La nomination d’Amira Elghawaby à titre de représentante spéciale de la lutte contre l’islamophobie du gouvernement fédéral alimente la controverse depuis plusieurs jours. Photo : La Presse Canadienne/Sean Kilpatrick
Dans la foulée de la levée de boucliers qu’a suscitée sa nomination, la représentante spéciale de la lutte contre l’islamophobie, Amira Elghawaby, s’est dite mercredi « désolée » de la façon dont ses propos ont blessé le peuple québécois. Elle s’en est excusée.
Elle s’exprimait en marge d’une rencontre avec le chef bloquiste, Yves-François Blanchet.
Je voudrais dire que je suis extrêmement désolée de la façon dont mes propos ont blessé le peuple québécois, et c’est ce que je vais exprimer à M. Blanchet
, a-t-elle affirmé aux médias, en anglais.
À la sortie de la rencontre, ses excuses, exprimées en français, étaient plus explicites : Je suis convaincue, je sais et je le dis que les gens québécois ne sont pas racistes. Ce n’était pas mon intention et, pour les blessures que j’ai faites avec mes mots, je m’excuse sincèrement.
L’ancienne chroniqueuse, nommée la semaine dernière représentante spéciale de la lutte contre l’islamophobie au gouvernement fédéral, a souligné qu’elle avait de l’empathie pour ce que peuvent vivre les Québécois.
« Vous savez, en tant que membre de la communauté musulmane du Canada, nous savons ce que c’est que d’être stéréotypé. Nous savons ce que c’est que les gens ont des préjugés. Et je comprends les mots que j’ai dits ont blessé des gens au Québec. J’ai écouté très attentivement. Je vous ai entendus. Et je sais ce que vous ressentez. Et je suis désolée. »— Une citation de Amira Elghawaby
Amira Elghawaby est sur la sellette depuis sa nomination par le gouvernement Trudeau en raison des opinions qu’elle a exprimées et défendues par le passé. En 2019, elle écrivait au sujet de la Loi sur la laïcité de l’État, la loi 21
, que la majorité des Québécois [semblaient] influencés […] par un sentiment antimusulman
.
Mme Elghawaby, qui a qualifié sa rencontre avec M. Blanchet de constructive
, a affirmé avoir discuté de la loi 21 avec le leader bloquiste : Nous avons échangé nos opinions et, bien sûr, nous avons été d’accord pour être en désaccord sur la loi 21. Mais c’est ça le dialogue, non?
« J’ai mon opinion sur la loi 21, je crois qu’elle est discriminatoire. […] Nous devons avancer dans ce dialogue difficile d’une manière qui ne soit pas blessante pour l’autre, loin de la confrontation. »— Une citation de Amira Elghawaby
Elle a enfin affirmé être la bonne personne
pour mener à bien cette mission : Mon intention est de faire avancer le vivre-ensemble que les Québécois veulent aussi.
Trudeau réaffirme sa confiance envers Amira Elghawaby
Le premier ministre Justin Trudeau, qui a plus tôt cette semaine défendu sa nomination, a tenté mercredi matin de calmer le jeu.
Les Québécois sont parmi les plus ardents défenseurs des droits et libertés individuelles, et ça vient d’une place dans l’histoire récente où, avant la Révolution tranquille, le Québec a été soumis à une religion qui ne respectait pas ces droits et libertés individuelles
, a-t-il dit.
Et donc, les Québécois, ça vient d’une bonne place de vouloir défendre l’égalité homme-femme, de défendre les droits des individus, de défendre la communauté LGBTQ
, a-t-il poursuivi.
Disant ne pas être d’accord avec certains des propos de Mme Elghawaby, il a affirmé avoir confiance que c’est la bonne personne pour pouvoir bâtir des ponts, pour écouter, pour apprendre, pour enseigner aussi et pour rassembler les gens
.
Pas assez, dit Jean-François Roberge
Tout en accueillant favorablement les excuses de Mme Elghawaby, le ministre québécois responsable de la Laïcité et des Relations canadiennes Jean-François Roberge l’a invitée à renoncer à son poste, réitérant ainsi sa demande formulée lundi.
Il a rappelé qu’elle a tenté de justifier ses propos en continuant de citer à tort un sondage, en interprétant de manière incorrecte les informations. Et c’est une erreur qui est trop grave. Donc, je pense que c’était une bonne chose qu’elle s’excuse
.
« J’apprécie ses excuses, mais je ne crois toujours pas qu’elle a la légitimité, la crédibilité pour occuper la fonction que le premier ministre lui a confiée. Donc, je pense que maintenant, la deuxième chose à faire, c’est de remettre sa démission. »— Une citation de Jean-François Roberge
Pour le ministre Roberge, Amira Elghawaby a fait des déclarations qui sont terribles, qui s’apparentent à du racisme. Elle a exprimé d’abord des préjugés qui sont très graves à l’égard des Québécois. Elle a pris beaucoup de temps avant de s’excuser
.
De son côté, le chef intérimaire du Parti libéral du Québec, Marc Tanguay, a lui aussi appelé au « remplacement » de Mme Elghawaby. Réagissant sur Twitter, il a qualifié ses excuses d’une « bonne chose », « nous estimons cependant que c’est trop peu, trop tard pour mériter notre confiance. »
Par Radio-Canada avec les informations de La Presse canadienne