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Congo-Interview. Makoko Michel Ganari Nsalou 2 : « Notre mission est de rassembler »

décembre 3, 2021

Avant son intronisation dans les jours à venir, le Makoko Michel Ganari Nsalou 2, désigné dix-huitième roi le 20 novembre dernier, a accordé une interview aux Dépêches de Brazzaville dans laquelle il invite au rassemblement de tout le peuple Téké, appelle certains vassaux dissidents à l’unité du royaume et encourage les Congolais à la consolidation de la paix.

Les Dépêches de Brazzaville (L.D.B.) : Qui est le Makoko Michel Ganari Nsalou 2 ?

Makoko Michel Ganari Nsalou 2 (M.M.G.S.) : Je suis Michel Ganari Nsalou 2, né le 24 juin 1948 à Ngabé, marié et père de sept enfants. Je suis le fils aîné de Alphonse Nsalou (roi de 1948 à 1964) et de Thérèse Ngaliké. J’ai fréquenté à Mbé (l’école primaire) de 1954 à 1960, puis le lycée Savorgnan-de-Brazza de 1960 à 1965. Admis à l’école paramédicale Jean-Joseph-Loukabou de Pointe-Noire de 1967 à 1969, de 1972 à 1974, j’ai obtenu le diplôme d’infirmier d’État. J’ai débuté mon cursus professionnel au centre médical d’Impfondo puis de Dongou et de Bétou dans la Likouala entre 1970 et 1972.

Ensuite, je suis affecté à l’hôpital général de Brazzaville de 1974 à 1978. Après un stage à l’Ecole nationale de santé publique de Rennes, en France (1978-1979), je suis promu directeur régional du secteur opérationnel n°7 des grandes endémies des Plateaux, à Djambala (1980-1981). De 1982 à 2012, j’ai exercé les fonctions de délégué médical.

Par la suite, j’ai été nommé responsable des ventes de la société IMEX Pharma pour la République du Congo, la République démocratique du Congo, le Cameroun, le Tchad, la République centrafricaine et le Burkina Faso, de 2012 à 2014. En janvier 2015, j’ai fait valoir mes droits à la retraite. Avant d’être désigné roi le 20 novembre dernier, je résidais au quartier Ngoyo, à Pointe-Noire.

L.D.B. : Vous êtes le 18e roi de la lignée d’Ilôh 1er qui a signé le traité avec l’explorateur franco-italien, Pierre Savorgnan de Brazza. Etait-il le premier Makoko ?

M.M.G.S. : Ilôh 1er n’est pas le premier roi Téké, avant l’arrivée du Blanc, le royaume Téké qui existait déjà avait dans son palmarès des anciens rois, mais les limites des recherches de l’histoire ont fait qu’on n’arrive pas à décrire la liste exhaustive de tous les anciens rois, mais ce qui est sûr, Ilôh 1er n’est pas le premier roi Téké. Il est devenu célèbre à cause de sa rencontre avec Pierre Savorgnan de Brazza. Aussi, s’il est appelé Ilôh 1er c’est parce qu’il y avait deux autres rois qu’on appelait Ilôh, notamment Ilôh Patrice qui a succédé à mon père Alphonse Nsalou. Puis Ilôh Bayidienlé. D’où, pour les différencier, on l’appelle Ilôh 1er.

L.D.B. : Depuis le 20 novembre 2021 vous êtes officiellement le 18e Makoko. Attendiez-vous à être désigné roi ? Etiez-vous prédisposé à l’être ou ça été une surprise pour vous ?

M.M.G.S. : Je suis né ici, j’ai grandi ici au palais royal avec mon père Alphonse Nsalou. Comme tout bon prince, l’ambition ne manque pas d’occuper le trône royal laissé par les ancêtres. Durant ma retraite à Pointe-Noire, je revenais régulièrement à Mbé et Ngabé. Mon cousin Auguste Nguempio, pendant son règne, me recevait souvent et me disait qu’il fallait que je sois régulièrement au village.

Parce qu’il avait le souci de laisser Mbé dans des bonnes mains. J’ai donc continué à fréquenter les miens. Je faisais des voyages entre Pointe-Noire, Mbé, Ngabé. Lorsque mon cousin le roi Auguste Nguempio nous a quittés et comme le trône royal devait avoir un occupant, cela était du ressort de la Cour royale (la reine Ngalifourou et des autres dignitaires). Comme le roi Auguste Nguempio avait déjà dans ses ambitions émis ses intentions, certainement que les dignitaires aussi en était au courant.

Oui, en tant que prince, j’avais exprimé ma volonté d’occuper le trône royal. Pendant la période des vacances de pouvoir, les dignitaires se sont retrouvés sûrement, puisque le 18 novembre on m’a fait venir de Pointe-Noire pour Ngabé. Et lorsque je suis venu ici à Ngabé, j’ai vu venir le 20 novembre un véhicule avec  à bord le vassal « Ngandzion » là où je réside. C’est par surprise que j’ai rencontré les dignitaires là où il m’avait amené. Ces derniers, avec la reine Ngalifourou, m’ont saisi et imbibé de poudre blanche (la poudre sacrée de Nkwembali) et on fait de moi roi. Ce qui a couronné mes ambitions.

L.D.B. : Est-ce légitime de partir de la vie professionnelle étatique pour devenir roi de tout un peuple ?

M.M.G.S. : Dans les années passées, nos grands parents ne partaient pas à l’école, voilà pourquoi il n’y avait pas de rois qui ont travaillé à la Fonction publique. Souvenez-vous que le roi Gaston Ngouayoulou fut un travailleur à la mairie de Brazzaville. Le roi Auguste Nguempio aussi était travailleur à la mairie de Brazzaville.

C’est également mon cas, j’ai travaillé à la Fonction publique avant de démissionner pour le secteur privé. A leurs retraites, Gaston Ngouayoulou et Auguste Nguempio ont regagné le village de Mbé. Moi également, après avoir pris ma retraite, je suis revenu au village.

