Posts Tagged ‘Attentat’

Pourquoi des Tadjiks ont-ils commis l’attentat de Moscou ?

avril 1, 2024

Les auteurs présumés de l’attaque terroriste du 22 mars à Moscou sont originaire du Tadjikistan. Retour sur l’histoire compliquée d’un État d’Asie centrale artificiel et faible.

La question de Montesquieu à propos des Persans – « Comment peut-on être persan ? » – vaut également pour le plus petit pays d’Asie centrale. Un cinquième de la France, une contrée largement inconnue coincée entre la Chine, l’Afghanistan, le Kirghizistan et l’Ouzbékistan, qui a surgi sur le devant de la scène mondiale… à Moscou. Les Tadjiks sont du reste des persanophones, les seuls au milieu de pays très majoritairement turcophones, même si le bilinguisme, voire le trilinguisme, est monnaie courante dans ces territoires.

Pour comprendre l’origine des auteurs présumés de l’attentat commis à Moscou le vendredi 22 mars, il faut remonter justement à Moscou. Voire à Saint-Pétersbourg, quand la Russie tsariste, dans le Grand Jeu l’opposant à l’Angleterre au XIXe siècle, s’empara du nord de l’actuel Tadjikistan en 1864, le grand émirat de Boukhara (actuel Ouzbékistan, avec sa partie orientale qui représente le sud du Tadjikistan) passant peu après sous son protectorat, à la frontière avec l’Afghanistan. Mais de Tadjikistan, il n’était pas encore question.

Le Tadjikistan, une création de Staline

Cette nation ne surgit qu’avec un « commissaire aux nationalités », qui n’est autre que Staline. « La politique systématique de l’URSS a consisté à casser les anciens empires, les anciens espaces de solidarité et de civilisation, en inventant le principe de nationalité », explique l’islamologue Olivier Roy, auteur de La Nouvelle Asie centrale ou la Fabrication des nations (Seuil). On démantela les émirats ainsi que l’ex-Turkestan russe. C’est ainsi que la langue supposée du peuple, le tadjik, proche du persan, fut érigée en langue nationale, transcrite en cyrillique, après que fut décrété qu’il ne s’agissait nullement de persan, langue de l’Iran, ennemie de l’URSS.

Moscou n’a pas agi autrement avec le moldave (dont on estima qu’il n’avait rien à voir avec le roumain), l’estonien artificiellement distingué du finlandais, l’ouzbek, le turkmène, langues turcophones, normalisées en langues nationales. La langue permettait de forger au forceps une nation, tabula rasa propice à la mise en place de la nouvelle architecture soviétique.

Orphelin de l’identité persane

Mais dans le découpage des frontières de l’URSS de 1924, le Tadjikistan fut perçu comme quantité négligeable. Non seulement il n’est qu’une république autonome au sein de la république soviétique d’Ouzbékistan, mais il se voit privé de ses deux grandes villes de culture persane, Samarcande et Boukhara, dévolues au voisin ouzbek, qui vont être ouzbékisées. Il faudra attendre 1929 pour qu’elle accède au même statut que ses voisins d’Asie centrale. « L’URSS a créé ex nihilo le Tadjikistan, qui n’était rien qu’un ensemble hétéroclite de montagnes et de vallées. » Du village Douchanbé – qui signifie « mardi » en tadjik car il s’y tenait un marché ce jour-là – a été faite une capitale, renommée Stalinabad ; la deuxième ville du pays, au nord, fut, elle, rebaptisée Leninabad, car Lénine désormais passait après Staline.

Plus intéressé par le soutien d’Ankara que par celui de Téhéran, Moscou a donc préféré choyer les turcophones plutôt que les persanophones, même si l’Armée rouge, pendant près de dix ans, a dû mater la révolte des basmatchis, musulmans turcophones, dans toute l’Asie centrale. De là, un Tadjikistan à l’identité faible dont les élites ne provenaient pas du peuple lui-même.

« Ces élites, précise Olivier Roy, ont été des communistes revenus de Samarcande et Boukhara, ou des Ismaéliens du Pamir persécutés par les Tadjiks sunnites, qui ont embrassé le communisme. » Une carte de l’atlas soviétique de 1968 indique dix-neuf groupes ethniques pour le Tadjikistan ainsi que onze groupes linguistiques, dont cinq turcophones et six indo-européens (parmi ceux-ci, le tadjik).

Émergence des islamistes après 1989

Une mosaïque qui va exploser après l’indépendance en 1991. « Les identités locales, régionales, sortent des vallées. » On trouve alors le Parti de la renaissance islamique, qui ne prêche pas la révolution islamique, comme en Iran, mais tout de même une radicalisation avec un retour à la tradition, à la charia. « Ils s’inspirent des Frères musulmans égyptiens, des moudjahidines afghans, lisent l’arabe, parlent le persan d’Iran, mais ce ne sont pas des salafistes, juste des traditionalistes. Aujourd’hui, les femmes portent le voile au Tadjikistan. »

Ils sont majoritairement issus de la vallée du Gharm, au nord du Pamir, tandis que les conservateurs néocommunistes viennent de la vallée de Kulob, comme Emomali Rahmon, qui dirige le pays depuis près de trente ans. L’alliance entre islamistes et démocrates, qui s’est heurtée aux divisions claniques, voire mafieuses, a échoué dans la guerre civile de 1992 qui les opposait au pouvoir néocommuniste, soutenu discrètement par la Russie.

