Moscou – La fille de l’ex-président ouzbek Islam Karimov, un temps toute puissante avant de tomber en disgrâce, a été emprisonnée pour des fraudes atteignant des sommes gigantesques, a annoncé vendredi le parquet de ce pays d’Asie centrale.
Le sort de Goulnara Karimova, fille aînée du président mort il y a un an après plus de 25 ans au pouvoir, faisait l’objet de multiples rumeurs ces dernières années au point que son fils, émigré à Londres, s’est interrogé publiquement en décembre dernier sur son éventuel décès.
Mettant fin au silence des autorités de cette ex-république soviétique à son sujet, le parquet général a indiqué dans un communiqué qu’elle avait été inculpée notamment pour fraude, blanchiment d’argent et recel de devises étrangères. « Elle a été placée en détention », est-il précisé.
Selon la même source, elle appartient à un groupe de crime organisé contrôlant des actifs représentant plus d’un milliard d’euros dans 12 pays, dont des propriétés à Londres, Dubaï, un château près de Paris ou encore une villa à Saint-Tropez sur la Côte d’Azur.
Un temps pressentie pour prendre la succession de son père, qui a passé plus d’un quart de siècle à la tête de cette ex-république soviétique, Goulnara Karimova est tombée en disgrâce après avoir comparé son père à Staline et s’être publiquement attaquée à sa mère et à sa soeur cadette.
Ancienne ambassadrice de son pays aux Nations unies mais aussi connue pour avoir organisé des défilés de mode, lancé une ligne de bijouterie ou interprété des chansons pop, elle a été citée aussi dans des affaires de corruption à grande échelle dans de nombreux pays, en Europe et aux Etats-Unis.
Les rumeurs la disaient assignée à résidence depuis ses critiques visant sa mère et sa soeur sur Twitter et elle n’avait pas assisté aux funérailles de son père en septembre dernier à Samarcande.
S’exprimant pour la première fois à ce sujet, le parquet général a indiqué qu’elle avait été condamnée en 2015 à une peine de contrôle judiciaire pour cinq ans.
Pour le journaliste russe Arkadi Doubnov, expert de l’Asie centrale, cette levée partielle du mystère entourant Goulnara Karimova peut s’expliquer par « la nécessité pour les nouvelles autorités ouzbèkes de montrer des résultats dans l’enquête avant le premier anniversaire de la mort d’Islam Karimov ».
Ces annonces montrent aussi que le gouvernement fait de vrais efforts pour récupérer les actifs à l’étranger liés à Mme Karimova, a-t-il ajouté sur la radio Echo de Moscou.
Mort à 78 ans d’une hémorragie cérébrale, Islam Karimov a été enterré le 3 septembre 2016 et son allié de longue date Chavkat Mirzioïev lui a succédé.
Selon le parquet général, des demandes pour geler les actifs ont été envoyées aux autorités des pays où se trouvent des actifs liés aux activités de Mme Karimova, dont la Suisse, la Suède, l’Espagne, l’Irlande, l’Allemagne ou la Russie.
En France, un appartement parisien, une villa sur la Côte d’Azur et un château proche de la capitale française appartenant à Mme Karimova ou son entourage ont fait l’objet d’une saisie pénale dès 2015.
Des procédures pour corruption ont été lancées dans de nombreux pays, impliquant des groupes de télécoms qui lui auraient payé de confortables pots de vin pour se voir attribuer des licences de téléphonie mobile.
Ces affaires ont notamment éclaboussé l’opérateur russe VEON (ex-Vimpelcom), qui a écopé d’une amende de plusieurs centaines de millions de dollars aux Etats-Unis, et par ricochet le norvégien Telenor, son actionnaire, dont plusieurs dirigeants ont perdu leur poste.
Romandie.com avec(©AFP / 28 juillet 2017 15h00)