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Picasso à Dakar : entre hommage, relecture et découverte

mai 28, 2022

REPORTAGE. Alors que l’exposition « Picasso à Dakar 1972-2022 » bat son plein, la galerie Le Manège propose un dialogue inédit entre artistes africains contemporains et Picasso.

Alors que le musée des Civilisations noires de Dakar propose depuis le 1er avril l’exposition « Picasso à Dakar 1972-2022 », cinquante ans après l’exposition des œuvres de l’artiste espagnol au Musée dynamique de Dakar, la galerie de l’institut français Le Manège offre une inversion des paradigmes à travers les œuvres de seize artistes originaires ou liés au continent africain.

Découverte des liens entre Picasso et l’Afrique

En cette matinée de début mai, les 28 élèves de cm2 de l’Institution Sainte-Jeanne-d’Arc de Dakar attendent, alignés en file indienne dans le hall du musée des Civilisations noires (MCN), de pouvoir assister à la visite guidée de l’exposition « Picasso à Dakar 1972-2022 ». « L’artiste s’appelle Pablo Ruiz Picasso et il a exposé à Dakar en 1972 au Musée dynamique après avoir rencontré Senghor à Paris », renseigne Youssou, 11 ans, prouvant au passage qu’il a bien fait les recherches recommandées par son enseignante en amont de la visite. Sa camarade Khadija, âgée de 10 ans, ajoute : « Il faisait des sculptures d’animaux, peignait des tableaux et aimait les masques africains. » C’est sa tante qui lui en a parlé. En dehors de ces informations glanées sur le Web, ce jeune public connaît peu l’artiste, et notamment ses œuvres. Ce qui est encore moins connu de ces préadolescents, comme de nombreux adultes, c’est l’attrait de Picasso pour le continent africain, lui qui vivait entouré d’œuvres et d’objets africains. Cinquante ans après la première exposition de Picasso au Musée dynamique de Dakar, sous l’impulsion de Léopold Sédar Senghor, c’est cette « parenté » que l’exposition actuelle souhaite mettre en avant. Celle-ci a été réalisée en collaboration entre quatre musées, deux français et deux sénégalais : le musée Picasso-Paris, le musée du Quai Branly-Jacques-Chirac, le musée Théodore-Monod ainsi que le musée des Civilisations noires qui l’accueille.

Au centre de l’exposition, les portes cuuray réalisés en céramique par le Collectif Ban.© Clémence Cluzel

Studieux, les élèves écoutent la médiatrice culturelle leur détailler cette filiation artistique, ou tout du moins ces jeux de miroirs constants. Munis d’une feuille de papier, ils ne ratent rien des informations récoltées : « négritude », « portrait d’un homme noir représenté comme un empereur », « cubisme », « art figuratif », etc. Arrivée devant un masque baoulé positionné à côté d’un tableau de Picasso (celui de l’affiche de l’exposition), Asmaou Manga les interroge : « Quelles sont les ressemblances que vous pouvez noter ? » Les doigts se lèvent : « La forme du visage allongée », dit l’une ; « le nez », ajoute un autre ; « la forme des yeux », analyse encore un élève. S’arrêtant devant une immense photo de l’artiste drapé dans un tissu orange au milieu de son atelier, la médiatrice culturelle, qui a suivi une formation d’une semaine pour approfondir ses connaissances sur l’artiste, continue de renseigner son auditoire qui l’interroge sur la vie privée de l’artiste : « Avait-il des enfants ? » Même jeu de miroirs quelques mètres plus loin entre la toile La Femme dans un fauteuil et un masque bedu : couleurs similaires, même forme… L’origine africaine de l’inspiration du catalan est visible. De toute l’exposition, Amsatou a jeté son dévolu sur le tableau La Femme couchée lisant, car elle aussi « adore lire ». Khadija en passant devant la toile s’interroge : « Qui est cette dame ? Ce ne serait pas Olga, la femme de Picasso ? », se rappelant que Mme Manga l’avait évoquée quelques minutes plus tôt. Au sortir de cette visite d’une trentaine de minutes, Émilie Sarr, l’enseignante de la classe, est très satisfaite : « Au départ, j’étais réticente, mais je trouve que c’est vraiment très intéressant. J’ai appris plein d’informations, notamment les correspondances entre les œuvres de l’artiste et l’Afrique, le lien avec les arts nègres… Les enfants ont besoin de s’ouvrir au monde, peut-être même qu’il y a des futurs peintres dans la classe ! » Elle compte d’ailleurs revenir avec ses enfants. Les visites scolaires s’enchaînent chaque jour au musée des Civilisations noires. « On a beaucoup de demandes ! » affirme Asamou Manga. « Cette exposition est un moyen de montrer que l’art rassemble, que le musée est ouvert à toutes les cultures tout en sauvegardant la nôtre. Pour les écoles, c’est aussi un moyen de faire connaître l’art aux enfants sénégalais, beaucoup ne connaissent pas ce milieu, et de susciter un intérêt », détaille-t-elle.

