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Burkina : Paul-Henri Sandaogo Damiba en exil au Togo

octobre 3, 2022

Le gouvernement togolais a confirmé, lundi 3 octobre, qu’il avait accueilli le chef de la junte burkinabè pour préserver « la paix ». Damiba a été contraint à la démission hier matin, après le coup de force du capitaine Traoré et de ses hommes.

Le lieutenant-colonel de Paul-Henri Sandaogo Damiba à sa cérémonie d’investiture en tant que président de la transition, à Ouagadougou, le 2 mars 2022 © OLYMPIA DE MAISMONT / AFP

Le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba se trouve au Togo dans l’esprit de l’engagement du pays « à la paix dans la sous-région », a déclaré ce lundi 3 octobre le ministre togolais de la Communication et porte-parole du gouvernement, Akodah Ayewouadan. « Le Togo, comme la Cedeao, salue le fait que l’esprit de paix l’ait emporté », a-t-il ajouté. L’accueil de « Paul-Henri Damiba fait partie de cet esprit ».

Après 48 heures de confusion et de tractation, le président de la transition burkinabè a finalement accepté de démissionner hier matin. Lors de la médiation menée par les chefs religieux et traditionnels, les corps de l’armée s’étaient finalement rangés du côté d’Ibrahim Traoré et de ses hommes, qui ont pris la tête du putsch.

Médiation

Depuis que les premiers coups de feu ont retenti le 30 septembre au matin, le lieutenant-colonel Damiba, lui-même arrivé au pouvoir par un coup d’État en janvier dernier, était demeuré invisible. Il ne s’était pas rendu sur les lieux où se déroulaient les négociations.

Samedi 1er octobre, à la RTB, Ibrahim Traoré avait affirmé que Damiba s’était réfugié à une trentaine de kilomètres de la capitale, « au sein de la base française de Kamboinsin ». Et d’ajouter : « Il est en mesure de planifier une contre-offensive afin de semer le trouble au sein de nos forces de défense et de sécurité. » Des allégations vivement démenties par la France. En effet, selon nos informations, Damiba se trouvait alors toujours à Ouagadougou, mais ces déclarations avaient suscité des manifestations demandant le départ du président de la transition.

La Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) a salué les différentes parties burkinabè pour « avoir accepté un règlement pacifique de leurs différends », et annoncé l’envoi d’une délégation à Ouagadougou dès ce lundi 3 octobre.

Par Jeune Afrique (avec AFP)

Mali : Bamako souligne ses « avancées » démocratiques et demande la levée des dernières sanctions

septembre 7, 2022

À Lomé, le chef de la diplomatie malienne a insisté sur les progrès accomplis dans le sens d’un retour des civils au pouvoir, tout en martelant une nouvelle fois le discours d’une souveraineté recouvrée.

Faure Gnassingbé (dr.), le président du Togo, reçoit Abdoulaye Diop, le ministre malien des Affaires étrangères, à Lomé, le 6 septembre 2022. © Twitter / Abdoulaye Diop

C’est depuis Lomé que le Mali a demandé, mardi 6 septembre, la levée des sanctions imposées par les organisations africaines après deux coups d’État militaires en deux ans. Le ministre malien des Affaires étrangères a tenu à souligner les progrès accomplis par son gouvernement sur la voie d’un retour des civils au pouvoir. « L’une des priorités majeures du gouvernement de transition reste l’organisation d’élections libres, transparentes et crédibles en vue du retour à un ordre constitutionnel apaisé et sécurisé dans le délai de 24 mois [à compter de mars 2022] », a déclaré Abdoulaye Diop devant un groupe ad-hoc créé par l’Union africaine en 2020, après le premier putsch des colonels maliens.

La date d’un retour des civils au pouvoir dans un Mali en proie à une grave crise sécuritaire et politique a donné lieu, depuis le premier coup d’État d’août 2020, à deux années de confrontation entre le Mali, ses voisins ouest-africains et une partie de la communauté internationale.

L’Union africaine (UA) et la Cedeao l’ont suspendu une première fois après le putsch d’août 2020 au terme duquel Ibrahim Boubacar Keïta a été renversé, puis à nouveau après un second coup de force renforçant la mainmise des colonels en mai 2021. Les tensions se sont atténuées quand les militaires se sont engagés, sous la pression, à organiser des élections en février 2024. La Cedeao a alors levé les sévères sanctions financières et commerciales infligées en janvier 2022.

« Normalisation progressive »

Mais la suspension du Mali des organisations africaines est restée en vigueur, de même que des sanctions individuelles prises par la Cedeao fin 2021 contre quelque 150 membres de la junte. Pourtant, « les avancées indéniables » réalisées par le gouvernement malien plaident pour une levée de la suspension de l’UA, a estimé Abdoulaye Diop.

Concernant la Cedeao, le chef de la diplomatie malienne a salué une « normalisation progressive » tout en qualifiant les sanctions encore en vigueur d’ « entraves ». « Le gouvernement du Mali demande la levée de ces mesures afin de favoriser une pleine coopération avec tous les partenaires », a-t-il dit devant le groupe de suivi et de soutien à la transition au Mali.

Depuis 2021, les autorités maliennes se sont détournées de la France et de ses alliés, et tournées vers la Russie. Les relations se sont aussi compliquées avec la mission de l’ONU au Mali (Minusma) et, plus récemment, le voisin ivoirien après l’interpellation mi-juillet à Bamako de 49 soldats ivoiriens.

