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Haïti dit adieu, sous haute sécurité, à son président assassiné

juillet 23, 2021
Haiti dit adieu, sous haute securite, a son president assassine
Haïti dit adieu, sous haute sécurité, à son président assassiné© AFP/Valerie BAERISWYL

Les Haïtiens rendaient vendredi un dernier hommage à leur président assassiné Jovenel Moïse, lors de funérailles nationales placées sous haute sécurité dans le pays rongé par les violences et la pauvreté.

Prévue pour durer toute la matinée, la cérémonie solennelle se déroulait dans la ville de Cap-Haïtien, la métropole septentrionale d’Haïti. M. Moïse, tué le 7 juillet à son domicile de la capitale Port-au-Prince par un commando armé, était originaire du Nord du pays.

Cap-Haïtien était relativement calme au matin, après une journée de tension jeudi. Des policiers ont été déployés un peu partout dans les rues.

Le cercueil de Jovenel Moïse, recouvert du drapeau national et de l’écharpe présidentielle, était exposé sur une esplanade, ornée de fleurs. La dépouille était gardée par des soldats des forces armées d’Haïti.

Martine Moïse, la veuve du président, gravement blessée dans l’attaque, était présente, le bras en écharpe après avoir été soignée dans un hôpital de Floride. Le visage barré d’un masque portant une photo de son mari, elle s’est inclinée devant son cercueil.

Délégation américaine

Des représentants de délégations étrangères, du corps diplomatique et les membres du gouvernement s’étaient succédé auparavant pour lui présenter leurs condoléances.

Le président américain Joe Biden a de son côté envoyé une délégation menée par Linda Thomas-Greenfield, l’ambassadrice des Etats-Unis à l’ONU, et Daniel Foote, le nouvel émissaire américain pour Haïti.

Un bataillon a rendu les honneurs militaires au chef de l’Etat, qui était âgé de 53 ans, avec notamment l’hymne présidentiel, suivi de l’hymne national. La cérémonie religieuse était dirigée par cinq prêtres.

La veuve du président a rendu un hommage appuyé à son mari, à la fructueuse carrière d’entrepreneur avant son entrée en politique, et a déploré sa fin tragique, « sauvagement assassiné », « abandonné et trahi ».

« Quel crime as-tu commis pour mériter un tel châtiment ? », a demandé l’épouse en deuil, coiffée d’un chapeau noir.

« Il connaissait bien les vices de ce système pourri et injuste », a affirmé Mme Moïse, « ce système auquel peu avant lui ont voulu s’attaquer ».

« Il s’est retrouvé du jour au lendemain avec tout le système en bloc, en face de lui », a-t-elle poursuivi, ajoutant toutefois ne vouloir « ni vengeance, ni violence ».

Ces louanges contrastent avec la vive défiance que suscitait avant sa mort M. Moïse au sein d’une bonne partie de la population civile, qui l’accusait d’inaction face à la crise et de dérive autoritaire, après qu’il eut suspendu le parlement.

Reste que l’assassinat du président a encore davantage plongé dans l’incertitude le pays et fait resurgir des tensions historiques au sein de la population.

Présent à Cap-Haïtien, le directeur général de la police nationale, Léon Charles, a notamment été pris à partie jeudi par des habitants qui lui reprochaient d’avoir échoué à protéger le président Moïse, l’enfant du pays.

Ariel Henry, le nouveau Premier ministre qui a pris ses fonctions mardi, a promis de traduire en justice les assassins du chef de l’Etat et d’organiser des élections présidentielle et législatives exigées par la population et la communauté internationale.

Les habitants du Nord d’Haïti rappellent que Jovenel Moïse est le cinquième chef d’Etat originaire de leur région à avoir été tué dans l’Ouest, où se trouve la capitale, Port-au-Prince. Certains accusent les Haïtiens de l’Ouest d’avoir perpétré ces assassinats.

Jeudi, des riverains ont ainsi érigé des barricades sur les routes nationales qui mènent au Cap-Haïtien afin, ont-ils affirmé, d’empêcher les habitants de Port-au-Prince de venir assister aux funérailles.

Avec Le Point avec AFP

Haïti-Assassinat de Jovenel Moïse : son chef de la sécurité serait détenu

juillet 15, 2021

Le chef de la sécurité du Palais national haïtien, Dimitri Hérard, est détenu par la police nationale dans le cadre de l’enquête sur l’assassinat du président Jovenel Moïse, rapportent jeudi le Washington Post et CNN.

Le chef de l'Unité de sécurité générale du Palais national, Dimitri Hérard.

© – Le chef de l’Unité de sécurité générale du Palais national, Dimitri Hérard.

Le Post dit en avoir obtenu la confirmation du chef du parquet de Port-au-Prince, Bed-ford Claude, d’un porte-parole du premier ministre Claude Joseph, Israël Jacky Cantave, et d’un proche de Hérard, Carl Martin.

Ce dernier a aussi confirmé la nouvelle à CNN.

Le motif précis de la détention de Dimitri Hérard n’est pas connu. La justice veut qu’il réponde à des questions», s’est borné à dire Bed-ford Claude au Post.

Depuis le meurtre de Jovenel Moïse, le 7 juillet, les Haïtiens s’interrogent ouvertement sur le rôle joué par les responsables de la sécurité du président, qui ne semblent pas avoir échangé le moindre coup de feu avec les assaillants.

M. Hérard, chef de l’Unité de sécurité générale du Palais national, et Jean Laguel Civil, coordonnateur de la sécurité du président, avaient été convoqués par le parquet cette semaine, mais n’ont finalement pas encore été entendus.

