Le président biélorusse Alexandre Loukachenko a annoncé que Vladimir Poutine lui a assuré avoir signé le décret permettant le transfert de charges nucléaires.
« Le transfert des charges nucléaires a commencé, ça a déjà commencé », a déclaré Alexandre Loukachenko, répondant à une question d’un journaliste russe dans une vidéo diffusée par la chaîne Telegram officieuse de la présidence biélorusse, Pul Pervogo.
Alexandre Loukachenko, qui était à Moscou jeudi pour un sommet régional, n’était pas en mesure d’indiquer si les armes en question étaient déjà dans son pays. « Peut-être, je rentre et je verrai », a dit le dirigeant biélorusse et principal allié russe. Alexandre Loukachenko a expliqué que Vladimir Poutine lui avait dit la veille avoir signé le décret permettant le transfert.
La crainte d’une escalade du conflit
Le président russe avait annoncé le 25 mars que Moscou allait déployer des armes nucléaires « tactiques » sur le territoire biélorusse, un pays situé aux portes de l’Union européenne, nourrissant la crainte d’une d’escalade du conflit en Ukraine. L’annonce avait suscité des critiques de la communauté internationale, les Occidentaux en particulier, d’autant que le dirigeant russe a depuis le début de son assaut contre son voisin ukrainien en février 2022 évoqué la possibilité d’un recours à l’arme atomique.
L’opposante en exil Svetlana Tikhanovskaïa a dénoncé jeudi une menace pour tout le continent européen. « Cela ne met pas juste en danger la vie des Biélorusses, mais crée aussi une nouvelle menace pour l’Ukraine, pour toute l’Europe », a écrit sur Twitter Svetlana Tikhanovskaïa. « Lorsqu’on parle d’armes nucléaires tactiques, la plupart sont aussi puissantes que celle qui a tué 140 000 personnes à Hiroshima », a-t-elle ajouté. Les armements nucléaires dits « tactiques » peuvent provoquer d’immenses dégâts, mais leur rayon de destruction est plus limité que celui d’armes nucléaires « stratégiques ».
Début avril, la Russie avait indiqué avoir commencé à former les militaires biélorusses à l’utilisation d’armes nucléaires « tactiques ».
En outre, Vladimir Poutine a indiqué par le passé que dix avions avaient déjà été équipés en Biélorussie pour l’utilisation de telles armes et qu’un entrepôt spécial serait terminé d’ici au 1er juillet. Le pays n’est pas directement engagé sur le terrain en Ukraine mais a prêté son territoire à l’armée russe pour qu’elle puisse lancer son assaut en février 2022.
Les Etats-Unis ont annoncé mercredi la vente de systèmes avancés de missiles sol-air NASAMS à l’Ukraine pour quelque 285 millions de dollars afin de renforcer la défense aérienne du pays face à la Russie.
« L’Ukraine a un besoin urgent de renforcer ses capacités de défense contre les frappes de missiles et l’aviation russe » a indiqué l’Agence américaine pour la coopération en matière de défense (DSCA) dans un communiqué.
Le département d’Etat a approuvé la vente qui a été notifiée au Congrès américain, lequel doit encore donner son feu vert. La défense aérienne s’est avérée un facteur crucial dans le conflit face au tir de barrage des missiles russes. Cette vente de systèmes NASAMS vient en parallèle des milliards de dollars d’aide militaire fournie par les Etats-Unis à l’Ukraine depuis le début de l’offensive russe le 24 février 2022.
Sur cette capture d’écran un bâtiment endommagé dans la région de Belgorod, en Russie, où les troupes russes et les forces de sécurité disent s’être battues mardi pour la deuxième fois contre des combattants venus d’Ukraine. Photo: AP
La Russie a affirmé mardi avoir « écrasé » avec son aviation et son artillerie le groupe qui a attaqué la veille depuis l’Ukraine la région frontalière de Belgorod, la plus grave incursion en territoire russe depuis le début du conflit.
Lundi, des combattants entrés en Russie depuis l’Ukraine ont attaqué plusieurs localités de la région de Belgorod, qui a également essuyé des tirs d’artillerie et des attaques de drones qui ont poussé les habitants à fuir.
Le Kremlin a exprimé sa profonde préoccupation et appelé à faire plus d’efforts pour empêcher ces incursions, en pleine multiplication d’attaques sur le sol russe ces derniers mois, qui ont soulevé des questions sur la solidité des défenses de Moscou.
Une image fixe d’une vidéo, publiée par le ministère russe de la Défense, présentant une attaque aérienne russe contre des combattants ukrainiens dans la région de Belgorod, à un endroit inconnu. Photo: Reuters/Ministère Russe de la Défense
Le ministère russe de la Défense a assuré mardi avoir repoussé cette incursion après une opération d’une ampleur inédite, qui a notamment mobilisé l’aviation et l’artillerie.
« Les formations nationalistes ont été bloquées et écrasées. »— Une citation de Extrait du communiqué du ministère russe de la Défense
Le reste des nationalistes ont été repoussés sur le territoire de l’Ukraine, où les frappes […] se sont poursuivies jusqu’à leur élimination totale, a encore indiqué le ministère, affirmant avoir tué plus de 70 terroristes ukrainiens.
Ces déclarations étaient invérifiables de source indépendante dans l’immédiat.
La Russie a accusé Kiev d’être derrière cette attaque, mais les autorités ukrainiennes nient toute implication.
Nous ne livrons pas de guerre sur des territoires étrangers, a ainsi assuré mardi la vice-ministre ukrainienne de la Défense Ganna Maliar, y voyant une crise interne russe.
L’attaque a été revendiquée sur une chaîne Telegram qui se présente comme appartenant à la Légion Liberté pour la Russie, un groupe de Russes combattant côté ukrainien, qui avait déjà assuré être à l’origine d’incursions précédentes dans la même région.
Un autre groupe similaire participerait à l’opération, le Corps des volontaires russes.
Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin Photo: Reuters/Sputnik Photo Agency
Ce qui est arrivé [lundi] suscite une profonde préoccupation et démontre une fois encore que les combattants ukrainiens poursuivent leurs activités contre notre pays, a déclaré à la presse le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.
Cela nécessite de notre part plus d’efforts, ces efforts continuent d’être fournis et l’opération militaire spéciale [en Ukraine] se poursuit pour que cela n’arrive plus, a-t-il ajouté.