C’est donc légitime. Parce que dans le règlement loyal de “Nkwembali” , le fait d’avoir été fonctionnaire à l’État n’est pas incompatible avec la qualité de devenir Makoko. Et surtout que le choix du roi est opéré par la Cour royale en fonction de l’appartenance à l’une des six branches, dont la branche “Inkui” pour laquelle je fais partie.

L.D.B. : Le royaume Téké a combien des vassaux ? Quelles sont les limitations de ces vassaux et leurs rôles ?

M.M.G.S. : Le royaume comprend en son sein douze vassaux. Il y a parmi eux les grands électeurs qui mettent en place les rois. Il s’agit du 1er vassal, Ngaïlino, des vassaux Ngandzion, Moutiri, Ngambion, Ngampo, Mouanga. Ils constituent l’ossature des grands électeurs. Mais il y a d’autres qui s’ajoutent et qui jouent un rôle important dans le royaume. Les vassaux ne vivent pas tous à Mbé ou à Ngabé, il y en a dans les localités comme Léfinin Imbima, Mbon, Abili, Ntsah (dans le département des Plateaux). Chaque vassal à son rôle.

Photos 1&2 : Le roi Michel Ganari Nsalou 2 / Adiac

L.D.B. : Il y a des rumeurs faisant état de quelques vassaux dissidents. Confirmez-vous cela et pourquoi se sont-ils comportés ainsi ?

M.M.G.S. : Oui, la dissidence existe dans mon royaume depuis belle lurette. Souvenez-vous, à l’époque du roi Auguste Nguempio, il y avait une tendance à deux rois. L’un s’appelait Auguste Nguempio et l’autre Instilambia. Ce sont des choses que nous gérons toujours dans notre royaume. On ne peut pas contrôler le cœur de chaque homme.

Chacun a son comportement. Actuellement, il y a des dignitaires qui croient qu’ils peuvent tout faire selon leur volonté qui n’est pas la volonté de “Nkwembali”. Malheureusement pour nous, c’est toujours dans les deux localités de la Léfini et d’Imbama que se situe la dissidence. Nous déplorons ce fait. C’est gênant ce qui se passe. Ce n’est pas bien que les gens se mettent à écrire et parler partout du royaume en mal.

Il y a certes dissidence mais ce sont mes frères, mes fils, je ne les refuse pas. Qu’ils reviennent pour qu’on construise le royaume ensemble. Je suis le roi des Tékés et je vous assure que je suis pour le rassemblement tout comme était mon prédécesseur et cousin Auguste Nguempio. Je les appelle à l’unité. Le “Nkwembali” n’aime pas la division. Que ceux qui se sont trompés se ressaisissent pour revenir, pour qu’on construise le royaume ensemble.

Nous devons revenir vers les règlements ancestraux, vers l’installation du pouvoir véritable royal. Nous devons faire revivre notre royaume dans le bon sens. Notre mission est de rassembler.  

L.D.B. : Après votre désignation le 20 novembre 2021, êtes-vous investi de tous les pouvoirs et de tous les apparats royaux tel qu’il se doit, puisque certains des vassaux dissidents n’ont pas encore fait volte-face ?

M.M.G.S. : Depuis que je suis désigné au trône royal, j’ai déjà observé deux cultes de “Nkwembali”. Notre culte c’est comme le dimanche religieux, il survient tous les quatre jours. C’est déjà un bon départ pour mon règne, parce que le jour du “Nkwembali” je ne sors pas. Depuis que je suis désigné roi, j’ai déjà mes attributs, notamment le “collier de six dents” rangées par paire, porté sur moi par le vassal Moutiri. Le premier jour, la Ngantsibi reine Ngalifourou qui m’a investi m’avait imbibé de la poudre blanche (la poudre sacrée qui sort du Nkwembali pour m’investir). Les jours qui viennent, je porterai ma longue plume, attribut du premier vassal Ngaïlino. Disant qu’à 80%, je suis déjà dans mes attributs. C’est pour vous dire que j’ai déjà commencé à siéger.

L.D.B. : Le siège du roi est à Mbé et celui de la reine Ngalifourou à Ngabé. Pourquoi aviez-vous élu domicile à Ngabé ?  Est-ce pour former un duo solide avec la reine ou pour bien d’autres raisons ?

M.M.G.S. : C’est vrai, vous m’avez vu à Ngabé, mais je vous rappelle également qu’il y a des rois qui ont régné à Ngabé, à savoir Ondzibi, Pierre Mielami Wawa, Moundzouani. Mon père, quand il était désigné roi, a régné quelques semaines ici à Ngabé aux côtés de la première reine Ngalifourou. Ce n’est qu’après qu’elle avait pris des dispositions pour l’installer à Mbé. C’est pour dire qu’il y a toujours une période d’initiation, de retraite auprès de la reine. Pour le moment, j’observe cette période et c’est de connivence avec la reine que je vais m’installer à Mbé. Ce n’est donc pas un problème, je finirai toujours par trouver une solution avec la reine. Mais entre-temps, le palais royal de Mbé mérite d’être aménagé. L’État pourra nous aider à le réhabiliter. La reine et d’autres dignitaires verront la possibilité de m’installer là-bas.

L.D.B. : De plus en plus, on parle des rois politiques ou politisés. Ne tomberez-vous pas dans ce piège ?

M.M.G.S. : Ni le roi ni les dignitaires, encore moins les vassaux, personne ne doit faire la promotion des partis politiques. C’est ainsi que le roi et sa cour ne font pas la politique politicienne. C’est vrai, le roi est un partenaire de l’État, est-ce que le fait de collaborer avec le président de la République pour des questions d’intérêt national, c’est faire de la politique comme l’insinuent certaines langues qui disent que le roi est politique, les dignitaires sont politiques ? Non, nous sommes leurs papas et sommes au-dessus de la mêlée, mais nous donnons nos points de vue lorsqu’il s’agit d’une question nationale.

