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En Égypte, la monnaie nationale dévaluée de près de 50 %

janvier 11, 2023

Après une nouvelle intervention de la Banque centrale, notamment pour répondre aux critères du FMI, la livre égyptienne s’échangeait ce mercredi à la moitié de sa valeur, comparé à celle de mars. Et les dévaluations pourraient continuer, selon certains experts.

Livres égyptiennes. Photo d’illustration. © Khaled Desouki / AFP

La moitié de sa valeur, comparé à celle de mars. C’est ce que représentait la livre égyptienne ce mercredi, après la troisième intervention de la Banque centrale, dictée notamment par un nouveau prêt du Fonds monétaire international (FMI). Cette nouvelle dévaluation – à 31,95 livres (1,076 euro) pour un dollar le matin avant de remonter en début d’après-midi à 29,8 livres pour un dollar – affecte encore un peu plus les 104 millions d’Égyptiens, dans un pays où la majorité des biens sont importés.

L’inflation atteint 21,9 %, et, en décembre, les prix des denrées alimentaires ont augmenté de 37,9 % sur un an, selon les statistiques officielles. La dévaluation pourrait encore continuer, selon des experts, car au marché noir la livre s’échange aux alentours de 35 pour un dollar.

L’État pris à la gorge

L’Égypte subit aussi de plein fouet les effets de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, dans la mesure où elle est le premier importateur de blé du globe, dont les deux grands producteurs du monde sont Kiev et Moscou. Elle doit désormais se fournir auprès d’autres pays à des prix qui ont soudainement flambé.

Pris à la gorge, le pays n’a plus que 34 milliards de dollars (près de 31,7 milliards d’euros) de réserve, contre 41 en février – dont 28 sous forme de dépôts des alliés du Golfe – et sa dette extérieure a plus que triplé en dix ans, à 150 milliards d’euros. Selon l’agence Moody’s, l’Égypte est l’un des cinq pays du monde le plus exposé au risque de défaut de paiement de sa dette extérieure.

Le Caire a obtenu un nouveau prêt du FMI en décembre, mais les trois milliards de dollars qui lui ont déjà été versés sur près de quatre ans pèsent peu : le seul service de la dette pour 2022-2023 s’élève à 42 milliards. Surtout, le FMI a dit réclamer « un changement définitif vers un régime de taux de change flottant » et une « politique monétaire visant à réduire graduellement l’inflation ».

L’Égypte doit aussi mener des « réformes structurelles dans de nombreux domaines pour réduire l’empreinte de l’État » dans une économie encore dominée par les entreprises publiques ou liées à l’armée, dont est issu le président Abdel Fattah al-Sissi, a plaidé l’organisation internationale.

Tourisme en berne et rationnement

Le tourisme, autre grand pourvoyeur de devises du pays, est en berne depuis la « révolution » de 2011 qui a renversé Hosni Moubarak. Alors que ce secteur – 10% du PIB et deux millions d’emplois – commençait à se relever en 2019, la pandémie de Covid-19 l’a de nouveau frappé. Reste le gaz naturel, dont un énorme gisement offshore a été découvert en 2015 dans les eaux égyptiennes : potentiellement 850 milliards de mètres cubes sur un secteur de 100 kilomètres carrés.

Mais en attendant ses retombées, avec une monnaie locale aussi faible face au dollar, de nombreux importateurs ont cessé de faire venir des biens et les étals des magasins et des centres commerciaux rutilants qui ont fleuri dans les nouveaux quartiers chics du Caire s’en ressentent. Certaines franchises internationales ont ainsi proposé tout l’été les collections d’habillement de l’automne-hiver précédent, tandis que de nombreuses pièces électriques ou appareils électroniques ne sont tout simplement plus disponibles dans le pays.

SELON LE GOUVERNEMENT, PLUSIEURS MILLIARDS DE DOLLARS DE BIENS, NOTAMMENT ALIMENTAIRES, SONT ACTUELLEMENT BLOQUÉS DANS LES PORTS DU PAYS

Pour les importateurs qui ont malgré tout passé commande, les dollars font défaut alors que les retraits sont de plus en plus contrôlés, et, selon le gouvernement, plusieurs milliards de dollars de biens, notamment alimentaires, sont actuellement bloqués dans les ports d’Égypte. Les supermarchés pratiquent désormais le rationnement, tandis que les restaurants ont drastiquement réduit leurs portions pour tenter de ne pas toucher aux prix, dans un pays où, officiellement, 30 % des habitants vivent sous le seuil de pauvreté et autant tout juste au-dessus.

Par Jeune Afrique avec AFP

Égypte : Sissi coincé entre le FMI et l’armée

novembre 10, 2022

Deuxième pays le plus endetté au monde, l’Égypte traverse une crise grave liée au conflit en Ukraine mais aussi à la mainmise de l’armée sur l’économie nationale. Le président Abdel Fattah al-Sissi dit vouloir régler le problème. Mais en a-t-il les moyens ?

Chantier du mégaprojet de la future nouvelle capitale administrative égyptienne, à 45 km à l’est du Caire. © Ahmed HASAN / AFP

La livre égyptienne a atteint son niveau historique le plus bas fin octobre, avec une dévaluation de moitié sur l’ensemble de l’année 2022. L’exécutif, qui vient de contracter son quatrième prêt auprès du Fonds monétaire international (FMI) et s’endette auprès de ses voisins, s’est engagé auprès de l’institution et de la Banque mondiale à porter la part du secteur privé dans l’économie égyptienne à 65 % au cours des trois prochaines années. Le gouvernement doit donc redéfinir le rôle de l’État et de l’armée, et réduire leur interventionnisme. En août dernier, le très critiqué gouverneur de la Banque centrale, Tarek Amer, a présenté sa démission.

