
À l’Université McGill et dans les autres établissements anglophones du Québec, les étudiants pourraient bientôt devoir prouver qu’ils ont étudié pendant au moins trois ans en français pour bénéficier du PEQ. Photo : La Presse Canadienne/Ryan Remiorz
Les nouvelles règles d’immigration sur lesquelles planche Québec prévoient notamment que les étudiants internationaux maîtrisant bien le français pourront immigrer plus rapidement que les autres. Cela ne signifie toutefois pas que les étudiants anglophones ne pourront plus s’installer au Québec, précise le gouvernement.
Jeudi, lors de la présentation de son document de consultation sur les réformes envisagées en immigration, le gouvernement Legault indiquait vouloir modifier de nouveau le Programme de l’expérience québécoise (PEQ), volet Diplômés du Québec
. Il s’agit de faciliter et d’accélérer l’immigration aux seuls étudiants maîtrisant bien le français.
Outre le fait que les candidats n’auraient plus à détenir l’expérience de travail exigée ni à travailler au moment de la demande, Québec veut réserver cette voie rapide vers l’immigration permanente aux étudiants qui auront étudié au moins trois ans en français. Que ce soit au niveau secondaire ou au niveau postsecondaire.
Le gouvernement assure que cela ne nuira pas aux admissions dans les universités anglophones.
Par exemple, un Français ou un Belge étudiant à Concordia en anglais pourra se qualifier pour le PEQ-Diplômés, a résumé la ministre de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration du Québec, Christine Fréchette, en entrevue à l’émission Tout un matin sur ICI Première.
La ministre de l’Immigration, Christine Fréchette Photo : Radio-Canada/Marie-Eve Cloutier
Dans son document de consultation, le gouvernement qualifie ces étudiants francophones de candidats idéaux
, dans le sens où ils sont déjà intégrés dans la communauté francophone du Québec. Ces candidats idéaux
étaient en baisse constante depuis cinq ans (avant le rebond de 2021), au point où, en 2020, il y avait quasiment autant d’étudiants étrangers anglophones que d’étudiants étrangers francophones au Québec.
« L’apport de plus en plus important d’étudiantes et d’étudiants étrangers détenant un diplôme francophone constituera de surcroît un bassin de main-d’œuvre inestimable. »— Une citation de Extrait du document de consultation du ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration
Par ailleurs, le premier ministre François Legault a ajouté que les étudiants internationaux qui ne pourront plus se qualifier au PEQ-Diplômés auront d’autres options s’ils veulent rester au Québec après leurs études.
Ce qu’on dit, c’est qu’à l’avenir le Programme expérience Québec va être réservé à ceux qui étudient en français. Mais rien n’empêche quelqu’un qui vient étudier, ou un travailleur, d’étudier dans d’autres programmes
, a déclaré vendredi M. Legault en marge d’un point de presse.

François Legault lors d’une conférence de presse (Photo d’archives) Photo : Radio-Canada
Le premier ministre fait notamment référence au Programme de sélection des travailleurs qualifiés. Les candidats à ce programme devront avoir un français de niveau 7, c’est-à-dire qu’ils n’ont pas besoin de l’aide de leur interlocuteur pour discuter d’un sujet qu’ils ne connaissent pas à l’avance.
Pour les candidats postulant à ce programme, les démarches risquent toutefois d’être moins simples et moins rapides que dans le cas du PEQ.
Ces nouvelles orientations gouvernementales suscitent un accueil mitigé. Au niveau des étudiants internationaux francophones, il y a un changement de cap très positif. On revient à des conditions du PEQ pré-2020
, note Claire Launay, présidente de l’organisme Le Québec c’est nous aussi, voué à la défense des droits et des conditions de vie des personnes immigrantes au Québec.
Elle déplore toutefois que les personnes non francophones, ou qui n’ont pas suivi un cursus francophone avant de venir ici, et qui vont dans un établissement anglophone au Québec, ne vont pas être [admissibles] au PEQ, même si elles apprennent le français ici
.
Ainsi, elles n’auront pas accès à la voie rapide vers l’obtention du Certificat de sélection du Québec qui mène ensuite vers l’obtention de la résidence permanente.
Le Programme de l’expérience québécoise, c’est un programme qui valorise l’expérience que les personnes ont accumulée au Québec. Donc, c’est quand même un peu particulier de les faire passer par une autre voie
, a souligné Mme Launay.
« C’est comme si on ne reconnaissait pas leur intégration ici, même s’ils ont passé plusieurs années ici et qu’ils ont des diplômes reconnus ici. »— Une citation de Claire Launay, présidente de l’organisme Le Québec c’est nous aussi
Un avis partagé par Laurence Trempe, avocate spécialisée en immigration. Ça va définitivement contribuer à garder les étudiants internationaux, mais par contre il y a d’autres éléments qu’on va devoir étudier par rapport aux étudiants anglophones et qu’est-ce qui arrive au PEQ-Travailleurs qui est un joyau
, souligne-t-elle.
En cinq ans, le nombre de personnes vivant au Québec en vertu du Programme des étudiants étrangers (PEE) a augmenté de 50 %, passant de 61 460 étudiants en 2017 à 93 370 en 2022. En moyenne, environ un étudiant étranger sur 12 décidait d’entamer un processus d’immigration par la suite.
Québec aimerait convaincre Ottawa, qui a la responsabilité de ce programme, de rehausser les taux d’admission d’étudiants africains francophones jugés stratégiques
, car ils maîtrisent généralement bien le français, mais dont les demandes de visas sont rejetées de manière disproportionnée
par Ottawa, selon le gouvernement Legault.
Ces nouveaux changements réglementaires seraient en place à l’automne 2023, sauf pour le Programme de sélection des travailleurs qualifiés qui serait mis en place un an plus tard à cause des planifications informatiques requises
, a indiqué la ministre Fréchette en mêlée de presse vendredi.
Radio-Canada avec les informations de Jacaudrey Charbonneau et de Xavier Savard-Fournier