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Les ports ukrainiens fonctionnent à nouveau, un pont clef frappé par l’armée de Kiev dans le sud

juillet 27, 2022
Les ports ukrainiens fonctionnent a nouveau, un pont clef frappe par l'armee de Kiev dans le sud
Les ports ukrainiens fonctionnent à nouveau, un pont clef frappé par l’armée de Kiev dans le sud© UKRAINIAN EMERGENCY SERVICE/AFP/STR

Les trois ports ukrainiens désignés pour les exportations de céréales ont recommencé mercredi à fonctionner, tandis que l’armée ukrainienne a en partie détruit un pont d’importance stratégique dans la région méridionale de Kherson occupée par les Russes et que les forces de Kiev cherchent à reprendre.

Le gouvernement ukrainien s’attend à ce que les premiers chargements puissent quitter « dès cette semaine » les ports de la mer Noire où ils étaient bloqués depuis le début de l’invasion russe le 24 février, sur fond de flambée des prix des denrées alimentaires à travers le monde.

En application là aussi des accords signés pour quatre mois le 22 juillet à Istanbul, le Centre de coordination conjointe (CCC) chargé du contrôle du transport via la mer Noire des grains ukrainiens a été officiellement inauguré le même jour dans cette métropole turque.

Autre conséquence de l’offensive russe, le gazoduc Nord Stream 1 entre la Russie et l’Allemagne n’est désormais plus en service, comme cela était prévu, qu’à environ un cinquième de sa capacité, renforçant les risques de pénuries cet hiver en Europe.

Des convois pour transporter les céréales

« Les ports d’Odessa, de Tchornomorsk et de Ioujny (Pivdenny, ndlr) ont repris le travail », a annoncé mercredi la marine ukrainienne.

« La sortie et l’entrée des navires dans les ports maritimes se feront par la formation d’un convoi qui accompagnera le navire de tête », a-t-elle poursuivi.

Kiev et Moscou se sont mis d’accord à Istanbul, via une médiation de la Turquie et sous l’égide de l’ONU, pour permettre la livraison à l’étranger des quelque 25 millions de tonnes de céréales coincées dans les ports ukrainiens.

Les responsables ukrainiens ont toutefois dit à plusieurs reprises ne pas faire confiance à Moscou pour assurer la sécurité des convois et rappellent les tirs de missiles russes samedi sur le port d’Odessa.

Le Kremlin a pour sa part déclaré ne pas voir d’obstacles à la reprise des exportations, également entravées par la présence de mines marines déposées par les forces ukrainiennes pour se prémunir d’un assaut amphibie russe.

Le déminage n’aura lieu que « dans le couloir nécessaire aux exportations », a souligné Kiev.

Pont « très endommagé »

Enjambant le Dniepr en banlieue de Kherson, le pont Antonovski, clef pour le ravitaillement, a été partiellement mis hors d’état mercredi par une attaque ukrainienne.

Cet ouvrage « est très endommagé » et « les Russes n’ont pas les spécialistes et l’équipement pour le réparer à court terme », a commenté le chef adjoint du conseil régional, Iouri Sobolevski, affirmant que « le pont ne pourra pas être utilisé pour faire traverser des équipements militaires lourds ».

« Ceux qui ont tiré sur le pont ont juste rendu la vie un peu plus difficile à la population », a relativisé Kirill Stremooussov, un haut représentant des autorités d’occupation russes.

Kherson est située à quelques kilomètres du front sud où les forces ukrainiennes ont déclenché une contre-offensive afin de reconquérir ces territoires perdus dans les premiers jours de l’assaut russe contre l’Ukraine.

Essentielle pour l’agriculture ukrainienne, la région est aussi stratégique car limitrophe de la péninsule de Crimée, annexée par Moscou en 2014.

Dans l’est de l’Ukraine, le bassin minier du Donbass a été le théâtre d’intenses combats.

Deux personnes ont été tuées et cinq blessées dans le bombardement d’un hôtel à Bakhmout, ont annoncé les services d’urgence ukrainiens.

Des journalistes de l’AFP présents dans cette cité, l’une des dernières du Donbass à rester sous contrôle ukrainien, ont entendu des tirs d’artillerie sporadiques et vu une maison touchée par un obus russe.

« J’étais dans la grange et j’allais sortir. J’ai entendu un sifflement. Et je ne me souviens plus de rien. Ça a explosé et j’ai été projeté dans la grange » par le souffle, a raconté à l’AFP Roman, 51 ans.

Moins de gaz russe livré à l’Europe

Dans le contexte du bras de fer énergétique entre Moscou et les Occidentaux depuis le début du conflit, l’arrivée de gaz en provenance de Russie en Allemagne était mercredi de quelque 14,4 gigawattheures (GWh), contre près de 29 GWh en moyenne ces derniers jours, a déploré l’opérateur allemand Gascade, qui gère le réseau sur le territoire allemand.

