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Amélie Nothomb reçoit le prix Renaudot pour son roman « Premier sang »

novembre 3, 2021

La récompense a été décernée, mercredi, à l’écrivaine belge pour « Premier sang » (Albin Michel), autobiographie fictive de son père, mort en 2020. Un récit sensible, à la première personne.

Amélie Nothomb, le 20 janvier 2019.
Amélie Nothomb, le 20 janvier 2019. JOEL SAGET / AFP

Le prix Renaudot a été attribué à Amélie Nothomb pour Premier sang (Albin Michel), mercredi 3 novembre. Après une remise des prix par visioconférence en 2020 (Marie-Hélène Lafon pour Histoire du fils, paru chez Buchet-Chastel), c’est à nouveau depuis le restaurant Drouant, dans le 2e arrondissement de Paris, que le jury a annoncé la nouvelle.

C’était donc au tour d’Amélie Nothomb d’être célébrée, elle qui a fait de la littérature un désir de joie partagée, un art de l’hospitalité. Non seulement parce qu’elle entretient avec ses lecteurs un lien solide, nourri par des rencontres ferventes et une correspondance quotidienne. Mais aussi parce qu’on entre dans ses livres comme les hôtes sont accueillis à l’une de ces réceptions et autres garden-parties qui peuplent son œuvre. Du reste, Premier sang s’inscrit dans cette gaie continuité. « Ma mère s’était lancée dans les mondanités. (…) Le matin, elle se réveillait en pensant : “Que vais-je porter ce soir ?” », peut-on lire dès les premières pages de ce texte qui aurait pu s’intituler Autobiographie de mon père, si le titre n’avait pas déjà été pris par le regretté Pierre Pachet (Belin, 1987).

Sensibilité magique

Dans ce roman en forme de conte, en effet, l’écrivaine fait parler son père, Patrick Nothomb, à la première personne : « le présent a commencé il y a vingt-huit ans. Aux balbultiements de ma conscience, je vois ma joie insolite d’exister. Insolite parce qu’insolente : autour de moi régnait le chagrin ». Page après page, elle redonne voix à ce diplomate, mort en mars 2020, afin qu’il retrace son propre destin, depuis sa naissance dans un milieu d’aristocrates déclassés jusqu’à la naissance de sa fille, et des rudes journées qu’il passa, enfant, auprès d’un grand-père à la fois poète et tyran, jusqu’à la terrible prise d’otages où il a failli mourir, au Congo, en 1964. Avec la sensibilité magique et l’humour plein de tact qui la distinguent, Amélie Nothomb est ici fidèle à son style, cette quête de simplicité et surtout de clarté qui est tout sauf une facilité, puisqu’elle est indissociable d’une certaine éthique de l’écriture, comme elle l’affirmait à propos du sinologue Simon Leys lors de son discours de réception à l’Académie royale de Belgique, en 2015 : « Chez Leys, notait-elle, cette clarté relevait d’une très haute exigence morale : à ses yeux, un écrivain pas clair n’était pas seulement un mauvais écrivain, mais une mauvaise personne. »

Sous la plume de Nothomb, comme le prouve une fois de plus Premier sang, cette morale de la clarté ne fait qu’un avec le plaisir du texte, l’ardent désir de le partager : « Mon travail à moi est une défense et une illustration de la beauté. Je dois sans cesse convaincre mes lecteurs qu’elle n’est pas synonyme de superficialité… », résumait-elle dans les colonnes du « Monde des livres » en 2016. Cela passe par une fidélité au langage de l’enfance, à sa lucidité enjouée, et aussi par une mystique de la littérature qui se confond, chez Amélie Nothomb aujourd’hui comme hier chez son père, avec un amour de la fête : « Toi, tu n’aurais pas supporté. Tu as toujours aimé l’extérieur, les fêtes, les rencontres. Tu as toujours aimé les autres. Ils te le rendent bien », écrivait-elle dans une lettre adressée à Patrick Nothomb, quelques jours après sa mort en Belgique, au premier jour du premier confinement.

Avec Le Monde par Jean Birnbaum

Le prix Renaudot du roman remis à Yasmina Reza

novembre 3, 2016

 

Yasmina Reza, déesse du carnage, et prix Renaudot 2016

La romancière est récompensée pour « Babylone », livre lumineux et cocasse, paru chez Flammarion. Aude Lancelin reçoit le prix essai pour « Le monde libre ».

Le prix Renaudot du roman revient à Yasmina Reza pour Babylone (Flammarion). Autant le monde du Goncourt Chanson Douce, de Leïla Slimani (Gallimard), peut paraître sombre – mais délicieusement –, autant celui de Babylone, malgré la noirceur des événements qui s’y produisent, est lumineux et cocasse. Non pas moins profond, au contraire, mais existentiellement drôle, comme le reste de son œuvre : le Renaudot du roman récompense en elle une auteure confirmée, dont le théâtre en particulier représente régulièrement la France à l’étranger.

