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Chlordécone: les cancers de la prostate reconnus comme maladie professionnelle

décembre 22, 2021
Chlordecone: les cancers de la prostate reconnus comme maladie professionnelle
Chlordécone: les cancers de la prostate reconnus comme maladie professionnelle© AFP/Archives/Christophe ARCHAMBAULT

Les cancers de la prostate liés à l’exposition au chlordécone, un pesticide largement utilisé pendant des décennies aux Antilles, sont désormais reconnus comme maladie professionnelle, selon un décret publié mercredi au Journal officiel.

« C’était une décision attendue, particulièrement aux Antilles », a mis en avant le ministère de l’Agriculture, dans un communiqué mercredi matin.

Le chlordécone, pesticide interdit en France en 1990, a continué à être autorisé dans les champs de bananes des Antilles par dérogation ministérielle jusqu’en 1993, infiltrant les sols pour des centaines d’années, alors que sa toxicité et son caractère persistant dans l’environnement étaient connus depuis les années 1960.

Plus de 90 % de la population adulte en Guadeloupe et Martinique est contaminée par le chlordécone, selon Santé publique France, et les populations antillaises présentent un taux d’incidence du cancer de la prostate parmi les plus élevés au monde.

Des élus des Antilles ont qualifié le décret « d’avancée (…) encore incomplète ». « L’empoisonnement à la chlordécone n’est pas seulement le fait des professionnels de la banane, mais de l’ensemble des populations », a déploré auprès de l’AFP le maire écologiste de Pointe-à-Pitre, Harry Durimel.

Olivier Serva, député de la majorité et président de la délégation Outre-mer à l’Assemblée nationale, a qualifié le décret « d’insatisfaisant » au regard des dispositions nécessaires pour bénéficier de l’indemnisation, qui entretiennent selon lui « le flou » sur les personnes éligibles ».

« Il y a une multitude de cancers ?du sang, du côlon – qu’on a découvert chez un bon millier d’ouvriers agricoles et d’ayant droits », a réagi auprès de l’AFP Yvon Sérénus, président du collectif des ouvriers empoisonnés par les pesticides, qui demandent qu’ils soient aussi reconnus « maladies professionnelles ».

Le décret publié permet de créer un « tableau des maladies professionnelles relatif au cancer de la prostate provoqué par les pesticides », déterminant les conditions de prise en charge ainsi que la liste des travaux susceptibles de provoquer cette pathologie en milieu agricole.

« Le terme +pesticides+ se rapporte aux produits à usages agricoles et aux produits destinés à l’entretien des espaces verts (produits phytosanitaires ou produits phytopharmaceutiques) ainsi qu’aux biocides et aux antiparasitaires vétérinaires, qu’ils soient autorisés ou non au moment de la demande », selon le texte.

Les travaux exposant habituellement aux pesticides sont effectués « lors de la manipulation ou l’emploi de ces produits, par contact ou par inhalation », « par contact avec les cultures, les surfaces, les animaux traités ou lors de l’entretien des machines destinées à l’application des pesticides », est-il précisé.

Cette mesure, destinée à faciliter l’indemnisation des victimes, s’inscrit dans une série d’actions menées par l’Etat dans ce dossier extrêmement sensible depuis des années aux Antilles et qualifié de « scandale environnemental » par le président Emmanuel Macron.

1.000 à 19.000 euros par an

La publication de ce décret avait été annoncée à l’automne par le ministre de l’Agriculture Julien Denormandie. Il ouvre aux agriculteurs concernés l’accès à un fonds créé en 2020 et destiné à indemniser les personnes atteintes de maladies liées aux pesticides.

Dans le détail, tous les exploitants ou salariés agricoles pourront demander ce statut à deux conditions: qu’ils aient travaillé pendant au moins dix ans au contact du chlordécone, et que moins de quarante ans se soient écoulés entre leur dernière exposition et le diagnostic de cancer de la prostate.

Ce sont les « durées généralement admises pour ce type de cancer », avait expliqué récemment le ministère de l’Agriculture. Les personnes exposées moins de dix ans pourront tout de même faire une demande au niveau d’une commission régionale, avait-il précisé.

« Les personnes éligibles peuvent dès à présent se rapprocher de leurs caisses de sécurité sociale (…) pour déposer une demande d’indemnisation », indique mercredi matin le ministère de l’Agriculture.

