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L’armée ukrainienne face aux tentatives des Russes d’encercler Bakhmout

mars 5, 2023
L'armee ukrainienne face aux tentatives des Russes d'encercler Bakhmout
L’armée ukrainienne face aux tentatives des Russes d’encercler Bakhmout© AFP/Anatolii STEPANOV

Les troupes russes poursuivent leurs efforts pour encercler la ville-symbole de Bakhmout, épicentre de la guerre dans l’est de l’Ukraine, a indiqué dimanche l’armée ukrainienne, assurant toutefois avoir repoussé de nouvelles attaques.

Dans son compte-rendu quotidien, l’Etat-major ukrainien a affirmé que « plus de 130 attaques ennemies » avaient été repoussées lors des dernières 24 heures, dans plusieurs secteurs du front, notamment à Koupiansk, Lyman, Bakhmout et Avdiïvka.

« L’ennemi poursuit ses tentatives d’encercler la ville de Bakhmout », a-t-il poursuivi, sans plus de détails.

L’armée des séparatistes prorusses de Donetsk, supplétifs des forces russes, a publié une vidéo censée montrer des combattants du groupe paramilitaire russe Wagner dans la banlieue nord de Bakhmout, assurant que la petite gare ferroviaire de Stoupky, au nord de la ville, avait été conquise.

Le groupe paramilitaire avait assuré vendredi avoir « pratiquement encerclé » la ville.

Des villages au nord et à l’ouest de Bakhmout ont été attaqués, a confirmé samedi sur CNN Serhii Tcherevatyi, porte-parole du groupement oriental des forces armées ukrainiennes.

Il a affirmé que si la situation à Bakhmout était « difficile », elle restait « sous contrôle ».

« Les Russes pourraient essayer d’encercler les forces ukrainiennes à Bakhmout, mais le commandement ukrainien a donné le signal qu’il préférait se retirer plutôt que risquer un encerclement », a estimé samedi l’Institut pour l’Etude de la guerre (ISW), un groupe d’experts américains.

La bataille pour Bakhmout, ville industrielle dont l’importance stratégique est contestée, dure depuis l’été. La cité est devenue un symbole car elle est au coeur des combats entre Russes et Ukrainiens depuis des mois.

Civils tués

Le ministère russe de la Défense a affirmé que le ministre Sergueï Choïgou s’était rendu samedi dans un poste de commandement avancé en Ukraine, dans la zone « Donetsk-Sud », sans préciser le lieu exact, ni la date de cette visite.

Cette zone d’opérations fait face au secteur de la ville de Vougledar, où l’armée russe a mené ces dernières semaines des offensives, sans grand succès.

Selon ISW, cette visite visait « visiblement à estimer l’ampleur des pertes autour de Vougledar et la possibilité de poursuivre une offensive dans cette direction ».

Selon des images publiées samedi par l’armée russe, Sergueï Choïgou a également assisté à une réunion avec les hauts gradés russes en charge de l’offensive en Ukraine, notamment le chef de l’Etat-major, Valéri Guerassimov.

Des tirs meurtriers ont par ailleurs été signalés ces dernières 24 heures contre des zones d’habitation, faisant au moins cinq morts, selon les autorités ukrainiennes.

Le parquet de Kharkiv, dans le nord-est de l’Ukraine, a annoncé ouvrir une enquête pour crime de guerre après la mort d’un couple de civils dans une frappe russe qui a touché leur voiture dimanche dans le village de Boudarky.

Enfin le bilan de la frappe contre un immeuble d’habitation de Zaporijjia (sud), dans la nuit de mercredi à jeudi, s’est alourdi à 13 morts dont un enfant.

Sur le front diplomatique, Volodymyr Zelensky a reçu samedi à Lviv, dans l’ouest de l’Ukraine, la présidente du Parlement européen, Roberta Metsola. Tous deux ont dit espérer l’ouverture, dès cette année, de négociations pour que l’Ukraine rejoigne l’Union européenne.

Samedi, M. Zelensky est également revenu sur la situation à la centrale nucléaire de Zaporijjia, dans le sud de l’Ukraine, un an après sa capture par les forces russes.

Le président ukrainien a dénoncé « la prise en otage » de la centrale, la plus grande d’Europe, et appelé l’Occident à sanctionner l’industrie nucléaire russe.

Dans une interview à l’AFP, le maire en exil de la ville d’Energodar, où est située la centrale, a affirmé que cette dernière était désormais à l’arrêt et avait été transformée de facto en « base militaire » où s’abritent les forces russes.

Aux avant-postes du soutien occidental à Kiev, le président américain Joe Biden a de son côté annoncé vendredi une nouvelle aide militaire à l’Ukraine de 400 millions de dollars.

Washington a inclus dans cette aide des munitions, notamment pour le système de roquettes Himars, que les forces ukrainiennes ont utilisé avec un effet dévastateur sur les troupes et lignes logistiques russes.

Avec Le Point par AFP

Ukraine : la situation autour de Bakhmout devient très difficile

février 27, 2023

Volodymyr Zelensky a fait le point, ce lundi soir, sur le combat qui fait rage aux alentours de la ville située dans l’est du pays.

Les forces russes tentent depuis plusieurs semaines d'encercler Bakhmout. (Photo d'illustration).
Les forces russes tentent depuis plusieurs semaines d’encercler Bakhmout. (Photo d’illustration).© Adrien Vautier / Le Pictorium / MAXPPP / Le Pictorium/Maxppp

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a reconnu lundi soir que la situation de ses troupes aux alentours de Bakhmout, dans l’est du pays, devenait très difficile. « La situation devient de plus en plus compliquée », a-t-il déclaré dans son message quotidien. « L’ennemi détruit systématiquement tout ce qui peut être utilisé pour protéger nos positions », a-t-il ajouté, qualifiant de « vrais héros » les soldats ukrainiens engagés dans cette bataille.

Depuis l’été, les troupes de Moscou tentent de prendre la ville de Bakhmout, à l’importance stratégique contestée mais devenue un symbole de la lutte pour le contrôle de la région du Donbass, dans l’est de l’Ukraine. Dans des propos diffusés lundi par la télévision russe, le chef de la région de Donetsk (Ukraine orientale) nommé par Moscou, Denis Pushilin, a assuré que toutes les voies d’accès à la ville-forteresse de Bakhmout sont « à portée d’armes » des forces pro-russes.

Un village capturé par les Russes

Les forces russes tentent depuis plusieurs semaines d’encercler Bakhmout et ont réussi à couper plusieurs routes importantes pour le ravitaillement des troupes ukrainiennes. Le patron du groupe paramilitaire russe Wagner, Evguéni Prigojine, a revendiqué samedi la capture par ses hommes du village de Iaguidné, situé à la périphérie nord de Bakhmout.

Le Point par V.D. avec AFP

Le discours de Poutine a laissé beaucoup de Russes sur leur faim

février 21, 2023

L’allocution du président, diffusée en direct sur toutes les chaînes d’État ce mardi, était très attendue par la population.