Ces derniers devaient, selon Abidjan et la Minusma, participer à la sécurité du contingent allemand de la Minusma, suivant des dispositions onusiennes permettant aux Casques bleus de faire appel à des prestataires extérieurs pour des appuis logistiques. Mais Bamako a présenté les Ivoiriens comme des mercenaires (trois d’entre eux – des femmes – ont fini par être libérés ce week-end). La junte est-elle même accusée de s’être assuré les services de mercenaires russes.

À Lomé, Abdoulaye Diop a martelé une fois de plus le discours d’une souveraineté recouvrée et assuré que le Mali n’était pas isolé. Le Mali est ouvert « à tous les partenariats », mais il « n’acceptera pas qu’on puisse nous imposer des agendas, qu’on puisse nous imposer notre propre agenda, nos priorités [et des] diktats », a-t-il dit.

Par Jeune Afrique (Avec AFP)

Togo : Faure Essozimna Gnassingbé face au péril jihadiste

août 3, 2022

À la mi-juillet, des attaques d’une ampleur inédite ont frappé le pays, qui tente depuis de revoir son dispositif sécuritaire pour contenir la menace venue du Nord.

Faure Essozimma Gnassingbé lors d’une réunion avec la population à Dapaong. © Emmanuel Pita.

Ce 15 juillet, Faure Essozimna Gnassingbé assiste à un combat de lutte traditionnelle Evala dans sa ville natale de Kara lorsque, au milieu de la bataille, il doit se précipiter sur un autre front. Le président est attendu à Mandouri, dans la région des Savanes, frontalière avec le Burkina Faso, pour constater les dégâts d’une nouvelle attaque menée durant la nuit précédente par des groupes armés.

Sur place, des éléments des forces de défense et de sécurité déployés dans la zone rendent compte au chef de l’État de ces heures qui ont fait une vingtaine de morts. « En ces moments d’affliction, je réaffirme ma détermination à lutter contre le terrorisme, afin de protéger nos populations et garantir la paix et la quiétude », déclare-t-il alors. Face au péril jihadiste qui ne cesse de se faire plus pressant, le président joue la carte de la proximité et du patriotisme.

Dialogue

Juste après l’attaque, le 18 juillet, Faure Essozimna Gnassingbé a convié une quinzaine de ministres, notamment le général Yark Damehane (Sécurité et Protection civile), Essozimna Marguerite Gnakadè (Armées) et Sani Yaya (Économie et Finances), autour de la Première ministre Victoire Tomégah-Dogbé pour une série d’échanges avec les différentes couches sociales de la région des Savanes. Avant de présider lui-même un dialogue à Dapaong.

Sous une tente, debout et d’un ton rassurant, il s’est fait chef de guerre et à appeler à une alliance nationale face aux terroristes. « Le pire n’est jamais sûr dans ce domaine », a-t-il clamé. « Aucune mort, aucune vie n’est banale. Pour nous, c’est un drame, une tragédie, des morts de trop », a-t-il poursuivi.

Coopération avec les pays voisins

Alors que les groupes armés frappent de plus en plus les pays côtiers, le gouvernement vient d’annoncer des mesures urgentes dans certaines préfectures ou cantons de la région du Nord. Le bataillon d’intervention rapide (BIR) de Sokodé a été déplacé vers une base de Dapaong et a été pourvu de drones d’attaques turcs TB2, quand certains postes avancés ont vu leurs effectifs renforcés. Une coopération accrue avec le Burkina Faso et le Ghana en matière de renseignement a également été mise en place.

Le chef d’état-major togolais, le général Dadja Maganawé, a assuré que rien ne saurait faire fléchir l’armée, déterminée « à poursuivre la mission de défense du territoire ». Reste à savoir si elle peut réussir à éliminer une menace que les autres pays confrontés au même péril ont bien du mal à contenir.

Avec Jeune Afrique par Charles Djade – à Lomé

Lutter contre le financement du terrorisme : plus que jamais !

juillet 18, 2022

Le 15 juillet 2022, une nouvelle fois, les groupes terroristes sahéliens ont frappé le Mali et le Burkina Faso. Pour lutter contre l’extension de ces mouvements au Bénin, au Sénégal, au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire ou encore au Togo, il faut d’abord comprendre comment ils sont financés.

Un soldat malien prend la pose, à Konna le 20 mars 2021. © Michele Cattani/AFP

Il existe plusieurs types de groupuscules terroristes en Afrique de l’Ouest. D’abord, des franchises d’organisations internationales, comme l’État islamique ou Al-Qaïda, qui sont financées, d’un point de vue « monétaire », mais aussi en termes de capacités, de compétences, de logistique par la « maison mère ». On trouve également des groupes qui se financent de toutes sortes de trafics. Il faut savoir que la zone sahélienne est très vaste, avec une faible empreinte étatique. Les grands couloirs de trafics (drogues, armes, contrebande de marchandises, trafic illicite de migrants, traite de personnes, fraude aux nouveaux moyens de paiement et cybercriminalité) se sont développés il y a une dizaine d’années.

En outre, quelques zones minières existent au Mali, au Burkina Faso ou au Sénégal, dans lesquelles les groupes terroristes étendent leur contrôle et prélèvent des ressources sur ces activités, qu’il s’agisse du rançonnement des entreprises, de prélèvements sur les gains des extracteurs ou du responsable du site en échange de sécurité, voire d’une implication dans la commercialisation du minerai. Pour finir, certains groupes terroristes prélèvent de l’argent sur les populations. Plusieurs témoignages évoquent également des taxes imposées aux éleveurs du centre du Mali sur la frontière entre le Mali et le Niger ou encore dans la région du lac Tchad.

