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Plongée au coeur du village olympique

juillet 25, 2012

Crédits photo : Panoramic
 
Le village olympique a commencé à accueillir des athlètes du monde entier ces derniers jours. Découverte du site qui accueillera 10 500 athlètes tout au long des Jeux Olympiques. 
Florentin Collomp, correspondant à Londres

De loin, le « village » ressemble plutôt à une cité HLM, cernée de hauts grillages, en bordure de voie de chemin de fer, derrière un centre commercial. Un hélicoptère fait des ronds au-dessus des lieux. Une fois passés les contrôles draconiens, on se retrouve au sein du paradis des sportifs.

Quelque 10 500 athlètes vont cohabiter pendant plus de quinze jours dans ces onze bâtiments construits pour l’occasion dans l’est de Londres, avant d’être reconvertis en logements sociaux. Aux balcons, les drapeaux des 200 nationalités en lice égayent les édifices grisâtres. Les Français une caravane de 600 personnes dont 330 athlètes – ont pris leurs quartiers entre les Australiens et les Japonais.

La majorité des équipes arrivent en ce début de semaine, en fonction des plannings de compétition. Après la gym artistique, le tennis et la voile lundi, les nageurs et les handballeurs débarquent mardi midi, l’escrime et le tir à l’arc, en fin d’après-midi. «Le fait de voir les gros anneaux olympiques à la sortie du train, ça veut dire qu’on y est, que ça va commencer », a lancé le gymnaste Yann Cucherat.

Delphine Racinet, médaille d’or à Sydney en tir à la fosse, a essuyé les plâtres, venue s’entraîner dès la semaine dernière, comme l’équipe de canoë avec Tony Estanguet. Hormis quelques petits soucis d’eau dans les douches vite réglés, elle apprécie le confort des installations en connaisseuse : ce sont ses troisièmes Jeux. « Les chambres sont plus petites qu’à Pékin, mais c’est confortable et convivial. »

Lits à rallonge pour les basketteurs
Le logement, à deux par chambre, deux à quatre chambres par appartement, tient plus de la résidence étudiante que de l’hôtel de luxe. Lits une place recouverts d’une couette décorée des sports olympiques (que les athlètes pourront emporter en souvenir), avec rallonge pour les basketteurs, meubles fonctionnels en bois clair, canapé et télé. Pas de cuisine : tout le monde se retrouve dans un immense restaurant de 5 000 places où sont proposés, 24 heures sur 24, des buffets du monde entier. Outre des spécialités de chaque continent, un stand sert le meilleur de la gastronomie britannique (porridge ou jacket potatoes), un autre des McDo à volonté. Le tout, entièrement gratuit, comme les distributeurs de boissons (sans alcool).

Hormis certaines équipes, hébergées près des sites éloignés du parc olympique, comme les tennismen à Wimbledon, la plupart des athlètes logent ici, même les stars. Tony Parker y est attendu. Les footballeurs vedettes de l’équipe d’Angleterre s’y sont faits. C’est pour eux l’occasion de vivre les Jeux de l’intérieur. « C’est fabuleux de côtoyer des gens d’aspect et d’origine si différents, qui sont le meilleur du sport mondial », s’enthousiasme Lizanne Murphy, une basketteuse canadienne qui vit ici ses premiers Jeux. « Les athlètes sont rois : tout est fait pour nous », apprécie Delphine Racinet. 150 000 préservatifs ont même été mis à leur disposition.

Mais, pour ne pas que la fête perturbe la compétition, les sportifs français devront quitter le village olympique pour un site annexe dans l’université de Queen Mary dès leurs épreuves terminées. « On n’est pas là pour s’amuser, c’est la performance en premier », se convainc Luis Rivera-Morales, Mexicain de 25 ans arrivé dimanche, dont l’épreuve de saut en longueur est prévue le 3 août.

Lefigaro.fr avec Sport24.com

Yémen: après la révolution, l’élection

février 21, 2012

Après trente-trois ans de règne et un soulèvement populaire, le président Saleh cède la place. Seul candidat, Abd Rabbo Mansour Hadi sera élu ce mardi. Les jeunes révolutionnaires se sentent volés.

«Place du changement» à Sanaa, des centaines de toiles de tente arborent encore les portraits des martyrs de la révolution, lancée il y a tout juste un an dans la foulée de la Tunisie et de l’Égypte. Comme celui d’Anas, ce bébé de 10 mois tué dans une voiture, alors qu’il attendait son père. Le quartier général de la contestation contre le régime d’Ali Abdallah Saleh est devenu une véritable ville de toiles avec ses étals, ses cabanes pour dormir et ses estrades pour écouter les prêches des uns et des autres.Pourtant, les apparences sont trompeuses. À deux pas de l’université, la «place du Changement» n’est plus le cœur battant de la révolution. Ce mardi, de nombreux jeunes, qui y campent toujours, vont voter sans enthousiasme. «C’est la seule façon d’extraire le Yémen de ses problèmes», résume Arslan, un étudiant de 21 ans. Un seul candidat est en lice: le vice-président Abd Rabbo Mansour Hadi, qui aura la redoutable tâche de mener à bien la délicate transition jusqu’à la véritable élection présidentielle prévue en 2014.