À partir de 1992, les islamistes, définitivement bannis en 2015 et qualifiés désormais de terroristes par l’État tadjik, passent au sud, en Afghanistan, où de fortes minorités tadjikes vivent depuis longtemps, au nord-est. « En Afghanistan, ils se divisent en deux groupes, une partie rejoint à l’Est des régions fortement peuplées de Tadjiks, le Badakhshan, le Panshir, et les troupes du commandant Massoud ; une autre part plus loin, vers Kunduz, et tombe sous la coupe des talibans. Au début, ce n’est pas un choix idéologique, mais plus un choix ethnique. » Ben Laden, à qui les talibans ont confié en 1995 la direction des Volontaires étrangers, a ainsi eu sous ses ordres quelques milliers de militants tadjiks et ouzbeks.

Ces Tadjiks vivent en Afghanistan depuis plus de vingt-cinq ans. Pour Olivier Roy, les auteurs de l’attentat sont les enfants de cette première vague de Tadjiks – certains ne parlent plus le russe pratiqué encore au Tadjikistan – ou bien d’autres Tadjiks militants partis plus tard de leur pays et passés par la Syrie où ils ont combattu les Russes.

Selon l’historien, la spécificité tadjike se définit donc par un État faible et une déculturation forte. « C’est l’inverse des Ouzbeks, qui n’étaient pas adossés à une grande culture perse, comme les Tadjiks. En Ouzbékistan, l’État-nation a pris forme, sur le modèle soviétique, consolidé par un vrai sens de l’État. » En revanche, les Tadjiks offrent tous les signes de déstructuration. Près de 20 % des Tadjiks vivent à Moscou et rapportent 40 % du PIB, notamment par une immigration féminine, cas extrêmement rare. « C’est un peuple qui vit une forte crise identitaire, avec une jeune population flottante prise entre immigration, guerre civile, radicalisation. » Certains, par leur capacité à parler perse, sont envoyés en Iran, pour commettre des attentats.

Un grand frère russe menacé

Et les Russes ? Leur principale base à l’étranger se trouve justement au Tadjikistan, dont ils sont la bouée de sauvetage économique, menacés toutefois par les Chinois devenus le premier partenaire économique. « Quand les Américains ont débarqué en Afghanistan, la Russie a eu peur de perdre son leadership en Asie centrale. Quand elle a demandé à ces pays de pouvoir installer une base, seul le Tadjikistan a accepté, ravi de bénéficier de son parrainage, alors que ses relations avec ses voisins sont exécrables, compte tenu d’un tracé de frontières aberrant en 1895 et en 1924. »

Depuis le premier congrès des peuples d’Orient en 1920, l’URSS s’est toujours posée en protectrice des peuples musulmans. Contrairement à ce qu’affirme une droite française conservatrice, Poutine n’est pas le défenseur de la chrétienté. Il a déclaré la guerre à des orthodoxes, les Ukrainiens, et s’appuie sur une carte musulmane, Kadyrov, en Tchétchénie, fidèle en cela à la méthode russe, qui vise à déléguer le maintien de l’ordre. Mais jouer cette carte, cela ne l’assure en rien de la loyauté ou de l’amitié des sujets musulmans, comme le camouflet de Moscou l’a démontré.

Avec Le Point

Les services de sécurité russes disent avoir déjoué un attentat dans le sud du pays

mars 29, 2024

Alexandre Borthnikov est attentif au déroulement de la séance du conseil d'administration.

Le directeur du service fédéral de sécurité de la fédération de la Russie Alexander Bortnikov assiste au conseil d’administration du Procureur général de la Fédération de Russie le 26 mars. Photo: Getty Images/Valeri Charifouline

Les services de sécurité russes (FSB) ont affirmé vendredi avoir arrêté trois ressortissants d’un pays d’Asie centrale qui prévoyaient un attentat à la bombe dans le sud-ouest de la Russie, une semaine après l’attaque d’une salle de concert près de Moscou qui a fait au moins 144 morts.

Le FSB a assuré dans un communiqué cité par les agences de presse russes avoir mis fin aux activités terroristes de trois ressortissants d’un pays d’Asie centrale qui projetaient de commettre un acte terroriste en faisant exploser un engin dans un lieu public de la région de Stavropol.

La télévision russe a diffusé des images sur lesquelles ont peut voir plusieurs hommes maintenus au sol par des agents du FSB entre des voitures.

Selon l’agence publique de presse Ria Novosti, des composants pour la fabrication d’un engin explosif artisanal et des substances chimiques ont été trouvés au domicile des suspects.

Cette annonce intervient une semaine après l’attentat au Crocus City Hall dans la banlieue de la capitale russe, qui a fait au moins 144 morts et 360 blessés et a été revendiqué par l’organisation djihadiste État islamique (EI) bien que les autorités russes assurent y voir une piste ukrainienne.

Douze personnes ont été arrêtées après ce massacre, dont les quatre assaillants présumés, qui sont originaires du Tadjikistan, une ex-république soviétique d’Asie centrale où l’EI est actif.

Le FSB annonce régulièrement depuis des années déjouer des attentats en Russie et peu de détails sont en général connus de ces affaires.