Selon CNN et le Miami Herald, M. Hérard a fait savoir par lettre qu’il ne pouvait comparaître mercredi, comme prévu, parce qu’il était retenu par l’inspecteur général de la Police nationale haïtienne, responsable des affaires internes.

Le quotidien haïtien Le Nouvelliste cite une source au parquet selon laquelle M. Civil a aussi justifié son absence, mardi, en disant être frappé par une mesure conservatoire de l’Inspection générale de la Police nationale d’Haïti ».

La police nationale colombienne a révélé plus tôt cette semaine qu’elle enquête sur de multiples voyages effectués dans leur pays par M. Hérard.

Ils cherchent à déterminer s’il y a un lien entre ces visites et le fait que l’essentiel des membres du commando accusé d’avoir assassiné le président dans sa résidence privée sont d’ex-militaires colombiens.

Le chef de la Police nationale d’Haïti (PNH), Léon Charles, demeure très discret au sujet des responsables de la sécurité du président.

Selon Le Nouvelliste, il s’est borné à dire mercredi soir que 4 d’entre eux étaient en isolement et que 24 policiers étaient frappés par des mesures conservatoires.

Deux arrestations supplémentaires

Le chef de la PNH Léon Charles a annoncé mercredi soir l’arrestation de deux autres suspects dans l’enquête sur l’assassinat du président.

Il s’agit de Reynaldo Corvington, dirigeant d’une firme de sécurité haïtienne, et Gilbert Dragon, un ancien chef rebelle ayant participé à un soulèvement contre l’ex-président haïtien Jean-Bertrand Aristide, en 2004.

Un défenseur des droits humains en Haïti, Pierre Espérance, a déclaré au Washington Post que Dragon est un proche de Dimitri Hérard.

Le quotidien américain et le Miami Herald affirment en outre qu’il était un bras droit de Guy Philippe, chef de la rébellion contre l’ex-président Aristide, aujourd’hui incarcéré aux États-Unis après avoir plaidé coupable à une accusation de blanchiment d’argent.

Les deux hommes ont planifié des rencontres à plusieurs niveaux depuis l’arrivée des assaillants, les ont logés, leur ont loué des véhicules, leur ont fourni des armes», a indiqué Léon Charles selon le compte-rendu du Nouvelliste.

Selon lui, des perquisitions effectuées aux résidences des deux hommes ont permis aux policiers de mettre la main sur de nombreuses armes et des munitions.

Quatre avis de recherche lancés

La PNH a aussi lancé mercredi quatre avis de recherche visant Joseph Félix Badio, John Joël Joseph, Rodolph (Dodof) Jaar et Gordon Phenil Désir.

Les trois premiers sont recherchés pour assassinat, tentative d’assassinat et vol à main armée, selon les avis de recherche diffusés par la PNH.

Selon le compte-rendu du Nouvelliste, Léon Charles a présenté MM. Badio et Jaar comme des coordonnateurs de l’opération sur le terrain» et M. Joseph, un ancien sénateur opposé à M. Moïse, comme le trésorier de l’opération».

MM. Joseph et Jaar auraient aussi été chargés de la coordination des rencontres avec les mercenaires» et auraient loué des véhicules utilisés dans l’opération.

M. Badio aurait en outre loué une maison située près de celle du président, tandis que M. Jaar aurait aussi hébergé des mercenaires.

Selon Associated Press, M. Jaar a été accusé en Floride en 2013 d’avoir comploté en vue d’importer de la cocaïne provenant de la Colombie et du Venezuela qui aurait transité par Haïti avant d’entrer aux États-Unis. Il a plaidé coupable a été condamné à quatre ans de prison.

L’agence présente aussi M. Badio comme un ancien fonctionnaire du ministère de la Justice qui s’est joint à l’Unité de lutte contre la corruption d’Haïti en 2013.

L’agence en question a fait savoir qu’il avait été congédié en mai pour des manquements graves à des règles éthiques qui n’ont pas été précisées, et qu’une plainte avait été déposée contre lui.

La PNH a aussi lancé un avis de recherche visant Gordon Phenil Désir présenté comme un responsable de la location des véhicules, de la coordination des rencontres avec les mercenaires et du paiement des matériels».

Outre 21 ex-militaires colombiens, la police haïtienne a aussi arrêté trois Haïtiens depuis le début de son enquête, soit James Solages, Joseph Vincent et Christian Emmanuel Sanon.

Cinq autres ex-militaires colombiens sont en fuite, et trois ont été tués dans les heures suivant le meurtre de Jovenel Moïse.

Selon la PNH, M. Sanon aurait recruté les 26 ex-militaires colombiens via les services d’une entreprise de sécurité nommée CTU, dirigée par un Vénézuélien basé en Floride, Antonio Emmanuel Intriago Valera.

Une photo présentée en preuve

Léon Charles a également présenté mercredi une photo, déjà virale sur les réseaux sociaux depuis quelques jours, montrant selon lui plusieurs des suspects réunis à Saint-Domingue, en République dominicaine pour planifier l’assassinat de Jovenel Moïse.

Ils s’étaient réunis dans un hôtel à Saint-Domingue. Autour de la table, il y a les auteurs intellectuels, un groupe technique de recrutement et un groupe de financement», a déclaré M. Charles à la presse.

Certains sur la photo ont déjà été appréhendés. C’est le cas du Dr Christian Emmanuel Sanon, (et de) James Solages. Ce dernier a effectué les coordinations avec la firme de sécurité vénézuélienne CTU, basée à Miami», a-t-il ajouté.