Amertume

Même sans autre enjeu que la participation, le scrutin de mardi est un passage obligé important vers plus de démocratie, espèrent de nombreux Yéménites. Mais il n’est pas sûr du tout que le vote tournera la page de l’ère Saleh, le président de la République qui a dû quitter le pouvoir en novembre, mais dont les proches trustent encore les principaux leviers de la sécurité et de l’armée. «Si le président Hadi évince la clique Saleh du pouvoir, on le soutiendra. Sinon, nous resterons là, sous nos tentes», assure Nasser, un autre étudiant, assis sous une bicoque en brique, ornée du drapeau yéménite, tandis qu’un groupe de jeunes défile en scandant un appel au boycott de la présidentielle.

En fait, un an après, les insurgés sont amers. «C’est vrai qu’on s’est fait voler notre révolution», reconnaît Nasser. Il ne dit pas par qui. Mais on le devine aisément en entrant sur la «place du Changement», où un militant du parti islamiste al-Islah fouille au corps les visiteurs.

«Rusés, les islamistes ont laissé les jeunes s’exprimer pendant deux mois, décrypte un diplomate, puis ils sont venus installer des comités de la santé, des médias, un comité militaire. Ils ont nourri les jeunes, ils ont transformé leur mosquée en hôpital, et à l’automne ils leur ont dit: “Puisque nous dirigeons le mouvement, et bien c’est nous qui allons maintenant négocier avec le pouvoir”».

Pour les jeunes, la trahison est intervenue le 23 novembre lorsque, constatant qu’aucun camp ne pouvait vaincre l’autre militairement, al-Islah, rejoint par les déserteurs de la 1re division blindée – en gros la moitié de l’armée – a conclu un accord sur la transition du pouvoir avec Saleh, sous l’égide des monarchies du Golfe, inquiètes de voir la crise déborder. Aux termes de cet arrangement, chaque camp dispose de 17 ministres dans un gouvernement d’entente nationale, et l’immunité est garantie pour Saleh et ses proches. «Impossible, il doit être jugé, insiste Nasser. Nous ne céderons pas aux pressions du Golfe.»

Même s’ils sont soutenus par la Prix Nobel de la paix, Tawakel Karman, les jeunes ont cruellement manqué de maturité politique. «Ils ont été incapables de se structurer, de former un parti, et enfin de présenter un candidat à la présidentielle», regrette un ambassadeur, actif en coulisses pour régler la crise. «La période n’est pas claire, répond Mohsen, nous préférons attendre la présidentielle de 2014». Certes, ils seront invités à participer au dialogue national prévu après le scrutin, mais ils n’ont encore aucun contact avec le futur président.

Ils ont perdu la main au profit du bloc constitué par les islamistes et les soldats de la 1re Division du général Ali Mohsen, un ancien proche de Saleh qui a fait défection en mars dernier pour protéger ensuite les révolutionnaires «place du Changement». Une alliance improbable dont la solidité va être testée au cours du dialogue national. «C’est un simple mariage d’intérêts, on ne sait pas qui tient qui», regrette Douraish, un indépendant de 50 ans, sous sa tente lui aussi, aux côtés de 48 autres groupes, sans programme politique pour la plupart. En revanche, l’agenda islamiste de la coalition al-Islah Ali Mohsen inquiète de nombreux jeunes, qui côtoient les fils d’apparatchiks du parti intégriste, envoyés «place du Changement» pour faire bonne mesure. D’autant qu’ils se souviennent qu’en 1994, les «barbus» avaient combattu avec le régime de Saleh contre les séparatistes du Yémen du Sud.

Une transition unique

Quant à la protection que leur offrent les troupes d’Ali Mohsen – qui restent payées par le pouvoir – elle est jugée pesante. «Ils nous empêchent parfois de sortir manifester devant le palais présidentiel», déplore Arslan, qui a perdu plusieurs amis pendant les mois de violences. Et une fois encore, les jeunes se souviennent qu’Ali Mohsen a longtemps été allié avec Saleh et qu’il est loin d’être le moins corrompu des seigneurs de guerres locaux.

Le Yémen n’est ni la Tunisie ni l’Égypte. En assurant une sortie du pouvoir honorable pour Saleh, la transition en cours est unique à ce jour dans la chaîne des révolutions arabes. «Il ne s’agissait pas d’une révolution, corrige Mohy al-Dhabi, vice-ministre des Affaires étrangères, mais plus d’une recomposition des équilibres, avec certes un peu de violence car chaque camp est armé, mais pas assez pour que l’un écrase l’autre. Et puis au Yémen, les partis politiques existaient déjà, cela facilite la transition. Nous avons l’habitude des compromis.» Voire même des retournements de vestes qui pourraient plonger de nouveau le pays dans le chaos.

Lefigaro.fr par Georges Malbrunot