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Différend RDC-Zambie : un haut diplomate zimbabwéen choisi comme médiateur

juillet 4, 2020

 

L’ambassadeur James Manzou, secrétaire des Affaires étrangères du Zimbabwe, dirigera le processus de médiation conduit par la Communauté de développement d’Afrique australe (Sadc)  dans le différend frontalier entre la République démocratique du Congo et la Zambie, indique le site southerntimesafrica.com.

 

James Manzou

L’ambassadeur Manzou a été le plus haut représentant du Zimbabwe auprès de l’Union européenne. Le président du Zimbabwe, Emmerson Mnangagwa, préside l’organe de la Sadc sur la coopération politique, de défense et de sécurité. Le porte-parole du président Mnangagwa, M. George Charamba, a déclaré au Southern Times que le président zimbabwéen a désigné l’ambassadeur Manzou pour traiter le différend frontalier entre la RDC et la Zambie. « Je crois comprendre qu’il fait des efforts pour gérer le conflit avec diligence. Ils se sont réunis lundi de cette semaine et je peux vous dire que des progrès importants ont été accomplis jusqu’à présent en termes de recherche d’une solution à l’amiable au différend », a déclaré le porte-parole.

La RDC et la Zambie se disputent le contrôle d’un terrain de treize kilomètres carrés à leur frontière, dans les provinces du Tanganyika et du Haut-Katanga. Depuis plus de deux mois, les soldats zambiens ont fait irruption sur le sol congolais. Tout en mobilisant les Fardc, Kinshasa disait privilégier dans un premier temps la voie diplomatique pour obtenir leur retrait. Mais la RDC a renforcé sa présence militaire dans la région, provoquant des affrontements entre les soldats des deux pays.

Le Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires a déclaré que les affrontements avaient entraîné le déplacement de centaines de personnes à Moba. Le 11 mai, le président de la RDC, Felix Tshisekedi, a envoyé à Harare la ministre des Affaires étrangères de la RDC, Marie Nzeza, pour demander à Emmerson Mnangagwa, président de l’organe de la Sadc sur la coopération politique, de défense et de sécurité, d’intervenir dans le différend. Et ce dernier a présenté la question à ses homologues de la région.

En juin dernier, la Sadc avait présidé une réunion des états-majors des armées de la RDC et de la Zambie afin de d’obtenir le retrait des troupes zambiennes du sol congolais. «Les deux pays reconnaissent qu’ils sont membres de la Sadc et qu’ils doivent coexister pacifiquement. Des différends surgiront toujours autour des frontières, mais l’essentiel est toujours de trouver des moyens pacifiques de les résoudre. Dans cet environnement Covid-19, le moins que nous puissions nous permettre  est une accentuation de la crise en important un autre problème de nature militaire. La bonne chose est que les deux pays sont prêts à parler », a déclaré George Charamba au Southern Times.

Une tentative de régler le problème a eu lieu en 1989 lorsqu’un traité a été signé entre les présidents de l’époque, le zambien Kenneth Kaunda et le Congolais Mobutu Sese Seko, et des balises ont été placées le long de la frontière comme marqueurs.Cependant, les affrontements frontaliers se sont poursuivis et les deux pays doivent encore trouver une solution durable au différend, rappelle le média.

De tels différends frontaliers sont courants en Afrique : Botswana/ Namibie, Nigéria/ Cameroun, et le Malawi/Tanzanie, etc. Cela est dû aux ambiguïtés créées par des frontières arbitrairement dessinées au moment de la partition de l’Afrique. Le Botswana et la Namibie se sont déjà disputés l’île de Kasikili / Sedudu sur la rivière Chobe qui borde les deux pays. La  médiation de ce différend avait également été assurée par le Zimbabwe et l’affaire a été réglée par la Cour internationale de justice en 1999 lorsqu’il a été décidé que l’île appartenait au Botswana.