« Picasso Remix » : inverser et émanciper les regards

En résonance à l’exposition du MCN, la galerie de l’institut français Le Manège propose de changer de paradigmes à travers son exposition « Picasso Remix »*. « Nous avons monté cette exposition avec Olivia Marsaud, directrice du Manège, à la demande de Hamady Bocoum, le directeur du MCN », explique Mohamed Amine Cissé, cocommissaire de « Picasso Remix ». Cette fois-ci, ce sont les œuvres de seize artistes**, issus de la diaspora, résidant ou ayant un lien fort avec le continent africain, qui s’emparent des œuvres de Picasso pour les revisiter et inverser les regards : les œuvres sont vues depuis le continent. « On sait que Picasso s’est inspiré de l’Afrique. On a voulu changer de paradigme, en donnant carte blanche aux artistes pour qu’ils expriment leur rapport à l’artiste, à son style, à ses réalisations. Les œuvres exposées ont été produites entre 2000 et 2022. Certaines étaient déjà existantes et rentraient en résonance, tandis que d’autres ont été créées pour l’occasion », ajoute Mohamed Amine Cissé avant de préciser que le but était également de multiplier les supports : peinture, toile, photocollage, sculpture, céramique… « Peu de gens savent que, vers la fin de sa vie, Picasso a produit environ 3 500 pièces en céramique », rapporte-t-il.

Les portes cuuray réalisés en céramique par le Collectif Ban.© Clémence Cluzel

« Certaines des œuvres sont des réponses, d’autres des hommages avec la revendication d’un héritage et une filiation assumée », raconte le commissaire. La toile hors norme du Guernicaest ici revisitée par le Béninois Roméo Mivekannin, qui insère dans la toile ses portraits, pour mieux se l’approprier et placer l’homme africain au cœur de l’œuvre. Elle apparaît plus que jamais actuelle, car elle fait écho aux conflits qui agitent notre siècle : SyrieAfghanistan et, dernièrement, la guerre en Ukraine. Sandra Seghir offre une relecture du célèbre tableau du peintre catalan Les Demoiselles d’Avignon avec sa peinture Les Primitifordiales, qui conserve le format original. S’il représente toujours le corps féminin, l’artiste y réinvente les codes esthétiques et la diversité en représentant des femmes fortes, aux différentes carnations. Une réappropriation plus féminine et féministe de l’œuvre qui brise les codes de l’art classique. Cette volonté de replacer la femme comme créatrice, et non plus comme simple muse, se retrouve également dans les peintures de Marianne Collin Sané et dans l’autoportrait réalisé par Audrey d’Erneville qui représente une femme à la taille démesurée pour illustrer la force et le pouvoir de la femme africaine. Un peu plus loin, la fameuse Tête de taureau de Picasso est revisitée par Meissa Fall qui l’a reconstituée avec des pièces de vélo, en l’occurrence une selle. « Il a créé cette œuvre pour permettre à tout le monde de la voir. L’originale est dans un musée, donc tout le monde n’y a pas accès », développe Mohamed Amine Cissé.

Les Primitifordiales, oeuvre de Sandra Seghir inspirée de la toile Les demoiselles d’Avignon.© Clémence Cluzel

« Picasso ne m’a rien appris. C’est lui qui s’est inspiré de moi. Et quand je dis moi, je parle de nous, les Africains », revendique l’artiste Moussa Traoré. Souvent appelée la « Picasso africaine », Kiné Aw s’en agace, arguant que le cubisme n’a pourtant pas été inventé par Picasso, bien qu’en Europe on le désigne largement comme le précurseur de ce style artistique.

Oeuvre de Thierry Fontaine qui aborde le colonialisme.© Clémence Cluzel

Les masques africains de Thierry Fontaine, dont les yeux ont été remplacés par des bougies, la cire perlant, telles des larmes, évoquent l’attrait pour les masques de Picasso. Mais derrière l’œuvre, l’artiste évoque la colonisation, l’interdiction de l’animisme pendant cette période et la douleur vécue par les populations. Le discours se fait plus politique avec le photocollage de Vincent Michéa qui évoque à travers la photo d’œuvres africaines encadrées, « enfermées », la question du retour des œuvres en Afrique. Un questionnement soulevé également par la réalisation du collectif Ban qui a réalisé des encensoirs traditionnels sénégalais (cuuray) en céramique qui « interrogent le sens que conserve un objet lorsqu’il est enfermé dans un musée et qu’il perd la raison de sa création. Il devient un objet mort ». Alors que la question de la restitution des œuvres d’art africaines au continent est plus que jamais actuelle, l’émancipation des regards s’impose. Ainsi, cette exposition en donnant la parole à ces artistes leur offre l’occasion de donner leur point de vue et de mettre en lumière l’apport des créateurs africains dans l’histoire de l’art mondiale. Une réappropriation salutaire et nécessaire avec une confrontation des esthétiques, des techniques, des inspirations qui vise au-delà de multiplier les regards sur l’histoire de l’art, à affirmer la place des artistes africains contemporains face aux critères de l’art moderne occidental. Le titre de l’exposition « Picasso Remix » est ainsi un hommage à « Africa Remix », l’une des plus grandes expositions d’art contemporain africain qui a permis de mettre celui-ci sur l’échiquier mondial et contribué à une meilleure reconnaissance des arts contemporains hors de l’Occident », souligne Mohamed Amine Cissé.