Le president russe Vladimir Poutine prononce son discours annuel sur l'etat de la nation au centre de conference Gostiny Dvor, a Moscou, le 21 fevrier 2023.
Le président russe Vladimir Poutine prononce son discours annuel sur l’état de la nation au centre de conférence Gostiny Dvor, à Moscou, le 21 février 2023.© Dmitry Astakhov/Sputnik/AFP

« D’un côté, je suis rassurée que le président n’ait rien dit à propos d’une nouvelle vague de mobilisation ou d’une participation plus évidente de nous tous, ici en Russie, à cette guerre », avoue Lara, 26 ans, commerciale dans une banque d’État. « Mais, de l’autre, les buts de cette guerre ne sont toujours pas clairs et on ne sait même pas quand on s’en sortira ! » soupire-t-elle, agacée.

Comme de nombreux Moscovites, Lara a regardé avec attention l’allocution de Vladimir Poutine sur son téléphone portable depuis son lieu de travail. À l’instar d’une majorité de la population russe inquiète et désarçonnée par l’invasion de l’Ukraine, il y a un an, la jeune femme attendait avec angoisse ce discours devant les deux chambres du Parlement, d’autant qu’il n’avait pas eu lieu à la fin 2022, comme l’exigeait pourtant la Constitution.

« Citoyens de deuxième catégorie »

Le discours-fleuve – le plus long de toutes ses allocutions aux deux Chambres – n’a guère apporté d’éléments nouveaux, sauf à la fin, quand le chef de l’État, à la voix enrouée mais à la mine et au ton énergiques, a annoncé que la Russie suspendait sa participation à l’accord New Start avec les États-Unis sur le désarmement nucléaire stratégique.

Il a justifié sa décision par les vols de drones – « modernisés avec l’aide de l’Occident » – au-dessus de deux aéroports russes en décembre, celui d’Engels et celui de Ryazan. Pour ajouter, presque malicieux et sûr de son effet, que si les États-Unis s’apprêtaient à procéder les premiers à de nouveaux essais nucléaires, la Russie se réservait également le droit d’y procéder. « Ce moment-là m’a marquée, souligne Lara, parce que c’est comme si le président évoquait la guerre froide… »

La jeune femme a été étonnée par l’insistance du président à diviser, en permanence, la société russe entre « les nôtres » et « les autres ». Il l’a fait notamment à propos des hommes d’affaires qui ont quitté le pays à la suite de la guerre. « Personne ne va les plaindre d’avoir perdu l’argent qu’ils ont déposé sur des comptes en banque en Occident » où ils ne sont, finalement, que « des citoyens de deuxième catégorie », a affirmé Vladimir Poutine, qui ne perd plus une occasion de montrer sa satisfaction vis-à-vis de la « purification » de la société russe induite par cette guerre.

Nouvelles élites

Autre moment révélateur : quand le président russe, quasi hors de lui, a évoqué le nom d’une nouvelle brigade de chasseurs alpins ukrainiens officiellement nommée « Edelweiss » (le nom d’une fleur de montagne), selon lui en référence à la division nazie qui portait le même nom. Selon Lara, beaucoup de Russes, même contre la guerre, peuvent se demander pourquoi cette dénomination a été choisie par le président ukrainien.

Au grand dam de la jeune femme, et de toute une population jeune et éloignée de la politique, Vladimir Poutine n’a pas soufflé mot sur les moyens de stopper cette guerre, ni sur ce qu’il proposait pour réussir à vivre sous ces conditions radicalement différentes.

Dans la salle où s’exprimait le président, de très nombreux invalides de guerre et militaires en uniforme, leurs médailles bien visibles, ont été montrés à plusieurs reprises lors de la retransmission télévisée en direct sur toutes les chaînes d’État, comme illustrant ce changement des élites que Poutine appelle de ses vœux.

Les anciennes élites, trop libérales dans les années 1990 – quand « des conseillers occidentaux venaient nous donner des leçons, vous vous en souvenez ? », a-t-il glissé –, se sont, selon Poutine, trompées et n’ont pas été assez patriotes. Voici les nouvelles élites, semblait dire le chef d’État russe, dont les propos étaient immédiatement illustrés par le réalisateur de la retransmission.

Aucune mention du coût humain du conflit

Assis aux côtés du ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, son collègue de la Défense Sergueï Choïgou a gardé un visage fermé et impassible tout au long de l’allocution. Ramzan Kadyrov, le président de la Tchétchénie, fort disert sur son fil Twitter, ne semblait pas être présent, alors qu’il avait été annoncé.

Le maire de Moscou Sergueï Sobianine, soupçonné de ne pas être un chantre de la guerre, et qui a tout fait pour que sa ville envoie très peu de mobilisés participer à « l’opération militaire spéciale », n’a pas été montré non plus.

Aucune mention n’a été faite, par Vladimir Poutine, du coût humain du conflit, sauf pour remercier celles et ceux qui, « héroïquement », en souffrent. Si certains semblent avoir apprécié que l’allocution n’ait été ni trop belliqueuse ni trop jusqu’au-boutiste, les « turbopatriotes », eux, l’ont immédiatement critiquée sur certaines chaînes Telegram. Hier dans l’expectative, les marchés boursiers russes avaient accusé une baisse. En signe de confiance, ce mardi, ils sont remontés pendant l’allocution du président.

L’agence de presse officielle RIA-Novosti a fait les comptes : la salle a applaudi 53 fois et s’est levée à 4 reprises. Mais pas quand Vladimir Poutine a subitement évoqué la suspension de l’accord nucléaire. À ce moment précis, un seul homme, en uniforme militaire et filmé de dos par le réalisateur, s’est levé de son siège, mais il n’a pas été suivi par la salle, preuve que l’ambiance était à la circonspection.

Avec Le Point.fr par l’envoyée spéciale à Moscou, Anne Nivat

La guerre a changé la vie de Canadiens d’origine russe

février 21, 2023
Un drapeau russe flotte au-dessus du consulat général de Russie à Montréal.

Selon l’ambassade de Russie au Canada, des membres de la communauté rapportent fréquemment être victimes d’intimidation et de harcèlement. Photo : Radio-Canada

Un an après le début de la guerre en Ukraine, l’ambassadeur russe à Ottawa affirme que le Canada est devenu un « pays très dangereux » pour ses compatriotes. Des membres de la communauté russe réfutent ces propos, mais admettent tout de même que leur vie a changé ces derniers mois.

La situation est sérieuse, affirme Vladimir Proskuryakov en entrevue à Radio-Canada. Le chef de mission adjoint de l’ambassade russe à Ottawa soutient que son bureau reçoit chaque jour des plaintes de compatriotes victimes de harcèlement et d’intimidation.

Nous avons reçu 1000 ou 2000 appels jusqu’ici, dit-il.

L’ambassadeur lui-même, Oleg Stepanov, est d’avis que le Canada n’est pas sûr pour les Russes. Je ne le recommanderais pas pour le tourisme, l’éducation ou les affairesa-t-il déclaré à l’agence de presse d’État RIA Novosti, plus tôt ce mois-ci.

Nous avons plusieurs cas où des personnes ont perdu leur emploi, explique Vladimir Proskuryakov. Dans d’autres cas plus préoccupants, notamment à Calgary et à Toronto […] certains ont reçu des menaces.

L’envoyé de Moscou parle même d’attaques, mais n’a pas voulu donner d’informations plus précises pour des raisons de confidentialité, donc il nous a été impossible de corroborer ces informations. Des incidents ont toutefois bel et bien été rapportés dans les médias et par la police.

