Posts Tagged ‘Malheur’

Le dernier morceau du frigo

mai 10, 2021

Étudiant, quand passe les jours

Et approche la fin du mois

Commence le compte-à-rebours

De la précarité de ma pauvre vie

Dès lors, je réduis les repas

Pour ne pas faire de faux-pas

Dans la gestion de ma ration

Loin des parents de la nation

Dans cette vie estudiantine

Où la bourse est mesquine

Je n’ai pas droit à l’erreur

Pour tomber dans le malheur

Bernard NKOUNKOU

Regards inespérés

décembre 16, 2019

 

La pluie tombe sur ma tombe

Loin des regards amis et ennemis

Lorsque les termites rongent ma robe

La terre recouvre ma chair ensevelie

 

Quand certains fêtent dans la joie le bonheur

D’autres pleurent sans manger dans le malheur

Dans l’indifférence totale de nos représentants

Qui s’accrochent pour leur argent au parlement

 

Même lorsque les inondations gagnent nos maisons

Les gouvernants sans états d’âme et sans raison

Se la coulent douce malgré les folles intempéries

Devenons pour eux les maudits de leurs soucis

 

Bernard NKOUNKOU

 

Bruits de bottes sentimentales

novembre 29, 2012

  

Silence radio, silence maison

L’internet tue notre amie raison

Plongée dans son réseau social

Le dialogue s’arrête au portail

L’éducation des enfants confisquée

Par la souris au museau masqué

A chacun ses amis dans le virtuel

Le regard de l’époux mauvais rituel

Car devant la tentation naît la flamme

Dans le flux des échanges mûrit la pomme

La méfiance devient un sentiment permanent

Le moindre pas en sa direction est terrifiant

Le voile de la suspicion prend de l’ampleur

Quand l’odeur de trahison installe son malheur

Plus de bon sommeil sur le lit en commun

La discrétion a brisé la confiance des humains.

 

Bernard NKOUNKOU

Le platine de la mort

août 23, 2012

Platine,

fatigués de t’extraire de tes entrailles

sans une réelle amélioration salariale

nous remontons du ventre de ta mine

les plis au front avec une sale mine.

 

Rassemblés en marée de têtes noires

dans la poussière de la grève noire

nous avons trouvé aveuglement la mort

sous les balles policières indigestes et ingrates

fusant sur le cuir de notre peau maladroite.

 

Platine, platine

malgré ta sortie de terre

de nos mains dures et noires

la richesse de ta vente pour ton bonheur

est le plus grand prix de notre malheur.

 

Platine,

ton regret pour le sort

de notre brutale mort

est un bateau sans port.

 

Bernard NKOUNKOU

La pente de l’éducation

février 21, 2012

L’éducation perd ses bretelles

Et tombe en petites dentelles

Comme un oiseau sans ailes

Qui pleure au coin des prunelles

 

L’éducation court le grand danger

Comme le papillon dans le verger

Qui veut goûter à toutes les fleurs

Même aux fruits pourris du malheur

 

L’éducation titube dans nos sociétés

Avec cigarettes, alcool, portables et gadgets

Fauchant parfois la maîtresse en classe

Mais aussi brûlant à la maison la politesse

 

Quelle voie tortueuse emprunte l’éducation

Dans une tenue de mauvaise fréquentation

Car la peur évidente d’une éducation ratée

Est une preuve d’un héritage mal préparé

 

La morale tangue dans les eaux troubles

Comme un matelot ivre sans contrôle

Qui va heurter à tort un rocher au passage

Dans la bêtise mortelle du grand naufrage

 

Donnez maintenant des canots de sauvetage

Aux enfants au creux de la vague peu sages

Qui se noient dans la tourmente sans repères

Car ils doivent devenir demain de bons pères.

Bernard NKOUNKOU

Le ventre du désert

juillet 25, 2011

Le ventre du désert est rempli de poussière
Portant les germes de la faim sans rivière
Il est un centre de désespoir et de malheur
Ballon vide qui réclame la graine du bonheur

Les yeux du désert de bovins sans efforts
Vacillent sous les paupières sans renforts
Et se ferment peu à peu dans la famine
Qui aussi rode et campe comme la vermine

Les voix qui s’élèvent sous le ciel du désert
Se dessèchent sans eau avant le secours
Des tables rondes sans greniers alimentaires
Sur les terres bradées au risque monétaire.

Bernard NKOUNKOU

Conte : La Sardine et le Silure

juillet 8, 2011

Martine la Sardine blanche du fleuve Congo vivait dans un palais majestueux au toit vert des jacinthes de bois.

Plongée dans l’ennui d’absence de loisirs, un jour elle partit se promener et rencontra aux cataractes, dans la turbulence et le tumulte des eaux, Arthur le Silure, au teint d’ébène qui jouait au cerf-volant. Elle demanda si elle pouvait se joindre à lui. Celui-ci accepta sans un brin d’hésitation. Ils s’amusèrent à pleine joie, rigolèrent en suivant le cerf-volant qui dansait aux caresses du vent. Ils se cognèrent parfois contre de petits cailloux et roulèrent sur le sable fin du fleuve. Le vent qui était au rendez-vous dans ce beau jeu du ciel redoubla de vigueur et le cerf-volant se propulsait plus haut dans les airs accompagnés de nombreux cris de salutation dans son mouvement. Pendant que les deux amis jubilaient sur le sable, le cerf-volant s’accrocha dans son voyage au sommet d’un palmier.