Mais le principal problème demeure : le budget national égyptien est grevé par les dépenses de l’institution militaire, qui pèse par ailleurs sur de très nombreux secteurs de l’économie. La prise de pouvoir d’Abdel Fattah al-Sissi en 2013 a renforcé cette mainmise, l’ancien président du Conseil suprême des forces armées (CSFA) ayant misé sur des projets d’infrastructure colossaux, permettant à l’armée égyptienne d’étendre encore son influence sur l’économie.

La crise actuelle est aggravée par les conséquences du conflit militaire en Ukraine, à l’origine d’une insécurité alimentaire qui touche des dizaines de millions d’Égyptiens : 80 % des importations de blé avant le début du conflit provenaient de Russie ou d’Ukraine. Pour y remédier, le régime a mis en place un « comité de crise » dès février 2022, et l’armée est chargée de distribuer des rations de nourriture aux plus vulnérables.

Mais la pénurie de matières premières n’est pas le seul contrecoup de la guerre, puisque des investisseurs étrangers qui avaient racheté des obligations souveraines ont retiré leur argent, à hauteur de 20 millions de dollars.

Emprunts tous azimuts

Seule solution pour soutenir une économie très fragilisée, le président Abdel Fattah al-Sissi a décidé de contracter en octobre un nouvel emprunt auprès du FMI, à hauteur de 3 milliards de dollars sur quatre ans. C’est la quatrième fois depuis le coup d’État de 2013 que le président se tourne vers le FMI. L’Égypte est le deuxième pays le plus endetté auprès de l’institution internationale après l’Argentine.

Endettée à hauteur de 53 milliards d’euros auprès de diverses institutions multilatérales, l’Égypte l’est aussi auprès de ses alliés régionaux, dont les monarchies du Golfe. Préoccupé par l’instabilité économique engendrée par le conflit ukrainien, le président a emprunté, début 2022, 5 milliards de dollars à l’Arabie saoudite, 5 milliards aux Émirats arabes unis et 3 milliards au Qatar.

Le Premier ministre égyptien Mostafa al-Madbouly a par ailleurs annoncé l’obtention de 1 milliard d’euros d’aide via un fonds du FMI consacré aux pays en voie de développement, et d’une enveloppe de 5 milliards de dollars de la part d’« organisations internationales et régionales ».

Mais le FMI a posé ses conditions à l’octroi de ces crédits. Le 27 octobre, la livre était dévaluée de 17 % conformément à la demande de l’institution, atteignant sa valeur historique la plus basse.

Le problème, notent beaucoup d’experts, c’est que le pays vit, et depuis longtemps, au-dessus de ses moyens. Persuadés que l’Égypte est une puissance régionale trop importante pour que ses partenaires – en particulier les monarchies du Golfe – la laissent faire faillite, les dirigeants du Caire multiplient les projets d’infrastructures ambitieux, mais le pays produit peu et importe énormément.

Réduire le budget défense 

Pour réduire les dépenses de l’État, le président semble n’avoir d’autre choix que de se tourner vers la part du budget réservée aux investissements militaires et de développer une économie de marché ouverte au secteur privé. Ce qui implique de réduire le budget défense, mais aussi de contraindre les forces armées à céder leurs parts dans certains secteurs de l’économie.

Une gageure : selon un rapport publié en 2019 par Yezid Sayigh, chargé de recherches au Malcolm H. Kerr Carnegie Middle East Center de Beyrouth, l’institution militaire possède près de 7 % des complexes hôteliers, occupe une position dominante dans le secteur de l’énergie, est aussi présente dans la sidérurgie, l’agriculture, l’immobilier, la pêche, la santé, la production de pâtes, le ciment, l’eau minérale, les carburants…

L’idée aujourd’hui avancée, à la fois pour renflouer les caisses de l’État et pour donner des gages aux bailleurs internationaux, est donc de réduire la part de l’État, et singulièrement de l’armée dans les secteurs où elle n’a, théoriquement, pas grand chose à faire.

En avril 2022, l’exécutif a d’ailleurs annoncé devoir prendre des mesures drastiques, et notamment vouloir ouvrir avant la fin de 2022 le capital de certaines entreprises militaires et les introduire en bourse. Une liste des sociétés concernées a été élaborée, dont les stations-service du groupe Wataniya et la compagnie agro-alimentaire Safi, mais alors que la fin d’année approche, rien n’a été fait.

Difficile de se mettre l’armée à dos

Cette difficulté à mettre en pratique les ambitions affichées de désengagement a plusieurs explications. Il s’agit, d’abord, d’un virage à 180 degrés par rapport aux pratiques observées depuis l’arrivée au pouvoir Sissi, en 2013. Lui-même issu de l’armée, le maréchal devenu président n’a eu de cesse, les premières années, de s’appuyer sur les entreprises détenues par les militaires pour faire avancer sa politique économique. Vouloir aujourd’hui privilégier le privé et retirer à l’armée des sources de revenus qu’elle contrôle depuis des décennies demande volonté et courage.

Officiellement, le gouvernement a promis au FMI que le poids du secteur privé dans l’économie du pays allait doubler dans les trois années à venir, pour atteindre 65 %. Mais même du côté des possibles investisseurs privés, la prudence et les doutes persistent. Peu d’entre eux sont enclins à prendre des parts dans des entreprises qui risquent de se retrouver en concurrence frontale avec des firmes détenues par les militaires, lesquels possèdent la majorité des terres du pays, sont dispensés du paiement de nombreux impôts et taxes, et disposent, dans leurs casernes, d’une main-d’oeuvre pléthorique et payée sur le budget de l’État.