À Montréal, par exemple, le SPVM a documenté 11 crimes haineux contre une personne d’origine russe depuis le 24 février 2022.

C’est de la propagande

Devant le consulat général de Russie à Montréal, une manifestation se tient tous les midis.

Une dizaine de personnes agitent des drapeaux ukrainiens devant le consulat général de Russie à Montréal.

Le conseiller municipal Serge Sasseville, accompagné de quelques personnes, manifeste tous les jours devant le consulat général de Russie à Montréal depuis le 15 mars 2022. Photo : Radio-Canada

Tous les jours depuis le 15 mars 2022, le conseiller municipal Serge Sasseville et un petit groupe de personnes y chantent l’hymne national ukrainien et font jouer des bruits de sirènes.

L’ambassade russe y voit un exemple d’hostilité. Nous n’avons pas d’objection à ce que les gens manifestent de façon pacifique […], mais parfois les participants sont agressifs, déplore Vladimir Proskuryakov.

On n’a jamais vu ça nous, c’est drôle, répond Serge Sasseville. Il n’y a rien de dangereux, on n’attaque personne, on est pacifique.

Olga Babina et Yuriy Novodvorskiy participent à la manifestation.

Olga Babina (centre) et Yuriy Novodvorskiy (droite) organisent des campagnes de financement pour l’Ukraine et des manifestations contre la guerre. Photo : Radio-Canada

D’ailleurs, des personnes d’origine russe l’accompagnent, dont Olga Babina qui est installée à Montréal depuis six ans. Il n’y a aucun danger ici, renchérit-elle. Je me sens en sécurité et même privilégiée d’être ici au Canada.

La vie est beaucoup plus dangereuse en Russie, fait-elle remarquer, où les manifestations comme celle-ci ne sont pas tolérées. C’est dur à expliquer à quelqu’un qui ne l’a jamais ressenti. Mais pour nous, avec notre histoire, c’est dans notre sang de vivre dans la peur.

Je crois qu’il est naturel pour l’ambassadeur de dire des choses comme ça, mais je n’ai vu absolument aucune preuve de ce qu’il avance, ajoute Yuriy Novodvorskiy. Je n’ai pas à cacher le fait que je suis Russe.

Avec Olga, il a fondé l’Alliance démocratique des Canadiens russes (ADCR) il y a quelques mois pour unir les membres de la diaspora qui sont contre la guerre.

Varvara Rakova en entrevue.

Varvara Rakova participe à des rassemblements contre la guerre en Ukraine, entre autres parce qu’elle dit ressentir de la honte depuis le début de l’invasion russe. Photo : Radio-Canada

Dire que le Canada est devenu dangereux, c’est ridicule, estime Varvara Rakova, qui s’implique dans certaines activités militantes. Je pense que c’est de la propagande.

Il n’y a rien de négatif qui m’est arrivé depuis le début de la guerre en Ukraine, explique-t-elle. En fait, quand les gens entendent un petit accent russe, certains me demandent : « C’est quoi ton origine? » Je dis russe. Ils disent : « Ah! C’est pas facile hein. » Ils comprennent. Les gens sont intelligents.

Associé à l’invasion de l’Ukraine, malgré lui

Établi au pays depuis 1995, Lev Chif est éditeur de Rendez-vous à Montréal, un journal destiné à la population russophone de la métropole, publié une fois par semaine. Il accuse lui aussi l’ambassadeur russe de faire de la désinformation, mais il avoue avoir reçu des insultes et même perdu des annonceurs au cours des derniers mois.

Une fois, je décroche le téléphone, un homme me dit : « Tu es Russe, va te faire foutre, je vous déteste », raconte-t-il. Ils nous associent à [Vladimir] Poutine.

Lev Chif en entrevue, à sa table de cuisine.

Lev Chif a fondé le journal russophone « Rendez-vous à Montréal » avec sa femme en 1998. Photo : Radio-Canada

Comble de l’ironie, Lev n’est même pas Russe. Il est plutôt originaire d’Ouzbékistan, une ancienne république soviétique.

Quand je suis arrivé ici, les gens me demandaient d’où je venais, se souvient-il. Je répondais d’Ouzbékistan et ils disaient : « Quoi? » Avec le temps, je me suis mis à dire que je venais de Russie. C’était plus facile.

Maintenant, je ne dis jamais ça, précise-t-il, sourire en coin.

La peur d’être associé à une guerre qu’il ne cautionne pas, un sentiment de culpabilité même, font partie de sa nouvelle réalité, comme pour bien d’autres.

Avec Radio-Canada par Sébastien Desrosiers

Ces tanks russes qui tirent sur les soldats russes

février 21, 2023

Ils sont cachés à plusieurs endroits en Ukraine. Celui que nous avons vu est perdu au milieu des champs du Donbass. Ce sont des ateliers militaires. Des endroits où l’on retape des chars ukrainiens, mais aussi des engins russes saisis sur le champ de bataille, puis retournés contre l’ennemi.

Des tanks ukrainiens en réparation dans un atelier clandestin.

Des tanks ukrainiens en réparation dans un atelier clandestin. Photo : Radio-Canada/Yanik Dumont Baron

Un contact de l’armée ukrainienne nous a donné rendez-vous près d’un pont. De là, il nous guide vers un petit secteur industriel au milieu des champs. Vers un vaste hangar au toit voûté.

Nous sommes dans l’est du pays. Pas trop loin du front. L’armée ukrainienne nous demande de ne pas en dire plus. De ne photographier que l’intérieur.

Dans ce hangar, on retrouve des outils, des pièces détachées. Et des chars d’assaut endommagés. Nous sommes dans l’atelier du bataillon de réparation pour la 3e brigade de blindés ukrainienne.

Un soldat armé monte la garde à l’entrée, près d’un poêle à bois. Le sol est en terre battue. Des oiseaux vont et viennent. Quelques drapeaux jaune et bleu sont bien en vue.

Trois mécaniciens en tenue militaire s’affairent sur un de ces gros véhicules à chenilles. Ils tentent de réparer un char T-72. Un tank abandonné en Ukraine par l’ennemi russe.

Toute marque qui l’identifie à l’ennemi a été effacée. Les Ukrainiens utilisent les mêmes modèles de chars, issus de l’époque soviétique. Ce tank est un peu comme un cadeau tombé du ciel.

Quand on voit un tank russe abandonné, on prend tout ce qu’on peut. On devient comme des enfants, lance le commandant Oleksandr Dereka, responsable de ce bataillon de réparation.

Pour nous, ce ne sont que des machines. On ne s’arrête pas à penser que des Russes sont peut-être morts dans le char. On manque de pièces de rechange!

Des chars donneurs d’organes pour l’armée ukrainienne

L’unité aurait déjà réparé et renvoyé au front cinq blindés russes. Soit environ le quart des chars que sa brigade a perdus au combat. Et c’est sans compter tous les morceaux qui peuvent être utiles.

Regardez autour de vous, lance-t-il : des transmissions, des moteurs, des roues. Plus de la moitié de ce que vous voyez ici vient de blindés russes!

Des chars dont la présence est souvent signalée au commandant par des contacts dans la région.

Mais ce n’est pas tout ce qui est abandonné qui est récupérable. La machinerie est souvent mal entretenue, explique le commandant Dereka. Les Russes maltraitent leur équipement.

