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Lutter contre le financement du terrorisme : plus que jamais !

juillet 18, 2022

Le 15 juillet 2022, une nouvelle fois, les groupes terroristes sahéliens ont frappé le Mali et le Burkina Faso. Pour lutter contre l’extension de ces mouvements au Bénin, au Sénégal, au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire ou encore au Togo, il faut d’abord comprendre comment ils sont financés.

Un soldat malien prend la pose, à Konna le 20 mars 2021. © Michele Cattani/AFP

Il existe plusieurs types de groupuscules terroristes en Afrique de l’Ouest. D’abord, des franchises d’organisations internationales, comme l’État islamique ou Al-Qaïda, qui sont financées, d’un point de vue « monétaire », mais aussi en termes de capacités, de compétences, de logistique par la « maison mère ». On trouve également des groupes qui se financent de toutes sortes de trafics. Il faut savoir que la zone sahélienne est très vaste, avec une faible empreinte étatique. Les grands couloirs de trafics (drogues, armes, contrebande de marchandises, trafic illicite de migrants, traite de personnes, fraude aux nouveaux moyens de paiement et cybercriminalité) se sont développés il y a une dizaine d’années.

En outre, quelques zones minières existent au Mali, au Burkina Faso ou au Sénégal, dans lesquelles les groupes terroristes étendent leur contrôle et prélèvent des ressources sur ces activités, qu’il s’agisse du rançonnement des entreprises, de prélèvements sur les gains des extracteurs ou du responsable du site en échange de sécurité, voire d’une implication dans la commercialisation du minerai. Pour finir, certains groupes terroristes prélèvent de l’argent sur les populations. Plusieurs témoignages évoquent également des taxes imposées aux éleveurs du centre du Mali sur la frontière entre le Mali et le Niger ou encore dans la région du lac Tchad.

Addition terrorisme et corruption

Il est à préciser également que l’addition terrorisme et corruption est possible. Il est impossible de comprendre le financement des mouvements terroristes d’Afrique de l’Ouest sans montrer du doigt la corruption de certains États et de leurs armées. À titre d’exemple, de nombreux rapports font état des financements de Boko Haram par le gouverneur de l’État de Borno de 2003 à 2011, qui souhaitait gagner les élections régionales de 2013 avec le soutien du groupuscule de Muhamed Yusuf, à qui il avait faussement promis de renforcer le domaine d’application de la charia.

Des solutions doivent donc être trouvées par les gouvernements pour lutter efficacement contre le terrorisme.

Il semble primordial de demander davantage de contrôles sur les financements du terrorisme, notamment sur l’utilisation des cartes prépayées. Il est impératif de former les salariés sur ces sujets, et notamment la fraude documentaire. Par ailleurs, l’absence de traçabilité des ressources qui financent l’activité aurifère et de celles qui découlent de la commercialisation de l’or alimente les risques de financement du terrorisme. Un assujettissement des sociétés aurifères à la LCB-FT (Lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme) semble indispensable pour vaincre le terrorisme.

Il semble également indispensable d’amplifier la coopération internationale avec des pays comme Israël, les Émirats arabes unis, le Qatar, la Turquie ou l’Arabie saoudite dans l’échange d’informations et le partage des meilleures pratiques. Cela peut passer par des séminaires, des symposiums ou des formations entre les différents partenaires. Il faut également mettre l’accent sur les capacités intrinsèques des États, à travers une plus grande mobilisation des citoyens, une gouvernance plus responsable, plus honnête et plus visionnaire, un fonctionnement politique qui puisse davantage satisfaire les populations.

Pour finir, il serait utopique de penser que la fin du terrorisme est pour bientôt. Cependant, les actes terroristes pourront diminuer si les autorités s’attaquent aux sources de la propagande des mouvements extrémistes et au financement du terrorisme. Ce qui impose la surveillance des signaux faibles, sans intrusion exagérée pour respecter la réglementation de la protection des données, d’autant plus que certains moyens de transfert d’argent sont totalement légitimes. L’utilisation de l’intelligence artificielle pourrait permettre de repérer certaines opérations bancaires atypiques servant pour financer le terrorisme.