Par Radio-Canada avec Agence France-Presse

Attentat de Moscou : le FSB accuse l’Ukraine et les Occidentaux d’avoir « facilité » l’attaque

mars 26, 2024

Le patron du FSB a pointé du doigt la responsabilité de l’Ukraine et des services secrets occidentaux dans l’attentat, revendiqué par l’État islamique, qui a fait 139 morts vendredi 22 mars près de Moscou.

Le Crocus City Hall, près de Moscou, a été la cible d'un attentat terroriste vendredi 22 mars.
Le Crocus City Hall, près de Moscou, a été la cible d’un attentat terroriste vendredi 22 mars. © Vyacheslav Prokofyev/TASS/Sipa USA

Après l’attentat en Russie vendredi 22 mars, le Kremlin pointe du doigt l’Ukraine et les Occidentaux. Le directeur des services de sécurité russes (FSB) a accusé ce mardi les services secrets occidentaux et ukrainiens d’avoir facilité l’attaque terroriste qui a tué 139 personnes vendredi soir, près de Moscou.

« Nous pensons que l’action a été préparée à la fois par des islamistes radicaux eux-mêmes et, bien entendu, facilitée par les services spéciaux occidentaux, et que les services spéciaux ukrainiens eux-mêmes sont directement impliqués », a déclaré Alexandre Bortnikov. « Je pense que c’est le cas », a-t-il insisté, répondant à la question de savoir si l’Ukraine, les États-Unis et le Royaume-Uni avaient orchestré l’attaque.

Dans sa prise de parole à l’agence de presse Ria Novosti rapportée par l’AFP, le patron du FSB a également affirmé que les auteurs présumés de l’attaque meurtrière au Crocus City Hall, revendiquée par l’État islamique, devraient être accueillis « en héros » en Ukraine. « Le commanditaire n’a pas encore été identifié », a-t-il néanmoins précisé.

Des « islamistes radicaux » qui fuyaient vers l’Ukraine

Plus tôt dans la matinée ce mardi, c’est un haut responsable russe qui a affirmé que l’Ukraine se trouvait derrière l’attentat dans la salle de concert. « Bien sûr que c’est l’Ukraine », a affirmé Nikolaï Patrouchev aux agences russes, répondant à la question de savoir si Kiev ou l’EI avait orchestré l’attaque.

De son côté, Vladimir Poutine avait estimé ce lundi, trois jours après la revendication djihadiste que le Kremlin refusait de commenter, que l’attentat avait été commis par des « islamistes radicaux ». Le président russe avait aussi pointé du doigt l’Ukraine. Selon lui, les quatre assaillants avaient tenté de fuir dans le pays, qui fait face à un assaut des troupes russes depuis février 2022.

« Il est important de répondre à la question de savoir pourquoi les terroristes, après leur crime, ont essayé de partir en Ukraine. Qui les attendait là-bas ? » avait-il déclaré lors d’une réunion gouvernementale, alors que Kiev a démenti toute implication dans l’attaque.

Le Point par Juliette Vignaud avec AFP

Pourquoi des groupes islamistes s’en prennent-ils à la Russie?

mars 24, 2024

Un homme marche près de la place Rouge, à Moscou, fermée en raison des mesures de sécurité renforcées après l'attentat à la salle de concert municipale de Krasnogorsk.

Un homme marche près de la place Rouge, à Moscou, fermée en raison des mesures de sécurité qui ont été renforcées après l’attentat à la salle de concert municipale de Krasnogorsk. Photo: Reuters/Shamil Zhumatov

L‘attaque contre la salle de concert municipale Crocus est la plus meurtrière en Russie depuis une vingtaine d’années et la plus sanglante en Europe à avoir été revendiquée par le groupe armé État islamique (EI) depuis les attentats du 13 novembre 2015 à Paris. Or, cet attentat, loin d’être le premier revendiqué par ce groupe armé dans ce pays, ne surprend pas les experts interrogés par Radio-Canada.

Il y a deux semaines, l’ambassade américaine en Russie avait pourtant averti ses citoyens qu’elle étudiait de près des informations selon lesquelles des extrémistes envisageaient de façon imminente de cibler de grands rassemblements à Moscou, y compris des concerts, sans toutefois préciser d’où venait la menace.

Mardi, Vladimir Poutine avait rejeté ces déclarations. Tout cela ressemble à du chantage pur et simple et à une volonté d’intimider et de déstabiliser notre société, avait-il dit.

Le bilan s’établissait dimanche matin à 137 morts et 152 blessés, selon le ministère russe des Situations d’urgence.

L’attentat du 22 mars était-il prévisible?

Vladimir Poutine et le Service fédéral de sécurité de la Fédération de Russie (FSB) ont probablement considéré cet avertissement comme une tentative des États-Unis de semer la panique en Russie, estime Ferry De Kerckhove, ancien ambassadeur canadien et professeur à l’École supérieure d’affaires publiques et internationales de l’Université d’Ottawa.

Je crois que c’est dans l’esprit même du caractère de Poutine d’ignorer ce genre d’annonces, dit-il, bien que la Russie fasse ouvertement partie des cibles d’EI depuis plusieurs années.

Aux yeux de Poutine, tenir compte de ces avertissements aurait été un signe de faiblesse, estime M. De Kerckhove. Or, ce signe de faiblesse va lui coûter assez cher.