 

Patrick Ndungidi

Kofi Annan, un médiateur en RD Congo ?

octobre 10, 2016

Scène de violence à Kinshasa, les 19 et 20 septembre 2016. © John bompengo/AP/SIPA

La République démocratique du Congo (RDC) est au seuil d’une crise politique profonde et historique, à l’issue très incertaine et aux conséquences sûrement imprévisibles pour la paix et la stabilité dans la sous-région d’Afrique centrale.

Le président Joseph Kabila, en fonction depuis une quinzaine d’années après avoir succédé à Laurent-Désiré Kabila en janvier 2001, arrive au terme de son dernier mandat le 20 décembre 2016.

Les sénateurs, les députés provinciaux, les gouverneurs et vice-gouverneurs des provinces ont vu leurs mandats reconduit de facto pour toute une législature, faute d’élection depuis 2012. Dans quatre mois, il en sera de même pour les députés nationaux dont le mandat arrive également à son terme.

La Commission nationale électorale indépendante (Ceni) – l’organe chargé d’organiser et d’administrer les élections – a montré ses limites à plusieurs égards et est incapable de convoquer le scrutin présidentiel en novembre prochain, comme le lui prescrit l’article 73 de la Constitution.

Le pays va bientôt se retrouver dans une situation où, de la présidence de la République aux gouvernorats des provinces, plus aucune autorité exerçant une fonction élective n’aura le pouvoir d’agir et de s’acquitter légitimement de ses responsabilités pour représenter et engager pleinement l’État congolais.

Nouvelles violences

Le bras de fer politique qui oppose actuellement la majorité présidentielle au pouvoir et le Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement ne fait que commencer. Mais il a déjà atteint les limites d’un jeu politique adroit, habituellement reconnu dans un régime démocratique. Le pays court le risque de sombrer dans une nouvelle violence, beaucoup plus sanglante que celle du 19 et 20 septembre dernier à Kinshasa (plusieurs dizaines de morts, selon la mission des Nations unies au Congo).

La RDC pourrait replonger dans la spirale des conflits armés, si jamais le dialogue réellement inclusif pour trouver un compromis politique consensuel n’a pas lieu d’ici la fin du mandat de Joseph Kabila.

En effet, même si le scrutin présidentiel avait lieu comme prévu, la constitution congolaise interdit au président Kabila de se représenter pour un troisième mandat, mais ce dernier ne donne aucun signe qui laisse penser qu’il serait prêt à quitter le pouvoir.

L’homme est resté insensible aux appels de la communauté nationale et internationale pour clarifier sa situation après son dernier mandat, pour apaiser la tension politique dans son pays. Son attitude inquiète de nombreux Congolais qui voient là une volonté manifeste de recourir à la politique de la terre brûlée.

Dialogue ou monologue ?

Pour contrer cette attitude belliqueuse, il est nécessaire que les forces politiques en présence – majorité présidentielle et Rassemblement des forces politiques acquises au changement – définissent un cadre politique clair, et conviennent d’un accord accepté par tous. Un cadre qui permette notamment d’assurer la gestion consensuelle du pays et le bon fonctionnement des institutions dans un laps de temps relativement court afin d’organiser le plus rapidement possible des élections démocratiques, et ce, dans un climat apaisé.

Mais devant l’impossibilité pour l’ex-Premier ministre togolais Edem Kodjo de concilier les points de vue divergents des deux parties, et de réussir à les rassembler autour de la table des négociations, la communauté internationale devrait, de toute évidence et en toute responsabilité, se raviser en requalifiant son appui à un dialogue qui, en réalité, est un monologue entre les membres d’une même famille politique élargie, qui harmonisent leurs réflexions et leurs actions communes pour conserver le pouvoir.

Ceci dit, le fait de vouloir coûte que coûte maintenir son appui à un dialogue aujourd’hui séché par les grandes composantes de la société civile et l’Église catholique, risquerait d’aggraver la situation conflictuelle qui règne déjà au sein de la classe politique congolaise.

