Le Congo Brazzaville est incontestablement un pays riche, voire même très riche. Pourtant il manque de routes, d’hôpitaux, d’eau potable, d’électricité, d’écoles… et 70% de ses 4 millions d’habitants vivent en dessous du « seuil de pauvreté », avec moins d’1 $ par jour. Interview de Paulin Makaya [*] par « Le Challenger » :
LE CHALLENGER : Comment expliquez-vous un tel décalage ?
PAULIN MAKAYA : Le problème du Congo B. se trouve d’abord au niveau de sa classe politique. Après les « indépendances » notre pays avait eu la chance d’avoir des visionnaires à sa tête, notamment les présidents Fulbert Youlou, Massamba débat et Le vice président Jacques Opango, qui au lieu de privilégier leurs intérêts personnels ont plutôt privilégié l’intérêt général. Pour preuve, il n’y a qu’à voir leur bilan après la prise du pouvoir par les révolutionnaires, qui a mon avis n’avaient qu’un problème de ventre.
Pour moi le Congo a trois principaux problèmes, le 1er c’est Mr Sassou lui-même, le 2eme problème, c’est son armée, au lieu d’être le symbole de l’« unité nationale », (qui malheureusement) est tout simplement devenue, le socle de l’« ethnisation » et de la « tribalisation » sociale, garant du pouvoir familiale et de la division de notre peuple. Enfin le dernier point est l’irresponsabilité de sa classe politique. Parfois il m’arrive de croire que le peuple congolais est plus mur que ces dirigeants politiques.
LE CHALLENGER : Pensez-vous que le peuple congolais peut-il s’en sortir de la pauvreté avec le pouvoir actuel ?
PAULIN MAKAYA : Non, du tout. La situation socio-politique et économique de notre pays le Congo a atteint son point de non retour. Comment pouvez-vous expliquer en plein 21 ème siècle que le Congo n’est ni électricité, ni d’eau potable, ni hôpitaux décents, et ni écoles adéquates. Et pourtant le baril de pétrole a atteint son niveau le plus élevé de son histoire. Vous comprendrez pourquoi nous avons mis en place le « Collectif Unis pour le Congo ». C’est par ce que nous avons compris que Mr Sassou et ses hommes n’ont aucune ambition politique Nationale afin de sortir notre pays le Congo de son profond sommeil hivernal. Voila pourquoi, nous avons décidé de mobiliser à tous les niveaux toutes les couches sociales et sans oublier sa diaspora à tous les niveaux.
LE CHALLENGER : Est-il possible à l’étape actuelle de demander le départ de la « dictature » Congolaise ?
PAULIN MAKAYA : L’histoire universelle nous a légué des leçons sociologiques et celle du Congo les a confirmées en juillet 1992. En un mot, la démocratie est un contrat social de paix qui a ses critères qu’il faut connaître et ses règles à respecter. Ainsi, sans une élection ouverte à tous, accessible à tous et transparente, le dictateur aura beau user de stratagème, confiner des mercenaires dans son sous-sol et user de la violence lorsque nécessaire, il finit toujours comme tous les dictateurs.
LE CHALLENGER : Cinq ans après votre démission, les militants de votre ancien parti le « MCDDI » vous donne raison aujourd’hui suite aux événements politiques. Pouvons-nous-vous appelez Prophète ?
PAULIN MAKAYA : Non ! Je ne suis pas un prophète, je ne serais donc présomptueux. Je constate tout simplement aujourd’hui que mon ancien parti le « MCDDI » n’a plus d’âme. Il a perdu son identité politique. Dans la vie il faut se battre pour les grandes idées. Ce que je sais, à l’époque, il y’avait trois principales écoles de pensée politiques. Le « Kolelisme », le « Lissoubisme », et le « Sassouisme ». Ce que je constate est que la première école a disparu au profit du troisième. Quelle tristesse ! Nous devons apprendre à ces messieurs la grandeur du patriotisme, qui est l’amour de son pays et la détestation du « tribalisme » qui est la haine des autres.
LE CHALLENGER : Pensez-vous que Mr Sassou peut-il faire aujourd’hui ce qu’il n’a pu faire en 25 ans de pouvoir sans partage ?
PAULIN MAKAYA : Monsieur Sassou se bat plus pour les vitrines et non pour les victimes. Il n’y a qu’à voir comment il se comporte vis-à-vis de son peuple, je pense que monsieur sassou a manqué son passage sur cette terre. Il tombera sans doute dans la poubelle de l’histoire congolaise. Si j’avais un conseil à lui donner, après tant d’année de pouvoir, il devait tirer sa révérence, c’est-à-dire démissionner. Comment expliquer que quelqu’un qui a tous les pouvoirs concentrés autour de sa propre personne ne soit capable d’améliorer les conditions de vie de son peuple.