Le responsable de la firme, Antonio Emmanuel Intriago Valera, est sur la photo. Il est entré plusieurs fois en Haïti pour planifier l’assassinat», a poursuivi Léon Charles.

Il y a aussi sur le cliché le responsable de la compagnie Worldwide Capital Lending Group, Walter Veintemilla. Nous sommes en train d’enquêter sur cette entreprise qui aurait collecté des fonds pour financer l’exécution de l’acte criminel.»

Il y avait un groupe de quatre (mercenaires) qui étaient déjà présents au pays. Les autres sont entrés le 6 juin. Ils sont passés par la République dominicaine. Nous avons retracé la carte de crédit qui a été utilisée pour acheter les billets d’avion», a indiqué le patron de la PNH.

Avec CBC/Radio-Canada 

Un troisième Haïtien arrêté en lien avec l’assassinat du président Jovenel Moïse

juillet 12, 2021

La police nationale en Haïti a annoncé dimanche avoir arrêté un ressortissant haïtien qui est accusé d’être entré au pays à bord d’un avion privé et d’avoir participé au complot concernant l’assassinat du président Jovenel Moïse mercredi.

Léon Charles, directeur de la police nationale haïtienne, explique ce que son service a découvert à propos d'un suspect.

© RICARDO ARDUENGO/Reuters Léon Charles, directeur de la police nationale haïtienne, explique ce que son service a découvert à propos d’un suspect.

Le chef de la police nationale haïtienne, Léon Charles, a indiqué que le suspect se nomme Christian Emmanuel Sanon et qu’il est âgé de 63 ans.

M. Charles a expliqué que les policiers ont trouvé plusieurs objets potentiellement d’intérêt au domicile de l’homme, dont une casquette à l’effigie de l’agence américaine de lutte contre le trafic de drogue, 20 boîtes de munitions, des parties d’un fusil, quatre plaques d’immatriculation de la République dominicaine, deux voitures ainsi que des lettres dont le destinataire n’a pu être identifié.

Le chef de la police n’a pas immédiatement été possible de confirmer si l’homme avait un avocat.

« Des objectifs politiques »

À son arrivée dans le pays en juin, Charles Emmanuel Sanon était accompagné de plusieurs ressortissants colombiens, chargés d’assurer sa sécurité.

Le chef de la police haïtienne explique que la mission a ensuite changé.

La mission était de procéder à l’arrestation du président de la République et l’opération a été montée à partir de là : 22 autres individus sont alors entrés en Haïti», a-t-il ajouté.

Les interrogatoires réalisés auprès des 18 citoyens colombiens arrêtés depuis mercredi ont permis à la police haïtienne d’apprendre que Charles Emmanuel Sanon avait recruté les 26 membres du commando via les services d’une compagnie vénézuélienne de sécurité nommée CTU, basée en Floride.

Ces 26 Colombiens figurent parmi la liste des suspects concernant l’assassinat du président haïtien. De ce nombre, 18 ont déjà été arrêtés, tous comme trois Haïtiens.

M. Charles a aussi mentionné que cinq suspects étaient toujours en fuite, tandis que trois autres ont été tués.

Quand nous avons bloqué la progression de ces bandits, la première personne qu’un des assaillants a appelé, c’est Charles Emmanuel Sanon. Il a lui, pris contact avec deux autres personnes que nous considérons comme auteurs intellectuels de l’assassinat du président Jovenel Moïse», a indiqué Léon Charles sans détailler l’identité de ces deux suspects.

La police haïtienne collabore avec les autorités colombiennes pour faire la lumière sur ce complot. Les forces de l’ordre cherchent notamment à savoir comment les suspects ont quitté la Colombie et qui a payé pour leur trajet vers Haïti.

Le FBI en renfort

Des membres du FBI, du département d’État, du département américain de la justice et du département de la sécurité intérieure des États-Unis sont arrivés dimanche en Haïti et ont rencontré le directeur général de la police nationale.

Cet assassinat a aggravé la crise institutionnelle dans laquelle Haïti était déjà plongée depuis des mois et qui amène aujourd’hui trois politiciens à se prétendre légitime pour assurer le pouvoir par intérim.

La délégation des États-Unis s’est entretenue en rendez-vous séparés avec les principaux acteurs de la scène politique dont le premier ministre Claude Joseph.

J’ai rencontré la délégation américaine et ensemble nous avons apprécié la résolution du sénat qui a fait choix de moi comme président provisoire de la République», a pour sa part indiqué dimanche soir sur Twitter Joseph Lambert, président du Sénat.

Quatre jours après l’assassinat du chef de l’État, un calme précaire perdure en Haïti compte tenu des zones d’ombres qui entourent ce meurtre commis dans la chambre de Jovenel Moïse, dans sa résidence privée pourtant sous haute surveillance.

Aucun policier haïtien n’a été blessé au cours des opérations pour appréhender les présumés mercenaires colombiens dont trois ont été tués.

Avec  CBC/Radio-Canada 

Deux Américains d’origine haïtienne arrêtés relativement à l’assassinat du président

juillet 9, 2021

PORT-AU-PRINCE, Haïti — Deux hommes que l’on croit être des Américains d’origine haïtienne – dont l’un serait un ancien garde du corps à l’ambassade du Canada à Port-au-Prince – ont été arrêtés relativement à l’assassinat du président haïtien, ont annoncé jeudi des responsables haïtiens.

