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En Papouasie, des rebelles armés d’arcs et de flèches rêvent d’indépendance

décembre 21, 2021

Wiro Nongganop dit commander un bataillon d’indépendantistes de Papouasie occidentale, mais n’a pour seules armes que des arcs et des flèches, et vit en exil dans une hutte faite d’écorces, se nourrissant parfois de simples feuilles de pommes de terre.

Le commandant rebelle Papou Wiro Nongganop dans une maison à Yapsi, dans la province occidentale de Papouasie-Nouvelle-Guinée, le 26 septembre 2021

© Chris MCCALL Le commandant rebelle Papou Wiro Nongganop dans une maison à Yapsi, dans la province occidentale de Papouasie-Nouvelle-Guinée, le 26 septembre 2021

Originaire de la province indonésienne de Papouasie occidentale, M. Nongganop a fui sa terre natale en 2019 avec quelques membres de son peuple Muyu pour traverser la frontière, très poreuse et s’installer en Papouasie-Nouvelle-Guinée.

Un garçon marchant dans un camp de réinstallation de réfugiés à Yapsi, dans la province occidentale de Papouasie-Nouvelle-Guinée, le 26 septembre 2021

© Chris MCCALL Un garçon marchant dans un camp de réinstallation de réfugiés à Yapsi, dans la province occidentale de Papouasie-Nouvelle-Guinée, le 26 septembre 2021

Il assure que 700 hommes suivent son commandement, essayant de survivre grâce à quelques cultures sur les terres marécageuses offertes par le gouvernement et rêvant d’une indépendance de la Papouasie occidentale, un objectif inaccessible depuis que l’Indonésie a pris le contrôle de cette moitié de l’île, il y a 60 ans.

Le commandant rebelle Papou Wiro Nongganop (D) et son adjoint Yohanis Ovop (G) dans une maison à Yapsi, dans la province occidentale de Papouasie-Nouvelle-Guinée, le 26 septembre 2021

© Chris MCCALL Le commandant rebelle Papou Wiro Nongganop (D) et son adjoint Yohanis Ovop (G) dans une maison à Yapsi, dans la province occidentale de Papouasie-Nouvelle-Guinée, le 26 septembre 2021

« Si nous avions des armes, nous ferions la guerre », explique à l’AFP M. Nongganop, commandant de bataillon de l’Organisation Papouasie libre (OPM), assis en tailleur à côté de son adjoint dans sa modeste hutte.

« Mais il n’y a pas d’armes. Si nous utilisons une fois une flèche, ils utilisent des armes à feu ».

Pendant des décennies, les rebelles de Papouasie occidentale ont mené une insurrection à la hauteur de leur faible équipement contre les forces de Jakarta, tout en peinant à trouver un soutien international.

Mais aujourd’hui, la colère, la pauvreté extrême et les violations présumées des droits humains par l’Indonésie confortent les partisans de la ligne dure et leur désir d’action militaire directe au sein du mouvement indépendantiste fragmenté.

Les rebelles ont intensifié leurs attaques, visant des chantiers de routes, mais aussi les écoles et les cliniques qu’ils estiment liées à l’armée.

En avril, les indépendantistes ont tué le chef des renseignements indonésiens en Papouasie, ce qui a considérablement accru les tensions.

Jakarta a réagi en qualifiant tous les séparatistes de « terroristes », en envoyant davantage de troupes dans la région et en lançant des représailles sanglantes.

Les envoyés des Nations unies ont exprimé leur « grave préoccupation » quant à la réaction excessive de l’Indonésie, qui semble « refléter un schéma plus large de racisme » à l’encontre des Papous indigènes.

En 2020, ils ont cité des accusations de tortures, le meurtre de civils papous et le déplacement de dizaines de milliers d’autres.

Ils se sont aussi inquiétés du fait que Jakarta a coupé l’accès à internet de façon sporadique et interdit de facto la présence de presque tous les journalistes étrangers dans la région, rendant toute vérification très difficile.

Le gouvernement indonésien n’a pas répondu aux sollicitations, mais le ministre de la Sécurité Mahfud MD a assuré que les Papous étaient considérés comme égaux aux autres citoyens en Indonésie.