* « Picasso Remix », une exposition à voir à la galerie Le Manège de l’Institut français de Dakar, jusqu’au 30 juin.

**16 artistes de 7 pays = Meissa Fall, Thierry Fontaine, Collectif Ban, Camara Gueye, Kiné Aw, Noumouke Camara, Audrey d’Erneville, Dimitri Fagbohoun, Marianne Collin Sané, Sandra Seghir, Moussa Traoré, Hervé Yamguen, Carl-Edouard Keïta, Koko Komegne, Vincent Michéa, Roméo Mivékannin.

Avec Le Point par Clémence Cluzel à Dakar

Un rare Picasso vendu pour 67,45 millions de dollars à New York

novembre 5, 2015

Un tableau de Picasso de la période bleue de l’artiste, qui cache une seconde œuvre sur le revers de la toile, s’est vendu pour 67,45 millions de dollars (67,1 millions de francs) jeudi soir à New York lors d’une enchère par Sotheby’s. Il s’agit de « La gommeuse ».

L’œuvre est un magnifique nu d’une artiste de cabaret à la forte charge érotique. Peinte en 1901, alors que Picasso n’avait que 19 ans, cette toile pouvait à elle seule prétendre à de belles enchères. Mais c’est le revers du tableau qui montre un ami de Picasso en lutin jaune, nu et urinant coiffé d’un turban rouge et blanc, qui fait de cette pièce une oeuvre très rare.

Cette vente est aussi une fort belle affaire pour le milliardaire américain Bill Koch, qui avait acheté l’oeuvre pour 3 millions de dollars en 1984, ignorant totalement que le nu en cachait un autre. Des travaux de restauration en 2000 ont permis de découvrir la seconde peinture. Le tableau avait été estimé à 60 millions de dollars.

33,85 millions pour un Monet
Quelques minutes seulement avant la vente du Picasso, une étude à l’huile des nymphéas de Monet a trouvé un acheteur à 33,85 millions, pour une estimation de 30 à 50 millions.

Autre temps fort de la soirée, un Van Gogh, peint un an seulement avant la mort de l’artiste et montrant un ciel tumultueux au-dessus des champs dans la région d’Arles. Il est parit pour 54 millions de dollars, alors que « le bébé Marcelle Roulin », un portrait d’un bébé joufflu portant un bonnet de dentelle, également peint par Van Gogh, s’est vendu pour 7,64 millions de dollars après une longue et frénétique empoignade entre amateurs.

Les plus belles pièces des enchères d’automne qui se tiennent traditionnellement à cette période à New York restent encore à venir à la vente. Il s’agit d’un nu somptueux de Modigliani dont les spécialistes de la maison Christie’s espèrent au moins 100 millions de dollars et aussi de « Nurse », un Roy Lichtenstein tout à fait exceptionnel qui est estimé à 80 millions de dollars et qui sera également vendu par Christie’s.

Romandie.com

« La Coiffeuse » de Picasso rendue à la France 17 ans après son vol

août 13, 2015

« La Coiffeuse », une toile cubiste peinte par Picasso en 1911 et estimée à 15 millions de dollars est remise ce jeudi aux autorités françaises, après avoir été volée il y a 17 ans. Elle a été retrouvée dans un anodin colis à destination des Etats-Unis.

Le tableau de 33 cm sur 46 cm a traversé l’Atlantique à la période des fêtes en 2014, savamment dissimulé dans un paquet portant l’inscription « Art Craft/30 E/Joyeux Noël ».

Mais le leurre, laissant penser qu’il s’agissait d’un cadeau de Noël sans grande valeur, n’a pas dupé les services américains des douanes et de l’immigration (ICE). Leur division d’enquête sur le trafic international d’œuvres d’art a identifié la toile volée en 1998 et dont la disparition n’avait été découverte qu’en 2001.

Disparition inexpliquée
Le colis a été posté en Belgique le 17 décembre, mais sa disparition, constatée par le personnel du Centre Pompidou à Paris lors d’une demande de prêt, reste inexpliquée. Les péripéties de ses 17 années de « cavale » ne sont pas non plus connues.