Le gouverneur de Belgorod, Viatcheslav Gladkov, a déclaré que plusieurs localités, dont Graïvoron, chef-lieu du district du même nom, avaient été soumises à de nombreux bombardements, au moyen de pièces d’artillerie, de lance-roquettes multiples et de drones.
Neuf localités ont par ailleurs été évacuées, a indiqué le gouverneur, qui a fait état d’un total d’au moins 12 civils blessés.
En réponse à l’incursion, la Russie a décrété lundi un régime antiterroriste dans toute la région de Belgorod, une mesure qui renforce les pouvoirs des autorités pour mener des opérations armées, contrôler les civils ou encore évacuer les populations. Ce régime avait été utilisé en Tchétchénie de 1999 à 2009.
Le Comité d’enquête russe, chargé des principales investigations, a annoncé mardi l’ouverture d’une enquête pour acte terroriste.
Alors que se profile une vaste contre-offensive ukrainienne, le territoire russe a été ces derniers mois et semaines la cible d’un nombre croissant de sabotages, d’attentats et d’attaques de drones imputés à Kiev, mais jamais revendiqués par l’Ukraine, qui préfère évoquer des actions de partisans russes.
Le président russe Vladimir Poutine ne s’est pas exprimé au sujet de l’incursion, se bornant, lors d’une cérémonie de remise de décorations au Kremlin mardi, à parler de manière très générale du conflit en Ukraine.
« Oui, la Russie fait face à des temps difficiles, mais aujourd’hui est un moment particulier pour notre consolidation nationale […] Moscou défend les populations russes du Donbass ukrainien. »— Une citation de Vladimir Poutine, président de la Russie
Lundi, son porte-parole avait indiqué qu’il avait été informé de l’incursion dans la région de Belgorod.
Le Kremlin avait accusé lundi Kiev d’être derrière cette attaque, dans le but de détourner l’attention de la prise revendiquée par les forces russes de la ville de Bakhmout, dans l’est de l’Ukraine.
Les forces russes ont affirmé ce week-end avoir pris l’intégralité de cette ville dévastée, théâtre de la bataille la plus longue et la plus meurtrière du conflit, où les deux camps ont subi de lourdes pertes.
Kiev a démenti la perte de Bakhmout, affirmant encore mardi que les batailles pour la ville […] se poursuivent.
Par ailleurs, le président Volodymyr Zelensky s’est rendu mardi sur la ligne de front dans la région de Donetsk, dans l’est, où il s’est entretenu avec des militaires.
Selon le président Poutine, l’opération de sabotage est une tentative de l’Ukraine de détourner l’attention de la « chute » de Bakhmout. Photo: Sputnik/AFP via Getty Images/Gavriil Grigorov
La Russie a reconnu lundi combattre sur son territoire un groupe de « sabotage » venu d’Ukraine, qui a, quant à elle, fait face à une attaque russe nocturne d’ampleur et à une brève coupure dans une centrale nucléaire.
Les autorités russes ont rapporté l’entrée d’un groupe de sabotage et de reconnaissance de l’armée ukrainienne dans le district de Graïvoron, dans la région de Belgorod, frontalière de l’Ukraine.
Les forces armées russes, aux côtés des gardes-frontières, de la Garde nationale et des services de sécurité, prennent toutes les mesures nécessaires pour éliminer l’ennemi, a affirmé sur Telegram le gouverneur régional, Viatcheslav Gladkov.
Le président Vladimir Poutine a été informé de cette incursion, a déclaré aux journalistes son porte-parole Dmitri Peskov, qui a estimé qu’il s’agissait d’une tentative de l’Ukraine de détourner l’attention de la chute de Bakhmout.
La présidence ukrainienne a assuré que Kiev n’avait rien à voir avec cette incursion, affirmant suivre la situation avec intérêt.
L’opération a été revendiquée sur une chaîne Telegram qui se présente comme appartenant à la Légion Liberté pour la Russie, un groupe de Russes combattant côté ukrainien, qui avait déjà assuré être à l’origine d’incursions précédentes dans la même région.
Il est venu le temps de mettre fin à la dictature du Kremlin, a affirmé dans une vidéo diffusée par cette chaîne un homme qui avait été présenté à l’AFP en décembre comme Caesar, porte-parole du groupe, un homme identifié par la presse comme un ex-néonazi russe passé côté ukrainien en 2014.
Selon la chaîne, le groupe a complètement libéré un village de la région de Belgorod et a attaqué une deuxième localité.
Nouvelles frappes aériennes à Dnipro
Côté ukrainien, les autorités ont indiqué avoir repoussé au cours de la nuit des frappes d’une ampleur inédite sur la ville de Dnipro, dans le centre-est du pays, avec des missiles et des drones explosifs.
Sept personnes ont été blessées à Dnipro et sept autres dans sa région lors de cette attaque réalisée à l’aide de missiles de différents types et drones Shahed de fabrication iranienne, selon l’armée ukrainienne.
Selon le maire de cette grande ville d’un million d’habitants à 125 kilomètres du front, Borys Filatov, il n’y a jamais eu de bombardements d’une telle ampleur [sur Dnipro] depuis le début de l’offensive russe.
Dnipro a été la cible de 16 missiles et 20 drones de combat russes, selon un bilan ukrainien. Photo: Getty Images/AFP/Mykhailo Moskalenko
Cette attaque russe a aussi provoqué, selon les autorités ukrainiennes, une coupure temporaire de courant à la centrale nucléaire de Zaporijia, la plus grande d’Europe, occupée depuis le début du conflit par la Russie.
Visée à de multiples reprises par des bombardements et déjà précédemment coupée à six reprises du réseau ukrainien, la centrale a déconnecté ses six réacteurs, mais requiert toujours de l’électricité pour ses propres besoins.
Ces derniers mois, alors que se profile une vaste contre-offensive ukrainienne, le territoire russe a été la cible d’un nombre croissant de sabotages, d’attentats et d’attaques de drones imputés à Kiev.
L’incertitude plane à Bakhmout
L’opération de sabotage illustre une nouvelle fois les apparentes difficultés de Moscou à assurer la sécurité de ses frontières dans les zones limitrophes de l’Ukraine, où les bombardements et les infiltrations se sont multipliés ces derniers mois.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a démenti la perte de Bakhmout, où son armée a dit tenir encore une petite zone, tout en continuant une percée sur les flancs russes au nord et au sud de la ville.
Si elle était confirmée, la prise de la ville de Bakhmout représenterait le premier succès russe après une série de revers humiliants depuis plus d’un an.