Pour Abdel Fattah al-Sissi, il est aussi très difficile de prendre le risque de se mettre à dos l’institution qui l’a formé, et qui demeure la plus influente du pays, y compris politiquement. Depuis la proclamation de la République égyptienne, le 18 juin 1953, les présidents successifs sont quasi exclusivement issus de l’armée, de Nasser à Sissi en passant par Moubarak. Mohamed Morsi, issu des Frères musulmans, faisait à cet égard figure d’exception, mais il a rapidement été renversé en 2013 par un coup d’État… organisé par les Forces armées nationales, dirigées par Sissi.

Avec Jeune Afrique

FMI : le monde est au bord de la récession 

octobre 11, 2022

L’inflation et la guerre en Ukraine déstabilisent de nombreuses économies à travers le globe, alerte le Fonds monétaire international.

Kristalina Georgieva a ete nommee a la tete du Fonds monetaire international le 1?? octobre 2019.
Kristalina Georgieva a été nommée à la tête du Fonds monétaire international le 1ᵉʳ octobre 2019.© DREW ANGERER / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP

L’économie mondiale, secouée par des chocs à répétition depuis un an, se rapproche un peu plus de la récession, qui risque de toucher plusieurs pays avancés en 2023, a prévenu mardi le FMI à l’occasion de la publication de son rapport d’automne sur l’économie. Certes, le Fonds monétaire international (FMI) a maintenu à 3,2 % sa prévision de croissance pour 2022, déjà révisée trois fois cette année, mais il a abaissé de nouveau celle attendue pour 2023, cette fois à 2,7 %, soit 0,2 point de moins que la précédente révision au mois de juillet.

« À l’exception de la crise financière de 2008 et de la phase aigüe de la pandémie, il s’agit de la plus faible croissance attendue depuis 2001 et elle reflète le ralentissement des principales économies », États-UnisEurope et Chine pour différentes raisons, précise l’institution. Car l’économie mondiale, qui se remettait doucement des effets de la pandémie et restait confrontée à des problèmes de logistique dans de nombreux secteurs, fait désormais face à un enchaînement de chocs inhabituel.

Une inflation persistante

« Les chocs de cette année vont renforcer les conséquences de la pandémie qui n’étaient qu’en partie rattrapées. En résumé, le pire est à venir et pour beaucoup de gens, 2023 ressemblera à de la récession », a déclaré le chef économiste du FMI, Pierre-Olivier Gourinchas, dans un communiqué. Au centre des difficultés, une inflation persistante, touchant les économies avancées mais, plus encore, les pays émergents et en développement, et qui devrait atteindre 8,8 % en moyenne au niveau mondial cette année (+ 0,5 point par rapport aux prévisions de juillet). Une note positive cependant : l’inflation mondiale devrait avoir atteint son pic au troisième trimestre (9,5 %) et commencer à refluer dès le dernier trimestre 2022, poursuivant cette tendance l’année prochaine, pour revenir au dernier trimestre 2023 à un niveau comparable à l’inflation de 2021 (4,7 %).

Le ralentissement économique va cependant toucher l’ensemble des États les plus riches, à commencer par les États-Unis : la croissance y a été révisée à tout juste 1,6 % en 2022, contre 2,3 % attendus en juillet. 2023 pourrait être plus difficile encore, le Fonds tablant sur tout juste 1 %. Et la situation n’est guère meilleure dans la zone euro : certes, la croissance devrait atteindre 3,1 % en 2022, mieux qu’attendu en juillet (+ 0,5 point), mais la zone devrait frôler la récession en 2023, à 0,5 % de croissance (- 0,7 point par rapport aux prévisions de juillet). Et pour certains États membres, l’Allemagne et l’Italie, la récession semble inévitable l’an prochain (respectivement – 0,3 % et – 0,2 %), alors que la France peut espérer rester au-dessus de la ligne de flottaison, avec une croissance de 0,7 %. Tout comme, hors UE, le Royaume-Uni, à 0,3 %.

Les pays émergents résistent mieux

La Chine, deuxième puissance économique mondiale, devrait de son côté connaître en 2022 sa pire année depuis plus de 40 ans, si l’on excepte la pandémie en 2020, avec une croissance attendue de tout juste 3,2 %, avant de repartir légèrement en 2023 (4,4 %). En cause, les confinements à répétition causés par la politique de tolérance zéro vis-à-vis du Covid-19 qui ont touché plusieurs villes du pays, à commencer par son pôle économique, Shanghai, fermé pendant plus d’un mois. La Russie, dont l’économie subit de plein fouet les sanctions mises en place notamment par les États-Unis et l’Union européenne, connaîtra une récession cette année, mais la situation devrait être moins marquée qu’envisagé au début de l’été. Le FMI y anticipe désormais une contraction de 3,4 % pour 2022, mais c’est 2,6 points de mieux que les prévisions faites en juillet dernier. La Russie devrait cependant être la seule économie du G20, qui se réunira mercredi à Washington, à connaître la récession cette année.