« Détériorée par le vol, les mauvaises conditions de conservation qu’elle a ainsi subies et les aléas rocambolesques de son expédition outre-Atlantique », la toile « doit faire l’objet d’une soigneuse campagne de restauration, avant d’être présentée de nouveau au public », a prévenu Serge Lasvignes, président du musée d’art moderne parisien.

Il s’est dit « heureux que cette magnifique œuvre de Pablo Picasso retrouve prochainement le chemin » du Centre Pompidou qui rassemble quelque 115’000 pièces, la plus vaste collection européenne d’art moderne.

Exemple caractéristique du cubisme analytique
« La Coiffeuse » reconnaissable à ses teintes de gris et de beige a été vue publiquement pour la dernière fois à Munich, lorsqu’elle avait été exposée, dans le cadre d’un prêt, à la Kunsthalle der Hypo-Kulturstiftung.

Cette huile sur toile date de l’époque cubiste du peintre espagnol au tout début du XXe siècle, au cours de laquelle il a notamment réalisé les « Demoiselles d’Avignon », un large tableau fondateur de ce courant artistique.

« La Coiffeuse » est un exemple caractéristique du cubisme analytique mis en œuvre par Pablo Picasso et Georges Braque en 1910, selon le Centre Pompidou.

Cette phase du cubisme repose sur une décomposition des volumes en facettes et est centrée sur une analyse conceptuelle et géométrique de la forme. La couleur permet d’homogénéiser l’ensemble d’une composition.

Romandie.com

France: un Picasso d’une valeur d’au moins 25 millions d’euros saisi sur un bateau en Corse

août 4, 2015

Ajaccio – Un tableau de Pablo Picasso d’une valeur estimée à plus de 25 millions d’euros, considéré comme un bien culturel inexportable par les autorités espagnoles, a été saisi vendredi dernier sur un bateau en Corse, île française de la Méditerranée, a annoncé mardi à l’AFP la douane française.

Le propriétaire de l’œuvre, le banquier espagnol Jaime Botin, tentait en vain d’obtenir l’autorisation d’exporter ce tableau Head of a young woman (Tête de jeune fille) depuis 2012.

Une demande d’autorisation de sortie du tableau du peintre espagnol à destination de la Suisse a été déposée jeudi dernier au bureau des douanes de Bastia, ville de Corse à proximité de laquelle se trouvait le bateau, explique la douane dans un communiqué.

Les agents des douanes se sont rendus à bord du navire transportant l’œuvre, accosté au port de plaisance de Calvi et ont réclamé les documents relatifs à la situation du tableau, poursuit le texte.

Le capitaine du navire n’a pu présenter qu’un document d’évaluation de l’œuvre ainsi qu’un compte-rendu de jugement rédigé en langue espagnole de mai 2015 émanant de l’Audience nationale espagnole (une des plus hautes juridictions du pays), confirmant qu’il s’agissait d’un trésor national espagnol qui ne pouvait en aucun cas être sorti d’Espagne, selon le communiqué.

Ce tableau, d’une valeur estimée à plus de 25 millions d’euros selon la douane, est la propriété de Jaime Botin, dont la famille a participé à la fondation de la banque Santander en 1857, devenue le premier groupe bancaire d’Espagne.

Le banquier, âgé de 79 ans, qui fut vice-président de Santander entre 1999 et 2004, n’était pas présent à bord du bateau, propriété d’une société dont il est actionnaire et battant pavillon britannique, a précisé à l’AFP un porte-parole de la douane.

Une première demande avait été déposée en décembre 2012 en Espagne pour sortir définitivement le tableau du territoire espagnol, pour le mettre aux enchères chez Christie’s à Londres.

Le ministère de la Culture avait rejeté la demande, déclarant ce tableau bien culturel inexportable parce qu’il n’existe pas sur le territoire espagnol d’œuvre similaire de cette période de la vie du peintre, a expliqué un porte-parole du ministère.

En mai 2015, l’Audience nationale avait confirmé la décision du ministère. Elle avait rejeté les arguments de Jaime Botin qui plaidait que le tableau se trouvant à bord du yacht Alix, battant pavillon britannique, et amarré à Valence, il n’était pas sur le territoire espagnol.

Les autorités françaises attendent désormais d’éventuelles demandes de l’Espagne pour récupérer l’œuvre mais les autorités espagnoles n’ont pas voulu communiquer sur cette affaire.

La Guardia civil, dont une unité est chargée de protéger le patrimoine historique, a confirmé qu’une enquête était en cours depuis un certain temps mais qu’elle ne communiquerait pas sur ce sujet mardi.

Romandie.com avec(©AFP / 04 août 2015 12h54)