Le patron du groupe paramilitaire russe Wagner, Evguéni Prigojine, a affirmé lundi que ses hommes, en première ligne, quitteraient la cité d’ici le 1er juin et transféreront leurs positions aux troupes régulières de l’armée russe.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, qui a passé le week-end au sommet du G7 au Japon où il a engrangé les promesses de soutien, a démenti que son armée avait perdu la ville.
Le commandement ukrainien a affirmé toujours contrôler une partie insignifiante de Bakhmout et poursuivre ses tentatives d’encercler les troupes russes en pressant sur les flancs de la ville.
Voilà des mois que le gouvernement ukrainien réclame des chasseurs F-16 pour mieux combattre les Russes. (Photo d’archives): Getty Images/Ministère de la Défense de la Corée du Sud
Le président des États-Unis a accordé vendredi son « soutien à une initiative commune visant à entraîner des pilotes ukrainiens sur des avions de combat de quatrième génération, y compris des F-16 », a déclaré un haut responsable de la Maison-Blanche, en marge du sommet du G7 qui s’est ouvert au Japon.
Il s’agit d’un pas important dans le soutien militaire aérien fourni par l’Occident aux forces ukrainiennes, dont les dirigeants réclament depuis des mois des chasseurs modernes de type F-16 pour reprendre le contrôle de l’espace aérien des zones occupées par les Russes et pour soutenir la progression des forces terrestres.
Il n’est toutefois pas question d’envoyer immédiatement de tels avions sur le champ de bataille. Plusieurs étapes restent encore à franchir.
Pendant que l’entraînement se déroulera ces prochains mois, notre coalition de pays participant à cet effort décidera quand fournir des avions, combien [d’appareils seront offerts] et qui les fournira, a précisé le porte-parole de Washington.
Aujourd’hui, la Maison-Blanche, sans s’engager à livrer des avions elle-même aux Ukrainiens, s’est dite ouverte à ce que d’autres pays le fassent.
La formation des nouveaux pilotes ne devrait également pas avoir lieu aux États-Unis, a précisé le responsable du gouvernement américain. Ces opérations devraient se faire en Europe, en présence de personnel et d’instructeurs américains. La formation de plusieurs mois devrait commencer dans les semaines à venir, selon la même source.
Le Danemark, qui possède une quarantaine de F-16, a d’ores et déjà annoncé qu’il contribuera à la formation des pilotes ukrainiens. Le Danemark déploiera tous ses efforts pour en faire une contribution prioritaire, a assuré le ministre danois des Affaires économiques, Troels Lund Poulsen.
Le premier ministre britannique Rishi Sunak, son collègue belge Alexander De Croo et la ministre de la Défense néerlandaise Kajsa Ollongren ont tous salué cette annonce et promis de travailler avec leurs partenaires pour renforcer les capacités aériennes de l’Ukraine.
Kiev salue une décision historique
À Kiev, cette décision a été qualifiée d’historique par le président Volodymyr Zelensky, qui se réjouit que son homologue américain soit désormais prêt à autoriser les alliés de l’Ukraine à lui fournir ces avions. Cela va considérablement aider notre armée de l’air, s’est félicité le président ukrainien Zelensky.
Je compte discuter de la mise en œuvre pratique de cette décision lors du sommet du G7 à Hiroshima, a écrit le président Zelensky sur son compte Twitter.
L’Ukraine demande depuis des mois à ses alliés occidentaux de lui fournir des avions performants qui lui permettraient de frapper les troupes russes en profondeur dans les zones occupées.
En mars dernier, des pilotes ukrainiens avaient été évalués sur des simulateurs en Arizona afin de déterminer leur niveau de compétence sur des avions de chasse occidentaux. L’armée de l’air ukrainienne ne dispose pour le moment que de chasseurs de fabrication russe ou soviétique, à savoir des MIG et des Soukhoï.
Seule une poignée de pays européens disposent actuellement d’une réserve suffisante de F-16 pour en livrer à l’Ukraine. Les Pays-Bas et la Pologne ont déjà fait part de leur volonté d’en exporter en Ukraine, mais les États-Unis doivent auparavant approuver ce transfert en raison de la technologie américaine sensible dont sont dotés ces avions.
Développé par General Dynamics [Lockheed Martin] dans les années 1970, le F-16 Falcon a été fabriqué à plus de 4500 exemplaires. Très performant et polyvalent, c’est l’un des chasseurs les plus vendus et utilisés dans le monde.
Le Canada ne dispose pour sa part d’aucun chasseur F-16. L’essentiel de sa chasse est composé de CF-18 Hornet qui seront un jour remplacés par des F-35.
Radio-Canada avec les informations de Agence France-Presse et CNN
L’Ukraine a affirmé jeudi avoir abattu dans la nuit la quasi-totalité des missiles russes ayant visé Kiev et plusieurs régions, faisant un mort à Odessa (sud), Moscou se félicitant à l’inverse d’avoir « détruit » toutes ses cibles.
Cette neuvième série de frappes de missiles russes visant en particulier la capitale depuis le début du mois intervient à l’heure où Kiev dit achever ses préparatifs en vue d’une offensive d’ampleur pour bouter les Russes hors du territoire ukrainien.
Au cours de cette dernière « attaque nocturne », les forces ukrainiennes ont réussi à détruire « 33 cibles aériennes – 29 missiles et 4 drones ! », a déclaré le commandant de l’armée de l’air, Mykola Olechtchouk, sur un total de 30 missiles tirés par la Russie, selon la hiérarchie militaire.
A l’inverse, le ministère russe de la Défense a affirmé avoir « atteint » et « détruit » toutes les cibles de ses frappes nocturnes.
Il n’a pas précisé quels objectifs étaient visés, se bornant à souligner que des « stocks significatifs d’armements et de munitions » ukrainiens avaient été détruits et que des déplacements de troupes avaient été « enrayés ».
L’administration civile et militaire de Kiev a jugé que les attaques russes menées depuis début mai étaient « sans précédent par leur puissance, leur intensité et leur variété ».
Selon elle, des missiles de croisière ont été lancés par des bombardiers stratégiques russes venus de la région de la mer Caspienne, et des drones de reconnaissance ont ensuite survolé la capitale.
« Toutes les cibles ennemies dans l’espace aérien de Kiev ont été détectées et détruites », a-t-elle affirmé.