Dans un contexte mondial morose, la région Amérique latine et Caraïbes voit quant à elle ses prévisions s’améliorer, avec une croissance désormais attendue à 3,5 % (+ 0,5 point) cette année, même si ses deux principales économies, le Brésil et le Mexique, auront une croissance moins marquée que la moyenne de la région. L’avenir reste néanmoins incertain, souligne le Fonds, qui reconnaît que ses prévisions, en particulier pour 2023, ne sont valables que « si les anticipations d’inflation restent stables et que le resserrement monétaire n’entraîne ni récession généralisée ni ajustement désordonné des marchés financiers ». D’autant que l’effet de 2022 se fera sentir sur le long terme. Lors d’un discours prononcé jeudi, la directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva, avait souligné que « d’ici à 2026, cela représentera une perte de 4 000 milliards de dollars pour l’économie mondiale, soit la taille de l’économie allemande ».

Par Le Point avec AFP

Pour le FMI, l’Afrique tire son épingle du jeu

juillet 27, 2022

PRÉVISIONS. Dans un contexte où l’horizon s’obscurcit pour l’économie mondiale, les perspectives s’annoncent inchangées, voire positives, pour certains pays africains.

Le Nigeria, pays producteur de petrole, verra sa croissance s'ameliorer en 2023 par rapport aux previsions d'avril pour atteindre 3,2 %.
Le Nigeria, pays producteur de pétrole, verra sa croissance s’améliorer en 2023 par rapport aux prévisions d’avril pour atteindre 3,2 %.© PIUS UTOMI EKPEI / AFP

L’économie mondiale est prise dans une tempête de chocs et d’incertitudes alors qu’elle tentait de se relever du Covid-19, selon le FMI, qui a révisé à la baisse le 26 juillet ses prévisions de croissance et alerte sur les nombreux risques en vue. « L’économie mondiale, encore sous le choc de la pandémie et de l’invasion russe de l’Ukraine, fait face à des perspectives de plus en plus sombres et incertaines », observe l’économiste en chef du Fonds monétaire international, Pierre-Olivier Gourinchas, dans une note de blog. « De nombreux risques » évoqués par le FMI dans ses dernières prévisions, en avril, « ont commencé à se concrétiser », alerte-t-il, et « le monde pourrait bientôt se trouver au bord d’une récession mondiale, deux ans seulement après la dernière ».

La croissance mondiale n’est désormais plus attendue qu’à 3,2 % en 2022, soit 0,4 point de moins qu’anticipé en avril, reflétant « le ralentissement de la croissance dans les trois plus grandes économies du monde – les États-Unis, la Chine et la zone euro – avec des conséquences importantes pour les perspectives mondiales ».

3,8 % de croissance en 2022

Un tableau pessimiste duquel l’Afrique pourrait tirer son épingle du jeu, d’après le Fonds. En effet, dans sa dernière mise à jour des perspectives de l’économie mondiale, l’institution a estimé que l’Afrique subsaharienne devrait enregistrer une croissance de 3,8 % en 2022 et de 4 % en 2023, des taux qui demeurent inchangés par rapport aux précédentes prévisions du mois d’avril.

Les pays de la région qui s’en sortent le mieux sont les producteurs de combustibles fossiles et de métaux, qui tirent profit de la flambée des cours mondiaux. Ainsi, le Nigeria devrait voir sa croissance s’améliorer en 2023 par rapport aux prévisions d’avril pour atteindre 3,2 %. D’autres comme l’Afrique vont même voir leur situation s’améliorer, avec une croissance de 2,3 % en 2022, contre une précédente prévision de 1,9 %. La situation est différente pour les pays importateurs de pétrole, qui souffrent plus et vont connaître pour plusieurs une réduction de la croissance en 2023.

Attention à l’inflation et à l’endettement

Mais, comme pour le reste du monde, le principal défi pour le continent est l’inflation. Malgré l’inquiétant ralentissement qui menace l’économie mondiale, la priorité doit être de faire ralentir l’inflation et d’éviter à tout prix qu’elle soit totalement hors de contrôle, a souligné le chef économiste du FMI, Pierre-Olivier Gourinchas, dans un entretien à l’AFP. D’après le FMI, l’inflation devrait, en effet, être plus forte que prévu et atteindre 8,3 % cette année à l’échelle mondiale, soit 0,9 point de plus que ce qui était anticipé en avril, du fait principalement de l’augmentation des prix des denrées alimentaires et de l’énergie, ainsi que des déséquilibres persistants de l’offre et de la demande. Elle devrait atteindre 9,5 % dans les pays en développement cette année, soit une révision à la hausse de 0,9 et 0,8 point de pourcentage respectivement. Au Ghana, face à l’inflation frôlant désormais les 30 % par mois et un important endettement, le pays a récemment annoncé solliciter l’aide du FMI.

Dans tous les cas, ces niveaux d’inflation très élevés vont obliger les banques centrales à relever davantage leurs taux et donc à provoquer un surendettement, notamment des États africains. « Avec la hausse des taux d’intérêt dans les pays avancés et le resserrement des conditions financières au niveau mondial, la vulnérabilité de la dette et les risques de financement augmentent pour les émetteurs des pays émergents, le resserrement étant particulièrement marqué pour les émetteurs moins bien notés », écrit le FMI. Au moins 60 % des pays à faible revenu sont exposés à un risque élevé de surendettement. Dans ce contexte, l’institution recommande aux pays de maintenir une politique budgétaire de soutien pour éviter les chocs sociaux.

Par Le point avec AFP

Ghana : en pleine crise économique, Accra sollicite l’aide du FMI

juillet 3, 2022

Le pays a enregistré en mai une inflation de 27%, son niveau le plus haut depuis deux décennies, et les manifestations contre la vie chère se multiplient.

