Archive for the ‘Finances’ Category

Canada-Échec scolaire : une étudiante réclame 1,2 M$ à l’Université Laval

Mai 9, 2024

L'enseigne de l'Université Laval.

L’Université Laval est située à Québec. Photo : Radio-Canada/Vincent Archambault Canti

Insatisfaite d’avoir échoué à un stage, ce qui l’a empêchée de poursuivre sa formation, une étudiante de la Faculté de médecine dentaire de l’Université Laval poursuit l’établissement.

Athénaïs Collard réclame 1,2 million $, estimant avoir été exclue injustement du programme spécialisé de parodontie.

Un bureau d’avocats a déposé une demande introductive d’instance à la Cour supérieure, au nom de la jeune femme d’origine française.La jeune femme à la longue chevelure blonde porte un sarrau.

Athénaïs Collard estime avoir été traitée injustement par l’Université Laval. Photo : Facebook Athénaïs Collard

Celle-ci a tout laissé derrière elle pour s’établir à Québec, au printemps 2022, dans le but de pratiquer la parodontie en Amérique du Nord après avoir suivi sa formation à l’Université Laval.

Sa poursuite précise qu’elle avait obtenu un diplôme en médecine dentaire de l’Université CESPU du Portugal, en décembre 2020, après six années d’études supérieures.

Déménagement

Elle déménage donc à Québec après avoir été admise comme résidente au programme spécialisé en parodontie de l’Université Laval, qui l’aurait avisée que sa formation débutait en mai 2022.

Avec étonnement, elle dit avoir compris que sa véritable formation n’allait finalement débuter qu’à l’automne.

Le but de son voyage n’étant évidemment pas de faire du tourisme, la demanderesse était ainsi très déçue d’avoir inutilement interrompu, beaucoup trop tôt, ses activités professionnelles en France Une citation de Extrait de la poursuite déposée par les avocats de l’étudiante

Il faut noter que les allégations au soutien de cette poursuite n’ont pas encore été prouvées à la Cour et que l’Université Laval n’a toujours pas eu l’occasion de les contester.

« Lourde lacune »

Athénaïs Collard va donc entreprendre son stage clinique au mois de septembre.

Elle soutient n’avoir reçu aucun plan de cours écrit et qu’elle n’a ainsi pas pu connaître quels étaient les objectifs de la formationles attentes et le niveau de compétence qu’elle devait atteindre.

En dépit de cette importante et lourde lacune, écrivent ses avocats dans leur requête, l’étudiante se serait consacrée à la formation au meilleur de sa capacité.

À la fin de ce stage en décembre, l’étudiante n’aurait reçu aucune rétroaction tant positive que négative de la part de ses superviseurs, ni même d’évaluation finale.

Elle va donc poursuivre sa formation postdoctorale avec un second stage, en 2023, sans davantage bénéficier d’un plan de cours ni d’objectifs à atteindre, allègue-t-elle.

Tout s’effondre

Après avoir passé un examen au mois de mars lui permettant de pratiquer des chirurgies plus importantes, indique sa requête, tout se serait effondré le mois suivant.

Le 3 avril 2023, Athénaïs Collard dit avoir été convoquée à l’improviste par le superviseur et directeur du programme de parodontie, le docteur Reginaldo Gonçalves.L'homme porte un sarrau avec le logo de l'Université Laval.

Reginaldo Gonçalves Photo : Facebook Faculté de Médecine Dentaire – Université Laval

L’étudiante se serait alors retrouvée devant le Dr Gonçalves et deux de ses confrères. Selon la poursuite, le superviseur l’avise alors sans ménagement qu’elle a échoué à son stage, trois semaines avant même qu’il se termine.

Stupéfaite et sous le choc, elle arrive à peine à parler, écrivent les avocats de l’étudiante. Selon la poursuite, elle a demandé une évaluation écrite et des explications, ce qu’elle n’aurait pas obtenu Reginaldo Gonçalves ne lui donnant que quelques motifs hautement contestables.