Addition terrorisme et corruption

Il est à préciser également que l’addition terrorisme et corruption est possible. Il est impossible de comprendre le financement des mouvements terroristes d’Afrique de l’Ouest sans montrer du doigt la corruption de certains États et de leurs armées. À titre d’exemple, de nombreux rapports font état des financements de Boko Haram par le gouverneur de l’État de Borno de 2003 à 2011, qui souhaitait gagner les élections régionales de 2013 avec le soutien du groupuscule de Muhamed Yusuf, à qui il avait faussement promis de renforcer le domaine d’application de la charia.

Des solutions doivent donc être trouvées par les gouvernements pour lutter efficacement contre le terrorisme.

Il semble primordial de demander davantage de contrôles sur les financements du terrorisme, notamment sur l’utilisation des cartes prépayées. Il est impératif de former les salariés sur ces sujets, et notamment la fraude documentaire. Par ailleurs, l’absence de traçabilité des ressources qui financent l’activité aurifère et de celles qui découlent de la commercialisation de l’or alimente les risques de financement du terrorisme. Un assujettissement des sociétés aurifères à la LCB-FT (Lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme) semble indispensable pour vaincre le terrorisme.

Il semble également indispensable d’amplifier la coopération internationale avec des pays comme Israël, les Émirats arabes unis, le Qatar, la Turquie ou l’Arabie saoudite dans l’échange d’informations et le partage des meilleures pratiques. Cela peut passer par des séminaires, des symposiums ou des formations entre les différents partenaires. Il faut également mettre l’accent sur les capacités intrinsèques des États, à travers une plus grande mobilisation des citoyens, une gouvernance plus responsable, plus honnête et plus visionnaire, un fonctionnement politique qui puisse davantage satisfaire les populations.

Pour finir, il serait utopique de penser que la fin du terrorisme est pour bientôt. Cependant, les actes terroristes pourront diminuer si les autorités s’attaquent aux sources de la propagande des mouvements extrémistes et au financement du terrorisme. Ce qui impose la surveillance des signaux faibles, sans intrusion exagérée pour respecter la réglementation de la protection des données, d’autant plus que certains moyens de transfert d’argent sont totalement légitimes. L’utilisation de l’intelligence artificielle pourrait permettre de repérer certaines opérations bancaires atypiques servant pour financer le terrorisme.

Avec Jeune Afrique

Julien Briot-Hadar

Par Julien Briot-Hadar

Économiste français, expert en conformité aux normes des entreprises et spécialiste des questions de fraude fiscale

Le Togo subit sa première attaque jihadiste meurtrière

mai 11, 2022

Un détachement militaire situé non loin de la frontière burkinabè a été pris pour cible dans la nuit du 10 au 11 mai. Huit soldats ont été tués, selon le gouvernement.

Des soldats togolais en patrouille dans le village de Namoundjoga, au nord du pays, le 17 février 2020. © PIUS UTOMI EKPEI/AFP.

Sans doute n’était-ce qu’une question de temps, tant les pays de la sous-région sont, un à un, pris pour cible par les groupes terroristes qui sévissent dans celle-ci. Dans la nuit du 10 au 11 mai, aux environs de 3 h du matin, un poste militaire situé dans la localité de Kpékpakandi, non loin de la frontière avec le Burkina Faso, a été attaqué. Pour la première fois, des victimes sont à déplorer dans les rangs de l’armée.

Selon nos informations, les assaillants lourdement armés sont arrivés par dizaines, juchés sur des motos, et ont ouvert le feu sur les militaires togolais. S’est ensuivi un échange de tirs mais, l’effet de surprise jouant en leur faveur, ils sont parvenus à prendre le contrôle du poste. Des images montrant la violence des combats circulent déjà sur les réseaux sociaux, à l’instar de celles où l’on voit un pick-up incendié et un soldat blessé pris en chasse.

Attaque complexe et coordonnée

Dans un communiqué publié ce 11 mai dans l’après-midi, les autorités togolaises ont dénoncé une « attaque lâche et barbare », dans laquelle huit soldats ont été tués et treize autres blessés. Elles ont appelé « la population des localités concernées à une vigilance accrue et à ne pas céder à la panique », tout en les invitant « à collaborer étroitement avec les forces de défense et de sécurité ».

L’assaut n’a pas été revendiqué mais ressemble fort à ceux perpétrés par des groupes jihadistes dans le nord de la Côte d’Ivoire ou du Bénin. Sous le couvert de l’anonymat, l’une de nos sources au sein du pouvoir décrit une attaque « complexe et coordonnée ». Elle en veut pour preuve l’embuscade dans laquelle sont tombés les renforts de l’armée, après avoir été victimes d’un engin explosif improvisé sur la route.

attaque Togo frontière Burkinanuit du 10 au 11 mai 2022© DR attaque Togo frontière Burkina
nuit du 10 au 11 mai 2022
© DR
attaque Togo frontière Burkinanuit du 10 au 11 mai 2022© DR attaque Togo frontière Burkina nuit du 10 au 11 mai 2022 © DR

En novembre, une position de l’armée avait été attaquée dans cette même région, mais les assaillants avaient pu être repoussés sans que des dégâts matériels ou humains ne soient à déplorer.
Le poste militaire attaqué ce 11 mai fait partie du dispositif de l’opération Koundjouaré, censée sécuriser les frontières et prévenir une éventuelle infiltration jihadiste.