Nous sommes de ceux qui pensent que le groupe international de soutien à la facilitation du dialogue national (composé des Nations unies, de l’Union africaine, de l’Union européenne et de l’Organisation internationale de la Francophonie) peut encore sauver la mise. En jetant son dévolu sur une autre personnalité neutre, intègre et extrêmement crédible et respectée pour assurer la médiation et faciliter la communication entre les parties en présence, pour un dialogue national réellement inclusif.

Kofi Annan, l’homme de la situation

Ancien secrétaire général des Nations unies et prix Nobel de la paix en 2001, Kofi Annan est l’une des rares personnalités africaines et internationales qui inspire confiance et connaît bien la genèse de la problématique congolaise, qui remonte au génocide rwandais de 1994.

C’est du temps où il était secrétaire général des Nations unies que la classe politique congolaise et les forces vives de la société civile s’étaient réunies dans un dialogue inter-congolais à Sun City, en Afrique du Sud, pour conclure un accord en décembre 2002, mettant en place un nouvel ordre politique fondé sur une nouvelle constitution démocratique, actuellement en vigueur.

Avec M. Annan comme facilitateur, il est possible que le dialogue politique véritablement inclusif, voulu par les uns et les autres, prenne un tournant décisif.

Kofi Annan est rompu aux techniques de négociation internationale et peut mener à bien une mission de médiation et de facilitation dans un contexte complexe et difficile. Il a déjà été impliqué personnellement, avec beaucoup de volontarisme, lorsqu’il était en fonction, et connaît bien les acteurs qui tirent les ficelles, tant au niveau national que sous-régional.

Même dans sa retraite dorée, Kofi Annan,  président d’Africa Progress Panel, suit attentivement l’évolution de la situation politique, économique et sécuritaire du continent et en particulier dans la région des Grands lacs.

Avec M. Annan comme facilitateur, il est possible que le dialogue politique véritablement inclusif, voulu par les uns et les autres, prenne un tournant décisif et aboutisse à un compromis politique permettant de combler le vide laissé au sommet de l’État, le 20 décembre 2016.

Croisons les doigts et espérons que les souhaits de nombreux Congolais et amis du Congo se concrétiseront, et qu’un jour ce pays béni de Dieu pourra instaurer la démocratie, le respect des droits de l’homme et des principes de l’État de droit pour finalement permettre à son peuple de jouir de leurs droits économiques, sociaux et culturels.

Jeuneafrique.com par  Isidore Kwandja

Congo-Brazzaville : Sassou Nguesso, « l’homme de paix » qui est plus fort que le ciel et la terre

avril 6, 2016

Le « médiateur international de la crise centrafricaine », n’est pas resté longtemps sans emploi. La bonne élection présidentielle centrafricaine l’ayant mis de facto au chômage, il est invité à appliquer, à lui-même et à son propre pays, le Congo, les médications utilisées, hier, pour asseoir la paix et la tranquillité en Centrafrique. Réconciliateur chez les autres et tueur de ses propres compatriotes, uniquement, pour conserver le pouvoir par la force ? Voilà l’image que Sassou offre à la communauté internationale.

Le successeur auto-désigné du patriarche Omar Bongo qui s’occupait (avec maestria) des dossiers de paix de la sous-région de l’Afrique centrale, a beau cacher son naturel, celui-ci reprend, toujours, le dessus : le sang, le sang, le sang, etc. Voilà ce que Sassou est en train d’infliger, une énième fois, à son peuple, avec la complicité d’une communauté internationale, soumise aux diktats de ce dictateur, et, totalement, dépassée par les événements. Ban Ki-moon qui dit avoir un représentant personnel en Afrique centrale, le Sénégalais, Abdoulaye Bathily, peut-il expliquer à quoi il sert ?

Après s’être compromis au Burundi, chez Pierre Nkurunziza (avec la main de Sassou derrière), le voilà en flagrant délit d’incompétence notoire chez le même Sassou. Si Ban Ki-moon était un tant soit peu respectueux des Africains, il rappellerait son collaborateur. Le Congo n’a pas besoin des Nations-Unies pour connaître le pire. Il a, déjà, touché le fond.