En larmes et choquée

Toutes les chirurgies prévues à son horaire et qui faisaient partie de son apprentissage auraient aussi été annulées.

L’étudiante est sortie de cette réunion ébranlée, en larmes et choquée d’apprendre son échec avant même la fin de son stage, sans avoir obtenu d’évaluation écrite au préalable qui aurait pu l’alerter ou lui indiquer de devoir améliorer ses performances académiques.

L’étudiante aurait par la suite été écartée d’une réunion du comité de promotion en médecine dentaire, où elle aurait pu, selon la poursuite, faire valoir son point de vue.

Cette façon de procéder sournoisement et de manière opaque, selon ses avocats, serait contraire aux exigences des règles internes de l’Université Laval, prévue à la Déclaration des droits des étudiants et des étudiantes.

Échec confirmé

Athénaïs Collard a malgré tout poursuivi son stage, tout en contestant sa note d’échec. Elle a par ailleurs pu reprendre ses chirurgies qui avaient été suspendues.

Au mois de mai, son échec sera toutefois officialisé. Selon les prétentions de Mme Collard, le Dr Gonçalves avait alors versé à son insu une fiche d’évaluation écrite à son dossier d’étudiante, ce qu’elle a appris plusieurs mois plus tard.

En agissant de la sorte, le Dr Gonçalves n’a pas respecté les directives de l’Université, selon la poursuite, en plus de priver Athénaïs Collard de tout le processus de révision de note.

Ses tentatives de faire appel ont échoué, si bien que la jeune femme a été exclue du programme de parodontie.

Elle est toutefois demeurée inscrite au programme de maîtrise en sciences dentaires qu’elle a suivi en parallèle. Ses performances universitaires dans ce programme sont d’ailleurs très satisfaisantes et en conformité avec les attentes de ses superviseurs, indiquent ses avocats, en précisant qu’elle y a la note finale A, le 22 mars dernier.

Elle vient aussi de réussir l’examen prérequis par les autorités américaines pour obtenir un droit d’exercice comme dentiste, partout aux États-Unis.

« Traitée injustement »

Par contre, la jeune femme a subi un tort considérable en n’ayant d’autre choix que de renoncer à une carrière de dentiste spécialisée en parodontie partout à travers le monde, écrivent ses avocats.

L’étudiante reproche à l’Université de l’avoir traitée injustement et de manière abusive alors que le Dr Gonçalves a choisi de se débarrasser d’elle.

Elle réclame donc 1 million $ à l’Université, un montant dont la majeure partie couvrirait ses pertes de revenus futurs évalués à 835 000 $.

L’étudiante estime aussi avoir été privée de 287 691 $ en revenus pendant sa période d’études, qu’elle revendique également.

De plus, elle demande le remboursement de ses droits de scolarité et de ses frais de voyages, ainsi que 50 000 $ pour atteinte à sa réputation.

Comme le litige se transporte devant les tribunaux, l’Université Laval a préféré ne donner aucun détail sur cette affaire.

Athénaïs Collard et le bureau ML Avocats de Montréal qui la représente n’ont pas répondu à nos demandes d’entrevues.

Avec Radio-Canada par Yannick Bergeron

Canada-Exportations d’électricité vers New York: Hydro et les Mohawks forment un partenariat

avril 18, 2024

Exportations d’électricité vers New York: Hydro et les Mohawks forment un partenariat

Exportations d’électricité vers New York: Hydro et les Mohawks forment un partenariat© Fournis par La Presse Canadienne

KAHNAWAKE — Hydro-Québec et le Conseil des Mohawks de Kahnawake ont confirmé leur partenariat dans le projet d’exportation d’électricité vers l’État de New York.

La communauté détiendra une participation minoritaire d’au moins 10 % dans la ligne d’interconnexion Hertel-New York. La participation des Mohawks de Kahnawake leur permettra de tirer un revenu de dividende.

