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Congo-Disparition : Ignace Makirimbia conduit à sa dernière demeure

janvier 16, 2023

Décédé le 23 décembre 2022 à Kinshasa, en République démocratique du Congo (RDC), à l’âge de 78 ans suite à un malaise, le percussionniste des Bantous de la capitale, Ignace Makirimbia dit Mignon, a été conduit à sa dernière demeure au cimetière privé Bouka, à Kintélé. Bien avant, une cérémonie de recueillement a eu lieu au siège du cinquième arrondissement de Brazzaville, Ouenzé.

1-Le président du bureau exécutif des Bantous, Maurice Nguesso, déposant la gerbe de fleurs sur la dépouille d’ Ignace Makirimbia / Kinzenguélé

La cérémonie s’est déroulée en présence du président du bureau exécutif des Bantous de la capitale, Maurice Nguesso, des administrateurs maires de l’arrondissement 5, Marcel Nganongo, et de l’arrondissement 9 Djiri, Ida Victorine Ngampolo, du ministre honoraire Alain Akouala Atipault et bien d’autres.

Né en 1944 à Brazzaville de père originaire de la RDC et de mère de la République du Congo, Ignace Makirimbia dit Mignon, l’un des meilleurs percussionnistes des deux Congo jusqu’au dernier jour de sa vie, a passé son adolescence et sa jeunesse à Kinshasa. Après avoir longtemps évolué dans les tam-tam tékés au sein des groupes traditionnels de Brazzaville, il a tenté sa chance dans une carrière professionnelle à Kinshasa puis à Brazzaville, où il a presté dans plusieurs groupes. Moins connu du grand public, comme l’écrit Herman Bangi Bayo, il est considéré comme étant l’un des meilleurs percussionnistes des années 1960 et 1970 des deux rives du fleuve Congo.

C’est dans « Vox Africa » de Jeannot Bombenga qu’il démarre sa carrière musicale en 1966 aux côtés de Sam Mangwana, Ntessa Dalients, Papa Noël Nedule. Sa maîtrise des rythmes rumba et afro-cubains ont fait de lui la perle rare qu’il fallait avoir dans son groupe. Ainsi, après Vox Africa, il se retrouve avec Sam Mangwana dans l’African fiesta national de Rochereau de retour de Montréal, au Canada. Il est entraîné après par Sam Mangwana qui vient de quitter l’African fiesta pour le Festival des maquisards, un groupe qu’il a monté avec ses amis Guyvano, Dalienst, Lokombe, Dizzy Mandjeku, Diana. A la dislocation du Festival des maquisards, Ignace Makirimbia est à la création de l’orchestre Continental de Me Taureau Gombe en compagnie de Josky Kiambukuta, Bopaul Mansiamna, Lokasa ya Mbongo, Wuta Mayi, Tino Mwinkwa, Siran Mbenza, Eddy Mahungu dans lequel il y a joué presque toutes les chansons à succès.

En 1972, il participe à la naissance de l’orchestre Bella Bella des frères Soki et sort la chanson « Emilie Molangi« . Très proche de Sam Mangwana, Makirimbia quitte Bella Bella pour le rejoindre dans l’Afrisa international de Rochereau Tabu Ley qu’il intègre avec le statut de musicien indépendant. Malheureusement, Sam Mangwana n’y reste pas longtemps car, il le quitte pour l’Ok Jazz de Luambo Makiadi Franco. Lors d’un déplacement de l’Ok Jazz au Tchad, Luambo Makiadi Franco va débaucher Ignace Makirimbia pour les accompagner. Il joue pendant un bout de temps dans cet orchestre, avant de regagner Brazzaville où il passe dans les Trois frères avec Locko Massengo, Michel Boyimbanda et Youlou Mabiala qu’il va suivre dans l’orchestre Kamikaze Loningissa où il trouve Souza Vangu. En 2000, il séjourne quelque temps chez les Bantous de la capitale avant d’aller renforcer Bana Poto-Poto de Bienvenu Faignond et Souza Vangu aux côtés des saxophonistes Coplan et Adampot.

Ignace Makirimbia, un artiste qui a partagé sa vie avec les autres

2- L’artiste musicien Michel Boyimbanda s’inclinant devant la dépouille mortelle du disparu / Adiac

En 2012, Ignace Makirimbia regagne les Bantous de la capitale, après la mort de Souza Vangu qui a dirigé Bana Poto-Poto suite au décès de Bienvenu Faignond. Depuis lors, il n’a jamais quitté les Bantous de la capitale jusqu’à sa mort, le 23 décembre 2022 à Kinshasa. « La disparition d’Ignace Makirimbia, surnommé Mignon par sa mère, est une énorme perte pour les Bantous de la capitale et pour la musique des deux rives, lui qui a été considéré comme le digne successeur des grands percussionnistes tels que Dessouin, Pandi Saturnin… », a déclaré le chargé de la communication du bureau exécutif des Bantous, Médard Milandou, dans son oraison funèbre. 

