
Le pont de Kertch est le seul lien terrestre de la Russie avec la Crimée annexée. Photo: Getty Images/AFP
Au moins trois personnes ont été tuées dans l’explosion qui a endommagé le pont de Crimée reliant la Russie à cette péninsule ukrainienne annexée, ont annoncé les enquêteurs russes, qui affirment avoir identifié le propriétaire du camion piégé.
Selon les données préliminaires, trois personnes ont été tuées à la suite de l’accident. Il s’agit probablement des passagers d’une voiture qui se trouvait près du camion quand il a explosé
, a indiqué le Comité d’enquête russe dans un communiqué.
Selon cette source, les corps de deux victimes, un homme et une femme, ont déjà été sortis de l’eau
.
Le Comité d’enquête, organe responsable des principales investigations criminelles en Russie, a également affirmé avoir établi l’identité du camion et de son propriétaire
soupçonnés d’être à l’origine de l’explosion.
Il s’agirait d’un habitant de la région de Krasnodar, dans le sud de la Russie. Une enquête a été ouverte sur son lieu de résidence. L’itinéraire du camion et les documents pertinents sont en cours d’étude
, ont ajouté les enquêteurs.
L’explosion de ce camion a provoqué un vaste incendie et des dégâts samedi sur cette infrastructure routière et ferroviaire clé pour l’approvisionnement de la Crimée, péninsule annexée en 2014 par la Russie.
Il s’agit aussi d’un projet symboliquement fort reliant la Crimée à la Russie continentale, qui avait été construit à grands frais et inauguré en 2018 par Vladimir Poutine en personne.
Ce pont sert essentiellement au transport des personnes et des marchandises vers la péninsule, mais aussi aux troupes déployées en Ukraine.
L’Ukraine n’a pas officiellement revendiqué de responsabilité dans cette attaque.
Des images du pont, circulant en ligne, montrent la voie ferrée en flammes sur des dizaines de mètres et un tronçon routier effondré.
Si l’Ukraine était à l’origine de l’incendie et de l’explosion sur le pont de Crimée, le fait qu’une infrastructure aussi cruciale et aussi loin du front puisse être endommagée par les forces ukrainiennes serait un camouflet pour Moscou.
D’autant que la Russie enchaîne les revers militaires depuis le début du mois de septembre, ses troupes étant forcées de reculer aussi bien au nord-est que dans le sud du pays, notamment dans la région de Kherson, frontalière de la Crimée, dont M. Poutine revendique l’annexion.
Selon le Comité antiterroriste, deux voies routières sont endommagées, mais l’arche du pont n’est pas touchée.

Un hélicoptère déverse de l’eau sur les wagons pour tenter d’éteindre le feu. Photo : Getty Images/ AFP
Des vandales ukrainiens
Le chef de l’assemblée de Crimée, le Parlement régional installé par la Russie, Vladimir Konstantinov a dénoncé un coup des vandales ukrainiens
.
L’Ukraine n’a fait aucun commentaire, mais le chef du cabinet de la présidence ukrainienne Andriï Iermak a publié sur Twitter une binette montrant un pont dans des nuages de fumée.
Tout ce qui est illégal doit être détruit, tout ce qui a été volé doit être rendu à l’Ukraine
, a commenté sur Twitter Mikhaïlo Podoliak, un autre conseiller du président Volodymyr Zelensky.
Kirill Stremooussov, un responsable de l’occupation russe dans la région ukrainienne de Kherson, voisine de la Crimée, a publié sur son compte Telegram une vidéosurveillance du pont montrant une violente explosion. Selon lui, les réparations pourraient prendre deux mois
.
Le président de l’Ukraine, Volodymyr Zelensky Photo : Reuters
Un attentat terroriste
La Russie a toujours affirmé que le pont ne risquait rien en dépit des combats en Ukraine, mais elle a menacé par le passé Kiev de représailles si les forces ukrainiennes devaient attaquer cette infrastructure ou d’autres en Crimée.
Le député russe Oleg Morozov, cité par l’agence Ria Novosti, a réclamé samedi une réplique adéquate
. Sinon, ce type d’attentats terroristes va se multiplier
, a-t-il dit.
Plusieurs explosions ont eu lieu ces derniers mois sur des installations militaires russes dans la péninsule, résultat probable d’opérations ukrainiennes, comme lorsque la base militaire de Djankoï a été ravagée en août par la déflagration d’un dépôt de munitions, provoquant un exode de touristes de la région.
Les autorités russes ont été toujours avares d’explications concernant Djankoï et d’autres incidents similaires sur des dépôts d’armements ailleurs en Russie, mais proches de la frontière ukrainienne.
À Djankoï, Moscou avait admis finalement un « sabotage », et l’armée ukrainienne avait reconnu des semaines plus tard sa responsabilité.
Un revers de plus pour la Russie
Depuis début septembre, les forces russes ont été obligées de reculer sur de nombreux points du front. Elles ont notamment été forcées de fuir la région de Kharkiv (nord-est) et de reculer dans celle de Kherson (sud).

Le président russe Vladimir Poutine Photo : Getty Images/Gavriil Grigorov
Devant ces revers face à une armée ukrainienne galvanisée et forte des approvisionnements en armes occidentales, le président Poutine a décrété fin septembre la mobilisation de centaines de milliers de réservistes, des civils donc, pour inverser la tendance.
Il a aussi décrété l’annexion de quatre régions ukrainiennes, bien que Moscou ne les contrôle que partiellement.
L’Ukraine a quant à elle revendiqué la reprise de milliers de kilomètres carrés depuis début septembre et le lancement de sa contre-offensive en plusieurs points du front.
Le seul champ de bataille où Moscou a actuellement l’avantage se trouve aux abords de la ville de Bakhmout, dans la région de Donetsk (est), que les forces russes essaient de prendre depuis le mois d’août.
Les échecs des dernières semaines sont tels que, même dans les médias d’État, l’armée et son commandement sont la cible de critiques de personnalités en vue.
Par Radio-Canada avec Agence France-Presse