Dans la nuit de dimanche à lundi, Sassou a maquillé une attaque d’une de ses nombreuses milices qu’il essaie de faire passer pour une tentative de coup d’état. Celle-ci était partie des quartiers Sud de Brazzaville pour brûler des commissariats, une mairie, quelques édifices et bâtiments publics avec plusieurs morts d’hommes, à la clé. Aucun connaisseur n’a eu de mal à y voir la main cachée du dictateur. Il a, toujours, agi, ainsi, par le passé. C’est son mode opératoire. Cette fois, son objectif est de terroriser par le crime (toujours le sang) dans le seul but de reprendre la situation du pays en main qui est en train de lui échapper. Comme en 1997, 1998 et 1999, il est prêt à brûler le Congo, tout le Congo, pour rester président de la République. Voilà « l’homme de paix » qui court depuis quelques jours après des lettres de félicitation de chefs d’Etat.

Ce mardi, 5 avril, il a continué à dérouler son plan : bombardement des localités de Mayama et Soumouna, dans le département du Pool. On dénombrerait plusieurs morts et des blessés et beaucoup de biens détruits. Depuis quelques heures, ses chars et blindés encerclent les domiciles des anciens candidats à la présidentielle, André Okombi Salissa et Jean Marie Michel Mokoko. En attendant d’aller vers d’autres… Il a profité du désordre provoqué, en connaissance de cause, pour faire proclamer sa « victoire » finale à l’élection présidentielle par la Cour constitutionnelle. Les Congolais avaient plutôt à cœur de se sauver de ses tueries.

Le Congo n’est pas coupé du monde. Les diplomates en poste à Brazzaville voient ce qui se passe et rendent compte à leurs capitales respectives.

Sassou (comme on l’a souvent décrit à afriqueeducation.com) est un dictateur, au sens plein du terme. Heureusement pour l’Afrique, cette forme de dictateur est en voie de disparition. Il a réussi à domestiquer le Congo, et à en faire sa chose.

Cela dit, malgré son activisme actuel pour imposer une paix dans le sang, le dictateur est loin, très loin, d’avoir gagné. Il n’aura pas, cette fois, le dernier mot. Il le sait au fond de lui-même, que tout ce qu’il entreprend, aujourd’hui, lui sera reproché demain. Et qu’en continuant de tuer et de confisquer la démocratie comme il le fait, il alourdit son dossier. Il a beau être plus fort que le ciel et la terre réunis, sa fin (politique) est pour bientôt.

Afriqueeducation.com

Congo: Bathilly arrive à Brazzaville, Sassou promulgue sa constitution, suivi de la lettre de François Hollande

novembre 8, 2015

« Un médiateur chez le médiateur », tel serait le titre du feuilleton politique qui se joue au Congo-Brazzaville au lendemain du référendum controversé du 25 octobre 2015.

 

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Répétition

En politique comme dans tous les autres domaines, on assiste à d’étranges scènes répétitives où les réflexes dictatoriaux du passé deviennent des symptômes du présent. C’est très souvent sur le champ de la politique que l’on peut avoir le sentiment troublant et parfois désespérant que l’Histoire en Afrique et en Extrême Orient ( Corée du nord) repasse les plats (elle se répète) , ramenant l’actualité du Congo-Brazzaville au Burundi de Pierre Nkurunziza où le changement de Constitution a débouché à la déstabilisation de ce petit pays des Grands Lacs.

Aujourd’hui, en effet, c’est le Congo-Brazzaville de Denis Sassou Nguesso, un petit pays pétrolier d’Afrique centrale, qui défraie la chronique par ses étranges comiques de répétition, cela avec un sentiment particulier de déjà vu en Afrique où les présidents rechignent de décrocher et de passer la main.