Dans le port d’Odessa, sur la mer Noire, une personne a été tuée et deux autres blessées lors d’une attaque contre un site industriel, selon un porte-parole de l’armée.
L’armée a également fait état d’attaques de « missiles de croisière » dans la région de Vinnytsia (centre-ouest), et les médias locaux ont rapporté des explosions à Khmelnytskiï (ouest).
Ces nouvelles attaques interviennent au lendemain de la prolongation par Moscou et Kiev de l’accord céréalier pour deux mois, si important pour la sécurité alimentaire mondiale.
Jeudi, un train de marchandises transportant des céréales a déraillé sans faire de victimes en Crimée annexée par la Russie, selon les autorités, en pleine vague d’incidents et de sabotages régulièrement imputés par Moscou à Kiev.
Dans un communiqué, les chemins de fer locaux ont affirmé que l’incident était le résultat des agissements de « tierces personnes », euphémisme semblant faire référence à un sabotage et une formulation employée précédemment lors de déraillements début mai dans une région russe frontalière de l’Ukraine.
Un responsable parlementaire russe a évoqué lui une déflagration due à un engin explosif, sans que les autorités compétentes n’attestent cette thèse à ce stade.
Sur le front diplomatique, l’émissaire chinois envoyé, Li Hui, a conclu mercredi une visite de deux jours à Kiev où il a eu des discussions sur le « règlement » du conflit.
La présidence ukrainienne n’a pas souhaiter confirmer un entretien entre le diplomate et Volodymyr Zelensky, mais Pékin, dans un communiqué, a dit que les deux hommes s’étaient bien vus, sans donner plus de détails.
Sans surprise, le déplacement de M. Li — le plus haut responsable chinois à s’être rendu en Ukraine depuis le début de l’invasion russe — n’a permis aucune percée.
Sa tournée en Europe doit le mener vendredi en Pologne, puis dans les jours qui suivent en Allemagne, en France et en Russie.
Toujours sur le plan diplomatique, le Conseil de sécurité de l’ONU doit se réunir jeudi (19H00 GMT) pour évoquer la situation en Ukraine, à la veille du début du sommet du G7 à Hiroshima (Japon) où le renforcement des sanctions pour étrangler davantage l’économie russe sera au menu.
L’Ukraine célèbre par ailleurs jeudi la Journée de la « vychyvanka », ces chemises amples brodées traditionnelles devenues un symbole de l’unité nationale contre l’invasion russe.
Volodymyr Zelensky a ainsi salué sur Telegram « la force de notre culture » face aux « régimes totalitaires », célébrant à l’occasion le 79e anniversaire commémorant le début de la déportation des Tatars de Crimée, une minorité musulmane, par les autorités soviétiques.
Le président russe Vladimir Poutine prononce son discours lors du défilé militaire du Jour de la Victoire marquant le 78e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale sur la place Rouge à Moscou. Photo: AP/ Gavril Grigorov
Vladimir Poutine a promis lundi la « victoire » dans la « guerre » en Ukraine qu’il estime orchestrée par l’Occident pour détruire la Russie, traçant un parallèle avec la Deuxième Guerre mondiale dans les commémorations des 78 ans de la défaite nazie.
Mais le puissant chef du groupe paramilitaire russe Wagner, Evguéni Prigojine, engagé depuis des mois dans la bataille de Bakhmout, a lancé à l’inverse sur Telegram une longue diatribe pour dénoncer l’incapacité des autorités russes à défaire l’Ukraine, accusant même la hiérarchie militaire de vouloir tromper le président russe.
Plus d’un an après avoir lancé son armée à l’assaut de son voisin qu’il accuse de nazisme et après une série de cuisants échecs, M. Poutine s’efforce de présenter ce conflit comme voulu par les Occidentaux.
« La civilisation est de nouveau à un tournant. Une guerre a été lancée contre notre patrie. »— Une citation de Le président russe Vladimir Poutine
Parade à Moscou Photo: Reuters/Moscow News Agency
M. Poutine a fait cette déclaration depuis l’emblématique place Rouge à Moscou, devant des milliers de soldats, l’élite politique et une poignée de dirigeants de pays d’ex-URSS.
Il a salué les forces russes, notamment les centaines de milliers de réservistes qu’il a mobilisés. L’avenir de notre État, de notre peuple dépend de vous, a martelé le maître du Kremlin, accusant encore Américains et Européens d’utiliser l’Ukraine pour aboutir à la chute et à la destruction de notre pays.
Pour la Russie, pour nos vaillantes forces armées, pour la victoire, hourra!, a-t-il lancé, avant que commence un défilé de milliers d’hommes et de blindés sous le soleil printanier.
Le président Poutine prononce un discours lors du défilé militaire du Jour de la Victoire sur la place Rouge. Photo: Getty Images/Dmitry Astakhov
Cette cérémonie annuelle est censée exalter la puissance russe, comme la victoire de 1945 occupe une place centrale dans l’identité et le nationalisme portés par M. Poutine.
Cette année, les commémorations interviennent au moment où l’armée est plus que jamais enlisée dans sa campagne militaire, après avoir enregistré de lourdes pertes, tandis que se prépare une contre-offensive ukrainienne.
Un lanceur de missile balistique intercontinental russe Yars roule sur la place Rouge lors du défilé militaire du Jour de la Victoire dans le centre de Moscou, le 9 mai 2023. Photo: Getty Images/Gavril Grigorov
Lundi, date à laquelle le monde occidental marque la fin de la Deuxième Guerre mondiale, le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait promis à la Russie la défaite, la même que pour les nazis.
Rompant pour de bon avec la tradition soviétique du 9 mai, Kiev accueillait mardi la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen pour la Journée de l’Europe.
Il a exhorté l’UE à accélérer les livraisons de munitions d’artillerie. Il a également remercié la responsable Ursula von der Leyen pour la décision européenne de fournir un million d’obus d’artillerie à Kiev, avant d’insister sur le calendrier.
Nous avons discuté de la question clé : la rapidité d’approvisionnement et de livraison de ces munitions. On en a déjà besoin sur le champ de bataille, a-t-il ajouté.
L’armée russe affaiblie?
Sur le terrain, après 15 mois d’offensive, l’armée russe apparaît affaiblie par les pertes et les tensions entre l’état-major et les paramilitaires de Wagner. Elle reste empêtrée dans son combat pour la ville de Bakhmout, épicentre des combats dans l’Est depuis des mois.
