
Des urgences de l’Ontario sont forcées de fermer leurs portes, dernièrement. Celle de l’Hôpital Western, au centre-ville de Toronto, a passé près de devoir fermer en fin de semaine dernière. (Archives) Photo : Istock
Samedi, l’urgence de l’Hôpital Western, au centre-ville de Toronto, a passé bien près de devoir fermer ses portes. Dans la province, des salles d’urgence ferment temporairement en raison d’un manque de personnel dans plusieurs régions et depuis quelques semaines déjà. La situation est critique, selon bien des intervenants.
Pour moi, [la situation à l’hôpital Western] est une indication que le système est sur le point de s’effondrer
, selon la députée du Nouveau Parti démocratique provincial Marit Stiles.
Ça va prendre des morts
pour réveiller le gouvernement, affirme Cathryn Hoy, présidente de l’Association des infirmières et infirmiers de l’Ontario (AIIO).
Nous travaillons avec une fraction du personnel que nous avions auparavant
, ajoute le Dr Kashif Pirzada, urgentologue à Toronto.
On ferme des départements, on ferme des secteurs dans des départements, on perd nos travailleurs
, renchérit le Dr Michael Howlett, président de l’Association canadienne des médecins d’urgence (ACMU).
Selon eux, les solutions à ces problèmes sont évidentes, mais le gouvernement n’est pas à l’écoute.
Un système à risque
Mme Hoy explique comment la direction de l’Hôpital Western a contourné le problème de manque de personnel afin de garder l’urgence ouverte : Ce sont des médecins, des médecins résidents et des étudiants [en soins infirmiers] de 3e ou 4e année qui ont fait le travail d’infirmières autorisées
.
Celle-ci offre un exemple de ce qui est actuellement en jeu : Pouvez-vous imaginer s’il y avait eu un carambolage majeur sur la 401 [en fin de semaine] et qu’un nombre élevé de patients était envoyé à des urgences sans infirmières?

Le Dr Kashif Pirzada est urgentologue à Toronto. Photo : Radio-Canada
Le Dr Pirzada rappelle que le système subit une grande pression. Il y a une énorme charge sur le système hospitalier, en particulier au cours des deux dernières semaines. Les gens attendent 6 à 8 heures, parfois plus, pour voir un médecin aux urgences.
Le problème des conditions de travail
Le Dr Howlett affirme que le problème n’est pas nouveau, que les solutions sont évidentes et que, malgré tout, rien n’est fait. On doit travailler à améliorer de beaucoup les environnements de travail afin de travailler sur la rétention [du personnel].
Selon le Dr Pirzada, les effectifs sont beaucoup plus bas qu’avant. Nous avons eu beaucoup de gens – des infirmières et des médecins – qui quittent le terrain et trouvent un travail plus facile ailleurs
.
Mme Hoy est d’accord. Les infirmières démissionnent, elles prennent leur retraite, elles vont ailleurs pour un meilleur salaire, de meilleures conditions de travail. Il faut que ça s’arrête. Je ne sais pas quoi dire de plus. La preuve est là. Ils ferment les urgences!

Cathryn Hoy est la présidente de l’Association des infirmières et infirmiers de l’Ontario (AIIO). Photo : Radio-Canada
Le gouvernement doit arrêter de s’attendre à ce que les infirmières paient les pots cassés chaque fois.
Le réseau d’hôpitaux University Health Network (UHN), qui gère l’Hôpital Western entre autres, abonde dans le même sens dans un communiqué publié samedi. Les professionnels de la santé continuent de relever le défi, mais cela a été une tâche très longue et difficile et les employés sont fatigués.
« [Les infirmières] sont épuisées, elles sont fatiguées, certaines d’entre elles n’ont pas pris de vacances depuis trois ans, leur santé mentale est terrible. »— Une citation de Cathryn Hoy, présidente de l’Association des infirmières et infirmiers de l’Ontario (AIIO)
Des solutions évidentes
Le Dr Howlett affirme que la liste de solutions est simple et établie depuis longtemps. Nous sommes conscients de cette situation depuis plusieurs années maintenant. Notre association en parle depuis plus d’une décennie.
En plus des problèmes liés aux conditions de travail, le Dr Howlett ajoute à la liste : On doit ouvrir la porte à plus de diplômés étrangers et s’assurer qu’ils puissent intégrer le système rapidement. […] On doit retirer les barrières interprovinciales pour les infirmières, les médecins, tous les travailleurs [de la santé], pour qu’ils puissent se déplacer là où les besoins sont les plus criants.
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Le Dr Pirzada s’explique mal comment on a pu en arriver à ce point. Nous n’avons vu aucun leadership pour corriger ces problèmes structurels. Nous n’entendons rien de neuf des hauts dirigeants [des hôpitaux] ou des dirigeants politiques.
Pour Mme Stiles, c’est une question de pénurie de main-d’œuvre. Il s’agit d’un gouvernement qui n’a pas pris la situation au sérieux ou aussi rapidement qu’il le fallait. J’aimerais voir la nouvelle ministre [de la Santé, Sylvia Jones] proposer des solutions
.

Marit Stiles est la députée du NPD provincial dans Davenport. Photo: Radio-Canada
Le Dr Pirzada affirme que le travail des infirmières doit être récompensé. Donnez-leur une prime de danger. Donnez-leur plus d’argent pour faire les travaux difficiles. C’est là que nous en avons besoin en ce moment.
Il y a deux semaines, les ministres de la Santé des différentes provinces ont demandé plus d’argent au gouvernement fédéral.
Les salaires de tous les employés du secteur public ontarien, ce qui comprend les infirmières, sont plafonnés à une augmentation de 1 % par année par le gouvernement de Doug Ford.
Le ministère de la Santé de l’Ontario n’a pas répondu aux demandes d’entrevue de Radio-Canada.
Radio-Canada par avec des informations de Yanick Lepage