Placé sous le signe des documentaires photographiques de Robert Frank et Garry Winogrand dans lesquels Reza voit « l’immense hier de nos vies », Babylone, son troisième roman, a pour héroïne une dame un peu déprimée et son voisinage. C’est Elisabeth Jauze, 62 ans, « ingénieur Brevets » à l’Institut Pasteur. Ce genre de détail « médiocre » ponctue ironiquement tout le texte, voué qu’il est à défendre l’existence humaine contre les attaques de l’insignifiance, les blessures de la solitude, l’usure du temps. A cette dame revient l’initiative et, d’abord, l’idée de cette « sauterie organisée dans un moment d’optimisme », une fête d’anniversaire, qui débouchera sur un drame, qui se transforme en enquête policière satirique. C’est à travers sa voix que Reza déploie son regard si sensible sur les gestes infimes, les objets banals, les sentiments ordinaires où se ramasse « toute la force d’une vie minuscule » : les efforts d’une dame pour rester jusqu’au bout présentable, le « pressentiment accablant des dimanches », le déferlement des images oubliées…

Une gravité narquoise

Au moment du drame, c’est donc Elisabeth qui prend les choses en main (« Aucune panique. Je me suis trouvée ultragonflée »), elle aussi qui les stabilise par son rire profond, sa gravité narquoise, elle donc qui confère au monde une forme de permanence. Au début du roman, alors que la petite fête peine à prendre, les convives s’agglutinent devant la fenêtre pour contempler les flocons de neige. « Les hommes ont dit, ça ne va pas tenir, les femmes ont dit, ça va tenir », raconte Elisabeth. Cent pages plus loin, un avocat s’adresse à elle au poste de police : « Tout repose sur votre bonne foi et sur votre capacité à convaincre. Votre histoire tient. »

Voilà une assez bonne définition de l’art de Reza, qui déclarait au « Monde des Livres », lors de la sortie de Babylone : « J’aime bien ce mot, tenir. Il a plusieurs sens en français. La solidité, la cohérence, mais aussi l’endurance, le courage. Comme on n’a aucune certitude de sens, on n’est pas mécontent de faire tenir quelque chose. Au fond, la plupart de nos actes consistent à rétablir un peu d’équilibre. »

Aude Lancelin, quant à elle, ex-directrice adjointe de L’Obs, dont elle fut licenciée en mai, reçoit le Renaudot essai pour Le monde libre (Les liens qui libèrent, 240 p., 19 euros), dans lequel elle règle ses comptes avec le magazine. L’ouvrage avait été introduit par les jurés dans la liste des essais entre leurs deuxième et troisième sélections.

Lemonde.fr

Le Goncourt récompense « Pas pleurer » de Lydie Salvayre

novembre 5, 2014

La Française Lydie Salvayre a reçu mercredi le Goncourt, le plus prestigieux des prix littéraires français, pour « Pas pleurer », un roman sur la guerre d’Espagne. Le Renaudot salue David Foenkinos pour « Charlotte », un cri d’amour pour une jartiste juive allemande assassinée à Auschwitz à 26 ans.

« Je suis très heureuse, je suis très émue », a déclaré Lydie Salvayre, en se faufilant dans la cohue des journalistes rassemblés dans un restaurant de Paris. Le roman récompensé est hanté par la figure de Georges Bernanos et la voix de sa propre mère qui lui raconte l’insurrection libertaire de 1936 en Espagne.

David Foenkinos, qui était l’autre grand favori du Goncourt, a obtenu le prix Renaudot, décerné dans la foulée, pour son roman « Charlotte ».

Romandie.com

Le prix Goncourt à Pierre Lemaitre pour « Au revoir là-haut »

novembre 4, 2013

Le prix littéraire Goncourt a été attribué lundi à Paris à Pierre Lemaitre pour « Au revoir là-haut », roman sur les démobilisés de la Première Guerre mondiale. Le Renaudot est allé à Yann Moix pour « Naissance », épais roman centré sur l’enfer des relations parents-enfant.

L’attribution des deux prix a été annoncée, comme le veut la tradition, au restaurant parisien Drouant. Les jurés du Goncourt ne se sont mis d’accord qu’au douzième tour sur « Au revoir là-haut », édité chez Albin Michel, époustouflant roman sur une génération perdue, les démobilisés de la Première Guerre mondiale, sacrifiés par une France exsangue après quatre ans d’horreur dans les tranchées.

L’auteur, qui était l’un des favoris, a été choisi par le jury par six voix contre quatre à Frédéric Verger pour son premier roman, « Arden » (Gallimard).

« La Barbe » manifeste

En revanche, les jurés du prix Renaudot se sont mis d’accord dès le premier tour sur « Naissance » de Yann Moix, aux éditions Grasset, un ouvrage dense de près de 1200 pages qui débute par la venue au monde de l’auteur sous les insultes de ses parents.

Avant l’annonce des prix, alors que journalistes et photographes se bousculaient, une petite dizaine de militantes du mouvement féministe La Barbe ont brièvement pénétré dans le restaurant Drouant pour lire un manifeste de protestation contre le manque de femmes dans les jurys et la liste des candidats.

« Messieurs de l’Académie Goncourt, La Barbe est à vos côtés pour célébrer la gloire du verbe masculin », a lancé une militante. « Chers jurys du Goncourt, en 110 ans, et 109 prix remis, vous avez honoré 99 fois de mâles et talentueux écrivains », ironisait le mouvement sur son compte Twitter.

Romandie.com