Avec Jeune Afrique par Nadoun Coulibaly

Togo : le parti de Faure Gnassingbé, dix ans et peu d’opposants

mai 6, 2022

À un an des élections régionales, l’Union pour la république, fondée il y a une décennie, ne semble guère avoir d’adversaires solides. Affaiblie par des querelles internes, l’opposition a aussi dû faire face à une série d’arrestations.

Rassemblement pour les dix ans de l’Unir à Atakpamé, le 14 avril 2022 © DR

C’est à Atakpamé, là-même où elle avait été lancée en 2012, que l’Union pour la République (Unir) a fêté ses dix ans d’existence, le 14 avril dernier. Sous la pluie, les vice-présidents, les leaders de mouvements (des jeunes, des femmes et des sages) et d’autres cadres de la formation ont retrouvé quelques milliers de militants pour une messe œcuménique à 160 km de Lomé.

Drapelet en main et casquette vissée sur la tête, Atcholé Aklesso, le secrétaire exécutif du parti présidentiel, était intarissable. « Ce jour du 14 avril 2012, en portant sur les fonds baptismaux Union pour la République, nous avons pris l’engagement d’œuvrer à la satisfaction des aspirations profondes du peuple togolais, de combattre l’injustice, de protéger les couches vulnérables, de promouvoir la démocratie, l’État de droit, la transparence et l’équité », a-t-il déclaré.

Silence dans les rangs

Le secrétaire exécutif a ensuite rappelé les victoires de Faure Gnassingbé aux trois présidentielles (2010, 2015 et 2020), aux deux élections législatives (2013 et 2018) et lors des premières locales organisées il y a trois ans. « Faisant le bilan du chemin parcouru ensemble avec le peuple togolais, nous avons réalisé qu’en dix ans seulement, nous avons fait des avancées notables dans les domaines politique, économique et social, malgré les contraintes », a-t-il conclu.

LE DERNIER MOT REVIENT TOUJOURS AU BUREAU EXÉCUTIF, PRÉSIDÉ PAR FAURE GNASSINGBÉ

Né sur les cendres du Rassemblement du peuple togolais (RPT) fondé par feu Gnassingbé Eyadéma, l’Unir est devenu un creuset politique où s’aiguisent les ambitions personnelles. Même si le dernier mot « revient toujours » au bureau exécutif, présidé par Faure Gnassingbé, précise un cadre, et que personne ne doit dire à l’extérieur du parti quelles frustrations peuvent susciter certaines décisions.

En vue des élections régionales de 2023, l’Unir a lancé en mars à destination de ses partisans une série de formations liées à l’organisation et au maillage du parti ainsi qu’à la responsabilité du militant. « Notre parti est fondé sur certains idéaux et valeurs. Ils sont notre socle. Nous devons constamment les connaître et les partager », souligne la présidente du Mouvement des femmes, Raymonde Kayi Lawson.

« Pouvoir confisqué »

Devant ses militants, l’Unir ne s’est pas livrée qu’à une auto-critique ce 14 avril. Le président du mouvement des Sages, Charles Kondi Agba, a préféré s’attaquer à l’opposition, la qualifiant d’aphone et de non constructive. « C’est le rôle de l’opposition de critiquer, afin de permettre à ceux qui sont au pouvoir de corriger leurs erreurs. Mais devant nous, il n’y a vraiment rien, c’est une situation dangereuse », a-t-il taclé. Et d’affirmer que le seul argument du camp adverse pour s’opposer à Gnassingbé est la longévité de son régime.

POUR UN OUI, POUR UN NON, ON EST ÉCRASÉ ET JETÉ EN PRISON

Une pique inhabituelle, qui a suscité une levée de boucliers dans l’opposition. « Voilà des gens qui confisquent le pouvoir depuis 54 ans par la ruse, la violence, les fraudes électorales, la corruption, l’injustice et la privation des libertés et qui se plaignent qu’on le leur rappelle trop souvent », fulmine Nathaniel Olympio, le président du Parti des Togolais. D’autres leaders pointent le sort réservé à ceux qui osent critiquer la gouvernance actuelle : « Pour un oui, pour un non, on est écrasé et jeté en prison. Cela décourage tout le monde, regardez le cas de Djimon Oré. » L’ancien ministre de Faure Gnassingbé a été condamné en 2021 pour des propos violents contre le régime.

Engluée dans des querelles internes, l’opposition togolaise semble néanmoins très affaiblie face à un parti présidentiel désormais omnipotent. L’Unir semble en effet avoir un boulevard devant elle jusqu’aux élections régionales de l’année prochaine.

Avec Jeune Afrique par Charles Djade – à Lomé

Mini sommet quadripartite d’Oyo : les opérations militaires conjointes RDC-Ouganda passées au crible

février 14, 2022

Les chefs d’État du Congo-Kinshasa, Félix Tshisekedi; du Congo-Brazzaville, Denis Sassou N’Guesso; de l’Ouganda, Yoweri Museveni; et du Togo, Faure Gnassingbé Eyadéma, se sont retrouvés le 12 février à Oyo, dans le département de la Cuvette.

1- Félix Tshisekedi et Yoweri Museveni en tête-à-tête

Pendant près de trois heures, les quatre chefs d’Etat ont abordé des questions d’actualité sur l’Afrique centrale, rapporte  la cellule de communication de la présidence de la République démocratique du Congo (RDC). Au terme de la rencontre, un communiqué final en quinze points a été publié. Il en ressort que c’est à l’initiative du président Denis Sassou N’Guesso que la rencontre a eu lieu à Oyo, en République du Congo.