Une manifestation contre la vie chère, le 29 juin 2022 à Accra, au Ghana. © Nipah Dennis/AFP

Le Ghana sollicite le soutien du Fonds monétaire international (FMI) alors que le pays traverse une crise économique aggravée par l’invasion russe en Ukraine qui a fait exploser les prix, notamment à la pompe, a indiqué vendredi 1er juillet le gouvernement. En mai, le pays a enregistré une inflation de 27%, son niveau le plus haut depuis deux décennies.

Le président Nana Akufo-Addo avait précédemment rejeté les appels à solliciter l’aide financière du FMI. Mais vendredi, il a « autorisé le ministre des Finances Ken Ofori-Atta à entamer des engagements formels » avec l’organisation, a déclaré le ministre de l’Information, Kojo Oppong Nkrumah, dans un communiqué.

Manifestations contre la vie chère

« Cela fait suite à une conversation téléphonique entre le président et la directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva, qui a fait part de la décision du Ghana de s’engager avec le Fonds, précise le communiqué. L’engagement avec le FMI visera à fournir un soutien à la balance des paiements (…) pour accélérer le redressement du Ghana face aux défis induits par la pandémie de Covid-19 et, récemment, par les crises en Russie et en Ukraine. »

Depuis plusieurs mois, de nombreux Ghanéens manifestent contre la vie chère dans un contexte de hausse croissante des prix alimentaires et des carburants, mettant sous pression le président Akufo-Addo. Plusieurs bagarres ont par ailleurs éclaté au sein du Parlement sans majorité, alors que le gouvernement tente d’imposer des réformes qui, selon lui, pourraient sauver l’économie.

Le président cherche urgemment à trouver de nouvelles sources de revenus pour combler le poids de la dette de son pays, qui représente près de 80% du PIB. En 2015, le Ghana avait déjà sollicité l’aide du FMI et obtenu un prêt d’environ un milliard de dollars en contrepartie d’un plan de rigueur budgétaire, qui prévoyait une baisse des dépenses publiques.

Par Jeune Afrique avec AFP

RDC : pour le FMI, des résultats « meilleurs que prévu », mais…

juin 30, 2022

La situation fiscale de Kinshasa est supérieure aux attentes du Fonds monétaire international, qui a décaissé 200 millions de dollars de financement. Mais deux faiblesses majeures demeurent.

La directrice générale Kristalina Georgieva rencontre le président de la RDC Félix Tshisekedi au FMI à Washington, le 2 mars 2020. © Joshua Roberts /IMF-FMI

Le conseil d’administration du Fonds monétaire international (FMI) a jugé « satisfaisants » les progrès réalisés par les équipes de Félix Tshisekedi dans la mise en œuvre des réformes prévues par la facilité de crédit élargie de 1,52 milliard de dollars approuvée en juillet 2021.

Selon ses estimations, « les résultats budgétaires ont été meilleurs que prévu car l’augmentation des recettes budgétaires et du financement extérieur a permis de dégager une marge de manœuvre pour des dépenses supplémentaires, surtout en matière d’investissement, malgré l’accumulation d’arriérés intérieurs ».

Critères quantitatifs presque atteints

Le Fonds va décaisser 203 millions de dollars « pour répondre aux besoins de financement de la balance de paiement », soit 653 millions de dollars transférés à Kinshasa depuis un an.

Portées par la hausse des cours des métaux, les exportations du pays sont attendues à 45 % du PIB cette année, contre 40,8 % en 2021. Et les recettes et les dons sont désormais anticipés à 14 % du PIB cette année, leur niveau de 2020, alors qu’une baisse de deux points était crainte. Le PIB devrait croître de 6,1 % cette année, malgré les répercussions de la crise ukrainienne.

LE FMI MET LA PRESSION SUR KINSHASA POUR RÉDUIRE LA MASSE SALARIALE PUBLIQUE, ALOURDIE DE FONCTIONNAIRES « FANTÔMES »

Les équipes du FMI regrettent toutefois qu’un des cinq « repères structurels » n’ait pas été respecté entièrement : la publication de tous les contrats miniers. L’un d’entre eux n’a pas été rendu public ont-ils indiqué, sans identifier lequel. Il faut noter que Kinshasa a signé à la fin du mois de février un accord avec l’homme d’affaires israélien Dan Gertler pour le transfert à l’État d’actifs miniers au cœur de nombreuses controverses et de sanctions imposées par les États-Unis. La publication du contenu exact de l’accord obtenu avec Gertler est réclamée depuis lors par la société civile congolaise.

Masse salariale et subventions

Le Fonds a également encouragé l’exécutif à poursuivre « la maîtrise des dépenses courantes », notamment en ce qui concerne les subventions aux carburants et les réformes de la fonction publique, afin de « créer un espace pour les investissements prioritaires ».

Entre les lignes, l’institution multilatérale met la pression sur Kinshasa pour réduire la masse salariale publique – alourdie de bon nombre de fonctionnaires « fantômes » – et les subventions. En 2020, les salaires publics ont représenté 4 758 milliards de francs congolais (environ 2 milliards d’euros), soit plus de la moitié des dépenses courantes. Le FMI les anticipe à près de 7 000 milliards de francs congolais dès l’an prochain.

Par comparaison, en 2020, les dépenses d’investissement (Capex) ont atteint seulement 1 906 milliards de francs congolais. Au demeurant, à peine 251 millions de francs congolais de Capex avaient été financées localement… Les dépenses en subventions avaient quant à elles atteint 2 243 milliards de francs congolais en 2020. Elles sont anticipées en hausse de 1 000 milliards de francs supplémentaires cette année.