« Les Papous sont des frères pour nous, tout comme les Javanais, les Bugis, les populations de Sumatra et d’Aceh », a-t-il insisté. 

– ‘Meurtres secrets’ –

Wiro Nongganop s’estime heureux d’être en vie aujourd’hui.

Lui et son adjoint énumèrent les Papous issus de plusieurs groupes ethniques qui sont morts ou ont disparu dans des circonstances suspectes ces dernières années.

« Ils ont perpétré des meurtres secrets », assure-t-il. « C’est un système unilatéral. Ils ne se soucient pas de la population. »

« Trois membres des Kopassus avec une voiture et un camion blindé sont venus dans ma maison pour m’emmener. Alors nous nous sommes enfuis » dit-il, employant le nom sous lequel sont connues les forces de sécurité indonésienne, qui patrouillent régulièrement dans les villages frontaliers.

Il espère recevoir des armes à feu pour que les rebelles puissent riposter, mais personne ne leur en a donné pendant leurs décennies de combats, ne leur laissant que leurs armes artisanales trditionnelles: des arcs, des flèches et des lances.

Et pour les gens comme Wiro Nongganop, la vie dans la province la plus pauvre de Papouasie Nouvelle-Guinée est difficile et le premier combat à mener est souvent celui pour sa propre survie.

– ‘Peur de rentrer’ –

Son village, Yapsi, aussi appelé « Nouvel Emplacement », est un endroit difficile à cultiver. La terre est pauvre, les plantes poussent mal et la malnutrition et la tuberculose y sont courantes. 

Des enfants jouent entre les bâches aux couleurs de différentes agences des Nation Unies. L’école reste peu accessible. 

Beaucoup des Papous arrivés en 2019 ont préféré retourner de l’autre côté de la frontière, en Indonésie, malgré les risques qui les y attendent.

« Ils avaient faim. Ils ne pouvaient pas le supporter », explique Wiro Nongganop, décrivant le manque de nourriture récurrent.

Pour lui, le retour est impossible, au moins pour le moment. Les forces de sécurité indonésiennes savent qui il est, dit-il. « J’ai peur de rentrer », soupire-t-il, « je vais attendre l’indépendance et ensuite je rentrerai ».

Avec AFP par str/arb/ssy/qan/mav/mlb/at

Indonésie: nouvelles émeutes en Papouasie, plusieurs bâtiments incendiés

août 29, 2019

 

Des manifestants ont incendié plusieurs bâtiments jeudi dans la plus grande ville de Papouasie, selon un journaliste de l’AFP, alors que la province indonésienne est le théâtre depuis près de deux semaines d’émeutes qui ont fait au moins trois morts.

Plusieurs centaines de manifestants se sont rassemblés dans la ville de Jayapura, certains ont mis le feu à une assemblée régionale et ont lancé des pierres sur des commerces et des hôtels, a constaté un journaliste sur place. Plusieurs autres bâtiments officiels ont été ensuite incendiés ainsi que le siège local d’un opérateur de télécommunications. Nombre de manifestants réclamaient l’indépendance de la province et dénonçaient le traitement de la population autochtone de l’île, les Papous, par les autorités indonésiennes accusées de racisme.

Mercredi, les affrontements les plus graves depuis le début du mouvement se sont produits dans le district isolé de Deiyai. Des heurts entre manifestants et forces de l’ordre indonésiennes ont fait au moins un mort parmi les soldats et deux parmi les manifestants, selon les autorités. Des témoins et des médias locaux ont fait état de 6 manifestants tués par balle par des militaires au cours de ces incidents.

Les autorités ont démenti ce bilan et indiqué que les forces de l’ordre avaient été attaquées par des centaines de Papous armés de machettes et de flèches. Ce bilan n’a pas pu être indépendamment vérifié alors qu’un blocage de l’internet mobile, imposé en Papouasie depuis la semaine dernière, rend les communications particulièrement difficiles.