Nous sommes souvent reçus par le président de la République qui est lui-même aussi « Mwene d’origine », a une attention particulière à notre pouvoir. Nous ne pouvons pas lui tourner le dos pour fuir une prétendue appartenance politicienne. C’est notre chef. Vous savez, le Congo n’est plus un royaume mais une République organisée ; est-ce que nous allons nous cramponner dans notre enveloppe souterraine en tant que sauvages, en tant que primitifs ou bien nous allons nous ouvrir au monde, à la République, aux institutions de l’État ?

Parce que très souvent, lorsque le roi est reçu par le président de la République ou par un ministre, ou bien lorsqu’un ministre va visiter le roi, les gens ont tendance à dire que le roi fait la politique. C’est faux et aberrant. Nous ne sommes pas partisans et ne faisons pas la promotion des partis politiques. Nous coopérons avec l’État, avec tout citoyen qu’il soit politique ou pas, mais qui vient pour des intérêts d’ordre national.

L.D.B. : Quel est votre apport en tant que roi dans la consolidation de la paix au Congo ?

M.M.G.S. : La paix c’est le crédo du Makoko, de ses dignitaires et de tout le royaume Téké. Parce que sans la paix, rien ne peut se faire. Il y a le mot “Ouliih” qui signifie paix, que nos ancêtres développent depuis longtemps. Parce que le “Nkwembali” ne peut être bien assis que de connivence avec “Ouliih”, la paix. A chaque dignitaire, nous recommandons toujours de faire les efforts là où il se trouve pour qu’il y ait la paix, pour qu’il n’y ait pas désordre, pour qu’il n’y ait pas trouble de l’ordre public, pour que chacun respecte l’autorité des règles de vie, la moralité. Personne ne doit enfreindre à ces lois. Donc mon rôle à moi, c’est d’appeler tout le peuple Téké et tous les Congolais à préserver la paix. Car sans la paix on ne peut rien faire. Il ne faudrait pas aussi qu’il y ait des dissidences, parce que les dissidences ne favorisent pas la paix.

Photo 3 : Le Makoko Alphonse Nsalou / DR

L.D.B. : Le roi Auguste Nguempio et le roi Moe Makosso IV (tous deux décédés récemment) avaient procédé à la signature d’un protocole d’accord. En quoi consistait-il et continuerez-vous dans cette lancée ?

M.M.G.S. : Le Makoko et le Ma Loango se sont considérés toujours comme des parents. Le 28 novembre 1958, lors de la proclamation de la République, les deux rois, Alphonse Nsalou et Ma Loango se sont retrouvés à Pointe-Noire. La cérémonie se déroulait sous leurs yeux. Dernièrement aussi, le rois Auguste Nguempio et Moe Makosso IV ont consolidé cette amitié. Si vous arrivez à la concession où habitait le roi Auguste Nguempio, vous verrez un cocotier planté en guise de paix, en guise de fraternité par le roi MaLoango. Et ce n’est pas le seul exemple à citer… Donc, ce n’est plus une amitié à démonter, et ce n’est pas moi Michel Ganari Nsalou 2 qui remettra cette amitié en cause, je continue sur la même lancée. 

L.D.B. : Quel est votre dernier mot ?

R.M.M.G.S. : Je remercie le président de la République, chef de l’État, Denis Sassou N’Guesso, pour l’appui précieux à la Cour royale de Mbé dans le cadre de ma désignation. Je le rassure que je gère une institution traditionnelle (apolitique) à caractère culturel et spirituel qui interdit aux membres de la Cour royale et moi-même de nous interférer dans le fonctionnement de l’État.

Les messages qui sortiront d’ici sont ceux sur la paix, en parfaite symbiose avec le président et les institutions de la République. Comme il l’avait dit le 16 mai 2016, la Cour royale et moi-même ferons don de nos énergies et de nos intelligences à la nation éternelle afin de porter haut le flambeau de l’unité dans le travail et pour le progrès dans la paix. Je remercie aussi le Premier ministre, chef du gouvernement, Anatole Collinet Makosso, pour son apport à la réussite des séquences qui ont conduit à ma désignation.

Je n’oublie pas de remercier la reine Ngalifourou et tous les membres de la Cour royale de Mbé pour ma désignation. Quant à nos parents du royaume Loango qui m’ont adressé un message de solidarité avec promesse de venir nous rendre une visite fraternelle, je leur dis merci. Vandu, Vandu, Vandu. Je vais œuvrer à la cohésion au niveau de tous les dépositaires de Nkwembali et suis humblement à la disposition de tous à qui je sollicite une fraternelle compréhension.  

Avec Adiac-Congo propos recueillis par Bruno Okokana

Cameroun : décès d’Ibrahim Mbombo Njoya, roi des Bamouns

septembre 27, 2021
Ibrahim Mbombo Njoya

Le sultan s’est éteint ce lundi 27 septembre. Il avait contracté le Covid-19 et avait dû être évacué vers la France, où il avait été hospitalisé. À 83 ans, il demeurait l’une des personnalités les plus influentes du pays.

C’est la fin d’une ère pour les Bamouns, ce peuple installé depuis sept siècles dans les montagnes de l’ouest du Cameroun. Le sultan Ibrahim Mbombo Njoya, 83 ans, est décédé ce lundi, au petit matin, à l’Hôpital américain de Paris. Dix-neuvième sultan des Bamouns, il y avait été admis à la mi-septembre, après avoir contracté le Covid-19.

Né le 27 octobre 1937 à Foumban, Ibrahim Mbombo Njoya en était devenu le sultan le 10 aout 1992, remplaçant à ce poste son père, Seidou Njimouluh Njoya. Diplômé de l’Institut d’études administratives de Dakar, il avait intégré l’administration camerounaise en 1958, soit deux ans avant l’indépendance, en tant que secrétaire du haut-commissaire de la République française au Cameroun. Le début d’une longue carrière publique, au cours de laquelle il aura occupé à sept reprises des fonctions ministérielles et à deux reprises celles d’ambassadeur.