Ignorer ce que les Américains lui ont donné comme renseignement est déplorable, parce qu’il va se retrouver coupable d’avoir ignoré ce qui aurait pu éviter ce massacre. Une citation de Ferry De Kerckhove, ancien ambassadeur canadien et professeur à l’École supérieure d’affaires publiques et internationales de l’Université d’Ottawa

Plus tôt ce mois-ci, les services secrets russes ont même démantelé dans le Caucase du Sud une cellule qu’ils ont identifiée comme appartenant à EI et qui prévoyait d’attaquer deux synagogues à Moscou.

Dans une allocution télévisée présentée samedi, Poutine a repris la version des faits présentée par ses services de sécurité en affirmant que les attaquants avaient des contacts en Ukraine. À aucun moment il n’a mentionné la revendication d’EI.

Les suspects ont finalement été arrêtés dans la région de Briansk, frontalière de l’Ukraine et du Bélarus, selon le comité d’enquête russe.Des membres du Comité d'enquête de la Russie examinent des munitions trouvées sur les lieux de l'attentat meurtrier de vendredi.

Des membres du Comité d’enquête de la Russie examinent des munitions trouvées sur les lieux de l’attentat meurtrier de vendredi. Photo: Reuters/Comité d’enquête de la Russie

Poutine peut-il tourner l’attentat à son avantage?

C’est malheureux à dire, mais peu importe qui a commis l’attentat : reste à voir comment Poutine va s’en servir. […] C’est une raison qui va servir à justifier son éternelle présence à la tête du pays au nom de la sécurité et de la survie de l’autonomie russe, a noté Tamara Altéresco, ex-correspondante en Russie pour Radio-Canada, en entrevue vendredi à l’émission 24·60.

Il est encore trop tôt pour dire si cette attaque va renforcer le pouvoir de Poutine, mais c’est très rare que les attaques le déstabilisent. Il s’en sert surtout pour continuer de convaincre sa population qu’elle a besoin de lui, ajoute Tamara Altéresco.

Dans le même ordre d’idées, Aurélie Campana, professeure au Département de science politique de l’Université Laval, croit que « la population russe aura tendance – pas dans sa totalité, mais dans sa majorité – à se ranger davantage derrière Vladimir Poutine ».

Chaque fois qu’il y a un épisode de violence, il y a un durcissement du régime. […] C’est un revirement de situation qui va être maîtrisé comme il l’a toujours été en Russie, c’est-à-dire par l’utilisation de la répression et de la violence. Une citation de Aurélie Campana, professeure de science politique à l’Université Laval

Quel est le lien entre EI-K et la Russie?

« EI-K, c’est une revendication qui émane de la branche afghane d’EI [aussi appelée État islamique – province de Khorassan]. Ce groupe armé, considéré par de nombreux États comme une organisation terroriste, doit son nom à une province afghane située à la frontière entre le Pakistan et le Tadjikistan », explique Aurélie Campana.

C’est un groupe créé par une coalition de personnes qui se sont dissociées des groupes islamistes auxquels ils appartenaient, tels qu’Al-Qaïda ou encore les talibans afghans ou pakistanais. Une citation de Aurélie Campana, professeure de science politique à l’Université Laval

C’est un groupe, qui, depuis plus de deux ans, n’a de cesse de véhiculer des discours antirusses sur ses comptes de médias sociaux, poursuit la professeure.

Depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, EI – et particulièrement sa branche afghane – a multiplié les actions afin de mobiliser directement en Russie des musulmans radicalisés contre l’État russe. Il y a un faisceau convergent qui fait donc dire que cette attaque n’est pas une surprise totale, note Aurélie Campana.

Cette propagande a fonctionné jusqu’à un certain point, ce qui a incité les musulmans russes à se soulever contre le régime de Vladimir Poutine, ajoute-t-elle.

Les Russes qui ont été recrutés dans les rangs de l’organisation djihadiste en Syrie et en Irak ont hérité de responsabilités importantes en matière de commandement, note de son côté Wassim Nasr, spécialiste du djihadisme et chercheur associé au Soufan Center.

Pourquoi le groupe armé État islamique s’en prend-il à la Russie?

Il ne faut pas oublier que ce n’est pas la première fois qu’EI s’attaque à la Russie. Il y a eu deux attentats revendiqués en 2016, trois en 2017, deux en 2018 et un en 2019, et tout cela, à l’extérieur de la région du Caucase. Une citation de Wassim Nasr, spécialiste du djihadisme et chercheur associé au Soufan Center

Les groupes extrémistes islamistes se situent actuellement principalement dans le Caucase du Nord et au centre de la Russie. Il y a un certain nombre de républiques à majorité musulmane qui ont constitué dans les années 2010 des microfoyers de radicalisation avec une poussée du salafisme très proche de celui que défend maintenant EI, décortique la professeure en ajoutant que les prisons russes sont actuellement pleines de djihadistes.

« Il y a des foyers de radicalisation en Russie connus depuis des années. Dans les derniers mois, tous les yeux étaient rivés sur l’Ukraine, et on s’est très peu intéressé à la vivacité de ces foyers qui continuaient à être alimentés par des combattants russes qui revenaient de la Syrie. Ces derniers ont pu contribuer à former des cellules clandestines, comme celle qui revendique l’attaque meurtrière de vendredi », ajoute Aurélie Campana.