Avec Jeune Afrique par Joël Té-Léssia Assoko

Sénégal : les conditions du FMI pour maintenir son soutien à Dakar

mai 24, 2022

Un nouvel appui financier du Fonds monétaire international doit permettre au pays de lutter contre la flambée mondiale du cours des produits pétroliers et des denrées alimentaires, tout en lui fournissant davantage de ressources pour répondre à l’urgence socio-économique.

Entre la fin de 2021 et le début de 2022, au Sénégal, la croissance du PIB réel s’est élevée en moyenne à 6,1 %. Ici, à Saint-Louis. © Alfredo CALIZ/PANOS-REA

Après avoir rencontré le président Macky Sall, différents ministres, hauts fonctionnaires et représentants de la BCEAO, le Fonds monétaire international (FMI) a approuvé l’octroi de 161,8 millions de droits de tirages spéciaux (DTS), soit l’équivalent d’environ 217 millions de dollars environ, au Sénégal. Cette somme sera allouée sous réserve de validation par le conseil d’administration de l’institution en juin prochain.

Pour modérer les effets des chocs exogènes sur l’économie sénégalaise sans exacerber les vulnérabilités de sa dette, le Fonds estime qu’il conviendrait de « redéfinir les priorités et de limiter les subventions dans le secteur de l’énergie, tout en mettant en place un dispositif de soutien ciblé aux couches les plus vulnérables de la population ».

Une relance contrariée

Au cours des derniers mois, le Sénégal a connu une croissance économique très dynamique. En mars, l’équipe du Fonds dirigée par Edward Gemayel, avait  indiqué que « l’économie a[vait] retrouvé sa trajectoire de croissance d’avant la pandémie, grâce à la vigueur de la production industrielle et du secteur des services ». Entre la fin de 2021 et le début de 2022, la croissance du PIB réel avait été en moyenne de 6,1 %, soit un « point de pourcentage de plus que prévu », d’après la même source.

Perspectives économiques du Sénégal selon la Banque Mondiale © Perspectives économiques du Sénégal selon la Banque mondiale; Source : Banque mondiale
Perspectives économiques du Sénégal selon la Banque Mondiale © Perspectives économiques du Sénégal selon la Banque mondiale; Source : Banque mondiale

Pourtant, la flambée des cours mondiaux des produits pétroliers et des denrées alimentaires – causée par la pandémie et exacerbée par la guerre en Ukraine – ainsi que le ralentissement de l’activité économique chez plusieurs partenaires commerciaux du Sénégal (notamment après les sanctions de la Cedeao à l’encontre du Mali) devraient, selon l’institution de Bretton Woods, « entraîner un ralentissement de la croissance du PIB réel à environ 5 % en 2022 ». Conformément aux derniers pronostics, l’inflation s’établira autour de 5,5 %.

MAINTENIR LA DISCIPLINE BUDGÉTAIRE SERA CRUCIAL POUR PRÉSERVER LA VIABILITÉ DE LA DETTE

Par anticipation, Dakar a adopté une loi de finances rectificative arrêtée à la somme de 5 556,7 milliards F CFA (8,49 milliards d’euros) : ce qui correspond à une augmentation du budget de 357,7 milliards F CFA par rapport à l’année dernière.

Cette loi est vouée à intégrer des dépenses supplémentaires de subventions à l’énergie (300 milliards de F CFA ), de salaires de la fonction publique (120 milliards de F CFA), des transferts monétaires aux couches les plus vulnérables de la population (157 milliards de F CFA) et de sécurité nationale (73,5 milliards de F CFA). « Ces nouvelles dépenses porteront le déficit budgétaire à 6,2 % du PIB, contre 4,8 % du PIB dans la loi de finances initiale », peut-on lire dans le rapport du FMI.

« Face à la hausse des prix de l’énergie et des denrées alimentaires, ainsi qu’à l’accroissement des revendications sociales, maintenir la discipline budgétaire sera crucial pour préserver la viabilité de la dette » déclare le Fonds. Ainsi, pour éviter les « dérapages budgétaires » et garantir que le déficit des finances publiques converge vers sa cible de 3 % du PIB d’ici à 2024, conformément aux orientations du Conseil des ministres de l’Uemoa, les autorités sénégalaises et les services du FMI sont convenus d’un ensemble de mesures.

Revoir le code des marchés publics

Dans son communiqué, le FMI estime que gouvernement sénégalais a fait des « progrès dans la mise en œuvre de son programme ». En effet, tous les critères de réalisation à la fin de décembre 2021 ont été respectés, à l’exception de celui relatif aux recettes fiscales.

Cet écart s’explique particulièrement par la mise en œuvre limitée des mesures fiscales adoptées dans la première loi de finances rectificative de 2021, et du fait que la proportion de contrats de marchés publics conclus sans mise en concurrence a dépassé le plafond imposé. En réponse, le FMI a invité les autorités sénégalaises à revoir le code des marchés publics afin d’augmenter la fréquence des appels d’offres ouverts.

L’équipe d’Edward Gemayel a également souligné l’importance d’accélérer la mise en œuvre de la stratégie de mobilisation des recettes à moyen terme ; et de préparer une feuille de route pour l’élimination progressive des subventions à l’énergie. À l’occasion de cette cinquième revue, les experts ont encouragé les autorités du pays ouest-africain à parachever le cadre réglementaire et institutionnel pour la gestion des recettes issues de l’exploitation des ressources pétro-gazières en amont de la préparation de la loi de finances 2023. Enfin, Dakar et les services du FMI se sont mis d’accord sur la nécessité d’accélérer la restructuration du groupe de La Poste.