« Les échanges entre les quatre chefs d’État ont porté essentiellement sur la situation politique et sécuritaire dans les régions des Grands Lacs d’Afrique centrale et d’Afrique de l’ouest », précise le communiqué. « A cet égard, ils ont longuement évoqué les opérations conjointes que mènent les armées de l’Ouganda et de la RDC dans la partie Est de ce dernier pays, visant à éradiquer les rebelles des Forces démocratiques ADF, Musulm Tabliq Movement, MTN, et les autres forces négatives qui menacent la paix et la stabilité dans ces deux pays », apprend-on.

Le communiqué souligne, par ailleurs, combien les quatre chefs d’État se sont réjouis des succès déjà remportés par les Forces armées congolaises et ougandaises et se sont, une fois de plus, félicités de la mutualisation des forces de la RDC et de l’Ouganda pour les opérations militaires conjointes engagées entre les deux pays, initiative qualifiée, au demeurant, de « salvatrice ». 

En ce qui concerne la situation dans les Grands Lacs, les quatre chefs d’Etat ont salué et encouragé la démarche conjointe amorcée par les gouvernements de l’Ouganda et du Rwanda en vue de l’ouverture effective de leurs frontières communes, permettant ainsi la libre circulation des personnes et des biens, tout en appuyant la volonté de l’Ouganda et du Rwanda « de résoudre par les seuls moyens politiques et diplomatiques les différends pouvant subvenir dans leurs relations bilatérales ».

Bien entendu, ils ont saisi l’occasion pour exprimer l’intérêt qu’ils portent à la tenue du sommet des chefs d’État et de gouvernement des pays signataires de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba sur la paix, la sécurité et la coopération qui en est à sa dixième rencontre. C’est au cours des assises prévues le 24 février, à Kinshasa, que la RDC prendra la présidence rotative de la Conférence internationale sur la Région des Grands Lacs.

Autres situations évoquées

Les autres points abordés ont porté sur la Centrafrique avec la méditation angolaise assurée par le président Joao Gonçalves Lourenço, les changements qui s’opèrent dans les pays d’Afrique de l’ouest avec des changements anticonstitutionnels au Mali, en Guinée-Conakry et au Burkina Faso, la situation politique en Libye sous la médiation du président Denis Sassou N’Guesso et les retombées de la conférence de Glasgow sur le changement climatique.

2-Le président Félix Tshisekedi s’entretenant avec son homologue Denis Sassou N’Guesso

« Les quatre chefs d’État ont convenu de se voir régulièrement et de renforcer ainsi leur cadre de concertation sur les questions politiques et sécuritaires, régionales et internationales », conclut le communiqué final signé le 12 février.

Notons qu’avant la distribution du communiqué final, la quadripartite s’est muée en tripartite Tshisekedi-Sassou-Eyadema d’une demi-heure, et en bipartite Tshisekedi-Museveni de plus d’une heure. Il est à noter que c’est par l’aéroport d’Olombo à quelques kilomères d’Oyo, ville située sur la berge de la rivière Alima au nord de la République du Congo, que le président Félix Tshisekedi est arrivé sur le site, accueilli à sa descente d’avion par le président Denis Sassou N’Guesso qui l’a raccompagné à son retour à Kinshasa dans la soirée.

Pour rappel, Félix Tshisekedi est depuis le 19 janvier dernier président en exercice de la Communauté Économiques des États d’Afrique centrale.

Avec Adiac-Congo par Alain Diasso

Togo : Lomé, le musée à ciel ouvert de Camille Tété Azankpo

novembre 7, 2021
Le plasticien Camille Tété Azankpo, sur le rond-point de la Colombe-de-la-Paix, à Lomé. © Caroline Chauvet pour JA

Pour le plasticien togolais, Lomé est une source d’inspiration, parfois même une œuvre d’art. Il nous emmène à la découverte de « sa » capitale natale.

« Je vais, je reviens… Je suis moulé dans cette ville. » Lomé, le plasticien Camille Tété Azankpo y est né, y a grandi. Il aurait pu habiter en Allemagne où il a étudié, ou bien en France, où il expose régulièrement. Mais il n’a jamais voulu quitter sa ville natale. Chaque jour, ce Loméen contemporain coud avec des fils de fer des bouts de bassines métalliques découpées, leur donnant une nouvelle vie, tel un docteur Frankenstein. Le temps d’une journée, il nous a emmenés faire un tour de « sa » ville.

Camille Tété Azankpo dans son atelier du quartier Forever, au nord du centre-ville de Lomé.
Camille Tété Azankpo dans son atelier du quartier Forever, au nord du centre-ville de Lomé. © Caroline Chauvet pour JA

Nous partons du nord de la capitale. L’atelier de Camille Tété Azankpo est situé à Forever, un quartier résidentiel, d’où il peut facilement se déplacer dans tout Lomé. Premier stop à l’aéroport, « là où les étrangers ont leurs premières impressions de Lomé ». Dès leur arrivée, les voyageurs ne peuvent pas manquer les fresques qui, depuis 2017, courent sur les murs de l’aérogare, puis sur des centaines de mètres, tout au long de l’avenue de la Paix, jusqu’au centre-ville. Patchwork de couleurs et de formes, représentant la paix et l’amour de la patrie, l’œuvre a été réalisée par huit artistes. Camille Tété Azankpo n’y a pas participé, mais tient à rendre hommage à ses confrères et à saluer la récente volonté des pouvoirs publics d’embellir la ville en faisant la part belle aux artistes nationaux.