Avec Jeune Afrique

Julien Briot-Hadar

Par Julien Briot-Hadar

Économiste français, expert en conformité aux normes des entreprises et spécialiste des questions de fraude fiscale

Au Sénégal, Macky Sall ressuscite le poste de Premier ministre

novembre 25, 2021
Le président sénégalais Macky Sall salue ses partisans après avoir voté pour la présidentielle à Fatick, le 24 février 2019. © SEYLLOU/AFP

Supprimé au lendemain de la réélection de Macky Sall, en février 2019, le poste de Premier ministre vient de faire sa réapparition au Sénégal. Reste à savoir qui en héritera.

« Monsieur le Président de la République a promulgué ce jour la loi constitutionnelle portant suppression du poste de Premier ministre ». Le 14 mai 2019, quelques semaines après avoir été réélu au premier tour de la présidentielle (avec 58,26 %), Macky Sall annonçait cette réforme controversée, entérinée par l’Assemblée nationale quelques jours plus tôt : il se passerait désormais de Premier ministre et piloterait en solo l’action du gouvernement.

En guise d’explication, un slogan anglo-saxon : « fast-track ». « Quand on aspire à l’émergence et qu’on est tenu par l’impératif du résultat, l’urgence des tâches à accomplir requiert de la diligence dans le travail. Ce qui doit être fait aujourd’hui ne peut être remis à demain. Voilà le cap que j’entends fixer aux équipes qui m’accompagneront dans ce nouvel élan de réformes transformatives », se justifiait alors Macky Sall.

Diligence

Censée améliorer cette volonté de réformes énergiques, la suppression du poste de Premier ministre avait été entérinée par une large majorité de députés, même si les détracteurs du chef de l’État avaient alors fait valoir qu’elle n’avait pas été annoncée par Macky Sall avant sa réélection – dès le premier tour -, en février 2019.

Dix-neuf mois plus tard, celui-ci a donc changé son fusil d’épaule. Ce 24 novembre, peu avant de quitter le Sénégal pour la République démocratique du Congo (RDC), où il doit notamment préparer la transition à la présidence de l’Union africaine (UA) avec son homologue Félix Tshisekedi, Macky Sall a en effet informé son gouvernement qu’il revenait sur ses pas et comptait ressusciter la fonction de Premier ministre.

Révision

« Le Président de la République a par ailleurs informé le Conseil de sa volonté d’initier une révision de la Constitution en vue de l’instauration du poste de Premier ministre, peut-on lire dans le communiqué officiel du Conseil des ministres en date du 24 novembre. Cette restauration, qui vient ainsi adapter l’organisation du pouvoir exécutif à un nouvel environnement économique et sociopolitique, s’accompagne d’une nécessaire requalification des rapports entre l’exécutif et le législatif, notamment la réintroduction de la responsabilité du gouvernement devant l’Assemblée nationale et le pouvoir de dissolution de celle-ci, dévolu au Président de la République. »

Un retour à la situation antérieure donc, dans le cadre d’une réforme qui sera soumise à l’Assemblée nationale en procédure d’urgence au cours des prochains jours, et dont l’adoption ne devrait être qu’une formalité.

Reste à savoir à quelle échéance le prochain Premier ministre prendra ses fonctions et, surtout, qui sera l’heureux élu.

Selon nos informations, Amadou Ba, ministre de l’Économie et des Finances de 2013 à 2019 puis des Affaires étrangères jusqu’au remaniement du 1er novembre 2020, semble en pole position. Mais Amadou Hott, devenu ministre de l’Économie, du Plan et de la Coopération internationale en 2019, est également évoqué comme un possible candidat.

Avec Jeune Afrique par Medhi Ba