En conférence de presse, jeudi, le président-directeur général d’Hydro-Québec, Michael Sabia, a évoqué un rendement avoisinant les 8 % pour les parts détenues par la communauté.

«Le niveau du rendement est cohérent avec le rendement que nous gagnons nous-même sur les activités réglementées. Autrement dit, c’est à peu près 8 % à 8,2 % », précise-t-il en conférence de presse.

La participation de 10 % est un seuil minimal, mais le Conseil des Mohawks de Kahnawake pourrait prendre une plus grande participation, soit jusqu’à 49 % du projet.

La grande cheffe, Kahsennenhawe Sky-Deer, a dit qu’elle aimerait que le Conseil prenne une plus importante participation que le minimum de 10 %, mais que la question est encore à l’étude.

«Nous avons la possibilité d’aller n’importe où entre 10 % et 49 %, ça va dépendre de notre tolérance au risque, des taux d’intérêt. (…) Nous espérons que nous pourrons prendre autant que possible et que ça profitera à la communauté.»

Hydro-Québec et le Conseil des Mohawks de Kahnawake n’ont pas chiffré précisément le montant investi par la communauté. M. Sabia a précisé que la valeur réglementée du projet était de 345 millions $.

De ce montant, 70 % est financé par de la dette entièrement prise en charge par Hydro-Québec. Le 30 % restant représente l’équité. C’est de cette portion de 30 % que les Mohawks de Kahnawake aurait une participation d’au moins 10 %.

La valeur de l’investissement pourrait ainsi varier entre 10 millions $ à 50 millions $, selon la taille de la part qu’ils prendront.

Par Stéphane Rolland, La Presse Canadienne

Canada: Le prix de l’essence bondit au Québec et en Ontario; à qui la faute encore?

avril 18, 2024

Un panneau publicitaire éclairé, la nuit, dans une station-service, affichant le litre d'ordinaire à 1,89 $.

Les automobilistes sont confrontés à des prix de l’essence plus élevés à bien des endroits au pays, jeudi. À Montréal, la hausse a fait bondir le prix du litre d’ordinaire à près de 1,90 $, voire presque 1,92 $ à certains endroits. Photo: Radio-Canada/Alain Béland

Les automobilistes canadiens sont confrontés jeudi à une hausse subite du prix de l’essence. À Montréal le coût du litre d’ordinaire atteint à certains endroits près de 1,92 $ tandis qu’à Québec, des stations-service l’ont fait passer à 1,90 $. Et les raisons de cette augmentation sont variées.

Le Québec n’est pas le seul endroit touché par cette hausse. En Ontario, le litre d’ordinaire est passé d’environ 1,66 $ mercredi à près de 1,80 $ jeudi.

Selon l’analyste Dan McTeague, du site gaswizard.ca, ces prix représentent un sommet en deux ans dans l’est du Canada. Cet expert prévoit que le prix à la pompe devrait connaître une baisse d’environ quatre cents le litre dans la plupart des villes québécoises et ontariennes, dès vendredi.

Pour Carol Montreuil, vice-président pour l’est du Canada de l’Association canadienne des carburants, ce qui se passe sur la scène géopolitique mondiale explique en partie cette hausse substantielle.

En entrevue jeudi à Tout un matin, sur ICI Première, il a cité la guerre entre l’Ukraine et la Russie, celle opposant Israël au Hamas dans la bande de Gaza et la menace qui pointe du côté de l’Iran, auteur d’une attaque frontale sans précédent contre Israël, samedi dernier.

Affrontements, tensions, nervosité des marchés, au final, le cumul de ces pressions-là exerce un impact sur la matière première, le pétrole brut, dit M. Montreuil. C’est de loin le facteur le plus important.