D’Ahmadou Ahidjo à Paul Biya

En 1992, Ibrahim Mbombo Njoya avait mis un terme à sa carrière administrative à la faveur de son intronisation, mais il n’avait pas renoncé à la politique. D’abord membre haut placé de l’Union nationale du Cameroun (UNC) d’Ahmadou Ahidjo, il avait ensuite rejoint, dès sa création en 1985, le comité central et le bureau politique du Rassemblement démocratique du peuple du Cameroun (RDPC, au pouvoir).

Les 29 années de son règne auront été relativement calmes, mais son parcours politique aura été émaillé de rudes batailles, et ce dès l’avènement du multipartisme. La plus féroce d’entre elles l’a opposé à son cousin, Adamou Ndam Njoya, fondateur de l’Union démocratique du Cameroun (UDC, opposition) : tous deux se battront pour Foumban lors des élections municipales de 1996 et le sultan sera sèchement battu dans son propre royaume. L’opposition entre les deux hommes demeurera vive jusqu’au décès d’Adamou Ndam Njoya, en mars 2020. 

Ce revers n’a pas empêché Ibrahim Mbombo Njoya et le président Paul Biya d’être proches, le sultan des Bamouns étant considéré comme l’un des hommes les plus influents de la République. En 2013, il fut même pressenti pour occuper la présidence du Sénat, ce qui aurait fait de lui la deuxième personnalité du pays. Mais Paul Biya en décida finalement autrement, lui préférant Marcel Niat Njifenji, originaire de l’Ouest bamileke.

Une bataille pour la succession de Mbombo Njoya devrait maintenant s’ouvrir. Monogame pendant la trentaine d’années qui a précédé son accession au trône, le sultan des Bamoun laisse neuf veuves ainsi qu’une trentaine d’enfants. Or selon la tradition bamoun, ne peuvent prétendre au trône que ceux qui sont nés durant son règne. Dans la querelle qui se profile, nul doute que sa dernière épouse, l’influente africaine-américaine Kadidj Jennifer James Mbombo Njoya, devrait jouer les arbitres.

Avec Jeune Afrique par Franck Foute

Maroc: un youtubeur condamné à de la prison pour «offense au roi»

décembre 26, 2019

 

Un youtubeur marocain connu dans le royaume a été condamné ce jeudi à quatre de prison pour «offense au roi» dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, a indiqué son avocat.

Mohamed Sekkaki, connu sous le surnom de «Moul Kaskita», a été condamné par le tribunal de première instance de Settat (ouest) à quatre ans de prison en vertu de l’article 179 du Code pénal marocain, a déclaré son avocat Mohamed Ziane. Cet article prévoit une peine allant jusqu’à quatre ans de prison pour «quiconque commet une diffamation, injure ou offense envers la personne du roi ou la personne de l’héritier du trône ou une violation du respect dû au roi».

Le youtubeur avait été arrêté début décembre après la diffusion d’une vidéo sur sa chaîne YouTube dans laquelle il insulte les Marocains et critique le roi Mohammed VI, dont la personne est «inviolable» selon la Constitution. Dans cette séquence d’une douzaine de minutes, il s’en prend au monarque dont les discours ne sont «suivis d’aucun résultat», pendant que les Marocains «souffrent du clientélisme et du népotisme». Il traite par ailleurs ses compatriotes d’«ânes» et d’«ignorants», qui «voient leurs droits bafoués sans piper mot».

Le ministère public avait indiqué avoir reçu dans un premier temps plusieurs plaintes d’associations. Mohamed Sekkaki était ainsi initialement poursuivi pour «injures publiques à l’égard d’individus», avant qu’une nouvelle accusation pour «offense au roi» ne soit ajoutée au dossier. «Les ONG plaignantes ont retiré leur plainte et il n’a été condamné que pour l’accusation d’offense au roi», a précisé Maître Ziani, ajoutant que son client allait faire appel. La condamnation du youtubeur, dont les vidéos dépassent généralement les 100.000 vues, intervient moins d’un mois après celle d’un rappeur marocain, Gnawi, à un an de prison pour «outrage à fonctionnaire public» dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux. L’Association marocaine des droits humains (AMDH) avait déploré en juillet une «escalade des violations des droits humains et des libertés publiques et individuelles» au Maroc.

Par Le Figaro.fr avec AFP

Le beau-frère du roi d’Espagne, Iñaki Urdangarin, incarcéré

juin 18, 2018

Photo d’archives du 23 février 2017 du beau-frère du roi d’Espagne, Inaki Urdangarin, à sa sortie du tribunal de Palma de Majorque / © AFP/Archives / JAIME REINA

Le beau-frère du roi d’Espagne, Iñaki Urdangarin, a été incarcéré lundi après sa condamnation pour détournement de fonds à cinq ans et 10 mois de prison, épilogue d’une affaire qui a terni l’image de la monarchie espagnole.

Ce dénouement apporte « la certitude que la justice est la même pour tous et que personne n’est au-dessus de la loi », a commenté lundi soir le Premier ministre Pedro Sanchez lors d’une interview télévisée.

Ex-handballeur deux fois médaillé de bronze aux Jeux olympiques avec l’Espagne, le mari de l’infante Cristina s’est présenté vers 08H00 (06H00 GMT) à la prison de Brieva, une localité située à une centaine de kilomètres au nord de Madrid, a indiqué à l’AFP un porte-parole de l’administration pénitentiaire.

Comme les autres condamnés en liberté, Urdangarin, 50 ans, a pu choisir lui-même l’établissement dans lequel effectuer sa peine, à condition de s’y rendre volontairement.

La prison choisie par le beau-frère de Felipe VI est un petit établissement d’une capacité d’accueil de 162 personnes, réservé principalement aux femmes mais disposant d’un pavillon pour les hommes, qui était jusqu’à son arrivée inoccupé.

Après sa condamnation en appel mardi, la justice lui avait donné jusqu’à lundi soir à minuit (22H00 GMT) pour se rendre en prison.