OUI, IL Y A LA PAIX À LOMÉ, MAIS C’EST UNE PAIX SÉCURITAIRE

Colombe et légendes urbaines

Bifurcation vers le sud-ouest, direction le rond-point de la Colombe-de-la-Paix, dans le quartier de Tokoin. Posé sur une sphère, au sommet d’un vaste socle évasé, l’oiseau immaculé, un rameau dans le bec, surplombe le centre-ville situé en contrebas. Le monument est érigé sur le rond-point le plus emblématique de la capitale, passage obligé entre le sud et le nord de la capitale, entièrement réaménagé ces dernières années (chaussée de deux fois trois voies bitumées, larges trottoirs…).

Devant les fresques du « corridor de la paix ».
Devant les fresques du « corridor de la paix ». © Caroline Chauvet pour JA

L’artiste pose fièrement aux côtés de « la Colombe », qu’il compare à une tour Eiffel, tant elle est connue au Togo. Son seul regret : qu’elle ne soit pas l’œuvre d’un Togolais, mais d’un sculpteur italien, Franco Adami. Symbole de sérénité, le monument donne aussi lieu à quelques légendes urbaines. « Il paraît que sous la Colombe existe un passage qui mène directement au camp militaire… Ou encore que des corps humains auraient été ensevelis pour créer la Colombe ! explique l’artiste. Du temps du président Eyadema père, je me souviens que, lorsque le cortège présidentiel passait par ce carrefour, on bloquait les artères, on fermait les boutiques et tout le monde devait se tourner dos à la route. Cela pouvait durer une heure ou plus. Tout le monde avait peur de simplement regarder les hommes armés postés près de la Colombe. »

Aujourd’hui encore, l’endroit est bien gardé : un camp de la Garde républicaine jouxte le monument. Il représente décidément bien la ville, souligne Camille Tété Azankpo : « Oui, il y a la paix à Lomé, mais c’est une paix sécuritaire. »

Le marché dans son ADN

Direction le sud, au Grand-Marché d’Assigamé, le plus important de la capitale. Par sa position centrale, avec son littoral et son port en eau profonde, ses commerçants expérimentés et ses produits vendus moins cher qu’ailleurs, la métropole togolaise est une plateforme commerciale majeure dans la sous-région – et même pour l’Afrique centrale. Ivoiriens, Burkinabè, Maliens, mais aussi Gabonais viennent s’y approvisionner en pagnes et en produits de toutes sortes. Lomé est un grand marché et Assigamé, son cœur. Chaque pas de chaland, chaque clameur de commerçant est comme un battement de ville. Même si, Covid-19 oblige, nombre de clients ne peuvent plus aussi facilement se rendre au Togo, les frontières terrestres étant fermées pour les particuliers depuis mars 2020.

IL REDONNE AUX BASSINES ÉMAILLÉES, SI POSSIBLE ANCIENNES, UNE AUTRE VIE

C’est là que Camille Tété Azankpo est né et a vécu jusqu’à ses 12 ans. « Le marché est dans mon ADN », dit-il, en racontant qu’il y voyait sa grand-mère vendre du pétrole liquide (pour les lampes) qu’elle achetait au Ghana voisin. Le dimanche, il l’accompagnait parfois à la cathédrale du Sacré-Cœur. Un édifice que l’enfant admirait, non pour son caractère religieux, mais fasciné par sa structure imposante, ses formes, ses couleurs… Aujourd’hui, les œuvres de l’artiste sont découpées, comme des vitraux. « J’étais toujours content d’aller au marché, car on achetait plein de choses avec ma maman ! » se souvient-il avec une pointe de nostalgie. Assigamé, c’est sa madeleine de Proust.

… Et au Grand-Marché d’Assigamé.
… Et au Grand-Marché d’Assigamé. © Caroline Chauvet pour JA

C’est aussi là que le plasticien trouve sa « matière ». Depuis 1999, Camille Tété Azankpo récolte des bassines émaillées – si possible anciennes. Symboliques dans toute l’Afrique : elles sont souvent offertes lors d’un mariage, transmises de génération en génération… « Je leur redonne une autre vie. » C’est donc auprès des femmes, et en particulier celles du marché, que l’artiste trouve son bonheur. Aujourd’hui, il a repéré quelques modèles intéressants et promet à la vendeuse de repasser.

Le wharf, havre inspirant

Et comment parler de Lomé sans parler de l’océan ? Depuis Assigamé, il n’y a plus que quelques pas vers le bord de mer. Plus exactement vers le wharf, sur le boulevard du Mono, qui fut le premier port du pays, construit sous la colonisation allemande, inauguré en 1905 et mis à la retraite en 1964. Il n’en reste plus que les ruines battues par les vagues, les flots et le sable, comme un squelette émacié, une silhouette filamenteuse, à la Giacometti.

« Aujourd’hui, comme il n’a plus son utilité intrinsèque, le wharf est devenu une œuvre à part entière », murmure notre guide. Il est aussi un symbole de l’histoire de la ville et de la région, un lieu de promenade et de rencontres pour certains jeunes Loméens. Et un inspirant havre de méditation pour les artistes de passage.

Avec Jeune Afrique par Caroline Chauvet

Agroalimentaire : le Togo à l’assaut du défi de la transformation

octobre 14, 2021

REPORTAGE. Ces dernières années, producteurs et politiques cherchent les voies et moyens d’engager une transformation locale des matières premières. Illustration.