Le mitrailleur Roman Batsenko est d’accord. Il affirme avoir souvent piloté des tanks repris aux soldats russes. Il compare ces chars à des donneurs d’organes pour l’armée ukrainienne.

Cet engin blindé ukrainien, déjà bien éprouvé, fait un passage obligé par l'atelier.

Cet engin blindé ukrainien, déjà bien éprouvé, fait un passage obligé par l’atelier. Photo: Radio-Canada /Yanik Dumont Baron

On leur renvoie leurs propres obus

Comme mitrailleur, Roman Batsenko fait équipe avec deux autres soldats, installés dans le blindé. C’est lui qui vise et doit détruire les cibles adverses. Il a cessé de compter ses victimes.

Mais il arrive fréquemment que l’engin à bord duquel il doit travailler ne soit plus en état de fonctionner. Touché par un tir russe. Ou victime d’un problème mécanique.

Dans ce cas, l’équipe de Roman Batsenko prend des armes antichars, saute dans une tranchée… Parfois dans l’espoir de pouvoir voler un tank à l’ennemi.

Le mitrailleur assure s’être emparé de plusieurs chars russes. Des véhicules abandonnés par l’adversaire. Des vols parfois risqués, réalisés tout près des lignes russes.

Peu importe si c’est un char ukrainien ou un char russe. Le but, c’est de détruire ceux de l’adversaire venu prendre nos terres. Plus vite on le fera, souligne-t-il, plus vite on rentrera à la maison.

Roman Batsenko voit bien l’ironie de l’opération. On leur renvoie leurs propres obus, lance-t-il en riant. Mais c’est la guerre. Pas de place aux sentiments.

Tenir, mais pour combien de temps?

Un mécanicien démarre un des chars pour le déplacer. Le grand entrepôt se remplit vite de fumée. L’air est toxique, mais le travail continue, comme si de rien n’était.

Le commandant Dereka observe ses hommes, un peu comme un père bienveillant. Il apprécie leurs efforts, mais comprend aussi les limites de l’exercice.

Ça fait plus de onze mois que ces tanks sont au combat. Ça me fait mal de l’admettre, mais ils ne sont pas invincibles. Ces machines ont fait leur temps. Certaines ont plus de 40 ans.

Les duels d’artillerie du Donbass se font surtout avec des engins qui sont en fin de vieC’est dur de l’admettre, mais on est aux limites de ce qu’il est possible de faire avec eux, convient-il.

C’est pour ça que le commandant attend avec impatience les chars Abrams américains, les Leopard allemands et canadiens et les Challenger britanniques. Des véhicules plus performants, promis pour le printemps.

La bataille est un peu personnelle pour le commandant. Un de ses fils s’est installé sur des terres agricoles de la Saskatchewan il y a quelques années. Il lui manque. Il espère une victoire sur la Russie afin de le convaincre de rentrer vivre en Ukraine à ses côtés.

Avec Radio-Canada par Yanik Dumont Baron

L’Ukraine reconnaît avoir mené la frappe qui a tué 63 soldats russes près de Donetsk

janvier 2, 2023
Une batterie de missiles HIMARS.

Les États-Unis ont livré plusieurs systèmes de missiles aux forces ukrainiennes, dont le système HIMARS (archives). Photo : AFP via Getty Images/Gints Ivuskans

La Russie a reconnu lundi la mort de 63 de ses soldats en Ukraine, tués dans une frappe en territoire séparatiste dans l’est du pays, les plus lourdes pertes en une seule attaque admises par Moscou depuis le début de l’invasion.

L’armée n’a qu’à de très rares reprises donné un bilan de son offensive ou communiqué sur ses pertes. Selon le ministère russe de la Défense, 63 militaires ont été tués dans l’explosion de quatre missiles tirés par des systèmes HIMARS, une arme fournie par les États-Unis aux forces ukrainiennes.

Selon le porte-parole du ministère russe de la Défense, Igor Konachenkov, qui n’a pas précisé la date de la frappe, ces missiles ont frappé un centre de déploiement provisoire de l’armée russe à Makiïvka, ville sous occupation russe située à l’est de la ville séparatiste de Donetsk.

Igor Konashenkov.

Le porte-parole du ministère russe de la Défense, Igor Konashenkov. Photo : Getty Images/Natalia Kolesnikova

Le ministère a encore assuré avoir abattu deux des six missiles tirés sur cette cible à Makiïvka.

L’état-major ukrainien a, quant à lui, reconnu avoir mené cette frappe, réalisée selon lui avant le Nouvel An le 31 décembre, détruisant ou endommageant jusqu’à 10 véhicules. Les pertes en matière de personnel pour les occupants sont en train d’être précisées, a-t-il indiqué.

Dimanche, des médias russes et ukrainiens avaient commencé à faire état de cette frappe, affirmant qu’elle avait eu lieu dans la nuit de samedi à dimanche, au moment du passage à la nouvelle année, et qu’un bâtiment où se trouvaient des réservistes récemment mobilisés en Russie avait été touché.

L’annonce de ces lourdes pertes a immédiatement provoqué des critiques envers le commandement militaire russe, accusé notamment par l’ancien responsable séparatiste Igor Strelkov, très au fait de la situation sur le terrain, d’avoir entreposé des munitions dans ce bâtiment non protégé.

Le gouverneur de la région russe de Samara, Dmitri Azarov, a lui annoncé l’ouverture d’une ligne téléphonique pour les proches des soldats tués, parmi lesquels figurent ses administrés.

Une nouvelle année qui commence sous les frappes

L’annonce de cette frappe intervient après un Nouvel An marqué par des bombardements russes sur Kiev et d’autres villes samedi, dimanche et lundi, qui ont fait cinq morts et une cinquantaine de blessés.

Lundi à l’aube, les frappes ont provoqué des coupures de courant à Kiev.

Les Russes ont lancé plusieurs vagues de drones Shahed de fabrication iranienne, a déclaré Oleksiï Kouleba, le chef de l’administration militaire de la région de Kiev, précisant que les frappes étaient dirigées contre des infrastructures essentielles.

Un drone vole dans le ciel.

Ce drone russe photographié à Kiev correspond à la description d’un drone de fabrication iranienne Shahed-136, selon les autorités ukrainiennes. Photo : Reuters

La défense antiaérienne ukrainienne a affirmé avoir abattu 41 drones et un missile russes.

L’opérateur DTEK a annoncé que l’attaque avait infligé des dégâts aux infrastructures liées à l’alimentation en électricité de Kiev et qu’il devait de ce fait imposer des coupures d’urgence.

La compagnie nationale Ukrenergo a confirmé les pannes de courant, tout en assurant que la situation était totalement sous contrôle.

Après une série de revers militaires sur le terrain et d’attaques ukrainiennes ayant visé le territoire russe et la Crimée annexée, Moscou a opté à partir d’octobre pour une tactique de bombardement des infrastructures de l’Ukraine, provoquant régulièrement des coupures d’électricité et d’eau.

Les autorités russes ont quant à elles fait état lundi d’une attaque ukrainienne au drone sur une installation électrique dans la région de Briansk, frontalière de l’Ukraine, et ont affirmé avoir abattu un drone de reconnaissance ukrainien se dirigeant cette fois vers la grande ville de Voronej.

Moscou avait assuré que ses frappes du Nouvel An avaient visé des installations de fabrication de drones.