Le feuilleton judiciaire entamé au début des années 2010 et qui a terni l’image de la monarchie espagnole se finit donc derrière les barreaux pour l’ex-« gendre idéal » de l’ancien roi Juan Carlos.

Urdangarin avait été condamné en première instance en février 2017 par le tribunal de Palma de Majorque (archipel des Baléares) à six ans et trois mois de prison pour avoir détourné entre 2004 et 2006 avec un associé des subventions attribuées à la fondation à but non lucratif Noos qu’il présidait.

Une peine légèrement revue à la baisse à cinq ans et dix mois en appel par la Cour suprême de Madrid.

Urdangarin dispose toujours d’un recours possible devant le tribunal constitutionnel, qui n’est toutefois pas suspensif pour les peines supérieures à cinq ans, selon la jurisprudence observée jusqu’ici par cette instance.

– Image de la monarchie ternie –

L’incarcération d’Urdangarin intervient alors que Felipe VI est en visite officielle aux Etats-Unis où il doit rencontrer le président américain Donald Trump mardi. Interrogée la semaine dernière après la condamnation d’Urdagarin, la maison royale s’était contenté de faire part de son « respect absolu pour l’indépendance du pouvoir judiciaire ».

L’enquête impliquant Urdangarin avait démarré au début des années 2010, alors que l’Espagne s’enfonçait dans la crise économique.

Combinée à d’autres scandales concernant cette fois le roi Juan Carlos, comme un voyage au Botswana pour une partie de chasse à l’éléphant en 2012 ou ses relations avec une aristocrate allemande, cette affaire avait sérieusement terni l’image de la monarchie. Au point de précipiter l’abdication du roi en faveur de son fils Felipe en juin 2014.

Avant cette affaire, Urdangarin avait été durant 14 ans membre de plein droit de la famille royale. Du 4 octobre 1997, jour de ses noces somptueuses avec Cristina de Bourbon, jusqu’au 12 décembre 2011, date à laquelle il a été déclaré persona non grata au palais, écarté pour conduite « non exemplaire »…

Ecarté avec l’infante Cristina des cérémonies officielles, Urdangarin s’est vu retirer ensuite par le nouveau roi Felipe VI le titre de duc qui lui avait été concédé le jour de son mariage.

Le couple s’était installé en 2013 à Genève, loin des paparazzis, avec ses quatre enfants.

Romandie.com avec(©AFP / 18 juin 2018 23h46)

Le père d’un jeune Saoudien menacé d’exécution appelle le roi à la clémence

septembre 23, 2015

Ryad – Le père d’un jeune chiite saoudien condamné à mort et en attente d’être exécuté a appelé mercredi le roi Salmane à épargner la vie de son fils.

J’espère que le roi ne va pas signer l’ordre d’exécution, a déclaré à l’AFP Mohammed al-Nimr, le père d’Ali, arrêté à 17 ans en février 2012 pour avoir manifesté contre les autorités et dont le sort préoccupe des organisations des droits de l’Homme et des pays européens.

Le père a mis en garde contre une réaction violente des membres de la minorité chiite, qui se concentre dans l’est de l’Arabie saoudite, en cas d’exécution de son fils.

Nous ne voulons pas de ça, nous ne voulons pas d’une seule goutte de sang versé, a-t-il souligné.

Le jeune condamné est le neveu de cheikh Nimr al-Nimr, un religieux chiite qui est également dans les couloirs de la mort après avoir été condamné à la peine capitale.

Ce religieux avait été l’un des animateurs du mouvement de contestation qui avait agité la province orientale d’Arabie saoudite, un royaume à majorité sunnite, en 2011.

Le père d’Ali al-Nimr a admis que son fils avait participé il y a quatre ans, alors qu’il était étudiant, à des manifestations de chiites dans sa région. Mais il a affirmé qu’il était innocent de plusieurs autres charges pour lesquelles il a été condamné comme celles de cambriolage, d’attaque contre les forces de police et de jets de cocktails Molotov.

Romandie.com avec(©AFP / 23 septembre 2015 16h09)

Xénophobie en Afrique du Sud: le roi des Zoulous a joué avec le feu

avril 22, 2015

Xénophobie en Afrique du Sud: le roi des Zoulous a joué avec le feu
Xénophobie en Afrique du Sud: le roi des Zoulous a joué avec le feu © AFP

Lorsqu’il paraît drapé d’une peau de léopard, le roi des Zoulous renvoie à ses sujets l’image d’un puissant chef coutumier à l’incontestable autorité morale.

Et même si ses pouvoirs ne sont que symboliques, il a été accusé d’avoir déclenché la dernière chasse aux immigrés qui a fait au moins sept morts en Afrique du Sud.

Goodwill Zwelithini kaBhekuzulu, 66 ans, a, selon les médias locaux, appelé fin mars les étrangers à « faire leurs bagages et s’en aller ».

Devant l’ampleur des violences xénophobes qui ont éclaté d’abord à Durban – la métropole du pays zoulou – puis à Johannesburg, le souverain a dû prendre la parole en public cette semaine, et appeler au calme. Pour une fois vêtu d’un costume à l’occidentale.

Le roi n’a, assure-t-il, jamais ordonné à ses sujets d’attaquer des étrangers. « Si j’avais dit ça, il ne resterait plus rien! », a-t-il ajouté en toute modestie.

Si l’Afrique du Sud post-apartheid est une république, l’article 12 de sa Constitution reconnaît plusieurs milliers de chefs traditionnels, dont dix rois et une reine.

Nelson Mandela, fondateur de la « Nation Arc-en-ciel », était lui-même issu de la famille royale des abaThembu, qui règne sur un morceau du Transkei, au sud du pays.

Goodwill Zwelithini est le plus influent des monarques, sa juridiction s’étendant théoriquement sur près de 12 millions de personnes. Les Zoulous, principale ethnie du pays originaire de l’est, représentent plus du cinquième de la population sud-africaine.