L’approvisionnement de l’Allemagne – particulièrement dépendante du gaz russe – mais aussi d’autres pays européens via ce tuyau installé au fond de la mer Baltique avait déjà été réduit à 40 % de la normale mi-juin, avant un arrêt complet pour une maintenance annuelle entre les 11 et 21 juillet.

Lundi, Gazprom a fait savoir qu’il allait encore diviser par deux ses livraisons quotidiennes via Nord Stream, invoquant une opération d’entretien sur une turbine.

Un porte-parole du Kremlin a affirmé mardi que la réduction de débit s’expliquait par les sanctions occidentales prises contre la Russie.

Mais les Européens accusent Moscou d’utiliser le gaz en tant qu’arme économique et politique.

Face à des risques de pénurie, les prix du gaz ont continué à monter. Mercredi matin le TTF néerlandais, la référence du gaz naturel en Europe, avait progressé de plus de 9 %. Depuis le début de la semaine, le TTF a bondi de 35 %.

Mercredi soir, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a par ailleurs assuré que son pays s’apprêtait à augmenter ses exportations d’électricité vers l’Union européenne pour aider l’Europe à « résister à la pression énergétique » de Moscou.

« Nous allons augmenter nos exportations d’électricité aux consommateurs de l’Union européenne », a déclaré M. Zelensky dans son adresse vidéo quotidienne.

« Nos exportations nous permettent non seulement d’augmenter nos revenus en devises, mais aussi d’aider nos partenaires à résister à la pression énergétique russe. Nous allons progressivement faire de l’Ukraine un pays garant de la sécurité énergétique de l’Europe », a-t-il dit.

Par Le Point avec AFP

Le café est un combustible pouvant faire tourner des usines

novembre 12, 2016

Traversée d’une Afrique bientôt électrique (6). Lean Energy Solutions produit 40 tonnes par jour de briquettes des déchets agricoles, qui remplacent le gaz ou le diesel. Coca-Cola ou Unilever sont preneurs.

Les briquettes sont chargées dans la chaudière pour alimenter le foyer. Ici dans l’usine de textile de Spinners & Spinners, au Kenya.

Les briquettes sont chargées dans la chaudière pour alimenter le foyer. Ici dans l’usine de textile de Spinners & Spinners, au Kenya. Crédits : Matteo Maillard
Imaginons une scène du quotidien kényan. Un homme est attablé dans un des nombreux cafés bondés et bruyants du centre de Nairobi, la capitale. Il porte un pull rouge seyant tout en sirotant son soda glacé. Il ne se doute pas un instant qu’en effectuant ces gestes simples, revêtir ce pull et boire ce soda, il participe à une petite révolution verte pour les industries : la briquette écologique. Pour comprendre son origine, reculons de quelques mètres, derrière le comptoir où un barista s’agite devant sa machine à expresso. Les grains de café qu’il moud proviennent des hauts plateaux au centre du pays, dans la région du Mont Kenya. Là, dans les cultures de caféiers, des femmes en cueillent les fruits. Puis un procédé mécanique débarrasse la graine de son enveloppe. Cet exocarpe, impropre à la consommation, est écarté et jeté.

Faire tourner une usine avec les coques des graines de café

Mais depuis 2006, Lean Energy Solutions, une entreprise kényane, récupère ces déchets pour les valoriser. Elle a fourni aux ouvrières des plantations de grandes bâches en plastique noir et, contre rémunération, leur demande de verser les coques de café sur celles-ci afin qu’elles sèchent au soleil. Elles seront ensuite transportées par camion dans l’une des usines de briquettes de la société. Dans celle de Kiambu, près de Nairobi, il n’y a même pas besoin de transport. L’usine se trouve en face d’une fabrique de café. Depuis celle-ci, un convoyeur d’une cinquantaine de mètres a été construit au-dessus des bâtiments. Il transporte les coques, rachetées à moindre coût, jusque dans une grande salle où elles s’empilent sur plusieurs mètres.

Des empoyés de Lean Energy chargent le compresseur avec la sciure de bois et les coques de café. Ici dans l’usine de Kiambu de Lean Energy, près de Nairobi.

Des empoyés de Lean Energy chargent le compresseur avec la sciure de bois et les coques de café. Ici dans l’usine de Kiambu de Lean Energy, près de Nairobi. Crédits : Matteo Maillard

Puis les déchets végétaux du café sont mélangés à d’autres débris organiques récupérés par l’entreprise : la sciure de bois, la bagasse de canne à sucre et les résidus de charbon. Encore humide, le mélange traverse un immense séchoir au bout duquel un compresseur l’agglomère en des rondins friables, plus communément appelés briquettes à cause de leur important pouvoir calorifique. Chaque jour, dans cette usine, 80 tonnes de débris servent à produire 40 tonnes de briquettes que quatre camions porteront aux entreprises qui les achètent.