© Fournis par La Presse Canadienne

James Solages et Joseph Vincent font partie des 17 suspects détenus en lien avec l’assassinat du président Jovenel Moïse par des hommes armés à son domicile mercredi avant l’aube. Quinze d’entre eux sont originaires de Colombie, selon Léon Charles, chef de la Police nationale d’Haïti. Il a ajouté que trois autres suspects ont été tués par la police et huit autres sont en fuite. Léon Charles avait dit plus tôt que sept avaient été tués.

«Nous allons les traduire en justice», a-t-il déclaré alors que les 17 suspects étaient menottés au sol lors d’une conférence de presse jeudi soir.

Le suspect le plus âgé a 55 ans et le plus jeune, James Solages, a 35 ans, selon un document relayé par Mathias Pierre, ministre délégué chargé des élections.

Il n’a pas voulu donner plus de détails sur les antécédents de James Solages, ou le nom du deuxième Américain d’origine haïtienne. Le département d’État américain a déclaré qu’il était au courant d’informations selon lesquelles des Américains d’origine haïtienne étaient en détention, mais qu’il ne pouvait ni confirmer ni commenter.

James Solages s’est décrit comme un «agent diplomatique certifié», un défenseur des enfants et un politicien en herbe sur un site web pour un organisme de bienfaisance qu’il a créé en 2019 dans le sud de la Floride pour aider les résidents.

Sur sa page biographique pour l’organisme de bienfaisance, il a affirmé qu’il travaillait auparavant comme garde du corps à l’ambassade du Canada en Haïti. L’ambassade du Canada n’a pas immédiatement commenté; les appels à la fondation et aux associés de James Solages n’ont pas abouti ou n’ont pas obtenu de réponse.

Des témoins ont affirmé que deux suspects ont été découverts jeudi cachés dans des buissons à Port-au-Prince par une foule, dont certains ont attrapé les hommes par leurs chemises et pantalons en les poussant.

La police a arrêté les hommes, qui transpiraient abondamment et portaient des vêtements qui semblaient maculés de boue, selon un journaliste de l’Associated Press. Les agents les ont placés à l’arrière d’une camionnette et sont partis alors que la foule les poursuivait jusqu’au poste de police voisin.

Un homme a été entendu disant qu’il était inacceptable pour des étrangers de venir en Haïti pour tuer le dirigeant du pays, faisant référence aux informations relayées par des responsables haïtiens selon lesquelles les auteurs du meurtre parlaient espagnol ou anglais.

La foule a ensuite mis le feu à plusieurs voitures abandonnées criblées d’impacts de balles qui, selon certains, appartenaient aux suspects. Les voitures n’avaient pas de plaques d’immatriculation et à l’intérieur de l’une d’elles se trouvait une boîte vide de munitions et de l’eau.

Lors d’une conférence de presse jeudi, M. Charles, le chef de la police, a exhorté les gens à rester calmes et à laisser la police faire son travail en avertissant que les autorités avaient besoin de preuves qu’ils détruisaient, y compris les voitures incendiées.

Les responsables n’ont pas évoqué le motif du meurtre, affirmant seulement que l’attaque, condamnée par les principaux partis d’opposition d’Haïti et la communauté internationale, avait été perpétrée par un groupe fortement entraîné et lourdement armé.

Tout le monde n’endossait pas la description de l’attaque faite par le gouvernement. Lorsque le journaliste haïtien Robenson Geffrard, qui écrit pour un journal local et anime une émission de radio, a relayé sur Twitter un reportage sur les propos du chef de la police, il a suscité un flot de réponses exprimant son scepticisme. Beaucoup se sont demandé comment les assaillants sophistiqués décrits par la police pouvaient déjouer la sécurité du domicile de Jovenel Moïse, puis s’en échapper indemnes, pour être ensuite attrapés sans avoir su planifier leur fuite.

Pendant ce temps, un juge haïtien impliqué dans l’enquête a déclaré que le président Moïse avait été atteint d’une douzaine de balles et que son bureau et sa chambre avaient été saccagés, selon le journal haïtien «Le Nouvelliste». Le média a cité le juge Carl Henry Destin disant que les enquêteurs avaient trouvé des cartouches de 5,56 et 7,62 mm entre la guérite et à l’intérieur de la maison.

Par Evens Sanon, Dánica Coto et Joshua Goodman, The Associated Press

Mort du président haïtien : le président Jovenel Moïse assassiné cette nuit par un commando

juillet 7, 2021

Avec France24

Le président d’Haïti Jovenel Moïse assassiné

juillet 7, 2021

 

Jovenel Moïse, président d’Haïti, est mort assassiné à la suite d’une attaque armée de sa résidence, a confirmé le premier ministre par intérim Claude Joseph.

Le président haïtien Jovenel Moïse a été assassiné dans sa résidence dans la nuit de mardi à mercredi.

© Dieu Nalio Chery/The Associated Press Le président haïtien Jovenel Moïse a été assassiné dans sa résidence dans la nuit de mardi à mercredi.

Dans une déclaration publiée sur les médias sociaux, le premier ministre a déclaré qu’un groupe d’individus a attaqué la résidence privée du président, le blessant mortellement. Jovenel Moïse avait 53 ans.

L’ambassade d’Haïti au Canada a confirmé la nouvelle tôt ce matin sur Twitter.

Martine Moïse, la femme du président, a également été blessée dans l’attaque et a été transportée à l’hôpital. Son état de santé n’est pas confirmé pour l’instant. Quelques médias locaux rapportent qu’elle serait morte de ses blessures.

Claude Joseph a condamné cet acte odieux, inhumain et barbare». Il a appelé la population au calme.