Martine la Sardine commençait à se lamenter pour cet espoir ludique suspendu dans les bras verts du palmier. Arthur le Silure lui rassura qu’il réussirait à descendre le jouet de son arrêt momentané. Il ramassa des cailloux et commençait à les jeter pour faire tomber le cerf-volant. Il invita aussi sa campagne à cet exercice d’adresse. Mais dans cet acte de décision, un gros caillou lancé par Arthur le Silure traversa le palmier et alla cogner un tombeau en un bruit assourdissant, rebondit et se morcela. Soudain, une fumée grise s’échappait et prenait une forme humaine dressant debout une vieille dame qui dormait depuis une éternité : c’était Bertille l’Anguille.

– Mes enfants : pourquoi aviez-vous dérangé mon sommeil ?

Ses simples paroles faisaient trembler le sable et l’herbe sauvage, produisaient un tourbillon aux alentours qui remuait fortement leurs habits et leurs cheveux tandis que les poils de leur peau se dressaient comme des aiguilles rigides.

– Mémé, Mémé ! nous n’avons pas fait exprès. On voulait tout simplement descendre notre cerf-volant par le jet des pierres c’est pourquoi maladroitement un caillou est tombé sur ta demeure. Veuille bien nous en excuser.

– Alors que puis-je faire pour vous mes petits-enfants ?

– Si tu peux nous aider à décrocher notre cerf-volant. Nous savons que tu en es capable.

– Merci de la certitude que vous reposiez sur moi.

Bertille l’Anguiille s’approcha de l’arbre, se concentra un moment, ses yeux devinrent rouges, dégageant du feu et elle retrouva les souvenirs de son vivant lorsqu’elle grimpait sur les palmiers pour aller manger les noix mûrs d’un goût exceptionnel lui donnant une peau luisante. Elle s’enroula le long du tronc, arriva au sommet et descendit le cerf-volant. Ils remercièrent Bertille l’Anguille qui regagna son tombeau pour retrouver sa paix de l’âme.

Cependant, le jouet de Martine la Sardine et d’Arthur le Silure était perforé par les aiguilles du palmier, il n’était plus bon et ne pouvait plus s’envoler. Ils le prirent, l’enroulèrent d’une pierre et le jetèrent au-dessus du fleuve Congo. Le cerf-volant s’ouvrit quand même et se déposa comme un parachute en perte de vitesse, tomba droit à la surface de l’eau.

Par ailleurs, le soleil au zénith balançait sa férule de rayons de plein fouet. Ils eurent faim et soif puis mangèrent des tiges de roseaux. Ils creusèrent des vers de terre et firent la pêche pour avoir du poisson à manger. Durant toute la partie de la pêche, seule Martine la Sardine capturait le poisson. Pourquoi? Quand ceux-ci remontaient à la surface de l’eau, au temps chaud, par la clarté rayonnante et blanchâtre de Martine, les poissons exprimaient une grande joie pour mordre son appât. Mais au moment où ils émergeaient et qu’ils découvraient la présence d’Arthur le Silure, le trouvant trop noir, ils fuyaient son approche et n’osaient pas mordre à son hameçon. Pauvre de lui ! il rentra bredouille. Un peu confus. La compagnie ne pouvait pas se limiter à l’unique gain d’une partie.

Pour le consoler, Martine l’invita chez elle dans son palais. Elle prépara le poisson. Ils mangèrent ensemble, burent du bon vin. A chaque fois, il terminait toujours goulûment sa part de nourriture. Il mangeait, mangeait, mangeait. Il ne cessait de demander à manger à Martine la Sardine. Celle-ci lui dit un moment qu’elle ne pouvait pas opérer un miracle de la multiplication de poisson.

Fâché, il saisit le couvercle, regarda et constata effectivement que plus rien n’y était, il renversa toute la marmite, brisa les verres de table, renversa les chaises puis s’en prit à Martine la Sardine qui de sa petite taille s’étant débattue mais en vain, il la mangea pour assouvir sa faim. II en raffola bestialement la chair de Martine qui lui procura un appétit supérieur.

C’est pourquoi depuis lors, le Silure quand il est dans le même étang que la sardine, finit toujours par la manger. Leur cohabitation n’est plus amicale et recommandée chez les pisciculteurs.

Le service d’un bonheur dans l’amitié peut parfois se transformer dans le malheur.

© Bernard NKOUNKOU

L’orgueil du pouvoir

octobre 9, 2010

Il était l’insolence de l’État,
il avait le pouvoir
et régnait sur la république
se donnant le luxe des
femmes.

Il avait l’argent,
des coffres-forts et des comptes
partout
se promettant d’acheter des
voitures et des châteaux
dans une république
sans routes,
sans eau et électricité,
ni hôpitaux, ni écoles.

Il était le destin du peuple
et aucun souci du peuple,
le malheur du peuple
et le fossoyeur du peuple.

Il était le vice de la nation,
la honte criarde de la nation,
la bêtise démocratique de la nation,
le dernier garant respectueux de la nation.

Il était tout,
un fourre-tout,
nul partout,
un surtout.

Bernard NKOUNKOU