Comme ses collègues couronnés, le roi zoulou reçoit du gouvernement sud-africain 1,3 million de rands (100. 000 euros) par an. Le gouvernement provincial du KwaZulu-Natal lui verse en outre plus de 50 millions de rands (4 millions d’euros) pour l’entretien de ses sept palais, ses six femmes et ses 28 enfants.

– Un facteur de stabilité –

Certains contribuables sud-africain s’en plaignent, mais Goodwill Zwelithini, un descendant du sanguinaire Chaka Zoulou – grand chef de guerre et fondateur de la nation zouloue au début du XIXe siècle -, jouit d’un grand prestige chez ses sujets, notamment dans les campagnes. Et il est paradoxalement considéré comme un facteur de stabilité.

La province du KwaZulu-Natal avait été ravagée par des affrontements entre le parti zoulou Inkatha et l’ANC de Nelson Mandela avant les premières élections démocratiques de 1994.

« Cela a poussé le nouveau gouvernement à ne pas contrarier le roi et ses partisans, de peur de déclencher davantage de violence », constate le politologue Steven Friedman. « Si le prix à payer pour sauver des vies est de laisser le roi dans un luxe relatif, cela vaut la peine », estime-t-il.

Goodwill Zwelithini est somme toute « un outil politique », renchérit l’analyste indépendant Protas Madlala, basé au KwaZulu-Natal.

Le roi s’insurge contre le braconnage des rhinocéros, mais il dérape parfois comme quand il traite les homosexuels de « pourritures » – avant d’assurer qu’on l’a mal compris, déjà.

« Rappelez-vous que lorsque certaines de ces contrées ont été conquises par les puissances coloniales, les gens n’ont jamais cessé de reconnaître leurs rois et leurs chefs comme autorité », ajoute l’analyste de l’Université d’Afrique du Sud (Unisa) Somadoda Fikeni.

Dans d’autres pays africains, comme au Mozambique, note-t-il, des gouvernements socialistes ont essayé de se débarrasser des chefs traditionnels avant d’être obligé de les réhabiliter.

Mais l’analyste Protas Madlala rejette cette aristocratie qui renforce des classifications tribales ayant selon lui été « politisées par le gouvernement de l’apartheid ».

« Les architectes de l’oppression nous ont savamment désintégrés, disant: +Vous êtes zoulou, vous êtes xhosa. + Certains d’entre nous tentent de résister et de dire: +Regardez, nous sommes une nation commune, nous sommes tous des Sud-Africains!+ »

Le président sud-africain Jacob Zuma, lui-même zoulou, et également polygame, s’affiche volontiers avec lui. Fils de vacher, il n’est ni roi ni même noble, mais participe volontiers à des cérémonies traditionnelles vêtu de léopard.

Jeuneafrique.com

Rwanda : Sa Majesté Kigeli V, roi sans royaume

septembre 9, 2014

Kigeli V est en exil depuis plus de cinquante ans.
Kigeli V est en exil depuis plus de cinquante ans. © DR

Il est le dernier monarque du pays des Mille Collines. En exil depuis plus de cinquante ans, Sa Majesté Kigeli V n’a toujours pas renoncé à revenir un jour sur sa terre natale.

C’est un lotissement typique des banlieues américaines dans la lointaine périphérie de Washington. Les maisons n’y sont pas misérables, mais pas luxueuses non plus. Rien, en tout cas, ne laisse penser que le dernier monarque d’une dynastie multiséculaire habite ici. La petite ville d’Oakton, en Virginie, où réside Kigeli V, l’ancien roi du Rwanda, est l’étape finale d’une longue errance commencée il y a un demi-siècle.

Mais impossible pour nous de pénétrer dans sa demeure. « Le roi n’accorde plus d’audiences aux journalistes jusqu’à nouvel ordre. » L’homme qui nous oppose une fin de non-recevoir, dans ce lobby de l’hôtel Marriott d’une zone commerciale peu fréquentée, en cette moite journée d’août, est son « chancelier », Boniface Benzinge. Ce colosse, bien portant malgré son âge avancé (80 ans), a laissé au Kenya femme et enfant pour suivre et servir son souverain.

Sur les raisons du refus royal, Benzinge restera évasif. Le roi, un homme de 78 ans à la taille hors norme, a-t-il une santé fragile ? « Non. Il est parfois fatigué, bien sûr, mais il se maintient, répond le chancelier. Il continue de faire de l’exercice physique. C’est qu’il est trop occupé avec sa fondation. »

Il n’empêche, en 2013, Kigeli V s’était longuement confié au journaliste américain Ariel Sabar. Mais l’article, paru dans le Washingtonian Magazine, détaillait sa passion pour les retransmissions de catch à la télévision, ou encore les dialyses qu’il devait subir régulièrement. Il a fortement déplu au monarque. D’où, peut-être, sa méfiance à l’égard de la presse. « Le journaliste n’a pas respecté la vie privée du roi, s’indigne Benzinge. Il a écrit des choses qu’on ne doit pas publier ! » L’autorité du mwami a décidément perdu de sa superbe.

En réalité, le souverain n’a jamais véritablement connu d’heure de gloire. Le trône du Rwanda, dont il a hérité en 1959, n’était déjà plus la monarchie absolue au territoire impénétrable telle que décrite par les premiers explorateurs de la région. Pour administrer le pays, les colonisateurs (allemands, puis belges) se sont appuyés sur l’aristocratie tutsie tout en affaiblissant son emprise. Et Kigeli V n’a eu le temps ni de se préparer à la fonction, ni de laisser sa trace dans le pays des Mille Collines.

Persona non grata dans son propre pays

Son demi-frère Mutara III meurt mystérieusement en juillet 1959 à l’âge de 47 ans (il aurait été victime d’un empoisonnement commandité par les Belges, selon de nombreux Rwandais) sans laisser d’héritier. Conformément à la tradition en pareil cas, les Birus, un groupe secret possédant le pouvoir de nommer un nouveau roi, désignent Jean-Baptiste Ndahindurwa (son nom de baptême) pour lui succéder. Fonctionnaire de l’administration belge, celui-ci n’a alors que 23 ans. « Cela a été un choc pour lui, affirme Benzinge. Il ne s’y attendait pas du tout. » Sur certaines vieilles photos en noir et blanc, on peut voir le jeune souverain aux côtés du roi Baudouin de Belgique – et le dépassant de plus d’une tête.