Peu de détails concernant l’attaque sont connus pour l’instant. Elle aurait toutefois été menée par un commando organisé, composé d’individus qui s’exprimait en anglais et en espagnol, selon le premier ministre.

Les premiers échos de Port-au-Prince rapportent que la situation est relativement calme pour l’instant. Sur place, le rédacteur en chef du quotidien Le Nouvelliste Frantz Duval affirme que ce sont le choc et la stupeur qui règnent en ce moment.

La situation plonge le pays plus loin encore dans l’instabilité. Jovenel Moïse avait nommé Ariel Henry à titre de nouveau premier ministre lundi, mais celui-ci n’était toujours pas entré en fonction.

Le premier ministre en place, Claude Joseph, est donc celui qui a annoncé la nouvelle aux Haïtiens.

Crise politique et sociale majeure

Le pays vit une crise politique et sociale majeure depuis plus d’un an.

Haïti est le pays le plus pauvre du continent américain, et l’insécurité sociale y est amplifiée par la présence des gangs qui multiplient les enlèvements et les assassinats. Jovenel Moïse était accusé de fermer les yeux devant ces violences et de laisser la situation se gangrener.

Depuis son assermentation, M. Moïse a fait face à de nombreuses contestations populaires et un nombre toujours grandissant de voix appelaient à sa démission. Les manifestations à ce sujet s’enchaînaient depuis 2019, faisant des dizaines de morts et de blessés lors d’affrontements avec la police. Le président était toutefois déterminé à terminer son mandat, qui venait à échéance en 2022.

Jovenel Moïse affirmait d’ailleurs avoir échappé à une tentative d’assassinat et de coup d’État en février dernier.

Les violences sont fréquentes en Haïti, particulièrement dans la capitale de Port-au-Prince, où plusieurs quartiers sont sous le contrôle de groupes armés qui multiplient les assassinats. Un journaliste et une militante d’opposition ont par ailleurs été tués il y a un peu plus d’une semaine, suscitant un tollé à l’international.

Les violences, centralisées dans l’ouest de la capitale, ont forcé de nombreux habitants hors de la ville.

Des accusations de corruption

Élu en novembre 2016 sous la bannière du Parti haïtien Tet Kale (PHTK) de l’ancien président Michel Martelly avec tout près de 56 % des voix, Jovenel Moïse aura connu une vie politique mouvementée. Celui qui a pris les rênes du pays en 2017 a essuyé nombreuses accusations de corruption ces dernières années.

Il avait été déclaré vainqueur du premier tour de l’élection présidentielle d’octobre 2015, mais le second tour avait été annulé en raison d’accusations de fraude entourant le scrutin. Haïti avait alors hérité d’un gouvernement intérimaire, élu par le Parlement.

La victoire de Jovenel Moïse en 2016 avait aussi été entachée de plusieurs irrégularités, selon le tribunal électoral haïtien, ce qui avait déclenché de grandes manifestations au pays. Il avait tout de même été élu pour un mandat de cinq ans.

Issu d’un milieu modeste du nord du pays, M. Moïse n’était pas un politicien de carrière. Avant d’être porté à la tête du pays, il était PDG d’Agritrans, une entreprise de production et d’exportation de bananes. Des accusations de blanchiment d’argent, datant de son passage dans le monde des affaires, pesaient encore sur lui au moment de son élection.

En 2018, le pays s’était embrasé à la suite d’une hausse du prix de l’essence décrété par le gouvernement central.

Avec CBC/Radio-Canada 

Pas d’ingérence internationale, réclament des Haïtiens

novembre 11, 2019
© Ivan Alvarado
 

Huit semaines de manifestations parfois violentes, une population affamée luttant pour sa survie chaque jour, la corruption qui gangrène l’État. Haïti vit une profonde crise politique et humanitaire.

Au milieu de cet écoeurement populaire et de ce désir de changer le système d’oppression économique des citoyens, un autre discours s’impose également en discutant avec les gens dans la rue.

Ils veulent en finir avec ce qu’ils appellent la soi-disant aide internationale ainsi que l’impérialisme. Ici, on accuse souvent les Américains de soutenir le président Jovenel Moïse.

«Cette crise est haïtienne avant tout. La solution doit être haïtienne et l’impérialisme, les Américains, ils doivent juste arrêter cette ingérence.»

-Gilbert Mirambeau, cinéaste et militant anticorruption

Les racines du sentiment antiaméricain

Le ressentiment envers les Américains ne date pas d’hier en Haïti. Les États-Unis ont occupé la Perle des Antilles de 1915 à 1934 pour protéger leurs intérêts économiques stratégiques dans ce pays instable politiquement. Un fort nombre d’Haïtiens affirment que Washington dicte encore le paysage politique du pays.

Impossible non plus d’oublier que les Américains ont longtemps soutenu la dictature sanglante de François et Jean-Claude Duvalier (Papa et Bébé Doc), de 1964 à 1986.

Les Américains ont fermé les yeux sur la dictature des Duvalier, soutient Gilbert Mirambeau. C’était un appui sous le couvert de l’anticommunisme et de leurs politiques à travers le monde. Ils ont dit « ok » puisque les Duvalier étaient anticommuniste, soi-disant. On a subi cette dictature qui nous a fait très mal.

Gilbert Mirambeau cinéaste et militant anticorruption

© Fournis par Canadian Broadcasting Corporation Gilbert Mirambeau cinéaste et militant anticorruption

Dépendance forcée aux produits américains

Le tiers des Haïtiens vivent en situation d’insécurité alimentaire grave, selon le Programme alimentaire mondial (PAM). Pourtant, Haïti produisait suffisamment de riz pour nourrir sa population jusque dans les années 80.