A travers quelques produits agricoles cles comme le cacao, le soja ou le coton, le Togo veut impulser de nouveaux schemas pour faire de la transformation locale une realite.
À travers quelques produits agricoles clés comme le cacao, le soja ou le coton, le Togo veut impulser de nouveaux schémas pour faire de la transformation locale une réalité.© GODONG/DELOCHE / BSIP via AFP

Au Togo, comme dans la plupart des pays d’Afrique, l’agriculture occupe une très large portion des actifs et contribue énormément à l’économie, dont elle est d’ailleurs le moteur, avec pas moins de 40 % du produit intérieur brut (PIB). Mais la transformation in situ des matières premières pour avoir une plus-value en est le talon d’Achille. Aujourd’hui encore, c’est l’exportation sous forme brute vers l’Occident qui prime. Résultat : malgré l’abondance des ressources, le continent continue à importer chaque année des milliards de dollars d’aliments transformés et de produits raffinés. Les produits agricoles qui illustrent assez bien ce schéma sont la noix de cajou, le café et le cacao. Alors que le continent africain concentre 70 % de la production mondiale de fèves de cacao et que la transformation du chocolat est à l’origine de 100 milliards de dollars à travers le monde, selon l’International Cocoa Organization, seuls 6 % de cette somme reviennent aux pays exportateurs de la matière brute, comme la Côte d’Ivoire et le Ghana.

Le soja comme vitrine

Depuis quelques années, il y a une véritable prise de conscience sur le besoin de développer les infrastructures de transformation sur place. Ananas, mangues, papayes, soja, légumes frais, café, cacao. Choco Togo, d’Éric Agbokou, spécialisée dans la transformation du cacao – en plus de la production locale, elle importe le bio du Ghana et de la Côte d’Ivoire, des plus grands pays producteurs d’Afrique et du monde – en chocolat, fait partie des têtes de pont. Ses chiffres d’affaires montant crescendo depuis 2013, la diversité des pays d’exportation du chocolat de Choco Togo, les prix glanés un peu partout pour sa qualité sont assez parlants. L’ambition d’Éric Agbokou est de s’approprier le marché ouest-africain et de passer le cap des 10 000 tonnes annuelles de production.

Kanyi Group, de Kanyi Koffi Anoumou, est aussi une référence dans le secteur dans ce petit pays d’Afrique de l’Ouest, notamment pour la transformation des fruits séchés, aux côtés d’Ecocert. Agrokom, de Daniel Komlan ,fait dans la trituration du soja, tout comme Mama Soja.

Le Togo rêve de devenir un champion du soja bio dans le monde (image d’illustration).© WIKUS DE WET / AFP

Concrètement, le soja « made in Togo » est le porte-étendard de cette nouvelle stratégie. La filière est très porteuse, de la production à la transformation de la graine jusqu’à sa commercialisation. Le petit pays en a produit jusqu’à 176 000 tonnes à l’été 2021, contre 40 000 tonnes en 2018. Le soja constitue une matière première de choix pour une multitude d’industries sur le marché mondial des huiles et des protéines végétales. Il représente plus de 50 % en masse de la production mondiale d’oléagineux. Le Togo ne veut plus se contenter d’exporter. Il veut transformer localement et exploiter son immense potentiel pour en faire de l’huile, bien sûr, mais aussi de la farine, des savons et même du fromage.

Les politiques en place et les chiffres

Cet essor du secteur de la transformation in situ des produits agricoles bio tient en partie au cadre institutionnel et politique tracé par l’État togolais. En effet, bien des structures ont été créées dans la perspective de la promotion agricole de façon générale. Projet de transformation agroalimentaire du Togo (PTA-Togo) dans le cadre du plan stratégique de développement des agropoles au Togo (2017-2030) et de l’initiative Nourrir l’Afrique (2016-2025), visant à accroître de 19 à 40 % la part des produits agricoles transformés sur place, Programme national d’investissement agricole et de sécurité alimentaire (PNIASA) et ses dérivés, mécanisme incitatif de financement agricole (MIFA), etc. De nombreux programmes, projets ou mécanismes ont permis de faire un grand pas vers la transformation des produits agricoles sur place. Manifestation ultime ces derniers temps de cette volonté politique, la mise en place de la plateforme industrielle d’Adétikopé (PIA) et la promotion du volet transformation des produits.

Le secteur a par ailleurs bénéficié des appuis des partenaires en développement aussi. « Si nous appuyons les acteurs de la transformation, alors cela va agir sur toute la chaîne de valeur. Donc nous appuyons les transformateurs dans la démarche qualité, mais également pour obtenir les équipements nécessaires pour pouvoir répondre aux besoins du marché », a déclaré Isaac Nyuito, chargé de programme à la délégation de l’Union européenne au Togo.

Avant Choco Togo, la quasi-intégralité des fèves togolaises était exportée.© Choco Togo

L’un des pays européens actifs dans l’appui aux transformateurs des produits bio est sans doute l’Allemagne, qui, avec des programmes, projets et autres appuis aussi bien financiers que matériels, logistiques et techniques, aura contribué à booster cette activité au Togo, avec son bras armé, la GIZ.

En l’espace de quelques années, le Togo est parvenu à rattraper son retard et à occuper le rang de second exportateur africain de produits bio à destination des pays de l’Union européenne, derrière l’Égypte, selon des données statistiques rendues publiques en juin 2020. Passant de 22 000 tonnes à près de 45 000 tonnes, soit une hausse de 102 % enregistrée, le pays avait plus que doublé ses exportations de produits biologiques vers cet espace entre 2018 et 2019. Ce chiffre faisait du Togo le 14exportateur mondial (contre la 31place pour 2018), et de nouveau le premier plus gros exportateur de la Cedeao vers l’UE dans le domaine.