À cette époque, la révolte hutue gronde déjà et Bruxelles, agacé par la prétention de l’aristocratie tutsie à diriger le pays, ne fait rien pour la calmer. Le règne de Kigeli V commençait sous le signe de la précarité.

En janvier 1961, Kigeli décide de se rendre à Léopoldville (aujourd’hui Kinshasa), la capitale du Congo nouvellement indépendant, pour solliciter l’aide du Suédois Dag Hammarskjöld, alors secrétaire général de l’ONU et anticolonialiste viscéral. Les colons belges acceptent de lui donner un passeport. Mais à peine arrivé, il apprend à la radio qu’il est persona non grata dans son propre pays, après à peine plus d’un an de règne.

Kigeli V plaide sa cause en écrivant au Conseil de sécurité de l’ONU. En vain. Le Rwanda est sur le point de devenir indépendant. Il y rentre clandestinement, caché à l’arrière d’une voiture, mais les Belges le placent en résidence surveillée avant de le renvoyer vers la Tanzanie de Julius Nyerere. Il avait foulé sa terre natale pour la dernière fois.

Pendant les trois décennies suivantes, Kigeli errera en Afrique de l’Est, dépendant de la générosité des Tutsis (qui s’exilent en vagues successives, fuyant les pogroms du régime hutu de Grégoire Kayibanda) et des chefs d’État qui veulent bien l’accueillir, comme le Kényan Jomo Kenyatta ou l’Ougandais Idi Amin Dada. Aujourd’hui encore, le roi déchu vit des maigres aides sociales américaines et des dons d’une partie de la diaspora. Il ne peut d’ailleurs pas subvenir aux besoins de son chancelier, qui travaille encore comme vendeur au rayon ameublement de l’enseigne Sears, en attendant la retraite.

Dans les années 1980, Kigeli a toujours l’espoir d’un retour. Surtout quand, en 1986, Kampala est pris par Yoweri Museveni, le chef du Mouvement national de la résistance (MNR), une guérilla marxiste puissamment soutenue par les réfugiés tutsis rwandais. Parmi eux : Paul Kagamé. Mais Kigeli n’ira pas s’installer auprès de ses compatriotes, qui se fixent en Ouganda. « Museveni n’était pas en faveur de la royauté », explique Benzinge.

Révolutionnaires marxistes contre monarchistes… Ce clivage idéologique divise profondément la diaspora ­tutsie depuis des décennies. Mais le Front patriotique rwandais (FPR), fondé l’année suivante dans la clandestinité, réussit à former une union sacrée contre le régime de Juvénal Habyarimana, le président hutu au pouvoir à Kigali. Cette rébellion fera le choix de mettre la querelle idéologique de côté pour s’ouvrir au recrutement des monarchistes, encore nombreux.

« Les Rwandais étaient déjà suffisamment divisés comme ça, explique Tito Rutaremara, un des fondateurs du FPR et toujours membre de ses plus hautes instances dirigeantes. À titre personnel, j’ai toujours été républicain. Mais nous disions aux monarchistes : « La forme du gouvernement nous importe peu. Ce qui compte, c’est d’installer la démocratie. Si ensuite vous mobilisez les Rwandais et gagnez un référendum, nous n’aurons aucun problème avec une monarchie, du moment qu’elle est démocratique et progressiste. » »

« Fred Rwigema [le premier chef du FPR, tué au front en 1990] et le roi avaient de bonnes relations, affirme de son côté Benzinge. Il est même venu voir Sa Majesté plusieurs fois à Nairobi, où celle-ci avait trouvé refuge. »

Kagamé n’a aucun intérêt à s’embarrasser d’un ancien roi

Le 4 juillet 1994, le FPR, avec Paul Kagamé à sa tête, finit par faire tomber le régime hutu et met fin à l’effroyable génocide des Tutsis. Kigeli V croit l’heure de son retour proche. Une rencontre est organisée deux ans plus tard à Washington avec Kagamé, alors vice-président – mais véritable chef du FPR et du pays. « Kagamé lui a dit qu’il pouvait rentrer au pays comme simple citoyen, soutient Benzinge, qui était présent lors de cet entretien. Le roi voulait que Kagamé demande aux Rwandais s’ils voulaient de lui comme monarque. »

Vainqueur incontesté de la guerre, Kagamé n’a alors aucun intérêt à s’embarrasser d’un ancien roi en prenant le risque de raviver les vieilles divisions de son camp. Ce sera non. Et cela n’a pas changé depuis. « Le président ne veut plus entendre parler de lui », tranche un proche du président.

Que représentent encore les monarchistes dans le Rwanda d’aujourd’hui ? Difficile de le savoir : ils ne disposent d’aucun parti légal. L’activisme de certains les a d’ailleurs conduits à la prison ou à l’exil. En tout état de cause, dans un pays où la majorité des habitants a moins de 20 ans, rares sont ceux qui ont connu Kigeli. Mais celui-ci affirme qu’il s’entretient régulièrement avec ses partisans, même à l’intérieur du pays… et n’a pas tout à fait renoncé à revenir un jour.