Aujourd’hui, en vertu d’accords commerciaux, c’est le drapeau américain qu’on voit sur les poches de riz des marchés d’Haïti. Le riz américain, subventionné par Washington, est vendu à bas prix et a détruit la production agricole locale. Les Américains contrôlent essentiellement le marché du riz et d’autres produits comme les haricots.

«Pourquoi les Américains appuient le président Jovenel Moïse? Ils gèrent leurs affaires, c’est sûr. On n’oublie pas qu’on représente un grand marché pour le pétrole américain et pour le riz aussi. Géopolitiquement, on est aussi bien placés.»

-Gilbert Mirambeau

Où est passée l’aide humanitaire?

Les milliards d’aide humanitaire amassés après le tremblement de terre dévastateur de 2010 en Haïti devaient servir à la reconstruction du pays. Près de 10 ans plus tard, beaucoup d’Haïtiens vous diront qu’ils n’ont vu qu’une infime fraction de cette aide.

On ne cesse de nous répéter ici que les conditions de vie se sont dégradées pendant que les étrangers et les élites d’Haïti empochaient la quasi-totalité de cet argent.

En 2014, un chercheur de l’Université de Montréal déplorait le manque de transparence dans la gestion de l’aide humanitaire canadienne, affirmant qu’il était impossible de savoir à qui les deux tiers des sommes canadiennes avaient été attribuées.

Vous pensez que les étrangers sont impliqués dans les problèmes de corruption du pays? C’est pas une pensée, c’est un constat, laisse tomber un jeune rencontré au Champ-de-Mars, à Port-au-Prince.

Que pense le Canada de la crise politique haïtienne?

Lors d’une discussion à bâtons rompus avant une conférence de presse jeudi dernier, le sénateur Sorel Jacinthe discutait de la motion de solidarité envers le peuple haïtien adoptée à l’unanimité par les députés de l’Assemblée nationale du Québec le 1er novembre.

Ce parlementaire qui réclame la démission du président Jovenel Moïse cherchait à savoir si le Canada allait se prononcer sur cette motion. Le silence du gouvernement du Canada face à la crise haïtienne en inquiète plusieurs. D’autres disent par contre comprendre ce mutisme.

«Je ne pense pas que le Canada ou la France appuient ce qui se passe ici. On les a rencontrés plusieurs fois de manière officieuse. Ils étaient très directs et très carrés. Ils disaient qu’ils n’appuient pas ce qui se passe (dans le gouvernement haïtien). C’est vraiment l’Oncle Sam qui décide de tout ce qui se passe. Les Américains supportent Jovenel.»

-Gilbert Mirambeau

Un nouvel interlocuteur à l’international

Les différents groupes d’opposition réclamant la démission du président haïtien se sont entendus samedi soir sur un éventuel plan de transition advenant le départ de Jovenel Moïse.

Edgard Leblanc fils coordonnateur-général d'un des partis politiques membres de Mache Kontre

© Fournis par Canadian Broadcasting Corporation Edgard Leblanc fils coordonnateur-général d’un des partis politiques membres de Mache Kontre
On a compris que la seule façon de faire bouger les choses est de se mettre ensemble, dit Edgard Leblanc fils, dont le parti politique est membre du groupe d’opposants Mache Kontre.

Il s’agit non seulement de forcer le départ du président, mais aussi d’être un interlocuteur à l’international. Je pense aux Américains, mais aussi au gouvernement canadien, qui appuient quand même le président en fonction, selon moi. On sera un interlocuteur dans lequel il y aura un regroupement de partis opposés et qui représente l’ensemble des secteurs de la population haïtienne, ajoute-t-il.

 

Par Philippe Leblanc, envoyé spécial en  Haïti

Haïti au bord du gouffre

octobre 24, 2019
© Andres Martinez Casares
 

Rien ne va plus pour le régime du président d’Haïti, Jovenel Moïse. Le pays entier est le théâtre depuis cinq semaines de ce qui a toutes les allures d’un soulèvement pour obtenir sa démission.

Les rues de la capitale, Port-au-Prince, sont désertes pratiquement un jour sur deux, bloquées par des barricades de pierres, d’arbres et de pneus en flammes. Les manifestations se succèdent, souvent spontanées, rassemblant parfois de dizaines de milliers de personnes.

Les rassemblements hostiles au régime se déroulent aussi dans de nombreuses villes du pays. Certaines, comme les Gonaïves, ont vu défiler des manifestants armés. Les affrontements avec la police sont nombreux. Le journal web Haïti libre a recensé 94 morts par balles et 49 blessés entre le 1er septembre et le 11 octobre.

Le pouvoir central ne contrôle plus rien dans le pays, estime l’historien et écrivain Michel Soukar, qui, comme d’autres, s’inquiète d’une éventuelle « somalisation » d’Haïti, en référence à la situation qui sévit en Somalie, pays d’Afrique soumis aux bandes armées et aux seigneurs de la guerre. Devant le quasi vide du pouvoir en Haïti, des régions sont souvent laissées aux mains des gangs, des groupes mi-mafieux, mi-politiques, armés, qui étendent leur emprise sur des régions.

Les Haïtiens ont une expression pour décrire la crise : Peyi lòk (« pays bloqué »).

Pour la population, la situation est rien de moins que catastrophique. Les transports en commun sont suspendus entre plusieurs villes à cause des barricades et du rançonnement des véhicules et de leurs occupants. Les approvisionnements en essence, en nourriture et en fournitures médicales sont grandement ralentis quand ils ne sont pas devenus impossibles.