Les marchés mondiaux ont la mauvaise habitude d’escompter un peu ce qui pourrait arriver. Ce n’est pas une situation unique au Québec. Une citation de Carol Montreuil, vice-président pour l’est du Canada de l’Association canadienne des carburants

En mars dernier, Riyad et Moscou, piliers de l’alliance OPEP+ des pays exportateurs de pétrole, avaient prolongé leurs coupes volontaires jusqu’à la mi-2024 pour soutenir des cours minés par l’incertitude économique.

Et il y a aussi les taxes

Autre explication : les taxes qui composent le coût du litre d’essence à la pompe. Les gens l’oublient parfois, mais on est rendus à plus de six taxes différentes à la pompe, explique M. Montreuil.

Certes, la taxe carbone instaurée par le gouvernement fédéral ne s’applique pas au Québec (qui tarifie ses émissions de GES à l’aide d’un système de plafonnement et d’échange de droits d’émission).

Mais d’autres facteurs liés aux taxes entrent en ligne de compte, comme cette nouvelle réglementation, promulguée en juillet dernier au pays, qui oblige les fournisseurs de combustibles à réduire graduellement l’intensité en carbone de l’essence et des carburants diesel qu’ils produisent et vendent.

Selon une analyse du bureau du directeur parlementaire du budget à Ottawa (DPB), ces exigences environnementales pourraient faire grimper de 17 cents le litre d’essence en 2030, lorsque la sévérité des normes atteindra un sommet.

Les consommateurs ne le savent pas toujours, mais le cumul de ces taxes environnementales, on l’a vu ces derniers mois, [exerce une] pression à la hausse sur ces taxes-là, décrit Carol Montreuil.

À la fin, ça paraît, ça s’additionne.

Essence d’été, essence d’hiver

Enfin, autre élément d’explication : le passage de l’essence d’hiver à l’essence d’été. L’essence d’été est plus coûteuse à produire, puisque certains éléments y sont ajoutés pour la rendre moins volatile.

Pourquoi l’essence doit-elle être adaptée au rythme des saisons? En raison des normes de performance, répond M. Montreuil : quand il fait très froid l’hiver, il faut qu’il y ait des vapeurs d’essence pour que l’allumage se produise lorsqu’on démarre la voiture. L’été, quand il fait très chaud, ces vapeurs d’essence sont moins nécessaires. La tension de vapeur, qui est source de pollution, n’a pas à être aussi élevée. Donc, on abaisse ces niveaux-là.

Mais, en clair, le passage d’un type d’essence à un autre a peu d’incidence sur le prix à la pompe, résume le responsable de l’Association canadienne des carburants. On parle de fractions de sous… Les autres facteurs sont de loin plus importants.

Pas si payant que ça, vendre de l’essence?

Carol Montreuil dément par ailleurs l’idée que les stations-service s’en mettent plein les poches en vendant de l’essence : le rendement de l’investissement tourne autour de 6, 7 % ou 8 %, affirme-t-il. Ce n’est pas [comme] les pharmaceutiques ni les banques. Ce n’est pas une business qui fait des profits exagérés.

Il en va autrement dans le secteur de l’exploration pétrolière : Quand le prix du brut s’enflamme, si vous êtes quelqu’un qui vendez du pétrole brut, vous allez faire des profits importants avec l’exploration.

Mais ce n’est pas le cas pour le raffinage et la vente au détail.

Le sujet rebondit en Chambre

À l’Assemblée nationale du Québec, jeudi, le sujet a fait l’objet d’un échange entre le premier ministre François Legault et le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon. Le PQ réclame une enquête de l’Office de la protection du consommateur pour casser le cartel du pétrole et l’imposition de pénalités financières aux pétrolières pour la fixation des prix.

Dans sa réponse, le premier ministre a évoqué la nervosité des marchés à la perspective d’un envenimement du conflit à Gaza, et l’impact que cela pourrait avoir sur la production de pétrole.

Donc, il y a une hausse du prix du pétrole brut, a dit François Legault.