Bien auparavant, Horty Mabama, petite fille d’Ignace Makirimbia, a lu le mot de circonstance de la famille. Le soleil se lève chaque matin comme un héros, parcourt la terre et se couche le soir après avoir accompli sa mission, a-t-elle dit … Ta famille, tes amis, tes collègues, tous ceux qui t’ont connu t’appréciaient, tu étais un homme sympa, un homme qui a appris à partager son pain avec l’affamé, son eau avec l’assoiffé et qui donnait son vêtement à celui qui n’en avait pas, bref, tu as partagé ta vie avec les autres, a-t-il ajouté, concluant: « Nous sommes tous là, pour te rendre ce dernier hommage. Tu pars avant nous, bien trop tôt, bien trop vite. Ta disparition nous rappelle comme une évidence que nous sommes finalement bien peu des choses et qu’il faut profiter de chaque minute, de chaque seconde ici-bas, sur terre pour être prêt. Tu as été un rassembleur, un pilier pour la famille. Aujourd’hui comme le soleil qui s’est couché, tu te reposes de tous tes labeurs en héros qui a accompli sa tâche. Que tes bonnes œuvres te suivent … »  

A l’issue de l’oraison funèbre, le président du bureau exécutif des Bantous, Maurice Nguesso, a indiqué que la disparition d’Ignace Makirimbia est un regret généralisé pour tous ceux qui aiment la musique que de perdre un homme de valeur. « C’est le regret de tout le monde, il n’y a pas d’autres expressions. En tant que père de famille des Bantous de la capitale, je dis que la perte de Makirimbia est un souvenir de regret, il nous manque. En cas de guerre, ce n’est pas toujours le général qui combat, la victoire du général est couronnée par les militaires et autres. Pour le cas des Bantous de la capitale, Makirimbia nous manque beaucoup », a-t-il déclaré.

Notons que l’esplanade de la mairie de Ouenzé où les orchestres Bantous de la capitale et Mbassi-Ndzoumou ont presté sera désormais dénommé Espace Bantous de la capitale. Chaque dimanche le groupe Bantous de la capitale s’y produira, selon sa disponibilité.  L’administrateur maire de cet arrondissement, Marcel Nganongo, qui a livré l’information au public, prendra assurément une note pour entériner cette décision.

Avec Adiac-Congo par Bruno Okokana

Congo-Disparition : l’orchestre Bantous de la capitale pleure MPassi Ngongo Mermans

décembre 29, 2022

Le mi-soliste des Bantous de la capitale, Alphonse Mpassi Ngongo dit Mpassi Mermans, a tiré sa révérence le 28 décembre aux premières de la matinée, au Centre hospitalier universitaire de Brazzaville (CHU), à l’âge de 80 ans. Sa mort intervient cinq jours après celle de son collègue, le percussionniste Ignace Makirimbia, décédé le 23 décembre à Kinshasa, en République démocratique du Congo (RDC), alors qu’il y était en séjour.

1- Mpassi Ngongo Mermans / DR

Guitariste, auteur-compositeur et arrangeur, Mpassi Mermans a rejoint ses pairs des Bantous de la capitale, comme ce fut le cas pour le percussionniste Ricky Siméon Malonga dit Ricky Siméon “le gardien du temple”, décédé le 1er mai dernier à Brazzaville, à l’âge de 80 ans lui aussi. Né le 25 novembre 1942 à Madzia, département du Pool, Mpassi Ngongo Mermans a été le premier guitariste mi-soliste dans l’histoire de la rumba. En effet, après le départ de Papa Noël, il était devenu le seul soliste des Bantous de la capitale, mais avec la venue de Gerry Gérard, lui aussi soliste, il s’est posé la question du positionnement. Pour ne pas le mettre à l’écart, est ainsi créé le poste de mi-soliste. Du coup Les Bantous sont passés pour le premier orchestre à faire jouer quatre guitaristes. Il s’est agi de la guitare solo, guitare mi-solo, guitare accompagnement et la guitare base.