Un ouvrier remplit le séchoir des débris organiques. Crédits : Matteo Maillard

Lean Energy a passé des contrats avec douze sociétés basées au Kenya et deux en Tanzanie qui ont toutes installé une chaudière industrielle à cet effet. Parmi les clients les plus importants, on compte les géants de l’agroalimentaire Unilever, Coca-Cola, Pepsi-Cola et des sociétés de textile comme Spinners & Spinners. C’est dans les bâtiments de cette dernière que nous nous rendons pour observer comment des graines de café peuvent faire tourner une usine.

Crédits : Infographie Le Monde

La chaudière est une immense fournaise en fonte. Deux opérateurs la chargent de pelletées de briquettes afin de maintenir la pression entre 7,5 et 8,5 bars, jour et nuit. L’eau froide bout rapidement et produit une vapeur à 250 degrés qui se faufile à travers les conduits de l’entreprise de textile jusqu’au département des teintures où, par imprégnation et vaporisage, le pull de notre buveur de soda prend sa jolie teinture rouge carmin.

La fabrique de textiles de Spinners & Spinners à Nairobi.

La fabrique de textiles de Spinners & Spinners à Nairobi. Crédits : Matteo Maillard

D’ailleurs, qu’en est-il de son soda ? Il faut, pour le savoir, faire 350 kilomètres en direction de l’est du Kenya, dans l’usine Coca-Cola de Kisumu. Là, une chaudière semblable a été installée à l’extérieur du bâtiment. Comme pour l’autre, deux opérateurs de Lean Energy se chargent de l’alimenter. La vapeur produite est utilisée dans l’usine pour nettoyer les bouteilles en verre vides et dans la transformation du sirop concentré en boisson gazeuse.

La sciure de bois et les coques de café sont compressées pour faire les briquettes, dans l’usine de Kiambu de Lean Energy, à Nairobi.

La sciure de bois et les coques de café sont compressées pour faire les briquettes, dans l’usine de Kiambu de Lean Energy, à Nairobi. Crédits : Matteo Maillard

« Auparavant, toutes ces usines utilisaient des chaudières au mazout ou au diesel, explique Dinesh Tembhekar, directeur de Lean Energy. Pour les convaincre, nous leur avons proposé d’installer à nos frais notre chaudière à briquettes à côté de leur usine afin de produire une vapeur écologique qu’on leur vendait 25 % moins cher que leurs dépenses en mazout. Ainsi, ils étaient doublement gagnants. »

Dinesh Tembhekar, directeur de Lean Energy dans les nouveaux locaux.

Dinesh Tembhekar, directeur de Lean Energy dans les nouveaux locaux. Crédits : Matteo Maillard

Cette stratégie verte a permis à Lean Energy de signer des contrats de huit ans avec ces compagnies et de bénéficier d’une ligne de crédit de l’Agence française de développement (AFD, partenaire du Monde Afrique). « Produire une tonne de briquettes revient à créer 12 jours de main-d’œuvre pour un Kényan et à réduire d’une tonne les émissions de C02, poursuit-il. Les industries locales n’ont plus besoin d’importer du diesel ou du mazout des pays du Golfe. Tout est fait sur place, et reste sur place ».

Lean Energy emploie 400 personnes à travers le pays, dont une majorité de femmes en travail temporaire

Lean Energy emploie 400 personnes à travers le pays, dont une majorité de femmes en travail temporaire Crédits : Matteo Maillard

Modèle de succès kényan dans les énergies renouvelables, Lean Energy emploie 400 personnes à travers le pays, dont une majorité de femmes en travail temporaire. « Chaque année nous grandissons de 40 % et doublons notre personnel », lance M. Tembhekar. Une croissance insolente qui lui a permis d’installer son entreprise dans de nouveaux locaux et d’établir des partenariats avec le groupe français Schneider Electric. Désormais, elle investit aussi le marché du solaire en proposant des éclairages publics photovoltaïques et, à l’instar de D. Light ou de M-Kopa, des kits solaires domestiques pour les foyers kényans sans électricité.

Prochaine étape ? « Le marché rwandais puis, peut être, ougandais », confie-t-il à discrétion. Musique d’avenir ambitieuse. « Le continent est vaste, regorge de solutions énergétiques vertes et de ressources inépuisables. » Il tapote sur le bureau puis se redresse sur sa chaise. « Vous voulez un café ? »