L’Américain Trevor Reed, lors d’une comparution devant un tribunal de Moscou, le 11 mars 2020. Photo: Reuters/Tatyana Makayeva
L’ex-marine américain Trevor Reed, condamné à neuf ans de prison en Russie pour violences, a été échangé mercredi avec un pilote russe incarcéré aux États-Unis depuis 2010, un échange de prisonniers rappelant la guerre froide.
Le 27 avril, à l’issue d’un long processus de négociation, Trevor Reed […] a été échangé contre le citoyen russe Konstantin Iarochenko, condamné à 20 ans de prison par un tribunal américain
en 2011, a indiqué sur Telegram la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova.
Évoquant cet échange, le président américain Joe Biden a dit avoir dû prendre des décisions difficiles
pour obtenir la libération de l’ancien militaire.
Son retour sain et sauf témoigne de la priorité que mon administration accorde au rapatriement des Américains retenus en otages et injustement détenus à l’étranger
, a-t-il affirmé.
La télévision russe a diffusé des images de Trevor Reed, vêtu de noir et portant un grand sac, embarquant dans un avion.
Son père, Joey Reed, a déclaré à la chaîne américaine CNN que l’ancien militaire avait été transféré cette semaine à Moscou, puis mis dans un avion vers la Turquie.
« L’avion américain s’est arrêté à côté de l’avion russe et ils ont fait traverser les deux prisonniers en même temps, comme dans les films. »— Une citation de Joey Reed, père de Trevor Reed
Trevor Reed, 30 ans, a été condamné en juillet 2020 à neuf ans de prison pour avoir agressé en état d’ébriété, un an plus tôt, deux policiers appelés sur les lieux d’une fête à Moscou. Il a nié l’agression et dénoncé une affaire politique
sur fond de tensions russo-américaines.
Konstantin Iarochenko avait lui été arrêté en mai 2010 au Liberia par des agents des services secrets américains. Accusé de trafic de drogue en lien avec les FARC colombiens, il avait été emmené aux États-Unis, puis condamné à 20 ans de prison.
Un avion en provenance d’Ankara avec M. Iarochenko à son bord a atterri vers 8 h 30, heure locale, à Sotchi, station balnéaire russe sur les rives de la mer Noire, selon l’agence Interfax.
L’échange de prisonniers entre Moscou et Washington n’a aucun
impact sur les relations entre les deux pays, a souligné un responsable américain.
Détenu dans une colonie pénitentiaire de Mordovie, à 500 km de Moscou, Trevor Reed avait fait une grève de la faim en novembre 2021 pour protester contre ses conditions de détention.
Son avocat, Sergueï Nikitenkov, a affirmé qu’il avait été placé plusieurs fois en ‘isolement et que l’administration pénitentiaire ne lui faisait pas parvenir les lettres qu’il recevait. Il n’a pas demandé de grâce présidentielle, a précisé l’avocat mercredi à Interfax.
Une libération négociée depuis très longtemps
L’avocat russe de Konstantin Iarochenko, Alexeï Tarassov, a lui qualifié de miracle de Pâques
sa libération, ajoutant que l’échange était en négociation depuis très longtemps
et que la santé du pilote, quinquagénaire, laisse beaucoup à désirer
.
Le président américain Joe Biden s’était engagé à tout faire pour libérer Trevor Reed et d’autres Américains détenus à tort
en Russie, et l’hypothèse d’un échange de prisonniers était régulièrement évoquée, notamment avant la rencontre entre Joe Biden et Vladimir Poutine à Genève en juin 2021.
Le président russe s’était alors montré ouvert à une telle possibilité, ajoutant avoir toute une liste
de Russes incarcérés dans les prisons américaines.
Parmi les noms les plus évoqués revient celui de Paul Whelan, un Canado-Américain condamné à 16 ans de prison pour espionnage et qui clame son innocence. Côté russe figure le célèbre trafiquant d’armes Viktor Bout, arrêté en Thaïlande en 2008 et qui purge une peine de 25 ans de prison aux États-Unis.
Les échanges de prisonniers étaient fréquents entre Moscou et les Occidentaux jusqu’à la fin de la guerre froide en 1991 et n’ont jamais totalement cessé, notamment depuis l’arrivée au pouvoir, en 2000, de Vladimir Poutine.
Ils concernent le plus souvent des espions, comme en 2010, quand 10 membres d’un réseau russe (des agents illégaux opérant sous fausse identité américaine) arrêtés par le FBI avaient été échangés contre deux Russes travaillant pour la CIA et les services britanniques, ainsi qu’un chercheur.
Avec Radio-Canada par Agence France-Presse