Le chef de Wagner a choisi la date hautement symbolique du 9 mai pour accuser la hiérarchie militaire d’intrigue et de ne pas avoir tenu sa promesse de livrer des munitions, ainsi que des unités de l’armée régulière de fuir le champ de bataille à Bakhmout.
Pourquoi l’État n’arrive-t-il pas à défendre le pays? a-t-il lancé, affirmant que ce qui est montré à la télévision russe ne reflète pas la réalité.
Si tout est fait pour tromper le commandant en chef [Vladimir Poutine], alors soit le commandant en chef vous déchirera le c.., soit ce sera le peuple russe qui sera furieux si la guerre est perdue, a-t-il insisté dans son habituel langage fleuri.
Protection renforcée
Des tireurs d’élite sur le toit d’un bâtiment lors d’un défilé militaire le Jour de la Victoire, à Moscou. Photo: Reuters/Moscow News Agency
Les commémorations du 9 mai se déroulent aussi sous protection renforcée du fait de la multiplication des attaques en territoire russe attribuées à Kiev par Moscou. Elles se produisent alors qu’une vaste contre-offensive ukrainienne semble imminente et peut-être déjà en cours.
L’attaque la plus spectaculaire, même si elle a soulevé beaucoup de questions, a été une frappe présumée de deux drones contre le Kremlin la semaine dernière, que Moscou affirme avoir déjouée tout en la qualifiant de tentative d’assassinat de M. Poutine.
L’Ukraine a démenti tout rôle dans cette opération, laissant entendre qu’il pouvait s’agir de l’initiative d’un mouvement rebelle russe ou d’une mise en scène du pouvoir.
Il y a eu également des frappes contre des installations énergétiques russes, des sabotages de voies ferrées et de multiples tentatives ou assassinats de personnalités, comme celle qui a blessé samedi l’écrivain nationaliste Zakhar Prilépine.
Résultat, des défilés et manifestations prévus dans plusieurs villes et régions russes ont été supprimés, notamment dans les régions frontalières de l’Ukraine et en Crimée annexée, les autorités avançant un risque terroriste.
À Moscou, la traditionnelle marche du Régiment des Immortels qui rassemble des dizaines de milliers de Russes célébrant les vétérans de 1945 dans les rues de la capitale a été annulée.
Le maître du Kremlin a peu de bonnes nouvelles du front. Ses troupes, qui combattent depuis l’été pour Bakhmout, à l’importance stratégique contestée et en grande partie détruite, ne l’ont toujours pas conquise face à une résistance ukrainienne acharnée.
Les forces russes en contrôlent aujourd’hui la majeure partie, mais cette avancée s’est faite lentement et au prix de lourdes pertes.
Parallèlement, Moscou poursuit ses bombardements sur l’Ukraine. Mardi, l’armée de l’air ukrainienne a affirmé avoir abattu 23 missiles de croisière russes sur les 25 missiles lancés pendant la nuit sur le pays.
L’administration militaire de Kiev a dit avoir abattu une quinzaine de cibles aériennes ennemies autour de la capitale, sans signaler de victimes ni de dégâts importants.
Des sirènes d’alerte ont également été déclenchées dans plusieurs régions ukrainiennes.
La guerre nucléaire est souvent présentée comme une fin potentielle de l’humanité. Ces derniers mois, elle ressurgit en sourdine sur différents fronts. Elle court dans les déclarations russes comme une menace à peine voilée après l’invasion de l’Ukraine. Au même moment, les États-Unis sont engagés dans une démonstration de force au sujet de Taïwan avec la Chine, qui a lancé un vaste programme de renforcement de ses forces nucléaires. Même très faible, le risque d’une attaque nucléaire refait surface : attention, grave danger, préviennent d’éminents spécialistes de l’atome.
L’été dernier, la Ville de New York a publié une vidéo décrivant les étapes que les habitants devaient suivre en cas d’attaque nucléaire. Rentrez à l’intérieur, rapidement et loin des fenêtres. Restez-y. Soyez à l’écoute, informez-vous. La menace, soudainement, prenait des allures plus concrètes. Elle a atterré de nombreux New-Yorkais qui se sont demandé pourquoi la diffuser à ce moment-là.
D’un point de vue scientifique, ce message de fausse alerte a également surpris, mais pour d’autres raisons. On était horrifiés par sa naïveté, se souvient Rachel Bronson, PDG du Bulletin of the Atomic Scientists, un organisme fondé en 1945 par Albert Einstein et des confrères du projet Manhattan à l’origine de la première bombe atomique.
Le conseil – Abritez-vous à l’intérieur. Rapidement – est-il vraiment utile en cas d’attaque nucléaire? Quel effet aurait une bombe atomique lancée sur Manhattan? Prenons l’exemple de la Tsar Bomba.
Avec sa charge de 57 mégatonnes, c’est la bombe la plus puissante jamais créée et testée. Elle a explosé en octobre 1961 dans l’Arctique soviétique et a généré une boule de feu de 2,3 kilomètres de diamètre. L’éclair d’une telle explosion est visible à plus de 1000 kilomètres de distance. Larguée sur une zone densément peuplée comme New York, cette bombe ferait des millions de morts, selon l’outil de simulation en ligne Nukemap.
Le cœur de la zone de déflagration atteindrait un rayon de 3,14 km (30,9 km²). Dans ce périmètre (environ la moitié de Manhattan qui fait 59,1 km²), les habitants seraient exposés à des radiations probablement mortelles et décéderont dans le mois de l’explosion. Parmi les survivants, 15 % décéderont éventuellement d’un cancer.
Le souffle de l’explosion balayerait tout sur un rayon d’environ 4,62 km (67,1 km²), aussi appelé le périmètre de la boule de feu. Comme son nom l’indique, la lumière émise par la chaleur est si intense qu’elle déclenche des incendies et provoque de graves brûlures à grande distance.
Dans un cercle plus large de 8,91 km – désigné comme le heavy blast damage radius –, la zone serait elle aussi fortement sinistrée : les radiations y laissent peu de chances de survie, même des bâtiments en béton pourraient être gravement endommagés ou démolis.
Sur la carte, la moitié de Long Island et le nord-est du New Jersey seraient également touchés, notamment les trois grands aéroports new-yorkais, Newark à l’ouest, JFK au sud et La Guardia à l’est. Au nord, le Bronx n’y échapperait pas : la plupart des bâtiments résidentiels s’effondreraient, les blessures et les décès seraient nombreux, et les risques d’incendies, élevés.