Amoureux de l’art d’Orphée

Mpassi Mermans a pris goût de la musique alors qu’il était encore à l’école primaire en classe de CE2, à Kibouendé, dans le Pool où il résidait. A l’âge de 16 ans en 1958, il monte son premier orchestre, Syncope Jazz, dans ladite localité. Une année après, il trouve l’emploi à Mfoati, dans le département de la Bouenza. Pendant ce temps, l’orchestre Les Bantous de la capitale voit le jour. En 1960, à l’âge de 18 ans, il quitte Mfoati pour Brazzaville. Amoureux de la musique, il relance avec ses anciens musiciens de Syncope Jazz leur groupe, mais cette fois-ci en changeant d’appellation ; de Syncope Jazz, il devient Mondo Negro Kwala-kwa et il dirige ce groupe pendant trois ans. C’est finalement en juillet 1963 qu’il va intégrer Les Bantous de la capitale dont il était un fanatique fieffé et surtout du brillant guitariste Papa Noël. Il tenait à jouer de la guitare comme lui. Il est admis dans ce groupe le même jour que deux autres artistes de renom, Pamelo Mounka et Samba Mascotte. Après plusieurs mouvements de va-et-vient, Mpassi Mermans va regagner Les Bantous de la capitale en 1997 jusqu’au dernier jour de sa vie, le 28 décembre 2022 ;

Quant à sa discographie, Mpassi Mermans a, à son actif, plusieurs chansons, parmi lesquelles “Libala é keséni”, “Badeti”, “Bu boté mona pelé”, “C’est sérieux tantine”, “A mon avis ». C’est en 1972 qu’il a sorti son premier album en solo. Ceci se passe à l’issue de la première scission de l’orchestre, exclu par Nino Malapé au même moment que Célestin Nkouka, Edo Ganga, Pamelo Mounka, Kosmos Moutouari et Théo Bitcheko. C’est ainsi qu’il va créer avec Ganga Edo et Théo Bitcheko l’orchestre Les Nzoï, avant d’être rejoints par Ange Linaud. Au sein de cet orchestre, Mpassi Mermans lance l’album « Bani-bani » qui connaîtra un grand succès. Malheureusement, l’aventure avec Les Nzoï ne va pas durer longtemps. Mpassi Mermans quitte ce groupe pour créer un autre qu’il va dénommer Lissolo. Le premier 45 tours de cet orchestre est enregistré à Kinshasa. Une autre composition de Mpassi Mermans, “Lemba”, dans l’orchestre National, en 1976, est un disque 33 tours. En 1981, il met sur le marché du disque son premier album en solo « Monia », de quatre titres en France. En 1988, suite à la maladie de Pamelo Mounka, Mpassi Mermans quitte Les Bantous de la capitale pour créer Les Bantous Monuments en 1990. Il sort ensuite un autre album en solo intitulé « Ton ami n’est pas ton ami », en 1992, en France, dans lequel il mettra un titre en hommage à Samba Mascotte.

2 -Ignace Makirimbia / DR

Ignace Makirimbia

Véritable fils de la cité Ngamaba, à Brazzaville, Ignace Makirimbia a longtemps marqué ses connaissances dans les tumbas au sein des groupes traditionnels tékés communément appelés Tékés de Brazzaville. Son savoir-faire va le pousser à tenter une carrière professionnelle à Kinshasa et dans l’orchestre Continental où il s’est fait connaître dans le grand milieu musical, au point où il a joué dans plusieurs groupes, à l’instar du Continental de Me Taureau Gombe en compagnie de Josky Kiambukuta, Wuta Mayi, Tinio Mwinkwa, Siran Mbenza…, d’Afrisa de Tabu Ley Rochereau, … Très proche de Sam Mangwana, Ignace Makirimbia a été dans toutes ses aventures. Ils sont liés dans Vox Arriva de Jeannot Bombenga, ensuite dans Festival de maquisards… De retour à Brazzaville au cours des années 2000, il va passer directement chez les Bantous où il évolue dans un premier temps avec son cadet Robert Massengo, puis va dans Bana Poto-Poto de Bienvenu Rolland Faignand, avant de regagner Les Bantous jusqu’à sa mort le 23 décembre dernier, à Kinshasa.

Notons que Mpassi Mermans est de la deuxième génération après celle des co-fondateurs, à savoir Edo Ganga, Saturnin Pandi, Jean Serge Essous (premier chef d’orchestre), Nino Malepet (deuxième chef d’orchestre), Célestin Nkouka, Daniel Loubelo De la lune. Il est de la génération de Pamelo Mounka, Samba Mascotte, Théo Bitsikou, Michel Boyibanda, Gerry Gérard (qui ont tous tiré leur révérence). Les deuils de MPassi Mermans et Ignace Makirimbia se tiennent respectivement au 17 de la rue Matouba-Abraham, arrêt Mitoko Château d’eau pour Mpassi Mermans, et 20 rue Loubomo, Talangaï, arrêt Ebina, pour Ignace Makirimbia.

Avec Adiac-Congo par Bruno Okokana