Mais, d’ajouter le premier ministre, le vrai enjeu n’est pas le prix du pétrole brut, mais les marges de profit et là-dessus, le ministre de l’Économie [Pierre Fitzgibbon] fait un suivi.

Le premier ministre a reproché au chef péquiste de faire un lien entre le prix du litre d’essence à la pompe et les tensions géopolitiques alors que, dans ce dernier domaine, dit François Legault, le Québec subit exactement ce qui se passe ailleurs.

En février dernier, le ministre Fitzgibbon avait indiqué avoir mandaté un spécialiste pour tenter de savoir pourquoi les automobilistes de la péninsule gaspésienne paient très souvent l’essence plus chère qu’ailleurs au Québec.

Plus tôt, soit l’automne dernier, M. Fitzgibbon avait demandé à la Régie de l’énergie de se pencher sur les marges de profit qu’engrangent les stations-service de la grande région de Québec.

Le ministre de l’Économie dit avoir reçu un rapport d’expert à ce sujet et qu’il en divulguera sous peu les résultats.

Radio-Canada par Anne Marie Lecomte avec les informations de La Presse canadienne

En Côte d’Ivoire, une croissance à crédit ?

avril 17, 2024

Porté par une croissance record, le pays d’Alassane Ouattara est redevenu un poids lourd en Afrique de l’ouest. Mais les investissements ont un coût et posent la question de l’endettement.

Le pont Alassane Ouattara sur la lagune Ébrié
Le pont Alassane Ouattara sur la lagune Ébrié

Avec ses haubans et ses illuminations nocturnes aux couleurs du drapeau ivoirien, le pont Alassane Ouattara, dernière infrastructure d’ampleur inaugurée en 2023, trône au cœur d’Abidjan. Ce pont qui a pris le nom du président vient s’ajouter aux multiples chantiers qui ont fait évoluer le visage du pays depuis son arrivée au pouvoir en 2011.

À l’époque, la Côte d’Ivoire sort d’une sanglante crise post-électorale qui a fait plus de 3 000 morts et doit convaincre les investisseurs de miser sur un retour de la « locomotive d’Afrique de l’Ouest ». Sous la présidence d’Alassane Ouattara, économiste passé par le Fonds monétaire international (FMI), la confiance revient et la croissance est au rendez-vous : plus de 7 % en moyenne depuis 2011. L’organisation de la Coupe d’Afrique des Nations début 2024 a également permis de mettre un coup d’accélérateur aux investissements dans les infrastructures, dont la construction de routes et d’autoroutes pour relier les principales villes du pays.

Mais cette « success story » ne peut occulter les fortes inégalités qui demeurent en Côte d’Ivoire. Le taux de pauvreté, passé de 55 % en 2011 à 39,5% en 2018, diminue désormais plus lentement (35 % en 2020). « Le PIB a été multiplié par deux sous Ouattara, c’est à son actif. Mais ce n’est pas un indicateur qui montre comment les richesses sont partagées », explique l’économiste ivoirien Séraphin Prao.

Les quartiers pauvres et insalubres, dont certains sont détruits pour construire des infrastructures, restent nombreux à Abidjan, jouxtant parfois des zones huppées aux villas flambant neuves. Et au-delà des inégalités, l’endettement est également un sujet de discorde, régulièrement dénoncé par l’opposition. Car si l’économie ivoirienne s’appuie en partie sur son secteur agricole, essentiellement l’exportation du cacao dont elle est le premier producteur mondial, elle reste encore largement tributaire de l’aide extérieure.

« Dette improductive »

« La dette en soit n’est pas une mauvaise chose, mais on fait face dans le cas de la Côte d’Ivoire à une dette improductive », dénonce Ahoua Don Mello, vice-président de l’alliance des pays émergents des Brics. « Sur le budget 2023, près de 42 % sont des ressources propres, tout le reste est financé par perfusion de la dette », poursuit celui qui est aussi vice-président du Parti des peuples-africains – Côte d’Ivoire (PPA-CI), la formation d’opposition de l’ex-président Laurent Gbagbo.