Plus loin encore, les radiations thermiques s’étendraient sur une zone de 60 km (11 300 km2), pour atteindre des villes aussi éloignées de Manhattan que Stamford, dans l’État du Connecticut, ou encore Bedminster, dans le New Jersey, qui abrite le Trump National Golf Club. Les habitants pourraient souffrir de brûlures au troisième degré suffisamment sévères pour entraîner des blessures handicapantes et des amputations.
Le bilan humain d’une telle attaque est estimé à 7,74 millions de morts et 4,46 millions de blessés en 24 heures. Tous les dégâts mentionnés diffèrent en fonction de l’altitude d’explosion, analyse Nukemap, ce site en ligne créé par Alex Wellerstein, un historien des sciences et professeur adjoint au Stevens Institute of Technology, dans le New Jersey.
La sinistre projection repose sur le lancement d’une seule bombe, mais l’inventaire mondial comprendrait plus de 12 000 ogives, dont plus de 9000 ont été mises en stock pour une utilisation potentielle, selon le Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI), un institut international indépendant de recherche sur les conflits et les armes.
Difficile de dresser un portrait précis de la situation, certains pays affichant plus de transparence (les États-Unis) que d’autres (Israël).
Le cargo soviétique Anosov repart de Cuba chargé de missiles, conformément à l’accord américano-soviétique sur le retrait des missiles russes de Cuba en 1962. Photo : Getty Images
La survie, « pas une garantie »
Depuis la crise des missiles de Cuba en 1962, le monde n’a jamais été aussi proche de l’utilisation effective d’armes nucléaires. Le message a été porté par le président américain Joe Biden en octobre 2022. Avec cette mise en garde lâchée comme un missile : attention à l’Armageddon. Il est aussi véhiculé par d’éminents physiciens et scientifiques qui ont historiquement entretenu une relation particulière avec le contrôle des armes nucléaires grâce à leur expertise technique et analytique.
Alors que la crise des missiles de Cuba a duré 13 jours, la situation actuelle se détériore depuis plus d’un an. Plus longtemps cela dure, plus le danger s’accentue, alerte le mouvement Pugwash, une organisation internationale qui rassemble des personnalités des mondes universitaire et politique autour des menaces contre la sécurité mondiale.
Son secrétaire général, le physicien italien et professeur Paolo Cotta Ramusino, s’efforce de maintenir des relations avec ses confrères russes et dit s’être rendu récemment en Russie, en octobre et décembre derniers. Il y a de l’inquiétude là-bas, se contente-t-il de répéter, en entrevue à Radio-Canada, sans en révéler davantage. Le contrôle de la situation est assuré par les politiciens.
Fidèle à la mission de son organisation, M. Cotta Ramusino défend la désescalade militaire et le retour du dialogue entre les parties. Pugwash s’est vu décerner le prix Nobel de la paix en 1995 pour ses efforts sur le désarmement nucléaire et tire son nom d’une ville de Nouvelle-Écosse où ses conférences ont vu le jour en 1957.
« Il faut trouver des compromis et arrêter la guerre. »— Une citation de Paolo Cotta Ramusino, physicien et secrétaire général de Pugwash
Entre dissuasion militaire et menaces plus ou moins explicites, les postures qui attisent les incitations à une première frappe sont particulièrement préoccupantes, écrit aussi l’éminent physicien américain Richard L. Garwin dans un article scientifique co-signé le 13 mars 2023 avec Frank N. von Hippel, sur le site spécialisé The Bulletin of the Atomic Scientists.
Le parcours de ce grand spécialiste du nucléaire est éloquent : après avoir joué un rôle crucial dans le développement de la première bombe à hydrogène, il est devenu un ardent défenseur du contrôle des armements et conseiller de tous les présidents américains, d’Eisenhower à Obama. À 95 ans en 2023, il continue son combat pour éviter un holocauste nucléaire, selon ses termes. En ce sens, il invite la Chine, la Russie et les États-Unis à un dur travail de négociations réelles.
« Le succès – et la survie – ne sont pas garantis d’avance. »— Une citation de Richard L. Garwin, physicien, membre de l’Académie nationale des sciences américaine
Ce tabou sur la fin de tout
Dans l’espace public, le spectre nucléaire ressurgit sporadiquement à coup de déclarations-chocs. La partition de guerre se joue sur un rythme crescendo/diminuendo. Au quatrième jour de l’invasion de l’Ukraine par Moscou, Vladimir Poutine a d’emblée annoncé la mise en alerte de la force de dissuasion nucléaire de son armée.Début de la liste de 6 éléments. Passer la liste?
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Vladimir Poutine
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Vladimir Poutine.
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Jake Sullivan.
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Antony Blinken.
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Joe Biden.
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Vladimir Poutine.
Une seule et unique frappe nucléaire représente un risque majeur pour la pérennité de l’humanité, selon les scénarios américains, indique Pavel Podvig, spécialiste des forces nucléaires russes à l’Institut des Nations unies pour la recherche sur le désarmement (Unidir) à Genève.
Il n’y a aucune façon de contrôler l’escalade qu’elle engendrerait. Même un simple exercice de démonstration au-dessus de la mer Noire, qui ne blesserait personne et ne ferait aucun dégât, lancerait le signal de tuer beaucoup de gens, affirme M. Podvig.
Cette même analyse est partagée par les porte-parole de Pugwash, mouvement qui fut actif pendant la guerre froide et servit d’espace de réflexion et de canal de communication entre le bloc communiste de l’Est et les démocraties occidentales.
Ses membres – leaders politiques, scientifiques, diplomates, experts en affaires mondiales – devaient se réunir de nouveau au Qatar au printemps, mais la rencontre a été reportée en 2024.
Nous travaillerons toujours, pour le temps dont nous disposons, avec cette idée : ne jamais utiliser d’armes nucléaires, insiste le physicien Cotta Ramusino.
Un avion de transport militaire russe Iliouchine Il-80, également connu sous le nom « l’avion de l’Apocalypse », et un avion de chasse MiG-29 lors d’une répétition pour un défilé aérien, dans le cadre d’une parade militaire marquant l’anniversaire de la victoire sur l’Allemagne nazie lors de la Seconde Guerre mondiale, à Moscou, le 7 mai 2022.Photo: Reuters/Shamil Zhumatov
Des garde-fous qui s’effritent
Mais ce qui inquiète surtout les experts en la matière, c’est le délitement du contrôle des armes nucléaires par les traités existants.