Le président haïtien, Jovenel Moïse, est accusé de corruption par bon nombre de ses concitoyens.

© Fournis par Canadian Broadcasting Corporation Le président haïtien, Jovenel Moïse, est accusé de corruption par bon nombre de ses concitoyens.
Aux sources de la colère : inflation et corruption
La vague récente de contestation du régime n’est pas la première à survenir depuis l’élection du président Moïse, en février 2017. Le pays s’est embrasé une première fois pendant l’été 2018 alors qu’une hausse du prix du carburant a été décrétée par l’État.Le niveau de vie qui a continué de chuter dans les dix années suivant le séisme de 2010, la hausse du coût de la vie combinée à un chômage évalué à 70 %, sont autant de facteurs d’explosion sociale. Les émeutes qui ont secoué le pays ont forcé le gouvernement à reculer.

Mais la colère contre les dirigeants politiques n’a pas faibli. Un énorme scandale de corruption, qui entache l’ensemble de la classe politique a donné naissance à une nouvelle vague de contestation. C’est le  scandale du Fonds Petro Caribe.

Ce fonds, constitué grâce aux bénéfices tirés du pétrole vénézuélien vendu à prix d’escompte à l’État haïtien, devait en contrepartie servir à financer des projets de développement. Or, les différents régimes qui se sont succédé depuis les débuts de ce programme, en 2006, sont réputés avoir dilapidé et détourné l’argent.

Sous les présidences de René Préval, de Michel Martelly, puis de Jovenel Moïse, une grande partie de cet argent s’est évaporée, au fil des pots-de-vin, de procédés de double facturation ou de travaux débutés mais jamais achevés conformément aux contrats signés.

Qui plus est, une enquête de la Cour supérieure des comptes d’Haïti incrimine le président Moïse lui-même. Celui -ci fait face à des allégations de détournement de fonds et de double facturation dans un projet de route.

Un mouvement animé par des jeunes Haïtiens a enflammé les réseaux sociaux sur le thème de la corruption. Ceux-ci, surnommés les « pétrochallengers », ont provoqué une vaste mobilisation qui réclame depuis plus d’un an une reddition de comptes de la part des politiciens et entrepreneurs impliqués, et la tenue de procès pour corruption.

C’est la première fois que la lutte à la corruption se retrouve au centre d’une grande mobilisation populaire, constate l’avocat des droits humains Samuel Madistin, de la Fondation Je Klere.

Face à la colère populaire, une grande partie de la classe politique se réclame désormais de cette lutte contre la corruption et, à côté des demandes de démission du président Moïse, un vaste mouvement de la société civile s’est constitué pour demander une réforme en fond en comble du système, à commencer par l’abolition de l’immunité des parlementaires qui sont aujourd’hui protégés contre des poursuites lorsqu’ils sont en fonction.

Un rejet de l’ingérence étrangère

Un autre consensus rallie les Haïtiens, celui de la nécessité de résoudre cette crise entre Haïtiens. L’opinion est très remontée contre les pays étrangers qui, depuis longtemps mais plus encore depuis le séisme de 2010, dictent à Haïti ses politiques.

Les murs de Port-au-Prince sont couverts de graffitis contre l’ONU et aussi contre ce que tout le monde ici connaît comme le « Core Group », un regroupement de pays donateurs, dont le Canada, les États-Unis, l’Union européenne et l’Organisation des États américains, sans le soutien de qui aucun président ne peut rester en poste longtemps en Haïti.

Lors des manifestations, il est courant de voir les gens s’en prendre aux étrangers et aux symboles de leur présence comme des hôtels.

Jusqu’ici, aucune sortie de crise n’est facile à entrevoir. Le 15 octobre, en conférence de presse – une apparition publique exceptionnelle – le président Jovenel Moïse a déclaré : Ce serait irresponsable de ma part de démissionner.

Cette déclaration a donné lieu à une nouvelle manifestation spontanée à Port-au-Prince.

Tous les appels au dialogue lancés par le président depuis un mois ont été rejetés massivement par l’opposition.

Radio-Canada.ca par Luc Chartrand

Haïti: un mort en marge de la manifestation réclamant la démission du président

juin 10, 2019

 

Un homme a été tué en marge de la manifestation qui a réuni plusieurs milliers d’Haïtiens dimanche à Port-au-Prince, réclamant la démission du président Jovenel Moïse, accusé d’être au cœur d’un «stratagème de détournements de fonds» par la Cour supérieure des comptes.

Le corps sans vie, marqué d’une blessure par balle au thorax, a été rapidement transporté hors de la zone de tensions, a pu constater une journaliste de l’AFP.

En fin de parcours, des violentes échauffourées ont opposé des groupes de jeunes hommes aux forces de l’ordre à proximité du palais présidentiel et du siège départemental de la police. Malgré une importante présence policière et le déploiement de véhicules blindés de l’ONU, deux bâtiments à proximité ont été ravagés par un incendie.

Alors que manifestants et policiers s’affrontaient à coups de pierre et de grenades lacrymogènes, plusieurs rafales de tirs à balles réelles ont résonné au centre-ville.

Avant ces incidents, le cortège de plusieurs milliers de personnes, membres d’organisations de la société civile et de partis d’opposition, avait défilé dans le calme, réclamant justice.

Les juges de la Cour des comptes ont publié la semaine dernière un rapport de plus de 600 pages sur l’utilisation du fonds Petrocaribe, un programme de développement parrainé par le Venezuela, qui se révèle être une litanie d’exemples de gestion calamiteuse et de corruption.