Les Russes sont en train de perdre. Les drones, les missiles et tout le reste ne les aideront pas. Parce que nous sommes ensemble, a réagi dimanche soir le président Volodymyr Zelensky.

Des militaires ukrainiens sur un véhicule blindé de transport de troupes.

Des militaires ukrainiens sur un véhicule blindé de transport de troupes. Photo : Reuters

L’armée russe a par ailleurs déclaré dimanche poursuivre son offensive dans la région de Donetsk, dans l’est de l’Ukraine, où se concentre actuellement l’essentiel des combats.

L’état-major des forces ukrainiennes a, à cet égard, souligné dimanche soir que l’ennemi […] continuait de tenter des attaques dans le secteur de Bakhmout, le point le plus chaud du front, où les deux camps subissent de lourdes pertes.

Les soldats engagés dans cette bataille sont soumis à une incroyable fatigue morale et physique. Et dans cette guerre d’usure sans fin, certains finissent par se percevoir comme de la viande, juste bons à être envoyés à la mort, a expliqué sur place à l’AFP Mark Kouptchenenko, un jeune aumônier militaire ukrainien qui va tous les jours sur le front.

Il n’y a pas ou très peu de rotations, ils sont en permanence au combat, sous une pression énorme, soumis à des ordres que parfois ils ne comprennent plus, a-t-il encore dit.

Par Radio-Canada avec Agence France-Presse

Ukraine : Zelensky dans la ville de Kherson reprise aux Russes

novembre 14, 2022
Le président Zelensky est entouré de gardes de sécurité.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky s’est adressé lundi aux médias à Kherson. Photo: AP/Bernat Armangue

Agence France-Presse

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky s’est rendu lundi à Kherson, une ville d’importance majeure dans le sud de l’Ukraine reprise vendredi à l’armée russe à « un prix élevé » après des semaines de combats.

Le Kremlin a de son côté continué d’affirmer que la ville ukrainienne, officiellement annexée en septembre au même titre que la région éponyme, appartenait à la Russie bien que ses troupes aient dû l’abandonner.

Il est impossible de tuer l’Ukraine, a lancé Volodymyr Zelensky lors d’une visite surprise à Kherson, libérée il y a trois jours par l’armée ukrainienne.

Le prix de cette guerre est élevé, a-t-il appuyé, cité par la présidence. Nous allons pas à pas dans tous les territoires temporairement occupés de notre pays. […] C’est un chemin long et difficile, a-t-il reconnu.

C’est important d’être ici […] pour que les gens sentent que ce ne sont pas que des paroles et des promesses, mais qu’on revient vraiment et qu’on brandit vraiment notre drapeau, a souligné le dirigeant ukrainien dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux.

Des habitants se rassemblent lors d'une visite du président ukrainien Volodymyr Zelensky à Kherson, dans le sud de l'Ukraine, le lundi 14 novembre 2022.

Des habitants se rassemblent lors d’une visite du président ukrainien Volodymyr Zelensky à Kherson, dans le sud de l’Ukraine, le lundi 14 novembre 2022. Photo : AP/Bernat Armangue

Main sur le cœur, comme les autres responsables civils et militaires présents, il a chanté l’hymne national au moment de la montée du drapeau ukrainien devant le bâtiment de l’administration régionale dans le centre de Kherson.

Selon des photos publiées sur Telegram, le dirigeant ukrainien s’est également promené en tenue militaire dans les rues de la ville, entouré de gardes du corps lourdement armés, sans toutefois porter lui-même de casque ni de gilet pare-balles.

De nombreux habitants, certains drapés dans les couleurs ukrainiennes, étaient massés sur son passage.

Gloire à l’Ukraine!, lui ont crié des habitants depuis le balcon d’un immeuble. Gloire aux héros! ont répondu conformément à la tradition le chef de l’État et ceux qui l’accompagnaient, selon une vidéo abondamment relayée sur les réseaux sociaux.

Une femme dans les bras d'un soldat avec un bouquet de fleurs.

Valentyna Buhaiova, résidente de Kherson, enlace un soldat après que l’armée ukrainienne a repris le contrôle de la ville, annexée par la Russie en septembre. Photo: Reuters/Valentyn Ogirenko

Les forces russes ont été contraintes de se retirer la semaine dernière de Kherson après huit mois d’occupation, laissant le champ libre aux soldats ukrainiens pour entrer vendredi dans la ville.

Interrogé sur ce déplacement du président ukrainien à Kherson, le Kremlin a de son côté continué d’affirmer que la ville appartenait à la Russie.

Nous ne commenterons pas, vous savez bien que c’est le territoire de la Fédération de Russie, a déclaré à la presse le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov.

Kherson avait été la première grande ville et le seul centre régional à tomber après l’invasion russe déclenchée fin février. Le retrait forcé des troupes de Moscou face à la pression de la contre-offensive ukrainienne a constitué un camouflet pour le président russe Vladimir Poutine qui a ordonné la mobilisation de 300 000 réservistes en septembre.

Les mois à venir seront difficiles pour l’Ukraine, a toutefois averti le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg lundi.

Nous ne devons pas commettre l’erreur de sous-estimer la Russie, a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse à La Haye, estimant que l’objectif de Poutine est de laisser l’Ukraine froide et sombre cet hiver.

L’armée russe, en difficulté sur le terrain, a mené ces dernières semaines plusieurs vagues de frappes massives de missiles et drones kamikazes sur les infrastructures civiles ukrainiennes, notamment sur les réseaux énergétiques.

Elle a affirmé lundi avoir conquis une localité de l’est de l’Ukraine, Pavlivka, un rare succès revendiqué par Moscou après des semaines de revers et de retraites.

Dans son allocution quotidienne, Volodymyr Zelensky a, lui, accusé dimanche soir les forces russes d’avoir commis des atrocités à Kherson comme dans les autres régions libérées précédemment.

Actes de résistance

Selon lui, 400 crimes de guerre  russes ont été documentés à ce stade, sans préciser s’ils concernaient uniquement la région de Kherson. La Russie n’a pas pour l’instant réagi à ces affirmations.

Interrogés par l’AFP, des habitants de Kherson ont raconté les mois d’occupation russe et pour certains, leurs actes de résistance pour aider la contre-offensive ukrainienne.

Volodymyr Timor, un jeune de 19 ans, dit avoir noté avec ses amis durant des mois les mouvements des soldats russes dans la ville pour informer l’armée ukrainienne.

On signalait tout : où se trouvaient leurs équipements et leurs lieux de stockage de munitions, où ils dormaient, où ils allaient boire des coups, a expliqué à l’AFP ce jeune homme qui voulait devenir musicien avant la guerre.

Dans la région de Lougansk (Est) où se poursuivent des combats violents contre les forces russes, l’armée ukrainienne a repris le village de Makiivka, à 50 km au nord-est de la ville stratégique de Severodonetsk, contrôlée par les Russes, a affirmé lundi la présidence ukrainienne dans son bulletin quotidien.

Un étudiant zambien de 23 ans, qui purgeait une lourde peine de prison en Russie, a par ailleurs été tué le 22 septembre au combat en Ukraine, a annoncé le gouvernement zambien.