Nous pensions que la plupart de ces cellules avaient été démantelées, mais ça ne veut pas dire qu’elles ont disparu. Elles se sont recomposées à la faveur des allées et venues de certains combattants russes en Syrie. Une citation de Aurélie Campana, professeure de sciences politiques à l’Université Laval

« Il est clair qu’EI-K reproche à la Russie les guerres qu’elle a menées en Tchétchénie et en Syrie. Il lui reproche également son intervention en Afrique de l’Ouest aux côtés des régimes malien et burkinabé, notamment au Sahel, ainsi que ses tentatives de rapprochements avec les talibans afghans », conclut Aurélie Campana.

Radio-Canada par Érika Bisaillon avec les informations de Gabrielle Proulx.

Attentat à Moscou : la tour Eiffel pourrait être éteinte en hommage aux victimes

mars 24, 2024

Le sanglant attentat survenu dans la nuit du vendredi 22 mars, à Moscou, a fait au moins 137 morts. Paris pourrait afficher sa solidarité en éteignant la tour Eiffel dans les prochains jours.

La tour Eiffel sera-t-elle éteinte en hommage aux victimes de l'attentat à Moscou ? 
La tour Eiffel sera-t-elle éteinte en hommage aux victimes de l’attentat à Moscou ?  © Fabio Mazzarella/Sintesi/SIPA / SIPA / Fabio Mazzarella/Sintesi/SIPA

L’attentat meurtrier survenu à Moscou dans la nuit du vendredi 22 mars, avant le début d’un concert dans le Crocus City Hall, est considéré comme l’attaque la plus meurtrière sur le sol européen revendiquée par le groupe État islamique. Tandis que la communauté internationale a condamné l’attaque, la Russie est en deuil national ce dimanche 24 mars.

Au moins 137 personnes, dont 3 enfants, ont perdu la vie, et 154 ont été blessées, selon les dernières données recueillies par les autorités locales. Face à l’horreur de cet acte, faut-il afficher sa solidarité avec le peuple russe ? Pour Ian Brossat, la réponse est sans hésitation, oui.

« Il est logique que la tour Eiffel soit éteinte »

Invité de l’émission de France 3 Dimanche politique ce 24 mars, le sénateur et conseiller de Paris (Parti communiste) a expliqué qu’il est important que chacun « exprime sa peine et sa solidarité vis-à-vis des victimes, de leur famille, et du peuple russe qui n’est en rien responsable des exactions de Vladimir Poutine ».

Alors que la Russie vit son « Bataclan », pour le sénateur de Paris, il est « tout à fait logique qu’il y ait un hommage à la tour Eiffel, pour évoquer la solidarité avec les victimes de cet attentat ». « Une vie est une vie, et ces vies-là doivent être honorées. » Ian Brossat a ensuite rappelé que les hommages à la tour Eiffel se font généralement quelques jours après les événements.

Le Point par Marie Guermeur

Qui sont les 4 assaillants arrêtés après l’attentat à Moscou ?

mars 24, 2024

Selon les médias russes, les assaillants seraient originaires du Tadjikistan, tandis que pour le président tadjik, les « terroristes » « n’ont pas de nationalité ».

Au moins 137 personnes ont perdu la vie dans l'attentat survenu la nuit du 22 mars 2024 au Crocus City Hall, près de Moscou.
Au moins 137 personnes ont perdu la vie dans l’attentat survenu la nuit du 22 mars 2024 au Crocus City Hall, près de Moscou. © CHINE NOUVELLE/SIPA / SIPA / CHINE NOUVELLE/SIPA

Moins de 48 heures après l’attentat dans une salle de concert près de Moscou qui a fait au moins 137 morts dont 3 enfants, la Russie a annoncé l’arrestation de 11 personnes, dont « 4 terroristes », des « citoyens étrangers » « alors qu’ils se dirigeaient vers l’Ukraine ». Vladimir Poutine n’a pas mentionné l’État islamique (EI), alors même que le groupe djihadiste a revendiqué être l’auteur de l’attaque.

Selon les médias russes et le député du parti majoritaire Russie unie Alexander Khinshtein, les quatre assaillants arrêtés seraient originaires du Tadjikistan, une ancienne république soviétique d’Asie centrale qui jouxte l’Afghanistan, où l’EI est actif.

L’État islamique actif dans le Caucase russe

Lors d’un entretien téléphonique, le président tadjik, Emomali Rakhmon, a déclaré à son homologue russe Vladimir Poutine que les « terroristes » « n’ont pas de nationalité ». « En ce moment du deuil national en Russie, le chef d’État tadjik a souligné la solidarité de tous les citoyens tadjiks avec le peuple russe », a déclaré le service de presse de la présidence tadjike dans un communiqué.

Pour sa part, le Kremlin a déclaré à l’issue de l’entretien que la coopération « étroite » entre la Russie et le Tadjikistan dans le domaine de la lutte antiterroriste allait « s’intensifier ». Ni le Kremlin ni les enquêteurs n’ont évoqué les menaces djihadistes qui pèsent sur la Russie depuis des décennies.

L’État islamique, que la Russie combat en Syrie, est actif aussi dans le Caucase russe. Il a déjà commis des attentats dans le pays depuis la fin des années 2010. Mais le groupe n’y avait jamais revendiqué une attaque d’une telle ampleur.