Trois cents membres des forces de l’ordre ont été envoyés en renfort à Deiyai pour rétablir l’ordre, a indiqué jeudi le chef de la police nationale Tito Karnavian. De nombreuses localités de Papouasie connaissent depuis près de deux semaines des manifestations, des émeutes et des incendies de bâtiments, dans un mouvement de colère déclenché par l’arrestation le 17 août à Surabaya, sur l’île de Java, de 43 étudiants papous.

La police antiémeutes avait investi un dortoir pour en déloger les étudiants, accusés d’avoir détruit un drapeau indonésien le jour de la fête de l’Indépendance de l’Indonésie. Les policiers les ont arrêtés et interrogés avant de les libérer. Des manifestants s’en étaient pris aux étudiants, proférant des injures racistes et les traitant de «singes» ou de «chiens».

Aujourd’hui divisé en deux provinces, l’ouest de l’île de Nouvelle Guinée, riche en ressources naturelles, est en proie à une rébellion indépendantiste sporadique contre le gouvernement indonésien. L’Indonésie a pris par la force le contrôle de ce territoire en 1963, l’année ayant suivi le départ des Néerlandais qui en avait fait une colonie, et l’a officiellement annexé en 1969. De nombreux Papous réclament l’indépendance. La Papouasie Nouvelle-Guinée, l’autre moitié de la grande île, l’a obtenue en 1975 après avoir appartenu à l’Australie.

Par Le Figaro.fr avec AFP

Papouasie: les troubles continuent et l’Indonésie envoie des renforts

août 21, 2019

 

La province indonésienne de Papouasie a connu ce mercredi un troisième jour de manifestations qui ont par endroits dégénéré en affrontements, poussant Jakarta à envoyer quelque 1200 militaires et policiers en renfort.

Le gouvernement a appelé au retour au calme dans cette province pauvre de l’extrême est de l’archipel. Les émeutes ont commencé lundi après l’arrestation pendant le week-end de 43 étudiants papous et des injures racistes prononcées à leur égard. Un millier de personnes a manifesté mercredi dans les rues de Timika (sud de la Papouasie), où un journaliste de l’AFP a vu des manifestants jeter des pierres vers les fenêtres du parlement local et tenter de détruire la barrière y donnant accès. La foule n’a été dispersée dans cette ville qu’après des tirs de sommation de la police. Plusieurs centaines de manifestants ont aussi défilé dans les rues des villes de Sorong et de FakFak à l’ouest de l’île.

Plusieurs villes de cette région riche en matières premières étaient paralysées ce mercredi, dont Manokwari où des magasins et le parlement local ont été incendiés par des émeutiers lundi. Plusieurs policiers ont été blessés, selon les autorités. Des informations non confirmées ont fait état de manifestants blessés. Quelque 900 policiers et 300 militaires ont été déployés à Manokwari et Sorong, ont indiqué mercredi le gouvernement et les autorités de Papouasie. Le porte-parole de la police nationale Muhammad Iqbal a estimé que la situation restait «globalement sous contrôle», précisant les forces de l’ordre n’étaient pas équipées de balles réelles.

La colère s’est répandue à travers la Papouasie après des informations sur l’arrestation samedi de 43 étudiants papous par la police à Surabaya, la deuxième ville du pays, sur l’île de Java.

a police anti-émeute a investi un dortoir pour déloger des étudiants papous qui avaient été accusés d’avoir détruit un drapeau indonésien le jour de la fête de l’Indépendance de l’Indonésie. Les policiers les ont arrêtés et interrogés avant de les libérer. Parallèlement, une manifestation contre la présence des étudiants papous a été organisée au cours de laquelle des injures raciales ont été proférées. Le président indonésien Joko Widodo a promis une enquête sur les incidents survenus à Surabaya et devrait se rendre dans la province prochainement.

La région, riche en ressources naturelle, connait une rébellion indépendantiste sporadique contre le gouvernement indonésien. La Papouasie s’est déclarée indépendante en 1961, mais l’Indonésie en a pris le contrôle par la force en 1963 et l’a officiellement annexée en 1969. De nombreux Papous réclament l’indépendance, comme la Papouasie Nouvelle-Guinée, autre moitié de cette grande île qui l’a obtenue en 1975 après avoir été une colonie australienne.

Par Le Figaro.fr avec AFP