Il consulte, y compris des membres du Congrès national rwandais (RNC), ce mouvement d’opposition fondé par des dissidents du FPR en exil, que le pouvoir soupçonne de vouloir fomenter un coup d’État. « Le roi est le père de tous les Rwandais, justifie Benzinge. Il n’est membre d’aucun parti et ne peut refuser de s’entretenir avec eux, quelle que soit leur appartenance politique. »

Il n’empêche, à son âge, ses chances de revoir un jour le Rwanda paraissent bien minces. Il n’a pas d’enfants et l’idée même de monarchie pourrait bien disparaître avec lui. À moins que les Birus se réunissent de nouveau à sa mort pour lui désigner un successeur. Ces derniers existent-ils encore et, si oui, où se trouvent-ils ? « Je ne le sais pas moi-même, lâche Benzinge. Personne n’a le droit de le savoir. »

Jeuneafrique.com par Pierre Boisselet, envoyé spécial à Washington

Conte : Le Roi de la basse-cour

décembre 11, 2009

Joh le Canard était le roi de la basse-cour. Il avait un plumage tout blanc de la tête jusqu’aux bas de ses pattes de palmipèdes. Il était très arrogant, fier et opulent. Il commandait à tout le monde aussi bien à ses deux femmes qui étaient des cannes, de la même nature que lui. Des femelles qui lui avaient donné de nombreux enfants, des petits : des cannetons de toute beauté identique.

Joh le Canard, ce grand Roi de la cour régnait aussi sur l’autre partie de la volaille composée d’un grand Coq, Kati, qui avait cinq poules comme femmes et de nombreux enfants, des poussins.

En sa qualité de Roi, imbu d’une grande autorité qui lui conférait le prestige et le respect; il marchait majestueusement avec son port royal orné de plumes luisantes, toujours entouré de sa famille de palmipèdes et des gallinacées.

Le Roi avait sorti un règlement dans la cour royale qui était affiché au pied de l’avocatier,  interdisant au Coq de chanter. Alors que dans la vie des gallinacées, une fois ayant atteint l’âge de la maturité, devenu grand, le coquelet a le plein droit de chanter.

Cependant dans la cour voisine du village environnant se trouvait un coq qui avait l’habitude de chanter. C’est lui qui réveillait son village, aussi bien que la cour royale de Joh. Il avait un grand champ de liberté à tel point qu’il pouvait chanter à tout moment, comme il voulait. Il se donnait du plaisir pour faire entendre sa voix et son chant au-delà des frontières villageoises.

Joh le Canard avait ordonné à toute la maisonnée, sa basse-cour de surveiller Kati, le Coq de chanter. Kati ne comprenait pas l’ordre auquel il obéissait lui interdisant de faire éclater, résonner sa voix, son chant aux confins de son gosier. Chaque fois qu’il voulait s’exprimer librement, chanter comme ses amis coqs, il était toujours persécuté et poursuivi devant la cour du Roi puis condamner à de lourdes peines, des sanctions affligées contre lui consistant à gratter le sol pour manger et picorer. Cette punition qui était à la fois un sort pour sa condition d’animal inférieur, résonnait mal dans sa conscience. Cela commençait à le faire réfléchir.

Et à chaque fois que Kati, le Coq se promenait avec ses cinq femmes, quand il arrivait derrière la maison du Roi, au moment où sa famille picorait, lui, il s’entraînait à la boxe devant le miroir qui était placé derrière la maison royale. Dans ce miroir, il voyait son propre double, croyant que c’était un autre coq. Ses femmes et ses enfants le traitaient de mari stupide qui se battait seul, comme un fou, parlant parfois seul : gauche, gauche, droite, droite, K.O.

Toutes ses femmes se moquaient de lui en disant : »Regardez Kati qui se bat seul, il croît être en face d’un rival, un autre coq alors qu’il est en présence de sa propre image. Il ne connaît pas le pouvoir qu’à le miroir de nous refléter notre image, de nous découvrir ».

Un jour Kati le Coq se promenait dans la cour, entendit chanter le coq voisin. Quand il tenta de chanter par une réplique pour manifester sa présence; Joh le Canard l’effraya de son puissant bec, grand ouvert, articulé par des gestes de combat, des mouvements  devenus familiers à Kati.

Cette fois-ci, Kati n’était point intimidé, il n’avait plus peur. Il s’éloigna un peu en courant. Aussitôt, il se braqua, s’arque bouta et sauta sur la face de Joh avec tous ses griffes : Plouf ! Prouf ! Prouf !

Le combat de Kati le Coq et de Joh le Canard débuta sur une violence inattendue à la grande surprise et stupéfaction de tous. Il dura pendant une heure. Les deux familles des palmipèdes et des gallinacées se séparèrent. Chacune dans son coin, regardait admirablement le combat qui se déroulait au milieu de la cour royale.

Kati le Coq malgré son poids plume, devant un poids lourd de Canard, menait le combat, à plusieurs reprises, sur le ring de la basse-cour, avec des crochets de son bec, des envolées de ses pattes et des uppercuts de ses ailes.

Joh le Canard n’en pouvait plus, il était fatigué et essoufflé. Ne pouvant plus faire face au combat, il prit la fuite. Et Kati courait derrière lui avec ses cuisses bicyclettes entraînant toute la basse-cour qui les suivait par des acclamations : Vive Kati ! Vive Kati ! Vive Kati !

Après trois tours de ring, Kati rattrapa Joh le Canard.

Au douzième round, Kati assena un coup fatal, de grand retentissement public, qui le mit à genoux.

Et dès que le combat fut terminé, Kati le coq chanta : j’ai gagné, j’ai gagné : coquerico, coquerico.

Je suis devenu le Roi de la basse-cour.

Le coq voisin répliqua aussi par un chant : coquerico, coquerico.

Les femmes de Kati coururent vers lui, le couvraient de doux baisers et des câlins sur ses plumes rouges mais aussi le long de son bec. Ses enfants le tenaient par les pattes, époussetaient ses plumes couvertes de la poussière du combat.

Kati ne cessait de continuer à chanter : coquerico, coquerico pour dire j’ai gagné, j’ai retrouvé ma liberté de chant.

Depuis ce jour, pour éviter des problèmes de cohabitation, les gallinacées se séparèrent des palmipèdes et Kati prit toute sa famille pour aller fonder son foyer dans l’autre village, créant sa république où il pouvait chanter au gré de son loisir et au plaisir de son bec.

© Bernard NKOUNKOU