Aucune implication ukrainienne, selon Washington

Le gouvernement américain a affirmé ce dimanche qu’il n’y avait « aucune implication ukrainienne » dans le massacre au Crocus City Hall à Moscou, après que le président russe Vladimir Poutine a évoqué un lien avec l’Ukraine. Il n’y a « aucune preuve » selon laquelle l’Ukraine est impliquée dans le massacre qui a fait au moins 137 morts, a rétorqué la vice-présidente américaine Kamala Harris lors d’un entretien télévisé dimanche.

Adrienne Watson, porte-parole du Conseil de sécurité nationale américain, a renchéri dans un communiqué : « L’État islamique (EI) porte l’entière responsabilité de cet attentat. Il n’y a eu aucune implication ukrainienne. »

Le Point par M.G. avec AFP

L’Iran ne croit pas à la responsabilité de l’État islamique dans l’attentat de Kerman

janvier 5, 2024

Alors que le mouvement terroriste, qui avait été combattu en Irak et en Syrie par le général Soleimani, a revendiqué l’attentat commis sur sa tombe le 3 janvier, Téhéran affirme ne pas croire à ce scénario et accuse Israël d’avoir téléguidé l’attaque.

Funérailles des victimes tuées dans les explosions du 3 janvier 2024, alors qu’elles participaient à une commémoration marquant l’anniversaire de l’assassinat du général Soleimani à Kerman. © Iranian Presidency/AFP
Funérailles des victimes tuées dans les explosions du 3 janvier 2024, alors qu’elles participaient à une commémoration marquant l’anniversaire de l’assassinat du général Soleimani à Kerman. © Iranian Presidency/AFP

Ce 5 janvier, les Iraniens rendent hommage aux victimes de l’attentat perpétré le 3 janvier dans le sud de l’Iran, près de la tombe du général Qassem Soleimani, à Kerman. La double explosion, revendiquée le 4 janvier en fin de journée par le groupe État islamique (EI), est survenue lors d’une cérémonie de commémoration de la mort de celui qui fut l’architecte des opérations militaires iraniennes au Moyen-Orient, avant d’être tué en janvier 2020 par une frappe américaine en Irak.

Le ministre de l’Intérieur, Ahmad Vahidi, a déclaré que les services de renseignement avaient procédé à l’arrestation de « certains individus impliqués » dans l’attaque, sans plus de détails.

Les obsèques des victimes ont débuté vers midi dans la cour de la mosquée Emam Ali de Kerman, où une foule était rassemblée devant des dizaines de cercueils enveloppés dans les drapeaux iraniens, selon les images diffusées par la télévision d’État. Le président iranien Ebrahim Raïssi ainsi que le général Hossein Salami, chef des Gardiens de la révolution, l’armée idéologique de la République islamique, étaient présents.

Le chef de l’État a affirmé dans un discours que le groupe État islamique avait été « formé » par Israël, l’ennemi juré de la République islamique. « Sachez que l’initiative nous appartient, le lieu et le moment (de riposter à l’attentat de Kerman) seront déterminés par nos forces », a-t-il averti. L’EI « a disparu » et « ne peut agir désormais que comme mercenaire de la politique sioniste et américaine », a accusé pour sa part le général Salami.

Drapeaux du Hezbollah

De nombreuses personnes présentes brandissaient le drapeau iranien, celui du Hezbollah libanais, mouvement chiite allié de Téhéran, ou encore des portraits de Qassem Soleimani.

Le bilan a été revu à 89 morts, parmi lesquels des femmes et des enfants, après la mort de cinq blessés. Au moins douze des victimes sont des ressortissants afghans, selon la même source. Les corps des victimes originaires de Kerman seront inhumés au cimetière des martyrs à Kerman après la grande prière du vendredi, tandis que les autres seront transférés dans leurs villes d’origine.

La télévision a également rapporté que des manifestations auront lieu dans tout le pays après la prière pour « condamner l’attentat terroriste » de l’EI. Le groupe jihadiste a revendiqué l’attaque via ses chaînes Telegram, affirmant que deux de ses membres avaient « activé leur ceinture explosive » au milieu « d’un grand rassemblement d’apostats, près de la tombe de leur leader ».

Le général Soleimani, figure clé de la République islamique et ex-chef de la force Qods, la branche des opérations extérieures des Gardiens de la révolution, est célébré dans son pays pour son rôle dans la défaite de l’EI en Irak et en Syrie.

Par Jeune Afrique (Avec AFP)

En Iran, un attentat fait plus d’une centaine de morts sur la tombe du général Soleimani

janvier 3, 2024

L’attaque est survenue alors que le pays célèbre le quatrième anniversaire de la mort du chef de la force Al-Qods, rattachée aux Gardiens de la révolution, tué par une frappe de drone américain en Irak.

Les services d’urgence iraniens arrivent sur le site où deux explosions successives ont frappé une foule célébrant l’anniversaire de l’assassinat en 2020 du général Soleimani, à Kerman, le 3 janvier 2024. © MEHR NEWS/AFP
Les services d’urgence iraniens arrivent sur le site où deux explosions successives ont frappé une foule célébrant l’anniversaire de l’assassinat en 2020 du général Soleimani, à Kerman, le 3 janvier 2024. © MEHR NEWS

Au moins 103 personnes ont été tuées par une double explosion survenue le 3 janvier près de la tombe du général Qassem Soleimani, l’architecte des opérations militaires iraniennes au Moyen-Orient dont l’Iran célèbre le quatrième anniversaire de la mort, a rapporté un média d’État évoquant une « attaque terroriste ».