L’endettement actuel de la Côte d’Ivoire, détenu principalement par les bailleurs occidentaux classiques et la Chine, s’élève à 58 % du PIB, contre 38 % en 2019, un niveau dont la soutenabilité fait débat chez les économistes. « Le ratio d’endettement par rapport au PIB recommandé se situe entre 60 et 70 %. On n’a pas dépassé les 60 %, il n’ y a pas le feu en la demeure », estime Blaise Makaye, docteur en économie et chercheur à l’université de Bouaké (centre) qui précise que ce ratio est « bien inférieur à ceux des pays développés », comme la France où elle frôle les 100 %.

« Les ressources propres ne suffisent pas à couvrir les dépenses courantes de l’État »

« Le FMI dit que pour les petites économies comme la Côte d’Ivoire, dépasser 49 % d’endettement peut être dangereux », répond Séraphin Prao, qui met en garde contre des « taux d’intérêt élevés » et les « bases fragiles » de l’économie ivoirienne.

Le FMI, qui a validé en mai 2023 un programme de prêts de 3,5 milliards de dollars, et la Banque mondiale, « ont toujours dit que notre dette était soutenable, ce qui veut dire que la Côte d’Ivoire ne présente pas de risque de non-paiement de sa dette », se défend le ministre de l’Éc

onomie Adama Coulibaly. Il rappelle que certains pays voisins tels le Sénégal ou le Ghana ont un taux d’endettement supérieur.

Au sortir de la crise, en 2011, la Côte d’Ivoire avait bénéficié d’un allègement de sa dette extérieure, d’environ 25 %. « Cela

aurait dû permettre d’affecter les ressources propres de l’État dans l’éducation et la santé. Or, les ressources propres ne suffisent même pas aujourd’hui à couvrir les dépenses courantes de l’État », pointe Ahoua Don Mello. « La croissance est à crédit, les fonctionnaires sont payés à crédit », abonde Séraphin Prao. « Tant qu’on vit sous perfusion, on ne voit pas le problème, mais si la perfusion est enlevée on verra qu’il n’y a plus de moyens d’alimenter le budget de l’État », conclut Ahoua Don Mello.

Par Jeune Afrique (Avec AFP)

Congo: Évitant un conflit avec les Makouens, Sassou exige la libération du voleur Ludovic Itoua

avril 5, 2024

Un jour après son incarcération à la maison d’arrêt de Brazzaville pour des faits de détournements des deniers publiés aggravés, le DG des impôts a bénéficié d’une liberté provisoire contre paiement d’une caution de 18 millions Cfa. On apprend que c’est le chef de l’État en personne qui aurait interféré dans ce dossier afin d’éviter tout conflit avec la zone Owando-Makoua. Les ressortissants de cette partie de la Cuvette n’ont pas compris cette arrestation quand les Mbochis sont les plus grands voleurs du pays.

Le DG des impôts, Ludovic Itoua, vient d’être mis en liberté provisoire par le parquet de la République le jeudi 4 avril 2024, contre une caution de 18 millions de FCFA. Néanmoins, il est interdit de sortie du territoire national, son passeport et autres pièces d’identité ayant été confisqués.

Rappelons que déféré le mercredi 3 avril 2024 devant le procureur de la République pour faux et usage de faux et détournement de fonds, Ludovic Itoua avait été écroué à la maison d’arrêt centrale de Brazzaville sitôt après.

Il est accusé d’un détournement de près de 2 milliards cfa qui lui ont permis d’être propriétaires de 200 parcelles, 20 comptes bancaires, 40 bus etc.