Avec Radio-Canada

L’armée ukrainienne entre dans Kherson après avoir forcé les Russes à se retirer

novembre 11, 2022
L'armee ukrainienne entre dans Kherson apres avoir force les Russes a se retirer
L’armée ukrainienne entre dans Kherson après avoir forcé les Russes à se retirer© AFP/BULENT KILIC

L’armée ukrainienne a annoncé vendredi être entrée dans Kherson (sud) après le retrait forcé des militaires russes, qui constitue un nouveau revers cinglant pour Moscou après bientôt neuf mois d’invasion en Ukraine.

« Kherson revient sous le contrôle de l’Ukraine, des unités des forces armées ukrainiennes entrent dans la ville », a indiqué sur Facebook le ministère ukrainien de la Défense, appelant les militaires russes restés sur place à « se rendre immédiatement ».

Le chef de la diplomatie ukrainienne, Dmytro Kouleba, s’est félicité d’une « victoire importante ». « Kherson c’est l’Ukraine ! », s’est enthousiasmé le maire de Kiev, Vitali Klitschko, alors que la ville du sud du pays était occupée depuis la mi-mars.

Ce repli est le troisième d’ampleur depuis le début de l’invasion le 24 février, la Russie ayant dû renoncer au printemps à prendre Kiev, avant de devoir abandonner la quasi-totalité de la région de Kharkiv (nord-est) sous la pression de l’armée ukrainienne en septembre.

M. Kouleba a diffusé sur son compte une vidéo montrant, selon lui, des résidents de la localité de Bilozerka, à quelques kilomètres de la ville de Kherson, en train d’arracher une gigantesque affiche proclamant « La Russie est là pour toujours ».

A Kiev, Sergueï, 26 ans et employé du secteur informatique, dit à l’AFP avoir eu « des larmes » de joie à l’annonce de l’entrée des troupes ukrainiennes dans Kherson.

« C’est un coup dur pour Poutine », estime pour sa part Isak Danilotvich, un mathématicien rencontré par l’AFP dans la capitale. « Ils ont été forcés de partir, c’est clair pour tout le monde », ajoute-t-il, célébrant cette « victoire ».

Plus tôt vendredi, le ministère russe de la Défense avait annoncé avoir achevé à 05H00 de Moscou (02H00 GMT) « le redéploiement » de ses unités de la rive droite (occidentale) du fleuve Dniepr, où se trouve Kherson, vers la rive gauche, assurant n’avoir subi aucune perte, ni abandonné de matériel militaire.

Selon lui, « plus de 30.000 » soldats russes et « près de 5.000 unités d’armements et de véhicules militaires ont été retirés » de la rive occidentale du Dniepr.

Ce repli a toutefois tout du camouflet, Vladimir Poutine ayant revendiqué fin septembre l’annexion de quatre régions ukrainiennes, dont celle de Kherson.

En dépit de cette retraite, la zone reste « un sujet de la Fédération de Russie », a affirmé vendredi le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

« Il ne peut y avoir aucun changement », a-t-il ajouté dans le premier commentaire de la présidence russe sur ce repli.

Pont détruit

Le camouflet est d’autant plus fort que Vladimir Poutine avait ordonné le 21 septembre la mobilisation de quelque 300.000 réservistes pour consolider justement les lignes russes en difficulté.

L’agence de presse d’Etat Ria Novosti a diffusé des images filmées de nuit de véhicules militaires russes quittant Kherson, indiquant qu’ils empruntaient le pont Antonivsky enjambant le fleuve Dniepr.

Plusieurs correspondants russes ont indiqué ensuite, images à l’appui, qu’une partie du viaduc avait été dynamitée pour entraver la progression des troupes ukrainiennes.

L’Ukraine avait pilonné des semaines durant ce pont avec son artillerie, sans pouvoir pour autant le détruire, pour couper les lignes d’approvisionnements russes et forcer Moscou au repli.

L’Ukraine avait revendiqué jeudi une douzaine de localités reprises dans la région, mais ses dirigeants, Volodymyr Zelensky en tête, s’étaient montrés ces deux derniers jours très prudents quant au repli russe, craignant une feinte.

« Réponse cynique »

La Russie a en outre continué de mener des frappes à travers l’Ukraine, dont une partie de l’infrastructure énergétique a été détruite ces dernières semaines, ce qui a entraîné des coupures d’électricité dans une large partie du pays, notamment à Kiev, la capitale.

Une frappe a encore visé dans la nuit de jeudi à vendredi Mykolaïv, cité du sud ukrainien à une centaine de kilomètres de Kherson.

Un immeuble d’habitation de cinq étages y a été entièrement détruit par une frappe qui a fait au moins sept morts, selon le chef de l’administration régionale, Vitaliï Kim. Il a dénoncé sur Telegram « une réponse cynique de l’Etat terroriste (russe) à nos succès sur le front ».

Une journaliste de l’AFP sur place a pu voir un immeuble éventré et les secours avancer dans les décombres. Une pelleteuse déblayait les décombres.

Sur le front de l’est, les combats continuent aussi de faire rage, en particulier à Bakhmout, une ville que Moscou tente de conquérir depuis l’été et le principal champ de bataille où l’armée russe, appuyée par les hommes du groupe paramilitaire Wagner, reste à l’offensive.

Par Le Point avec AFP

La peur, la mort, la fuite… La mobilisation racontée par des Russes

octobre 19, 2022

Si Vladimir Poutine a annoncé que la mobilisation controversée tirait à sa fin, la peur et la méfiance se sont installées en Russie, au terme de 8 mois de guerre.

Un couple s'embrasse.

Une femme embrasse son mari qui vient d’être recruté à Omsk, en Russie. Photo : Reuters/Alexey Malgavko

Nos conversations sont courtes et simples, mais elles vont droit au but.

-Comment ça va en Russie?

-Normal…

-Vous avez peur?

-Oui.

-De quoi?

J’attends impatiemment la suite, mais elle n’arrive pas. Je regarde les trois petits points sur mon écran de téléphone qui indique qu’Andrei (nom fictif) avec qui je cause m’écrit encore, mais ça lui prend du temps pour formuler la réponse.

Quand elle apparaît enfin quelques minutes plus tard, ses mots me glacent le sang.

Mon ami s’est tué cette semaine pour ne pas aller à la guerre.

Il n’avait que 24 ans.

Un jeune homme qui vivait à Moscou. Il a mis fin à ses jours après avoir reçu sa convocation, m’écrit froidement Andrei. Cette convocation militaire l’aurait obligé à aller au front et à se battre contre les Ukrainiens.

Il y a des hommes russes qui se cassent une jambe ou un bras pour éviter d’être conscrits. D’autres se cachent et s’enfuient, mais ce jeune de 24 ans a choisi d’en finir pour de bon.

Pourquoi souffrir? Il savait comment ça finirait pour lui, ajoute Andrei, qui m’assure que son ami ne souffrait pas de dépression au préalable.

Il m’avoue pour la première fois (depuis que la guerre a commencé) que c’est la panique à Moscou, et ce, même si Vladimir Poutine assure que la mobilisation tire à sa fin et même si le maire de Moscou, Sergueï Sobianine, a renchéri cette semaine en assurant que plus un seul Moscovite ne sera conscrit.

Les Russes se doutent bien que cette mobilisation partielle n’est peut-être que le début d’une mobilisation plus vaste, sinon générale, et bien sûr Andrei, qui est plus vieux, a peur d’être le prochain.