Les faits se sont déroulés près de la mosquée Saheb al-Zaman, où se trouve la tombe du général Soleimani, à Kerman, dans le sud de l’Iran. Une foule compacte composée de représentants du régime et d’anonymes y était rassemblée pour une cérémonie commémorative. Selon le dernier bilan annoncé, les explosions ont fait au moins 103 morts et 170 blessés. L’attaque, qui n’a pas été encore revendiquée, a été rapidement qualifiée d’acte « terroriste » par Rahman Jalali, adjoint au gouverneur de la province de Kerman.

Selon l’agence locale Tasnim qui cite des sources bien informées, les explosions ont été provoquées par des « bombes dissimulées dans deux sacs ». « Les auteurs des faits ont apparemment activé les bombes via une télécommande », selon la même source. L’agence Isna, qui cite le maire de Kerman, Said Tabrizi, explique que les explosions se sont produites à dix minutes d’intervalle.

Vainqueur de Daesh

Qassem Soleimani avait été tué en janvier 2020, à l’âge de 62 ans, lors d’une attaque de drone américain en Irak. Homme clé du régime iranien, il était également l’une des personnalités publiques les plus populaires du pays. Ce général qui avait fait ses premières armes durant la guerre qui avait opposé l’Iran à l’Irak dans les années 1980 dirigeait la force Al-Qods, la branche des opérations extérieures du Corps des gardiens de la révolution islamique d’Iran, supervisant les opérations militaires dans l’ensemble du Moyen-Orient.

Déclaré « martyr vivant » par le guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, alors qu’il était encore en vie, Soleimani était considéré comme un héros pour son rôle dans la défaite du groupe jihadiste État islamique en Irak et en Syrie. Aux yeux de nombreux Iraniens, ses prouesses militaires et stratégiques ont permis d’éviter la désintégration multiethnique de pays voisins tels que l’Afghanistan, la Syrie et l’Irak.

Longtemps considéré comme un ennemi juré par les États-Unis et leurs alliés, Soleimani a été l’un des plus importants fondés de pouvoir de la région, fixant l’agenda politique et militaire de l’Iran en Syrie, en Irak et au Yémen, selon des observateurs. En janvier 2021, une rue a été baptisée à son nom à Ghobeiry, dans la banlieue sud de Beyrouth, tandis qu’un buste en bronze à son effigie, keffieh palestinien autour du cou, était érigé dans le même quartier. Un hommage, précisait alors la presse, qui ne faisait toutefois pas l’unanimité parmi les habitants.

Par Jeune Afrique (Avec AFP)

France-Attentat près de la tour Eiffel: l’assaillant toujours en garde à vue, a fait allégeance à l’EI

décembre 3, 2023
Attentat près de la tour Eiffel: l'assaillant toujours en garde à vue, a fait allégeance à l'EI
Attentat près de la tour Eiffel: l’assaillant toujours en garde à vue, a fait allégeance à l’EI © AFP

Toujours en garde à vue dimanche, l’islamiste radical qui a tué un jeune touriste germano-philippin et blessé deux autres personnes à proximité de la tour Eiffel à Paris samedi soir avait fait allégeance au groupe Etat islamique avant son passage à l’acte, qui pose aussi la question du suivi psychiatrique de certains jihadistes.

L’attaque est survenue à quelques mois des JO-2024 à Paris et moins de deux mois après celle d’Arras (Pas-de-Calais), qui a coûté la vie à un enseignant mi-octobre et conduit au relèvement du plan Vigipirate au niveau maximal « urgence attentat ».

S’exprimant en langue arabe dans cette vidéo, Armand Rajabpour-Miyandoab, un Franco-Iranien de 26 ans, apportait « son soutien aux jihadistes agissant dans différentes zones », a déclaré le procureur antiterroriste, Jean-François Ricard, lors d’une conférence de presse dimanche soir.

« Cette vidéo était notamment mise en ligne sur son compte X (ex-Twitter) », ouvert début octobre et qui comportait « de nombreuses publications sur le Hamas, Gaza et plus généralement la Palestine », selon le magistrat.

Fin octobre, la mère de l’assaillant, voyant que son fils « se repliait sur lui-même », avait fait un signalement auprès de la police. Les services de police avaient tenté en vain qu’il soit examiné par un médecin et de le faire hospitaliser d’office, ce qui n’a pas été possible en l’absence de troubles, selon une source proche du dossier. Sa mère, en outre, ne voulait pas demander l’hospitalisation forcée de son fils. Quelques jours après son signalement, elle avait assuré qu’il « allait mieux », toujours selon la même source.

Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a réclamé dimanche soir que les autorités « puissent exiger une injonction de soins » pour une personne radicalisée suivie pour troubles psychiatriques afin de prévenir des passages à l’acte, à l’issue d’une réunion interministérielle à Matignon.

L’acte a « potentiellement été préparé depuis plusieurs semaines », analyse une source proche du dossier. Les enquêteurs cherchent notamment à déterminer quand les armes de l’agression ont été achetées.

