Dans la perspective de la présidentielle, la parole d’Emmanuel Macron est décomptée sur les chaînes télé et les radios dès qu’il parle de sujets nationaux.

Le 1er janvier 2022, la France prendra la présidence de l’Union européenne pour six mois. Pour la première fois, cette présidence coïncide avec la campagne électorale présidentielle. Emmanuel Macron peut-il profiter de ses multiples prises de parole à venir pour marquer des points dans le cœur des Français ? Comment savoir lorsqu’il parle au nom de l’Europe ou en son nom ? D’autant qu’il peut attendre pour se déclarer jusqu’au 8 mars, date de la publication officielle par le Conseil constitutionnel des candidats à l’élection présidentielle. On sait déjà que le chef de l’État français doit prononcer le 19 janvier un discours devant le Parlement européen à Strasbourg.
« La règle qui s’applique est claire, précise Roch-Olivier Maistre. Pour la présidence française 2022, si le président rend compte d’un conseil de l’Union européenne, il sera pleinement dans l’exercice de ses fonctions. Si des microphones lui sont tendus à la fin de la conférence pour le faire réagir sur ce qu’a dit un candidat à la présidentielle ou une annonce qui concerne le débat national, le compteur de temps de parole se met en marche immédiatement. »
« L’arrêt Hollande »
Cette règle du décompte du temps de la parole présidentielle est méconnue. Elle est pourtant appliquée depuis un arrêt du Conseil d’État de 2009. À chaque fois que le président de la République s’exprime non dans l’exercice de ses fonctions mais sur des questions qui relèvent du débat politique national, il voit ainsi son temps de parole décompté sur les chaînes de télévision et les radios. « On distingue vraiment les interventions du chef de l’État dans la plénitude de ses fonctions et celles concernant le débat politique », insiste Roch-Olivier Maistre, président du CSA.
Pour l’anecdote, le Conseil d’État avait édicté ce principe dans une décision ordonnant au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) de prendre en compte le temps de parole présidentiel, à la suite d’une plainte contre Nicolas Sarkozy de deux députés socialistes : Didier Mathus et un certain… François Hollande. Ce dernier s’était plaint en 2007 de l’absence de décompte des prises de position du président Sarkozy. Ironiquement, la règle qu’il avait exigée s’est d’ailleurs retournée ensuite contre François Hollande lors de son mandat présidentiel, entre 2012 et 2017…
Éric Zemmour et les nocturnes de LCI
Depuis septembre, le polémiste Éric Zemmour, probable candidat à la présidentielle, est considéré comme « un acteur du débat politique national » et est donc soumis au décompte du temps de parole dans l’audiovisuel. Le CSA assume et ne regrette pas du tout sa décision. « Je crois que les dernières semaines ne nous ont pas démenties », indique Roch-Olivier Maistre, président de l’institution.
Par ailleurs, lors de la présentation des modalités de décompte du temps parole durant la campagne présidentielle, il a rappelé que le CSA serait « très vigilant » à ce que les chaînes, d’information en continu notamment, n’abusent pas de la nuit pour rééquilibrer les temps de parole. LCI s’est déjà fait rappeler à l’ordre à la suite de la multirediffusion en pleine nuit en novembre 2020 d’une interview de l’écologiste Yannick Jadot. CNews a par ailleurs récemment diffusé en pleine nuit le meeting de Jean-Luc Mélenchon à Reims.
Par Le Point avec Olivier Ubertalli