Le traité ABM (1972) interdisant les missiles antibalistiques, et qui a longtemps constitué un garde-fou des tensions nucléaires entre les États-Unis et l’URSS, est caduc depuis 2002. Celui sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI), signé en 1987, a expiré en 2019 après les retraits américain puis russe.
Le traité New Start reste le seul à réglementer la taille et la composition des arsenaux des États-Unis et de la Russie. Or l’annonce récente par Vladimir Poutine de la suspension de la participation russe à ce traité, qui doit expirer en 2026, fragilise davantage l’équilibre mondial de sécurité.
Rien n’indique pour l’instant qu’il y ait des négociations en vue d’un suivi, ce qui signifierait qu’il n’existera plus aucun traité régissant le nombre d’armes nucléaires, déplore, en entrevue, Wilfred Wan, directeur du programme sur les armes de destruction massive pour le SIPRI (Stockholm International Peace Research Institute).
La Russie et les États-Unis possèdent à eux seuls plus de 90 % des forces nucléaires dans le monde. Les sept autres États qui en sont dotés (Royaume-Uni, France, Chine, Inde, Pakistan, Israël et Corée du Nord) développent ou déploient de nouveaux systèmes d’armes, ou ont annoncé leur intention de le faire. Finie, donc, l’ère du désarmement post-guerre froide, observe Wilfred Wan, du SIPRI.
Le nombre d’armes nucléaires dans le monde avait pourtant considérablement diminué ces trois dernières décennies, en passant d’un record d’environ 70 300 en 1986 à une estimation de plus de 12 500 au début de 2023. Aujourd’hui, les États continuent de moderniser leurs forces nucléaires restantes à un rythme soutenu et plusieurs ajoutent de nouveaux types d’armes, selon divers rapports. Des armes plus utilisables sur le champ de bataille, observe M. Wan.
Il rappelle que les risques associés ne s’évaluent pas seulement en nombre de morts, mais aussi en termes d’impact environnemental et social que ces armes peuvent produire – les migrations, les famines causées.
La Chine est en pleine expansion de son arsenal. Le ministère américain de la Défense prévoit que Pékin pourrait disposer d’environ 1500 têtes nucléaires en 2035, selon un rapport publié en 2022, soit plus du triple de son armement actuel évalué à 410 ogives par la Fédération des scientifiques américains (FAS).
La Corée du Nord a intensifié ses essais de missiles, dont le plus inquiétant a eu lieu le 4 octobre, quand elle a effectué un tir balistique au-dessus du Japon. L’Iran continue d’augmenter sa capacité d’enrichissement de l’uranium. L’Inde modernise son arsenal nucléaire, qui compte quelque 160 ogives, tout comme le Pakistan (170).
Quand le recours à une seule ogive peut mener au désastre, c’est surtout l’engagement formel des États à restreindre leurs capacités nucléaires qui importe, plus que le nombre maximal d’armes autorisé, résume le chercheur onusien Pavel Podvig.
Photo: Selon une enquête de la Commission européenne européens, 84 % des répondants sont favorables à la fin du changement d’heure. Crédit: iStock
90 secondes avant minuit
Pour dépeindre efficacement la gravité actuelle de la situation, un groupe de scientifiques a annoncé en janvier dans le Bulletin of the Atomic Scientists que l’horloge de l’Apocalypse serait avancée de 90 secondes avant minuit. Considérant qu’à minuit, tout explose, l’heure fatidique n’a jamais été aussi proche.
L’ajustement ne repose pas sur des données spécifiques, mais sur le jugement d’experts qui évaluent toute une palette de paramètres. Ils redoutent aujourd’hui les possibilités d’escalade par accident, intention ou erreur de calcul ou que le conflit échappe au contrôle de quiconque. Ils s’inquiètent entre autres de la violation des protocoles internationaux et des risques de la guerre menée sur les sites des réacteurs nucléaires de Tchernobyl et de Zaporijia, en Ukraine.
L’image-choc du décompte, réévalué annuellement depuis 1947, offre un outil de communication accessible pour démocratiser la très technique question du nucléaire conçue pour tenir le public à l’écart, selon Rachel Bronson, PDG du Bulletin.
Son site spécialisé tente d’y remédier. L’opinion publique, mieux informée sur le nucléaire, agira comme une force motrice auprès des décideurs politiques, espère Mme Bronson… dans l’héritage des scientifiques fondateurs du Bulletin qui, ayant contribué à la mise au point des premières armes atomiques, ont cherché à conscientiser les populations sur leurs dangers irréversibles.
C’est aussi la mission que poursuit le secrétaire général de Pugwash à travers le monde : En nucléaire, il n’y a pas de forte probabilité, c’est la probabilité qui compte.
Radio-Canada par Maud Cucchi, illustrations: Mathieu Blanchette
L’écrivain nationaliste russe Zakhar Prilépine, soutien farouche de l’attaque du Kremlin en Ukraine, a été grièvement blessé samedi dans l’explosion de sa voiture en Russie, une attaque que Moscou impute à l’Ukraine et l’Occident.
Cette explosion, qui a tué le chauffeur de l’écrivain, pratiquement détruit le véhicule et laissé un cratère important, survient alors que des frappes de drones, sabotages et attentats présumés se multiplient ces dernières semaines sur le territoire russe, sans que leurs auteurs soient clairement identifiés.
Le Kremlin désigne comme responsable l’Ukraine, qui dément, alors que se profile une vaste offensive des forces armées ukrainiennes et les grandes célébrations en Russie du 9 mai, jour de la victoire contre Hitler.
Dans la nuit de mardi à mercredi, une attaque de drones a notamment frappé un bâtiment du Kremlin, le cœur du pouvoir russe. Kiev a démenti toute implication.
« Une personne a été tuée par l’explosion et l’écrivain Zakhar Prilépine, qui se trouvait dans la voiture, a été blessé », a indiqué le ministère de l’Intérieur, qui a ensuite affirmé qu’un suspect né en 1993 et avec des antécédents judiciaires avait été arrêté dans la région de Nijni Novgorod (centre-ouest), où ont eu lieu les faits.
« Acte terroriste »
L’agence Interfax, citant les services de secours médical, a indiqué que l’écrivain était dans un état « grave ». « Il a été décidé de ne pas le transférer à Moscou et de l’opérer à Nijni Novgorod. Son état est considéré comme grave », a indiqué cette source.