Parmi les centaines de projets épinglés, les magistrats ont découvert qu’en 2014, pour le même chantier de réhabilitation de route, l’État a signé deux contrats avec deux entreprises aux noms distincts, Agritrans et Betexs, mais qui partagent notamment le même matricule fiscal et le même personnel technique.

Avant son arrivée au pouvoir en 2017, Jovenel Moïse était à la tête de l’entreprise Agritrans, laquelle a reçu plus de 33 millions de gourdes (plus de 700.000 dollars américains, au taux de l’époque) pour ce projet routier alors que son activité consistait à de la production bananière.

«Ces gens-là n’ont pas fait beaucoup d’effort pour dissimuler quand ils détournaient l’argent. C’est pour ça que le président doit démissionner : pour qu’on puisse finalement couper toute la tête de ce système de mafia qui se protège pour ne pas aller en prison et aller vers le procès Petrocaribe», a affirmé dimanche avec espoir Velina Charlier, «Petrochallengeuse» de la première heure.

Toujours perçu comme source de gaspillage et de corruption, le fonds Petrocaribe a déjà donné lieu, en 2016 et 2017, à deux enquêtes sénatoriales. Depuis l’été 2018, le mouvement citoyen «Petrocaribe Challenge» a multiplié les manifestations à travers le pays, poussant la Cour des comptes à lancer son contrôle pour déterminer comment les plus de 1,6 milliard de dollars américains ont été dépensés par les quatre administrations successives.

En février, Haïti a connu une semaine de violentes manifestations contre le pouvoir au cours desquelles au moins sept personnes ont été tuées. Ces émeutes ont entrainé mi-mars la chute du gouvernement, mais depuis le processus politique pour installer un nouveau cabinet est bloqué par le Parlement.

Sans ministres en fonction, sans encore de budget voté pour l’année fiscale qui a débuté en octobre, Haïti est également menacée par une crise constitutionnelle car la tenue d’élections législatives à l’automne est incertaine.

Cette fragilité institutionnelle aggrave la crise économique à laquelle le pays fait face. Avec une inflation dépassant les 17%, couplée à une forte dévaluation de la monnaie nationale, les besoins des familles les plus vulnérables s’amplifient.

Par Le Figaro.fr avec AFP

Jovenel Moïse investi président d’Haïti

février 7, 2017

Après une crise électorale qui a paralysé la vie politique du pays le plus pauvre des Caraïbes pendant un an et demi, Jovenel Moïse devient officiellement président.

Le président haïtien, Jocelerme Privert, au côté du président haïtien élu, Jovenel Moise, lors de sa cérémonie d’investiture, à Port-au-Prince (Haïti), le 7 février 2017.

Le président haïtien, Jocelerme Privert, au côté du président haïtien élu, Jovenel Moise, lors de sa cérémonie d’investiture, à Port-au-Prince (Haïti), le 7 février 2017. HECTOR RETAMAL / AFP
Propulsé en 2015 à 48 ans sur la scène politique par le président Michel Martelly, Jovenel Moïse accède dès le début de sa carrière politique aux plus hautes fonctions. Il est devenu le 58e président d’Haïti mardi 7 février lors de la cérémonie d’investiture à Port-au-Prince.

Plus de 2 000 personnes avaient été invitées à cette passation de pouvoir organisée en deux temps : la prestation de serment au Parlement en début de matinée, suivie d’une cérémonie religieuse et du premier discours du 58e chef de l’Etat haïtien.

Les cérémonies ont lieu au cœur de la capitale haïtienne à l’emplacement du palais présidentiel, détruit lors du terrible séisme en janvier 2010.

Deux élections présidentielles

Surnommé « l’homme-banane » durant la campagne présidentielle, car il est propriétaire de bananeraies, Jovenel Moïse avait été choisi par l’ancien président Martelly pour être son successeur. Le président sortant, une star de carnaval qui amuse les foules en se déhanchant et abusant d’un vocabulaire grossier, contraste avec son successeur à la personnalité effacée et inconnu du grand public.

Jovenel Moïse était arrivé en tête du premier tour de l’élection présidentielle en octobre 2015. Mais en raison de contestations et de fraudes massives, le vote avait été annulé. L’homme d’affaires, qui entend relancer par l’agriculture l’économie haïtienne a finalement été élu président en novembre 2016, lorsque le scrutin avait été reprogrammé.

A la fin du mandat de Michel Martelly, le 7 février 2016, faute de successeur élu à temps, le Parlement avait choisi Jocelerme Privert, alors président du Sénat, pour assurer l’intérim. Avec un an de retard, la première République noire de l’histoire, marquée par une tradition d’instabilité politique, retournera à l’ordre constitutionnel en ayant à sa tête un président élu au suffrage universel direct.

Décision de justice en suspens

Les doutes concernant de possibles blanchiments d’argent dont M. Moïse aurait été l’auteur n’ont cependant pas été levés. A l’été 2016, l’Unité centrale de renseignements financiers avait transmis à la justice le rapport confidentiel de son enquête sur les comptes de M. Moïse, enquête débutée en 2013 à la suite du signalement d’une institution bancaire.

Si le juge d’instruction a remis son rapport au commissaire du gouvernement (l’équivalent du procureur en Haïti), ce dernier n’avait pas lundi soir rendu publique sa décision – prononcer un non-lieu, demander une enquête complémentaire ou inculper le président élu. Cette décision de justice laissée en suspens mine la déjà fragile popularité de Jovenel Moïse.

Lemonde.fr avec AFP