Il est pourtant un vrai patriote avec qui j’ai souvent discuté de la Russie. Ce pays qu’il a toujours défendu avec passion se retourne contre lui, c’est du moins ce qu’il laisse entendre dans ses missives ces jours-ci.

-Pourquoi tu ne pars pas?

-Pour aller où? Et à quoi bon, tout le monde est contre nous.

Il ne veut même plus parler de Vladimir Poutine, qui était dans un passé pas si lointain toujours au cœur de nos échanges.

Ce n’est plus important, si je soutiens Poutine ou pas. On est tous dans le même bateau qui coule. Les sanctions ne sont plus contre lui, mais contre moi et mon fils. Si les bombes tombent, ce sera sur moi et mon fils aussi.

Il tient ce discours fataliste que j’ai souvent entendu en Russie. Ce qui doit arriver arrivera. Comme si être Russe était une sorte de condamnation.

Comme des millions de ses compatriotes, Andreï goûte finalement à cette guerre qui, depuis des mois, leur apparaissait si loin, et pour certains même nécessaire, comme le prétend le Kremlin.

Mais cette opération spéciale, comme on la leur a vendue, a fini par les rattraper et les arrache désormais de leur confort et de leur sécurité.

Des réservistes survolés par un drone.

Des réservistes récemment mobilisés s’entraînent à Volgograd, en Russie. Photo : Reuters/Kirill Braga

Depuis l’annonce de la mobilisation partielle en septembre, des centaines de milliers d’hommes ont quitté la Russie pour trouver refuge dans les pays comme la Géorgie, l’Arménie, la Mongolie et le Kazakhstan.

Plusieurs hommes à qui nous avons parlé ont quitté leur famille, leurs enfants, et ont pris tout ce qu’ils avaient comme économies pour s’installer à l’étranger.

Une autre amie, Valeria (nom fictif), qui est encore en Russie avec son mari et ses enfants, m’écrivait pas plus tard que cette semaine : Elle est vraie cette guerre, on le comprend.

La dernière fois que j’ai vu Valeria en personne, c’était quelques semaines avant l’invasion au mois de février, alors que les troupes russes se massaient à la frontière de l’Ukraine.

Comme beaucoup d’autres, elle n’y croyait pas vraiment, à la possibilité d’une guerre. Même quand les bombes ont commencé à pleuvoir sur l’Ukraine, elle doutait de l’étendue des dégâts. On ne sait pas vraiment ce qui se passe, me disait-elle, toujours craintive de critiquer le régime, surtout devant une journaliste étrangère. Elle s’en tenait à des généralités pour exprimer son désarroi.

Aujourd’hui, elle m’écrit que la guerre est vraie et douloureuse, parce qu’elle risque de lui prendre son mari, et le père de ses enfants.

Il préfère aller en prison que d’aller à la guerre, il nous a prévenus, m’écrit-elle.

Elle m’explique qu’il limite ses déplacements en ville de peur d’être arrêté à la sortie de la maison ou devant une bouche de métro par les recruteurs de l’armée.

Un panneau de nuit dans la ville.

Un nouveau panneau publicitaire fait la promotion de l’armée à Moscou. Photo : Reuters/Evegenia Novozhenina

L’armée mandate désormais des hommes et des femmes à l’échelle du pays qui vont de porte en porte pour livrer les avis de convocation en personne aux futurs combattants.

Parfois, ce sont des enseignants ou des policiers locaux qui distribuent les avis, m’explique une amie journaliste russe qui prépare un documentaire sur la guerre telle que la vit son peuple. Dans le déni ou dans la peur.

Sur 20 appartements, il n’y en a qu’un seul où quelqu’un répond à la porte, me dit-elle, les hommes se cachent.

Elle vit en banlieue de Moscou et passe aussi des heures à filmer devant les bureaux de recrutement du ministère de la Défense. Les réservistes qui s’y présentent, papiers en main, n’ont souvent aucune espèce d’idée de la mission qu’on leur confie de force, ne serait-ce qu’ils s’en vont remplir les rangs d’une armée de terre qui est en déroute.

Devant un bureau de l’armée à Strogino, un jeune venu s’enrôler lui a dit qu’il a répondu à l’appel parce qu’il est endetté et qu’on lui a promis un congé sur les paiements de ses prêts bancaires.

Des personnes devant un bureau de recrutement.

Des hommes récemment mobilisés quittent leur famille à Moscou. Le maire a annoncé que la mobilisation est terminée pour le moment dans la capitale. Photo : Reuters/Fournie à Reuters

Puis elle me raconte l’histoire de Vlad et Katia, un couple dans la vingtaine qu’elle vient de filmer, et qui a dépensé 100 000 roubles (environ 2000 $) pour équiper Vlad d’un sac de couchage et de l’équipement nécessaire pour survivre au combat.

Les vidéos qui circulent sur les réseaux sociaux montrent des recrues qui se plaignent des conditions dans lesquelles ils sont envoyés à la guerre, sans nourriture ni médicaments. Beaucoup affirment avoir de la fièvre après avoir passé des jours sous la pluie.

Katia a supplié Vlad de se cacher, mais raconte qu’il n’a pas pu échapper à la mobilisation. Il ne sait pas où on l’emmène et combien de temps il aura pour s’entraîner avant d’être officiellement déployé au front.

Katia pleure alors qu’elle s’apprête à lui dire au revoir.

Ils savent tous les deux que sur des milliers de conscrits déjà envoyés à la guerre, des dizaines sont déjà revenus en Russie dans des cercueils.

Vlad et ses nouveaux compagnons d’armes qui se préparent à monter dans un autobus bleu ont eu droit à un sermon sur l’importance de cette guerre pour vaincre les nazis en Ukraine ainsi que pour préserver les valeurs conservatrices.

Puis un prêtre les a aspergés d’eau bénite. Et ils sont partis.

Un prêtre porte une croix au front d'un homme.

Un prêtre bénit des réservistes à Bataysk, en Russie. Photo : Reuters/Sergey Pivarov

Si la promesse du maire de Moscou est tenue, ces bureaux de recrutement seront fermés sous peu dans la capitale, si ce n’est pas déjà le cas.

Mais dans le reste de la Russie, la mobilisation continue et le Kremlin confirme aujourd’hui que Vladimir Poutine n’en a pas encore décrété la fin.

Avec Radio-Canada

Tamara Alteresco

par Tamara Alteresco

Des Russes fuyant la mobilisation militaire bloqués par les délais d’immigration canadiens

octobre 1, 2022
Un égoportrait de Pavel Slinkov-Albul et de sa femme.

Pavel Slinkov-Albul et sa femme attendent le traitement de leur demande de visa d’études par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada depuis plus de six mois. Photo : Fournie par Pavel Slinkov-Albul

Les longs délais dans le traitement des demandes d’immigration au Canada font craindre le pire à certains Russes qui cherchent à fuir la mobilisation militaire dans leur pays. Pendant que les convocations se multiplient partout en Russie, des hommes dont le dossier est en traitement depuis parfois plus d’un an craignent d’être forcés d’aller combattre en Ukraine.