Médiation

Ironie de l’histoire, Denis Sassou Nguesso, médiateur dans la crise centrafricaine doit s’ouvrir à la médiation de l’envoyé spécial de l’ONU en Afrique Centrale, Abdoulaye Bathily, en vue de la résolution de la crise née du scrutin référendaire du 25 octobre 2015 très largement déserté par les populations du Congo-Brazzaville.
Denis Sassou Ngueso veut prendre tout le monde de court : l’IDC-FROCAD, Abdoulaye Bathily et la communauté internationale qui manque de fermeté à son égard. L’homme d’Edou/Penda veut passer en force, avec, en prime, un bras d’honneur au reste du monde.

Promulgation

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Ainsi, contre vents et marées, Sassou Nguesso a promulgué, vendredi 6 novembre, la nouvelle Constitution, adoptée par référendum le 25 octobre 2015. Un référendum contesté par la plate-forme IDC-FROCAD et dont les résultats ont été avalisés vendredi 6 octobre 2015 par la Cour Constitutionnelle d’Auguste Iloki. Selon les chiffres officiels, 94 % des électeurs ont approuvé la Constitution. L’alliance IDC-FROCAD a rejeté avec véhémence ces résultats sortis du chapeau d’Henri Bouka, tel un prestidigitateur. La promulgation de la nouvelle Constitution coïncide avec l’arrivée chez le médiateur de la crise centrafricaine, à Brazzaville, d’Abdoulaye Bathily, l’envoyé spécial de l’ONU en Afrique centrale, venu pour tenter de relancer le dialogue entre Sassou Nguesso, le PCT, les épigones du « chemin d’avenir » et l’alliance IDC-FROCAD. Est-ce un hasard ou un pied de nez à l’endroit de la communauté internationale ?

En tout cas, la promulgation de la constitution de Sassou ressemble à un camouflet au médiateur sénégalais Abdoulaye Bathily. Pour Sassou Nguesso, « j’y suis, j’y reste ». La page est tournée. Que ceux qui souhaitent prendre son fauteuil aillent voir ailleurs s’il y est.

Résistance

L’IDC-FROCAD ne l’entend pas de cette oreille et n’entend pas se coucher. Elle va maintenir la pression jusqu’au retrait de la Constitution. Sous quelle forme ? Un dialogue de sourd s’est installé entre les deux camps. Et, un véritable bras de fer est engagé entre Denis Sassou Nguesso, le PCT, les épigones du « chemin d’avenir » d’une part et la plate-forme IDC-FROCAD d’autre part. Denis Sassou Nguesso et Pierre Nkurunziza, même combat de dictateur ? Abdoulaye Bathily a essuyé un échec en tentant de ramener Nkurunziza à de meilleurs sentiments au Burundi. Réussira-t-il sa mission auprès de Denis Sassou Nguesso au Congo-Brazzaville ? Abdoulaye Bathily démentira-t-il sa réputation de looser dans la résolution des crises en Afrique Centrale qui lui colle sur la peau comme la tunique de Nessus ? Abdoulaye et Hollande même hypocrisie ?

Benjamin BILOMBOT BITADYS

Burundi : report sine die des élections, le médiateur de l’ONU rejeté par l’opposition

juin 5, 2015

Pierre Nkurunziza, le président burundais.
Pierre Nkurunziza, le président burundais. © AFP

Le président burundais, Pierre Nkurunziza, a signé jeudi un décret officialisant le report sine die des élections législatives et communales. Les 17 partis et organisations de l’opposition ont quant à eux récusé la médiation de Saïd Djinnit, l’envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU pour la région des Grands Lacs

On ne sait toujours pas quand auront lieu les élections législatives et communales au Burundi, initialement prévues vendredi 5 juin. Leur report avait été annoncé mercredi par la présidence burundaise qui avait alors précisé que la Commission électorale nationale indépendante « [annoncerait] officiellement le nouveau calendrier électoral qui tiendra compte de la recommandation des chefs d’État de l’EAC (Afrique de l’Est) et des délais prévus par la Constitution ». Ce que Prosper Ntahorwamiye, le porte-parole de la Ceni, avait démenti à Jeune Afrique, expliquant que c’était à Pierre Nkurunziza de prendre les décrets portant report des élections et convocation du corps électoral à un certaine date. « À ce jour, nous avons déjà envoyé deux propositions du calendrier électoral à la présidence. Nous attendons son retour. Le reste, c’est du verbiage, du mensonge ! Car aussi longtemps que la présidence n’aura pas publié le décret, il n’y aura pas de calendrier électoral », a-t-il indiqué.

