie, où 6,2 millions de personnes sont menacées par la famine selon l’ONU.
Une crise humanitaire dramatique
À l’origine de cet élan de générosité ? Le YouTubeur français Jérôme Jarre, véritable star sur les réseaux sociaux, qui s’est ému de la situation en Somalie après avoir appris le décès par déshydratation d’une fillette de six ans dans le pays. « L’ONU a déclaré que ce serait la plus grosse crise humanitaire depuis la Seconde Guerre mondiale », déclare-t-il dans une vidéo publiée sur Twitter le 15 mars.
Suivi par plus d’un million de followers sur Twitter, le jeune homme de 26 ans appelle dans la vidéo Turkish Airlines, la seule compagnie qui dessert le pays, à acheminer un avion rempli de nourriture. Le succès est immense. En quelques heures, le tweet est repris des dizaines de milliers de fois. Face à la déferlante, Turkish Airlines répond par l’affirmative à sa requête dès le lendemain. Selon la compagnie aérienne, un avion-cargo doit décoller lundi 27 mars avec à son bord 60 tonnes de nourriture.
Soutien des stars
Mais le YouTubeur n’en reste pas là. Il lance une cagnotte en ligne, dont les fonds sont gérés par l’association de l’acteur américain Ben Stiller. Il met également en ligne une vidéo dans laquelle il appelle les stars à se mobiliser grâce au hashtag #NominatedForSomalia. Un florilège de célébrités répondent présents, notamment l’acteur français Omar Sy.
Mais l’initiative, si elle est louable, ne devrait malheureusement pas suffire à endiguer la catastrophe humanitaire. Sur les 864 millions de dollars jugés nécessaires par l’ONU pour lutter contre la faim en Somalie, seulement un tiers de la somme a été pour le moment collecté.
Mogadiscio – Quelque 110 personnes sont mortes dans le sud de la Somalie jeudi et vendredi des conséquences de la sécheresse, a annoncé le Premier ministre somalien Hassan Ali Khaire.
« Environ 110 personnes sont mortes ces 48 dernières heures à cause de la sécheresse et de diarrhées sévères dues à l’eau dans les régions du sud de la Somalie, en particulier dans les régions de Bay et Bakool », a indiqué M. Khaire dans un communiqué daté de samedi.
« Les Somaliens, où qu’ils soient, doivent sauver leurs frères dans le besoin, qui mourront de faim si on ne les aide pas. La tâche prioritaire du gouvernement sera de venir en aide aux gens qui ont été touchés par la sécheresse, a-t-il ajouté.
Les autorités locales du village d’Awdiinle, dans la région de Bay, ont annoncé qu’au moins 69 personnes, la plupart des enfants et des personnes âgées, étaient décédées de diarrhées causées par l’eau.
« Il n’y a pas de médicaments et la maladie est maintenant devenue une épidémie », a déclaré à l’AFP par téléphone un responsable local de ce village, situé à 30 km de la capitale régionale Baidoa.
« C’est à cause de la sécheresse qui a provoqué une pénurie généralisée d’eau. Nous avons besoin de l’aide des agences humanitaires », a-t-il ajouté.
La Somalie a décrété fin février « catastrophe nationale » la grave sécheresse qui ravage le pays et menace environ trois millions de personnes, selon les ONG.
La Somalie est, avec le Yémen et le Nigeria, un des trois pays au bord de la famine, déjà officiellement déclarée au Soudan du Sud où elle touche 100.000 personnes.
Plus de 20 millions de personnes risquent de mourir de faim dans ces quatre pays.
La dernière famine en date en Somalie, en 2011, résultat d’une grave sécheresse dans la Corne de l’Afrique aggravée par le conflit avec l’insurrection islamiste shebab, y avait tué 260.000 personnes.
L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) estime qu’en Somalie plus de 6,2 millions de personnes – soit la moitié de la population – ont besoin d’une aide humanitaire d’urgence, dont près de trois millions qui souffrent de la faim.
Selon l’agence onusienne, plus de 363.000 enfants sont gravement mal nourris, parmi lesquels 70.000 ont besoin en urgence d’une aide vitale.