Le gouverneur de la région avait précédemment affirmé que Zakhar Prilépine souffrait de « fractures mineures » et que sa vie n’était pas en danger.
La porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a accusé l’Ukraine, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et l’Otan d’être derrière cet acte « terroriste ». « Responsabilité directe des Etats-Unis et la Grande Bretagne. Nous prions pour Zakhar », a-t-elle écrit sur Telegram.
Selon le Comité d’enquête, qui parle d' »acte terroriste », l’écrivain était dans sa voiture « avec sa famille » quand l’explosion s’est produite vers 11H00 (8H00 GMT) dans une localité du district de Borski.
Une photo des lieux de l’incident, publiée par le Comité d’enquête, montre ce qu’il reste d’un véhicule blanc à l’avant déchiqueté et retourné sur le toit, devant un cratère sur une route de terre, dans une zone boisée.
Figure nationaliste et littéraire
Figure bien connue de la scène littéraire russe, traduit dans plusieurs pays, l’écrivain, âgé de 47 ans, s’est engagé dès 2014 en faveur des séparatistes prorusses de l’est de l’Ukraine, aux côtés desquels il a combattu.
Depuis, il se rend régulièrement dans l’est de l’Ukraine et défend le président Vladimir Poutine et son offensive massive contre Kiev, lancée le 24 février 2022.
Auteur de romans et nouvelles s’inspirant de son expérience personnelle, notamment dans des zones de guerre, il participe activement aux mouvements patriotiques et traditionalistes en Russie.
Sous sanctions européennes depuis fin février 2022, il avait participé l’an dernier à un groupe parlementaire chargé de débusquer les acteurs du monde culturel en Russie ayant des « positions antirusses ».
« La Russie se transforme en Donbass (région de l’est de l’Ukraine). Un grand nombre de personnes veulent la détruire (…) Je n’ai aucun cas de conscience par rapport à ce qui se passe. C’est arrivé, il faut maintenant aller jusqu’au bout », disait-il dans une interview au média Chita.ru en novembre dernier.
Avant de se rallier au régime de Vladimir Poutine, ce vétéran des guerres de Tchétchénie dans les années 1990 avait milité un temps dans l’opposition au sein du parti national-bolchévique du sulfureux écrivain Edouard Limonov (1943-2020).
Zakhar Prilépine n’est pas la première figure du mouvement proguerre russe à être visée par un attentat.
En août dernier, Daria Douguina, la fille de l’idéologue ultranationaliste Alexandre Douguine, elle-même blogueuse et journaliste engagée, est morte dans l’explosion de la voiture dans laquelle elle se trouvait, dans la région de Moscou.
Début avril, un influent blogueur paramilitaire, Vladlen Tatarskii, chantre de l’offensive en Ukraine, a été tué dans l’explosion d’une statuette piégée dans un café du centre de Saint-Pétersbourg.
Cole Zelenco, 21 ans, et Kyle Porter, 27 ans, ont été tués lors de combats dans la région de Bakhmout, dans l’est de l’Ukraine, le 26 avril. Ils auraient été bombardés par l’artillerie russe. Photo : Photo Fournie à CBC
Deux Canadiens qui combattaient aux côtés de l’armée ukrainienne ont été tués dans les combats à Bakhmout, selon CBC News. L’un des deux hommes avait d’ailleurs déclaré au diffuseur public, avant sa mort, que les conditions sur le front tenaient de la « boucherie ».
Cole Zelenco, 21 ans, et Kyle Porter, 27 ans, respectivement originaires de Calgary en Alberta, et de St. Catharines, en Ontario, servaient tous deux au sein de la Légion internationale ukrainienne, qui était rattachée à la 92e brigade mécanisée.
Cette unité a encaissé le plus gros des impacts liés à la défense, par les forces ukrainiennes, de la ville de Bakhmout face à l’assaut russe.
La ville de Bakhmout (le point sur la carte, dans l’est de l’Ukraine) est le siège de combats particulièrement violents entre troupes ukrainiennes et russes. Photo : Google Maps
Située dans la région du Donbass, dans l’est du pays, cette municipalité est le théâtre de la plus longue bataille de la guerre jusqu’à présent; des milliers, voire des dizaines de milliers d’hommes ont été blessés ou tués de chaque côté de la ligne de front
Quelques jours avant sa mort, M. Porter était en contact avec CBC News; il avait transmis plusieurs messages texte où il évoquait son anxiété à propos des conditions difficiles sur le front.
Laissez-moi voir comment je vais survivre aux prochains jours…, a-t-il écrit trois jours avant sa mort.
C’était un casse-pipe la première fois et je ne m’attends pas à ce que ce soit mieux, cette fois-ci.
Dans une entrevue, leur officier, un combattant de la Légion surnommé le dentiste, a fait savoir qu’en date du 26 avril, vers 18 h, heure locale, les deux Canadiens faisaient partie d’un groupe plus vaste de soldats qui avaient le mandat de tenir une importante ligne de ravitaillement vers Bakhmout.
Toujours selon cet officier, l’unité a été lourdement bombardée par les Russes. MM. Porter et Zelaco, en compagnie d’au moins trois autres soldats ukrainiens, ont cherché à se mettre à l’abri dans un bunker renforcé, mais un obus est tombé directement sur cet emplacement. Tous ont été tués.
Ils étaient tous deux très fiers de ce qu’ils accomplissaient, a encore indiqué le commandant. Nous étions comme une famille. J’ai l’impression d’avoir perdu mes frères.
Les deux hommes ont précédemment servi au sein des Forces armées canadiennes, mais ont quitté ses rangs avant de se rendre en Ukraine.
Un décompte officieux effectué par CBC News indique qu’il s’agirait des quatrième et cinquième Canadiens tués dans le cadre de la guerre en Ukraine depuis le début de l’invasion russe, en février 2022.
Une campagne de sociofinancement a été lancée pour rapatrier la dépouille de M. Zelenco; celle-ci a été récupérée et se trouve maintenant à Kharkiv. Quelque 30 000 $ auraient déjà été amassés pour couvrir les frais de transport et le coût des funérailles.
Le corps de M. Porter n’a pas encore été récupéré, mais son commandant a fait savoir que des membres de son unité espéraient y parvenir prochainement.
Un bénévole ayant longtemps œuvré à Calgary et qui est maintenant installé à Kharkiv, Paul Hugues, a indiqué qu’il prévoyait aider la famille de M. Porter à rapatrier son corps au Canada.