Je déteste son coté jouissif. On ne peut gouverner sous le sceau du hasard et de l’improvisation. Je me pose la question de savoir si Mr Sassou et ses hommes savent ce que c’est que la politique de l’état ? Pour preuve ils ont conduit l’état à la « faillite (Initiative Pays Pauvres très endettés PPTE) ».
LE CHALLENGER : Que proposez-vous pour le Congo aujourd’hui ?
PAULIN MAKAYA : Le Congo est vraiment malade. Pour le sortir de l’état où il est aujourd’hui, il a besoin de tous ses enfants. Voilà pourquoi, ensemble avec d’autres frères nous avions mis en chantier un rassemblement des congolais à l’extérieur et ceux du Congo dénommé « Unis Pour Le Congo » en sigle « UPC », afin de proposer des solutions à la crise socio-économique et politiquo-éthique dont souffre le Congo, notre mère patrie. Enfin, pour répondre à votre question, « Unis Pour Le Congo » est contre :
La captation des finances publiques, le non-respect des règles de l’orthodoxie financière, d’accès aux emplois, d’attribution des marchés publics, l’assujettissement des nombreuses institutions constitutionnelles de la République par le pouvoir exécutif? la spoliation des biens de l’Etat, l’accaparement des entreprises publiques liquidées pour la circonstance et cela à des fins personnelles, les malversations notoires dans la gestion du pétrole au profit personnel de Mr Sassou Nguesso, de sa famille et de son clan.
Vous voyez bien que tout montre aujourd’hui que les gestionnaires de l’Etat, au plus haut niveau de décision, n’ont qu’une ambition Nationale. Ils défigurent la République et hypothèquent l’avenir économique du pays et d’aggraver la pauvreté. Ils confondent volontiers l’« intérêt national » et l’« intérêt privé ».
C’est pourquoi, « Unis Pour Le Congo », prend donc l’engagement de promouvoir une démarche de rupture avec la situation qui prévaut dans notre pays, démarche consistant d’abord à :
– Faciliter le regroupement de tous les patriotes sincères autour d’une vision claire, un projet politique pertinent pour un développement dynamique et multisectoriel du Congo Brazzaville. Et ce, au-delà des clivages idéologiques et ethniques. Une vision restaurant l’impartialité de l’« initiative républicaine de développement durable » et de l’« unité de la nation »,
– Susciter et développer un courant actif sur le plan de la production intellectuelle, artistique, scientifique et écologique, en vue de la prospérité et du bien-être du Congo,
– Concourir à la réhabilitation de l‘état, que des décennies de banalisation ont réduit à sa plus simple expression et dont les repères universels ont été dilués dans la médiocrité,
– Travailler au renouvellement de la classe politique, afin d’initier les changements indispensables à la construction d’un Congo nouveau, travailler au retour de l’« éthique » morale, républicaine dans notre pays, notamment au niveau de la vie publique et privée des acteurs politiques.
Lutter pour la réhabilitation de la « Constitution » de 15 Mars 1992,
LE CHALLENGER : Votre mot de la fin
PAULIN MAKAYA : Le Congo est entre les mains de l’incompétence et du cynisme par ce que nous sommes totalement démunis du Nord au Sud, de L’est à L’ouest en passant par le centre. Nous devons donc nous mobiliser autour d’« Unis Pour Le Congo » pour le départ sans condition de ce système mafieux, c’est-à-dire un système de Gourou. Il va donc falloir choisir entre l’école de guerre de Mr Sassou et l’école des projets de développement d’« Unis Pour Le Congo ». C’est pour quoi, après la sortie officielle d’« Unis Pour Le Congo » j’annoncerais mon retour au bercail dans les « médias internationaux » après 13 ans de vie en exil.
NOTE :
[*] Monsieur Paulin Makaya est le coordonateur et le président du collectif « Unis pour le Congo (UPC) » regroupant l’« opposition extérieure » et l’« opposition intérieure », qui s’inscrit, résolument, dans une logique de rupture totale de la politique actuelle de monsieur Sassou et des partis de la majorité présidentielle qui le soutiennent, d’une part et d’autre part, ce point de fracture est non négociable dans le cadre d’un rapprochement politique avec toute structure désireuse de s’allier.
Source: Infopage Congo(Réseau Nerrati-Press)