La sécheresse a conduit à une propagation des diarrhées aiguës, du choléra et de la rougeole, et près de 5,5 millions de personnes risquent de contracter des maladies transmises par l’eau.
Editorial. Selon l’ONU, 20 millions de personnes ont aujourd’hui besoin d’une assistance alimentaire d’urgence dans sept pays.
A Thonyor (Soudan du Sud) le 25 février. SIEGFRIED MODOLA / REUTERSEditorial du « Monde ».Voilà des années qu’on n’avait pas vu revenir sa tête de gorgone émaciée. Elle a les traits de ces gosses au gros ventre et au corps squelettique. Il y a ces files d’attentes de malheureux en guenilles venus chercher une maigre ration alimentaire dans des camps de personnes déplacées. On sait trop à quoi ressemble la famine en Afrique. Elle est là, de retour dans la partie est du continent noir. La mort rôde. L’ONU, les organisations humanitaires préviennent : la faim pourrait tuer des dizaines de milliers de personnes dans les jours qui viennent.
Il faut sonner l’état d’urgence, bien sûr. Mais il y a aussi quelque chose de désespérant – d’obscène ? – à devoirconstater la réapparition récurrente de la famine dans un monde qui, de façon chronique, déborde de surplus alimentaires dont on ne sait que faire. Bien sûr, la question est plus complexe. Elle ne se limite pas à la production de denrées alimentaires.
Mais tout de même, en situation extrême, comme aujourd’hui en Afrique de l’Est, les ressources devraient être faciles à dégager, même si la distribution de l’aide pose des problèmes spécifiques. Les moyens financiers ne devraient pas être trop difficiles à réunir. Bref, la répétition du drame de 2011 dans la Corne de l’Afrique, quand la sécheresse a fait quelque 260 000 victimes en Somalie, aurait quelque chose d’intolérable.
Sécheresse et guerres
Sept pays sont concernés : Djibouti, Ethiopie, Kenya, Ouganda, Somalie, Soudan du Sud et, dans une moindre mesure, Tanzanie. La sécheresse n’est pas la seule coupable, même si elle affecte tout le monde. La guerre doit aussi être incriminée au Soudan du Sud, de même que Boko Haram, cette puissante secte djihadiste armée, et Al-Qaida en Somalie avec les groupes de Chabab, l’ensemble bien souvent sur fond d’Etats faillis.
En tout, 20 millions de personnes, selon l’ONU, ont aujourd’hui besoin d’une assistance alimentaire d’urgence en Afrique de l’Est. Les éléments d’un drame humanitaire de grande ampleur sont réunis.
La sécheresse ne devrait surprendre personne. Quoi qu’en pensent les Etats-Unis de Donald Trump – en plein négationnisme scientifique –, le réchauffement climatique frappe l’Afrique en première ligne. Et plus durement qu’ailleurs. « Les sécheresses y seront nombreuses, plus régulières et plus intenses », avait prévenu le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat).
L’incapacité du gouvernement central du Nigeria à venir à bout de Boko Haram affecte aussi toute la région du lac Tchad. Au Soudan du Sud, quatre ans d’une guerre civile atroce ont déplacé des centaines de milliers de personnes et provoqué la famine dans le nord du pays – où 100 000 personnes pourraient mourir de faim si elles ne sont pas aidées dans les jours qui viennent.
Pour l’ensemble de l’Afrique de l’Est, les sommes requises tourneraient autour de 2 milliards de dollars. C’est une petite levée de fonds dans un monde où quelque 4 000 milliards de dollars sont échangés tous les jours. Mais la distribution de l’aide est périlleuse en zone de guerre, où la question de l’accès aux populations est primordiale : « Si l’on s’y prend mal, tout cet argent peut finir dans les poches de responsables corrompus et avoir des effets pervers », prévient un expert humanitaire.
Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a eu les mots qu’il fallait : « Nous sommes face à une tragédie, nous devons éviter qu’elle devienne une catastrophe. »
Plus de sept millions de personnes sont menacées de famine dans le nord-est du Nigeria et dans le bassin du lac Tchad, selon un haut responsable des Nations unies.
La région est en proie depuis sept ans à une insurrection des islamistes de Boko Haram, qui ont tué environ quinze mille personnes et provoqué l’exode de plus de deux millions d’habitants.