Outil de création d’emplois et de valeur ajoutée

Certains acteurs l’ont compris depuis bien longtemps, la transformation locale des produits agricoles apporte une plus-value énorme aussi bien aux producteurs qu’au pays puisqu’elle permet la création d’emplois de meilleure qualité. « Si nous devons développer l’Afrique, ça ne peut qu’être par la voie de l’entrepreneuriat. Et nous n’allons pas produire sans transformer. La transformation sur place apporte une grande valeur ajoutée. Aller travailler dans une fonction publique, ce n’est pas mal, mais ça ne vous permet pas spécifiquement de contribuer au développement de votre pays », estime Kanyi Koffi Anoumou.

« J’étais dans la transformation des épices et farine et j’employais 2 personnes, mais, depuis que je me suis tourné vers les fruits séchés, ce nombre oscille désormais entre 10 et 14 en fonction de la production », explique Solim Kpemissi, la directrice générale de Futur of Africa SAS.

Défis et perspectives

Les défis ne maquent pas, cependant : entre la disponibilité des matières premières, les équipements pour ce faire, l’absence de débouchés locaux pour consommer ces produits, entre autres. Mais les acteurs du secteur, grâce à leurs diverses approches, tentent de surmonter de plus en plus ces écueils. « Les défis sont énormes : défis en termes de production, défis en termes de disposition de machines, défis en termes de personnel, de formation adéquate pour le personnel en matière de transformation », liste Kanyi Koffi Anoumou. « Mais nous arrivons à apporter des solutions, souligne-t-il. Je ne dirai pas que j’ai cherché une matière première pendant une ou deux semaines sans trouver. Parce qu’au fur et à mesure qu’on avance nous essayons de former nos coopératives à produire beaucoup plus en quantité pour que nous ne manquions de rien. »

Des produits transformés et commercialisés directement sur place trouvent leur place sur les étals des marchés et des principaux commerces du Togo.© DR

L’autre défi de grande portée à relever, c’est la consommation locale des produits bio. « Le marché d’écoulement, au début, c’était extrêmement difficile. Mais maintenant, je dirais que ça va mieux, pas totalement à 100 %. Avec le temps, on espère vivement que ça changera. (…) Il y a la concurrence qui est un peu rude, ce qui fait que parfois les productions locales deviennent plus chères que les produits importés. Nous sommes en train de régler ce côté-là pour que nos produits soient accessibles à tout le monde », ajoute le patron de Kanyi Group.

Amana Azotou, à la tête d’Ecocert abonde : « Honnêtement, certains produits transformés localement ont plus de valeur ajoutée à l’exportation que sur le marché local, si l’on pense créer plus de richesse pour l’entreprise et participer au développement de son pays », insiste-t-il. Pour lui, le marché togolais est trop petit. « C’est vrai qu’il faut travailler pour faire connaître localement ses produits car cela vous permet de nouer des contacts avec des partenaires qui peuvent porter votre projet et vous aider à vous faire connaître sur le marché international. L’exportation se prépare et c’est un travail de longue haleine », dit-il.

Comme pour témoigner de la place du bio et encourager sa production au Togo, il a été institué un marché idoine, l’Espace Viva. « On a identifié les producteurs qui font de l’agroécologie, utilisent des techniques comme la permaculture. On leur rend visite avant de les sélectionner pour qu’ils participent au marché des paysans. On les connaît donc très bien, ce sont des personnes engagées depuis très longtemps », a déclaré Aimée Abra Tenou, sa fondatrice.

Avec Le Point par notre correspondant à Lomé, Kouevi Nyidiiku

Le Togo en passe d’adhérer au Commonwealth

juin 23, 2021
Le Togo en passe d’adhérer au Commonwealth

(Agence Ecofin) – Après le Rwanda en 2009, qui a ouvert la voie, le Togo, à l’instar du Gabon, autre pays francophone, frappe à la porte du Commonwealth, l’organisation qui regroupe essentiellement d’anciens territoires de l’Empire britannique.

« Le Commonwealth, c’est un marché de 2 milliards de consommateurs. C’est une opportunité pour le Togo », a indiqué Franck Missité, directeur de Cabinet au ministère de la Communication alors qu’une mission de l’organisation intergouvernementale démarrait une nouvelle évaluation à Lomé.

Le pays qui ambitionne depuis 2014 d’adhérer à la communauté dont les Etats membres sont en majorité d’anciens territoires de l’empire britannique, ne compte pas toutefois rompre les liens avec la francophonie.

« Le Togo ne quitte pas la francophonie. Il demeure membre à part entière. Le Togo reste un pays francophone. On va seulement renforcer les programmes d’enseignement de l’anglais. Nous voulons simplement réactiver d’autres partenariats », a précisé le directeur de cabinet.

Sur le plan économique, l’adhésion du pays au Commonwealth, lui permettra de bénéficier du Fonds pour la Coopération Technique (CFTC) qui joue un rôle important dans le progrès économique et social de ses membres, souligne Togo First

Ainsi, la délégation après avoir échangé avec le Premier ministre, Victoire Tomegah-Dogbé et des membres du gouvernement, s’entretiendra avec les organisations de la société civile (OSC), les médias et les partis politiques.

Au terme de la mission, la délégation produira un rapport qui devra situer le Togo sur la suite du processus d’adhésion.

Le Commonwealth a pour mission de promouvoir une série de valeurs communes à ses membres, notamment l’égalité, la non-discrimination, la démocratie et la primauté du droit.

Avec Agenceecofin par Esaïe Edoh