Il précise qu’aux Antilles, le plan chlordécone IV – quatrième plan destiné à lutter contre les conséquences de cet insecticide, pour la période 2021-2027 – « prévoit un dispositif d’accompagnement spécifique des personnes concernées » qui « s’appuiera sur les associations présentes localement, dont notamment Phyto-Victimes et France Asso Santé Martinique, les centres communaux d’action sociale et les caisses générales de sécurité sociale ».

Le gouvernement s’est abstenu d’estimer combien de personnes pourraient être concernées par ces indemnisations. Il ne s’est pas non plus avancé sur le montant total.

Par Le Point avec AFP

France/Pesticide dans l’eau d’un village catalan: plainte pour «empoisonnement»

août 5, 2020

Deux plaintes ont été déposées mercredi 5 août à Perpignan, une pour «empoisonnement», l’autre pour «négligence», à la suite de la découverte de pesticide dans l’eau alimentant un village des Pyrénées-Orientales, a indiqué à l’AFP l’avocat des plaignants.

A la suite de la pollution d’une rivière, les quelque 900 habitants de Tautavel sont privés d’eau potable depuis deux mois. L’avocat des plaignants Me Jean Codognès précise que deux plaintes ont été déposées: une contre X pour «empoisonnement» afin qu’une enquête puisse déterminer l’origine, la seconde pour «négligence» vise Perpignan Méditerranée Métropole, gestionnaire du réseau d’au potable.

«Négligence des pouvoirs publics»

L’avocat pointe «une conjonction de plusieurs problématiques: d’abord, les installations de pompage ne sont pas aux normes, classées fragiles et vulnérables, la zone de captage doit être modifiée depuis 2012, mais rien n’a été fait. Il y a une négligence des pouvoirs publics». «Ensuite, ajoute-t-il, on suspecte un ou des viticulteurs soit d’avoir utilisé ces produits chimiques interdits, soit d’avoir vidangé des cuves contenant ces produits dans des zones inadaptées», qui auraient terminé dans la rivière qui traverse le village, le Verdouble.

«Les analyses révèlent la présence de plusieurs molécules de pesticides, soit du fluxapyroxad, un fongicide, le thiamétoxame, un insecticide substance active de la famille néonicotinoides, de l’atrazine et therbuthylazine dont l’utilisation est interdite par décret N°2018-675 du 30 juillet 2018», soulignent dans leur plainte les trois associations.

Appel à ne plus consommer l’eau du robinet

Pour le président LR de Perpignan Méditerranée Métropole, Robert Vila, un retour à la normale est prévu pour le 10 août. «L’agence régionale de santé a effectué des analyses qui ont montré que l’eau n’était pas consommable. Aujourd’hui, dit-il, les analyses sont de plus en plus rassurantes, on se rapproche de quelque chose de normal. (…) On espère qu’aux alentours du 10 août la situation sera à nouveau normale». Depuis le 10 juin et l’appel à ne plus consommer l’eau du robinet, Perpignan Méditerranée Métropole distribue gratuitement des bouteilles d’eau aux habitants de Tautavel.

C’est «une analyse de routine (qui) a révélé la présence importante de pesticides, généralement utilisés dans le monde agricole. On avait alerté à plusieurs reprises de la fragilité de la station de traitement», a précisé à l’AFP Giselle Santana, de la délégation Pyrénées-Orientales de l’Agence régionale de santé (ARS). Cette semaine, dans l’urgence, «une station de traitement mobile a été installée, avec un filtre à charbon actif, qui permet de retenir les molécules présentes dans l’eau, mais le problème n’est pas réglé à long terme. La solution pérenne, c’est un investissement de plusieurs millions d’euros», ajoute l’experte de l’ARS.

Produits «cancérigènes»

«On ne peut pas suspecter un geste volontaire, il faut identifier le fautif pour faire cesser ces pratiques. Ce sont des produits hyper dangereux, cancérigènes», alerte Patrick Marcotte, porte-parole local d’EELV et du collectif Alternative aux pesticides 66, une des associations plaignantes. Les deux autres associations à avoir porté plainte sont l’Association des usagers de l’eau des Pyrénées-Orientales et l’Association Tautavelloise pour l’information et la sauvegarde.

«On regrette le laisser-faire de l’ancienne municipalité alors que la rénovation du captage était subventionnée à 80%. Il faut relancer le débat sur le développement de la viticulture bio, 20% du vignoble est en bio dans le département, c’est un terroir exceptionnel, il faut protéger cette AOC magnifique (AOC Côtes du Roussillon Villages-Tautavel)», plaide l’écologiste.

Par Le Figaro avec AFP