Avec Jeune Afrique par Yara Rizk

Monnaie : le FMI appelle à ne pas considérer le bitcoin comme une panacée contre les défis économiques en Afrique

avril 28, 2022

Le Fonds monétaire international (FMI) a appelé jeudi à ne pas voir le bitcoin comme une panacée contre les défis économiques auxquels l’Afrique fait face, au lendemain de l’adoption par la Centrafrique de la cryptomonnaie comme monnaie officielle.

« Dans l’hypothèse d’un mouvement bien préparé vers la numérisation et par le biais de l’utilisation des monnaies numériques des banques centrales, les cryptomonnaies peuvent contribuer à un système de paiements plus robuste » sur le continent, a indiqué le directeur du département Afrique au FMI, Abebe Aemro Selassie, au cours d’une conférence de presse. Mais « adopter simplement la possibilité d’utiliser le bitcoin est quelque chose qui doit être surveillé de manière très, très attentive, il faut s’assurer que le cadre législatif, la transparence financière et la gouvernance sont bien en place », a poursuivi le dirigeant.

La Centrafrique a annoncé mercredi avoir adopté le bitcoin comme monnaie officielle au côté du franc CFA et légalisé l’usage des cryptomonnaies, assurant être le premier pays à le faire en Afrique. Le 7 septembre 2021, le Salvador avait été le premier pays au monde à adopter le bitcoin comme monnaie légale et le FMI avait immédiatement dénoncé une décision dangereuse pour la stabilité financière, l’intégrité financière et la protection des consommateurs. 

La volatilité du bitcoin peut donner le vertige. En 2021, les cours avaient flambé de plus de 150% et atteint un plus haut historique de 68 991 dollars, avant de s’effondrer de plus de 30%. Même si le marché s’est assagi en 2022, les variations restent très fortes : -17% en février, +8% en mars et +10% en avril. 

Pour l’heure, seuls le Salvador et la Centrafrique ont adopté le bitcoin comme monnaie légale mais d’autres pays envisagent de le faire, certains ayant enclenché des processus législatifs dans ce sens, selon le site spécialisé Coinmarketcap.com. 

Par Adiac-Congo avec AFP

Guinée : l’administration Doumbouya promet « prudence et transparence » dans la gestion des financements du FMI

mars 13, 2022
Le colonel Mamadi Doumbouya le 17 septembre 2021, à Conakry, à l’issue d’une réunion avec les représentants de la Cedeao. © JOHN WESSELS/AFP

Le Fonds avait alloué au pays plus de 280 millions de dollars en droits de tirage spéciaux, quelques semaines avant le coup d’État de septembre 2021.

Des cadres du Fonds monétaire international (FMI) – une équipe menée par Clara Mira –, viennent de boucler une visite virtuelle avec les autorités guinéennes, au cours d’échanges organisés du 28 février au 4 mars. Face à l’équipe du personnel du FMI, il y avait notamment Lanciné Condé, le ministre de l’Économie, des Finances et du Plan, ses homologues du Budget, Moussa Cissé, de l’Énergie, de l’Hydraulique et des Hydrocarbures, Ibrahima Abé Sylla, et le gouverneur de la Banque centrale Karamo Kaba. L’équipe a pu également s’entretenir avec le Premier ministre Mohamed Béavogui.

Incertitude politique prolongée

À l’issue de ces échanges, l’équipe du FMI a jugé l’économie guinéenne « résiliente » et caractérisée par une croissance « élevée et soutenue » du secteur minier. Les dirigeants du Fonds ont constaté « une reprise progressive – modérément plus lente que prévu » du secteur non-minier. Pour cette année, le FMI anticipe une croissance de 5 % du PIB de la Guinée, grâce notamment à la production minière, nonobstant l’atténuation des conséquences du Covid-19 sur l’économie, et le règlement attendu par le gouvernement de ses arriérés de paiement. L’institution multilatérale a toutefois alerté quant aux dangers posés par les autres facteurs, comme les effets globaux de l’invasion russe en Ukraine, et les risques d’« une incertitude politique prolongée » qui pourraient « peser sur les perspectives ».

De leurs côtés les autorités guinéennes ont tenu à rassurer les représentants du Fonds. En août 2021, le FMI avait alloué 205,3 millions de Droits de tirage spéciaux (DTS) à la Guinée (environ 284 millions de dollars), afin notamment d’atténuer les effets de la crise du Covid-19 sur les économies et permettre une relance soutenue. Au total, le Fonds a accordé 33 milliards de dollars en DTS aux pays africains, dont 23 milliards de dollars pour les pays subsahariens, précisait en février à Jeune Afrique, Kristalina Georgieva, directrice générale du FMI.

MAMADI DOUMBOUYA A CONVOQUÉ LES OPÉRATEURS ÉCONOMIQUES POUR LES METTRE EN GARDE CONTRE LA SPÉCULATION SUR LES PRIX

Les autorités guinéennes se sont en particulier engagées à utiliser les 205,3 millions de DTS « avec prudence et transparence », afin de « soutenir les investissements dans les infrastructures et les secteurs sociaux », ce qu’espèrent les services du Fonds monétaire. Outre les DTS alloués en août, les créances de la Guinée auprès du FMI atteignent 26,78 millions de DTS prêtés, eux, dans le cadre d’une facilité élargie de crédit de 152,75 millions de DTS, signée en décembre 2016. « En outre, en 2014 et en 2020, le FMI a apporté une aide d’urgence dans le cadre de la facilité de crédit rapide et accordé un allégement de la dette afin de dégager des ressources » au pays, rapporte l’institution multilatérale.