En garde à vue, l’assaillant n’a pas choisi de garder le silence et « s’exprime », selon une source proche du dossier. Trois autres personnes, membres de sa famille ou de son entourage, sont en garde à vue.

Les faits se sont déroulés samedi vers 21h30 dans ce lieu hautement touristique de la capitale, à proximité du pont de Bir Hakeim enjambant la Seine.

Le touriste tué au couteau, 23 ans, était de nationalités allemande et philippine, et se trouvait avait deux autres personnes d’origine philippine. Il a reçu « deux coups de marteau et quatre coups de couteau », a indiqué le magistrat.

L’assaillant a crié à plusieurs reprises « Allah akbar » et déclaré être « muni d’une ceinture d’explosifs », selon le procureur anti-terroriste.

Il s’en est aussi pris, avec un marteau, à deux hommes, un Français de 60 ans et un Britannique de 66 ans, légèrement blessés.

Il a été maîtrisé par les forces de l’ordre à l’aide d’un pistolet à impulsion électrique peu après l’attaque et placé en garde à vue dans les locaux de la section antiterroriste (SAT) de la brigade criminelle de Paris. L’enquête de flagrance est ouverte pour « assassinat et tentative d’assassinat en relation avec une entreprise terroriste » et « association de malfaiteurs terroristes en vue de la préparation de crimes d’atteinte aux personnes ».

« Profil très instable »

« Issu d’une famille sans aucun engagement religieux », Armand Rajabpour-Miyandoab s’est converti à l’islam à l’âge de 18 ans, en 2015, et a « très rapidement » versé dans « l’idéologie jihadiste ».

Fiché pour radicalisation islamiste (FSPRT), selon une source proche de l’enquête, il avait été condamné à cinq ans de prison pour association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un acte de terrorisme, après un projet d’action violente à la Défense, en 2016. Il était sorti en mars 2020 de prison après quatre ans de détention.

Il avait « noué des liens avec des individus ancrés dans l’idéologie jihadiste », tels que « l’un des futurs auteurs de Saint-Etienne-du-Rouvray », a noté M. Ricard, mais sans que ces contacts ne soient opérationnels dans la préparation d’attentats.

L’enquête va désormais tenter de faire la lumière sur la manière dont a été effectué le suivi médical de l’auteur, un homme au « profil très instable, très influençable », selon une source sécuritaire interrogée par l’AFP.

« L’évolution de certains troubles psychiatriques déjà relevés lors de sa détention » avait conduit le Pnat « à requérir la réalisation d’une nouvelle expertise psychiatrique », a notamment rappelé Jean-François Ricard.

« A la suite de cette dernière, l’auteur était soumis à une injonction de soins impliquant un suivi psychiatrique resserré et contrôlé par un médecin coordinateur. Ce suivi était effectif jusqu’à la fin de la mise à l’épreuve le 26 avril 2023 », a-t-il ajouté.

Environ 5.200 personnes sont connues pour radicalisation en France, dont 1.600 personnes sont particulièrement surveillées par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), selon une source au sein du renseignement, qui précise que 20 % de ces 5.000 personnes ont des troubles psychiatriques.

La France est « durablement sous le coup de la menace islamiste radicale », a insisté dimanche soir Gérald Darmanin. Le ministre de l’Intérieur a envoyé un télégramme aux préfets leur demandant une « extrême vigilance » lors de Hanouka, la fête juive des lumières, du 7 au 15 décembre.

Par Le Point avec Paris (AFP) –

France-Attentat à Arras : qui est l’enseignant tué par l’assaillant ?

octobre 13, 2023

PORTRAIT. Professeur agrégé de lettres modernes, Dominique Bernard, 57 ans, était un enseignant adoré de ses élèves.

Assassiné le 13 octobre en tentant de stopper l’auteur de l’attentat d’Arras dans les couloirs du collège-lycée, Dominique Bernard, 57 ans, était d’abord un passionné de littérature. Il adorait faire découvrir à ses proches la subtilité de l’écriture de Julien Gracq, son auteur favori, ainsi que Le Rivage des Syrtes. Il offrait fréquemment à ses amis des recueils du poète René Char.

Agrégé de lettres modernes, après avoir étudié à Lille et enseigné quelques années en classe prépa, il avait choisi de revenir à Arras il y a plus de quinze ans. Une ville où il avait passé son enfance. Père de trois grandes filles étudiantes, il était marié à une enseignante d’anglais, professeur dans un lycée du département.

L’envie de faire découvrir la littérature aux jeunes

Il avait choisi d’enseigner en collège pour faire découvrir la littérature aux jeunes adolescents. C’est avec le même esprit qu’il participait activement à l’université populaire d’Arras, qu’une de ses collègues de philosophie avait créée avec pour ambition de partager son savoir, ses connaissances et ses passions avec des adultes qui n’avaient pas forcément eu la possibilité d’étudier.

Très exigeant avec lui-même, il était resté en contact avec de nombreux anciens élèves avec qui il échangeait sur Facebook sur l’actualité. En défendant des valeurs humanistes (mais sans jamais parler de politique) et en faisant découvrir les voyages qu’il faisait chaque été à travers la France en amoureux du patrimoine. Lors de la mort de Samuel Paty, il avait beaucoup échangé avec ses collègues sur le rôle de l’enseignant dans la société.

Avec Le Point par Romain Gubert