« Le président Pierre Nkurunziza a signé cet après-midi un décret, a finalement indiqué jeudi 4 juin Willy Nyamitwe, le conseiller à la présidence en charge de la communication. « Dans ce décret, il est stipulé que les élections des conseillers communaux et des députés qui étaient prévues le 5 juin sont reportées à une date à préciser », a-t-il expliqué, ajoutant que « le même report s’applique à la période de la campagne électorale ».

« Le président n’a pas donné la date parce que la Ceni (commission électorale nationale indépendante) a proposé plusieurs possibilités », a cette fois affirmé Willy Nyamitwe. « On doit d’abord réconcilier les recommandations du sommet de Dar es-Salaam (Tanzanie) et les limites constitutionnelles ». Dimanche, au cours d’un sommet dans la capitale économique de la Tanzanie, les chefs d’État de la région avaient demandé un report de ces élections d’au moins un mois et demi, c’est-à-dire jusqu’à au moins la mi-juillet.

Ce report sine die vise à laisser à la Ceni « le temps d’organiser des consultations pour que ce soit des dates consensuelles », a précisé un haut cadre burundais.

Saïd Djinnit récusé ?

Depuis le sommet de Dar es-Salaam, le camp présidentiel et l’opposition ont exprimé leur volonté de reprendre le « dialogue politique », initié courant mai sous l’égide de l’ONU. Ce dialogue butte en particulier sur la fin des manifestations et le troisième mandat du président Nkurunziza, noeud de la crise. Les deux camps ont estimé que cette question du troisième mandat n’était « pas tabou » et qu’elle pouvait donc être désormais évoquée, laissant entrevoir une possible avancée du dialogue.

Problème, les 17 partis et organisations de l’opposition ont récusé jeudi la médiation de Saïd Djinnit, l’envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU pour la région des Grands Lacs, l’accusant de partialité. Il lui est reproché d’avoir montré un penchant pour le gouvernement lors du dialogue qu’il a mené jusque-là.

L’opposition assure avoir déposé jeudi en milieu d’après-midi au siège de la médiation une lettre adressée à Ban Ki-moon demandant à l’ONU de désigner un autre « médiateur ».  La médiation assurait en début de soirée qu’elle n’avait pas encore vu ce courrier.

Pressions sur les médias

Dans le même temps, un journaliste français, Thaïs Brouck, de la chaîne de télévision France 24, s’est vu retirer son accréditation de travail au Burundi délivrée par le Conseil national de la communication (CNC). Selon Thaïs Brouck, un responsable du CNC a justifié cette décision en affirmant avoir reçu des rapports de sécurité accusant le journaliste d’encourager par sa présence les manifestations. Dans une lettre officielle à l’intéressé, le CNC a estimé que M. Brouck n’a pas suivi ce qui était inscrit sur son accréditation, à savoir la couverture des élections.

Accompagné de deux membres de son équipe, le journaliste a quitté Bujumbura jeudi pour Kigali, au Rwanda. « Nous regrettons le retrait de l’accréditation, mais nous sommes en discussion avec les autorités burundaises pour en obtenir une nouvelle », a déclaré à l’AFP Marc Saikali, directeur de France 24, contestant tout parti pris dans le traitement par la chaîne des évènements au Burundi.

Il y a une dizaine de jours, une journaliste de la BBC, pourtant titulaire d’un visa, avait été refoulée à son arrivée à l’aéroport de Bujumbura. Au Burundi, la plupart des radios indépendantes du Burundi sont fermées depuis le coup d’État manqué du 13 mai dernier.

Jeuneafrique.com avec AFP