Une cérémonie solennelle s’est tenue ce samedi dans la ville où habitait l’enseignant assassiné par un terroriste pour avoir montré des dessins de « Charlie Hebdo ».

« La liberté commence où l’ignorance finit », peut-on lire sur le gymnase municipal d’Éragny-sur-Oise qui accueillait ce samedi une cérémonie en l’hommage de Samuel Paty, l’enseignant décapité l’an dernier par un jeune terroriste islamiste tchétchène. Le rassemblement particulièrement émouvant s’est tenu en présence du fils du professeur martyr et de son ex-compagne, mais en l’absence de ses parents.
Samuel Paty rentrait chez lui à Éragny quand il a croisé le chemin de l’assassin. Le tueur avait été aidé – involontairement certes – par quelques élèves qui lui avaient désigné le prof d’histoire-géo comme étant celui mis en cause par des musulmans radicaux pour avoir montré à ses élèves les caricatures du prophète Mahomet parues dans Charlie Hebdo. C’est en raison de l’implication de tant de jeunes dans cette tragédie que le maire Thibaut Humbert a tenu à associer la jeunesse à cet hommage. « En direction de la jeunesse, nous avons sollicité leurs représentants dans la Ville afin qu’ils ouvrent la cérémonie ». Des adolescents ont débuté cette matinée en lisant leurs travaux sur la liberté d’expression. Quelques minutes auparavant, le maire remettait la médaille de la Ville à un Éragnien rescapé de l’attentat du Bataclan. Blessé, il a perdu deux de ses amis. Il vit à 500 mètres du lieu de l’assassinat de Samuel Paty.
Parmi les invités, des représentants du culte musulman ont tenu à montrer leur solidarité avec la famille des victimes et la Nation entière : « On est présents. C’est une évidence », affirme le Conseil régional du culte musulman. Dans la foule, trois femmes voilées font l’objet de sollicitations médiatiques. « Ceux qui commettent les attentats ne sont pas de vrais musulmans, répète en boucle une jeune femme. On nous regarde bizarrement. À l’entrée, j’ai hésité puis les gens à l’accueil m’ont invitée à entrer. »
Les Éragniens tenaient à rendre hommage à Samuel Paty, car l’an dernier la recrudescence de la pandémie de Covid les avait empêchés de descendre dans la rue. Les élus du département se sont tous déplacés, maires, sénateurs, députés ainsi que Valérie Pécresse, présidente du conseil régional. La candidate à la présidentielle a préconisé l’union derrière les enseignants menacés ou intimidés : « L’ensemble des enseignants doit savoir que nous sommes derrière eux », a-t-elle affirmé.
« Une cérémonie émouvante qui nous rappelle que le combat contre le terrorisme islamiste doit être mené dans l’unité nationale », explique Naïma Moutchou, la députée LREM du Val d’Oise. L’ancien ministre de la Défense, Alain Richard, aujourd’hui sénateur, s’est lui voulu optimiste : « La France est une Nation robuste. Elle a une grande capacité de résistance. » Un anonyme tenant une fleur à la main confie : « À chaque fois, en regardant la télé, on se dit que c’est la dernière fois. Puis le terrorisme vient en bas de chez vous. Vous passez à la télé. En espérant que c’est la dernière fois que des gens meurent. Là, c’est un professeur de collège. Après, une policière à Rambouillet. Nous sommes traumatisés. Il faut que ça s’arrête. »
Avec Le Point par Aziz Zemouri à Eragny (Val d’Oise)