Protéger la population vulnérable

Les cadres du FMI ont, par ailleurs, appelé le gouvernement guinéen à « continuer à protéger les plus vulnérables contre les conditions difficiles ». Une tâche « essentielle » selon le Fonds, alors que les tensions inflationnistes sont de plus en plus persistantes. Le 10 mars, le lieutenant-colonel Mamadi Doumbouya, à la tête de l’exécutif depuis le coup d’État perpétré le 5 septembre 2021, a convoqué les opérateurs économiques pour les mettre en garde contre la spéculation sur les prix (déjà élevés), notamment des denrées de première nécessité.

Deux jours auparavant, à l’occasion de la célébration de la Journée internationale des droits des femmes, des Guinéennes n’ont pas manqué d’entonner des slogans, comme : « Doumbouya, le marché est cher ! » Pour ne rien arranger, l’arrivée du mois de ramadan est imminente (début avril à début mai 2022). Cette période de jeûne en islam est accompagnée généralement d’une hausse des prix…

Avec Jeune Afrique par Diawo Barry – à Conakry

Ukraine-Russie : le FMI prêt à aider une Afrique « particulièrement vulnérable » aux répercussions de la guerre

mars 11, 2022

Pour la directrice générale du Fonds monétaire international, outre les « millions de vies dévastées », cette guerre, qui intervient dans un contexte de reprise post-Covid-19, « menace d’anéantir une partie » des progrès réalisés sur le continent.

Dans un message transmis le 10 mars, Kristalina Georgieva est revenu sur les conséquences de l’invasion russe en Ukraine sur les économies africaines. « L’Afrique est particulièrement vulnérable aux impacts de la guerre en Ukraine par le biais de quatre canaux principaux : augmentation des prix des denrées alimentaires, hausse des prix des carburants, baisse des revenus du tourisme, et potentiellement plus de difficultés à accéder aux marchés de capitaux internationaux », a indiqué la directrice générale du FMI, à l’issue d’une rencontre organisée le 9 mars avec les ministres africains des Finances, les gouverneurs des banques centrales africaines et les représentants de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA).

« La guerre en Ukraine dévaste la vie de millions de personnes et affecte gravement l’économie ukrainienne. La guerre et les sanctions sans précédent imposées à la Russie ont des conséquences d’une portée considérable. Elles surviennent à un moment délicat pour l’Afrique », a-t-elle ajouté.

Menace sur les progrès réalisés

L’économiste bulgare, ancienne n°2 de la Banque mondiale et ex-commissaire européenne à la Coopération internationale, a déploré que pendant que l’économie mondiale et le continent « commencent à se remettre des ravages de la pandémie de Covid-19, cette nouvelle crise menace de réduire à néant une partie de ces progrès ». Elle s’est toutefois dite « très encouragée par le fort intérêt des décideurs politiques africains à poursuivre notre dialogue sur les réponses politiques ».

« J’ai noté, en particulier, les préoccupations importantes concernant l’espace politique national limité pour faire face durablement aux crises en cours », a-t-elle indiqué, laissant entendre en langage FMI que le Fonds est prêt à être flexible quant au respect ultra-strict des réformes demandées en échange des financements. Certaines d’entre elles, en particulier la suppression des subventions générales sur les produits énergétiques, s’avérant difficiles à réaliser, alors que le baril de brut a pris plus de 30 dollars entre la veille de l’entrée des forces russes en Ukraine et début mars. À plus de 113 dollars, le baril de brut est aujourd’hui à son plus haut niveau depuis avant la crise financière de 2008.

LES RÉCENTES RÉFORMES DE LA BOÎTE À OUTILS DE PRÊT DU FONDS OFFRENT UNE PLUS GRANDE FLEXIBILITÉ POUR AIDER À RÉPONDRE AUX BESOINS DE FINANCEMENT.

« En ce moment difficile, le Fonds est prêt à aider les pays africains à faire face aux répercussions de la guerre et à concevoir et mettre en œuvre des réformes grâce à ses conseils en matière de politique, au développement des capacités et à ses prêts. Les récentes réformes de la boîte à outils de prêt du Fonds offrent une plus grande flexibilité pour aider à répondre aux besoins de financement », a conclu la patronne du FMI.

Un conflit qui n’était pas prévu

Dans la dernière mise à jour du rapport Perspectives de l’économie mondiale du FMI, datée de janvier 2022, la possibilité d’une crise sur le continent européen n’était pas envisagée et le mot Ukraine n’apparaît nulle part. Le rapport pointait toutefois, déjà, que « la hausse des prix des denrées alimentaires a contribué à l’augmentation de l’inflation, par exemple en Afrique subsaharienne ».

L’institution multilatérale tablait toutefois sur une relance de l’économie, avec une hausse estimée de 4 % du PIB pour l’année 2020 au sud du Sahara, après une baisse de 1,7 % en 2020. Le Fonds anticipait une progression en 2022 et 2023 de respectivement 3,7 % et 4 %, en très léger recul (-0,1 point dans les deux cas) par rapport aux prévisions d’octobre 2021.

Il est à noter que le 9 mars, le Fonds a approuvé le décaissement de 1,4 milliard de dollars en faveur de l’Ukraine « pour répondre à des besoins urgents de financement et atténuer les répercussions économiques de la guerre ».

Avec Jeune Afrique par Joël Té-Lessia Assoko