Pavel Slinkov-Albul se souvient très bien du jour où Vladimir Poutine a annoncé la mobilisation de centaines de milliers de réservistes russes. Le père de famille de 35 ans venait de partir en voyage d’affaires. Dès que son avion a atterri, les messages textes ont commencé à retentir sur l’écran de son téléphone.

Même s’il y avait déjà des rumeurs concernant la mobilisation, nous étions tous sous le choc, se rappelle-t-il.

Le 21 septembre, le président russe, Vladimir Poutine, a annoncé une mobilisation partielle visant 300 000 jeunes réservistes pour combattre en Ukraine. Selon le média indépendant russophone Meduza, les autorités russes envisagent plutôt de conscrire 1,2 million de personnes.

Depuis, des centaines de milliers de personnes ont fui vers des pays voisins, comme la Géorgie, l’Arménie ou encore le Kazakhstan. Contrairement à elles, Pavel Slinkov-Albul, lui, n’a pas les moyens de quitter son pays et son emploi.

Un groupe de jeunes hommes marchent sur une route en Géorgie.

Un jeune homme fuit la Russie pour la Géorgie. Photo : Radio-Canada/Dimitri Bitsuleiman

Depuis l’annonce de la mobilisation, il vit donc dans la crainte de recevoir une convocation de l’armée. Il n’est pas un réserviste et n’a pas d’expérience militaire, mais il soutient que personne n’est à l’abri. Les autorités russes ont d’ailleurs admis, cette semaine, que de nombreux hommes censés être exemptés ont été convoqués.

J’ai peur pour mon avenir. J’ai peur d’aller en prison et que l’État détruise ma vie, raconte l’homme, qui affirme être prêt à aller en prison pour éviter d’être envoyé en Ukraine.

Son seul espoir est l’obtention de son visa d’études canadien, qu’il attend depuis le début du mois de février. Il a communiqué avec le gouvernement canadien, mais ignore toujours quand le traitement de son dossier sera réglé.

« J’ai très peu d’espoir. »— Une citation de  Pavel Slinkov-Albul

Pas un cas isolé

L’avocat spécialisé en immigration Lev Abramovich, de Toronto, dit avoir été contacté par de nombreux Russes dans la situation de Pavel Slinkov-Albul depuis le début du conflit.

Certains de ses clients attendent depuis plus d’un an. C’est le cas de Mariia, une ingénieure qui vit à Moscou. Elle a soumis une demande de visa d’études pour faire son doctorat à l’Université McMaster, à Hamilton, en Ontario, en septembre 2021. Son conjoint, lui, espère obtenir un permis de travail pour l’accompagner.

C’est injuste parce que nous souffrons aussi en raison de cette situation. Nous ne voulons pas être des réfugiés. Nous voulons contribuer [à la société canadienne], mais nous ne pouvons pas le faire parce que notre dossier est en attente, déplore-t-elle.

La jeune femme assure que son conjoint et elle feront tout pour éviter l’armée.

J’étais très jeune à l’époque, mais j’ai vu les soldats revenir d’Afghanistan. Ces gens souffrent toute leur vie, dit Mariia, qui craint que son conjoint subisse le même sort.

Dans une déclaration par courriel, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) explique que bon nombre des perturbations engendrées par la pandémie de COVID‑19 ont été résolues, mais que l’agence est toujours aux prises avec de multiples défis.

Cela s’est traduit par une importante accumulation de demandes à traiter au cours des 18 premiers mois de la pandémie et par une augmentation des délais de traitement, affirme l’agent en communications d’IRCC Jeffrey MacDonald.

Il ajoute qu’IRCC doit répondre à un nombre record de demandes de visa de résidence temporaire. Par exemple, l’agence dit avoir traité près de 560 000 demandes initiales de permis d’études en 2021, ce qui représente une hausse de 31 % par rapport au record établi en 2019.

Selon Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, le traitement complet de la plupart des demandes de visa d’études pour les citoyens russes est de 13 semaines, contre 15 pour un visa de travail.

Un système archaïque

Lev Abramovich affirme quant à lui que les retards d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada datent d’avant la pandémie.

Il qualifie le fonctionnement de l’agence fédérale d’archaïque et soutient qu’elle doit être réformée et faire preuve de plus de transparence.

IRCC s’appuie sur des consulats pour faire le travail dont le niveau de compétence et la capacité opérationnelle varient, explique l’avocat, en ajoutant que les délais de traitement des dossiers varient d’un consulat à un autre.

Il souligne que les demandes de visa des citoyens russes sont pour leur part gérées au bureau de Varsovie, qui priorise actuellement les dossiers des réfugiés ukrainiens.

C’est tout à fait normal, mais les dossiers des citoyens russes devraient être transférés ailleurs.

Des gens pleurent ou s'essuient les yeux dans la ville de Volzhsky, dans la région de Volgograd, en Russie.

Des parents et des connaissances de réservistes russes pleurent le départ de leurs proches dans la ville de Volzhsky, dans la région de Volgograd, en Russie, à la suite de la mobilisation partielle ordonnée par Vladimir Poutine. Photo : Reuters/Stringer

« La situation est extrêmement urgente. »— Une citation de  Lev Abramovich, avocat spécialisé en immigration

Il ajoute que ceux qui ont trouvé refuge dans des pays voisins, comme la Turquie, l’Arménie ou encore la Géorgie, ont souvent des statuts temporaires qui les rendent vulnérables.

De la chair à canon

Réfugié en Géorgie avec sa femme et son fils depuis février, Anton Chernyshev a récemment appris que les autorités russes se sont déjà présentées à son ancienne adresse pour le conscrire.

Mais pour lui, qui a fait son service militaire obligatoire, retourner dans l’armée russe est impensable.

Il s’inquiète du sort des nouvelles recrues sur le champ de bataille et craint les sévices qu’elles pourraient subir aux mains de leurs frères d’armes.

Un égoportrait d'Anton Chernyshev devant la mer.

Anton Chernyshev a trouvé refuge en Géorgie avec sa famille. Il craint d’être contraint à aller se battre en Ukraine s’il retourne dans son pays. Photo : Radio-Canada/Fournie par Anton Chernyshev

« Ils vont être considérés comme de la viande fraîche, littéralement. »— Une citation de  Anton Chernyshev

Le père de famille fait référence à la dedovshchina, une forme de bizutage institutionnalisé extrêmement brutal, qui s’accompagne généralement de sévices physiques et psychologiques et dont sont souvent victimes les nouvelles recrues.

Lorsque les soldats qui se battent déjà là-bas vont les voir arriver, ils vont leur faire subir toute leur colère et les choses terribles dont ils ont été témoins, déplore le trentenaire.

L’armée ne s’est pas modernisée. Elle demeure très semblable à ce qu’elle était au temps de l’Union soviétique. [Les nouvelles recrues] vont être utilisées comme de la chair à canon. Je doute qu’elles reçoivent une quelconque formation militaire, surtout celles qui n’ont pas d’expérience, ajoute le journaliste russe Yevgeny Kiselyov.

Anton Chernyshev espère que sa demande de visa en tant que travailleur spécialisé sera acceptée par le Canada, mais il attend déjà depuis plus d’un an et demi.

J’ai réalisé que, dans mon pays, je ne suis pas vu comme une personne, mais comme une chose qu’on peut envoyer à la guerre pour assouvir les ambitions de quelqu’un, dit-il.

Radio-Canada par Andréane Williams