Congo: Hommage à Jean-Baptiste Fila, à l’occasion du 50e anniversaire de sa mort

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Jean-Baptiste Fila est mort depuis 50 ans. Une mort qui a, aujourd’hui, atteint l’âge des noces d’or. Et cet hommage est une rose d’or à lui offrir dans la beauté pionnière de ses mérites pour notre belle capitale : Brazzaville.

Né vers 1910 à Makondo dans le district de Boko au sud de Brazzaville, de Mayika son père aux nombreux enfants, et, de Ndziendolo sa mère dont il fut un rejeton de fils unique sorti du ventre maternel. De ce père polygame – au style traditionnel – il était entouré dans sa filiation paternelle de deux frères jumeaux : tata Bazounzi et tata Batsimba et beaucoup d’autres frères.

Adolescent, il vint à Brazzaville en tant que catéchumène pour apprendre les rudiments du catéchisme auprès des pères du Saint-Esprit.

Débrouillard comme tout bon moukongo, dès qu’il commença des petites activités lucratives, il acquit une parcelle dans la commune de Bacongo où il ouvrit un petit commerce de proximité très courant à l’époque afin de pouvoir  joindre les deux bouts du mois, pour  nourrir sa famille.

La traversée de la rive gauche du fleuve Congo sollicita son esprit et prit le courage de s’intéresser  au passage régulier pour se rendre à Kinshasa en République démocratique du Congo.

Grâce à sa fibre énergique et à son habileté, il débuta ce commerce de fortune par l’achat des petites marchandises très prisées telles que : allumettes, bougies, biscuits, savons de toilette et de lessive, sardines, boîtes de corn-beef et autres boîtes de conserve. Cette gamme de marchandises vendues, sur une table déposée au coin de sa parcelle, était soumise à une orthodoxie financière à la gestion rigoureuse lui ayant permis de vite prospérer. Une prospérité, aux racines profondes dont les branches de ses différentes activités dans leur croissance, fleurissait en donnant de bons fruits par l’ouverture d’un magasin à l’avant de sa parcelle. Son rêve de commerçant avec un fonds d’établissement vit le jour.

Le succès de ses affaires dans cette jeune capitale lui donna l’occasion de construire une maison moderne dans la rue Bergère, près du temple protestant de Bacongo pour laquelle il obtint le prix de la ‘’meilleure concession’’ de la Commune. La croissance exponentielle de son commerce lui permit  d’acheter un camion de transport pour se rendre en brousse et dans les contrées lointaines afin d’y acheter des aliments prisés appréciés par sa clientèle, comme le manioc, du gibier et autres ingrédients.

A chaque retour de sa tournée, il réservait toujours de la nourriture pour ses amis et donnait à manger aux plus démunis. Il était imbu d’une générosité remarquable.

L’onction de la renommée reçue pour sa villa lui permit d’abriter les réunions politiques de l’Abbé Fulbert Youlou, alors maire de Brazzaville et candidat à la présidence du pays, lorsqu’il deviendrait indépendant. L’Abbé y recevait ses collègues de la République centrafricaine, à savoir le futur président Barthélemy Boganda ainsi que les notables nationaux tels que Nzalakanda et bien d’autres.

Durant ces occasions frappées du sceau de l’amitié et d’exquise courtoisie, sa fille aînée Marcelline Fila faisait montre d’habitudes civilisées sorties du moule de l’internat des religieuses de St Joseph de Cluny qui lui avaient appris à dresser la table à la manière européenne avec une dextérité ornementale. A cet effet, le service des  convives pouvait enfin assouvir la faim des hôtes de marque.

Fila Jean-Baptiste apporta son soutien indéfectible à la cause politique de l’Abbé Fulbert Youlou et n’épargna aucun sou pour financer sa campagne aux premières présidentielles. Il mourut, le jeudi 29 octobre 1959, sur le pont de la Loufoulakari – à l’endroit où le résistant Boueta-Bongo fut décapité et jeté dans l’eau par les colonisateurs – au moment où il était de retour du village paternel avec ses frères pour la construction des pierres tombales du clan paternel.

Il était du clan Pandzou et de la même lignée que le résistant. Fila ‘’celui qui accompagne’’ réussit sa mission de ‘’Jean-Baptiste’’ auprès de Fulbert Youlou. Cette mort inopinée, bouleversa et poussa l’Abbé de l’inhumer à ses frais à l’entrée du premier cimetière de Moukondzi-Ngouaka, à l’ombre de l’arbre de fer où il a reposé pendant des années.

En 1989, ses restes mortuaires furent transférés au village  Loua conformément à sa volonté. En effet, avant de mourir, monsieur Fila avait émis le vœu d’être enterré  au terrain de Loua qu’il avait acquis quelques années auparavant pour ses enfants. Sa fille Marcelline Fila, prit cette initiative, à l’occasion du trentième anniversaire de sa mort, de le faire avec le concours de ses frères et sœurs.

Pour honorer sa mémoire, la municipalité de Brazzaville avait donné son nom à une rue de la commune de Makélékélé. Celle-ci commence à Bacongo au marché Commission et se profile aux abords du marché Bourreau pour se terminer vers le Fleuve Congo. Véritable cadeau magnifique, les citadins qui la parcourent, laissent dans l’urbanité de la peau, la marque de leur passage au martèlement rythmé, faisant résonner le cœur de Jean-Baptiste Fila.

Bernard NKOUNKOU

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