Avec Sacer-infos par Stany Frank

Pourquoi le chocolat pourrait coûter de plus en plus cher

mars 29, 2024

Pour Pâques, préférez-vous des œufs au cacao ou en cuivre ? Le premier coûte maintenant plus cher que le second sur les marchés boursiers. Explications.

La dernière récolte mondiale de fèves de cacao enregistre un déficit de 10 % par rapport à l'année précédente.
La dernière récolte mondiale de fèves de cacao enregistre un déficit de 10 % par rapport à l’année précédente. © Studio QUB / Shutterstock / Shutterstock / Studio QUB

Certains préfèrent les poules, d’autres les lapins. D’autres encore ne jurent que par les œufs ou les rochers. À Pâques, (presque) tout le monde fond pour le chocolat. Mais cette année, il pourrait vous coûter plus cher.

En particulier si vous craquez habituellement pour les best-sellers. Selon l’UFC-Que choisir, les Kinder Surprise spécial Pâques coûtent en rayon 11 % plus cher cette année, pour un prix au kilo de 56 euros. Le lapin Lindt chocolat au lait a grimpé de 6 %, pour atteindre 39 euros le kilo. Les petits œufs Milka ont augmenté de 8 %.

Le cacao dépasse 10 000 euros la tonne

Pour justifier ces hausses, les industriels mettent en avant l’envolée des cours du cacao sur les marchés boursiers de New York et de Londres. « L’an dernier, le cacao était en moyenne à 2 400 euros, un prix stable depuis dix ans », précise Christophe Eberhart, cofondateur du fabricant de chocolat Ethiquable. C’est à partir d’octobre, début de la seconde récolte annuelle, que Ie marché a commencé à monter.

Les prix ont ensuite doublé sur les trois derniers mois pour dépasser, cette semaine, la barre des 10 000 euros la tonne de fèves non transformées. C’est plus cher que la tonne de cuivre ! C’est aussi le plus haut jamais atteint pour cette denrée. En parallèle, le sucre, additif souvent très présent dans le chocolat, voit lui aussi son prix au plus haut depuis treize ans.

La météo entraîne une baisse des récoltes de cacao

Ces cours de Bourse stratosphériques s’expliquent, en partie, par les mauvaises conditions météorologiques. Des pluies intenses puis un épisode de forte chaleur se sont succédé dans les pays du golfe de Guinée depuis l’an dernier. Résultat, le Ghana devrait connaître sa plus faible récolte en quatorze ans, et la Côte d’Ivoire s’attend à une baisse de production de 20 %, note L’Agefi. Or ces deux pays totalisent en temps normal plus de 60 % de la récolte mondiale.

Pour la récolte réalisée entre novembre 2023 et mars 2024, le déficit mondial serait de 390 000 tonnes, soit 10 % de la production habituelle. La spéculation boursière participe également à la hausse des cours. Cela profite aux fonds d’investissement du type hedge funds qui, depuis l’an dernier, ont acheté pour 8,7 milliards de dollars de fèves, pariant sur une hausse.

Conséquence, certains fabricants voient leurs coûts de production grimper. « Chez Ethiquable, cela représente une hausse de 20 centimes par tablette, indique Christophe Eberhart. Mais, par engagement solidaire, nous achetions la tonne de cacao à 4 200 euros aux producteurs locaux. » Pour ceux qui achètent la matière première aux cours du marché, l’impact est encore plus important.

Des cacaoyers fragilisés par le réchauffement climatique

D’autres fabricants assurent ne pas subir cette hausse. « Nous avons acheté notre cacao avant octobre 2023, explique Paul-Henri Masson, cofondateur du Chocolat des Français. Mais nous devrons refaire nos stocks pour Noël prochain. Si les cours ne diminuent pas d’ici là, nous serons nous aussi touchés. »

Le changement climatique interroge sur la capacité du marché à faire baisser les cours. Il rend plus fréquents les champignons, les insectes ravageurs et les maladies qui affectent les cacaoyers d’Afrique de l’Ouest. Une partie des arbres plantés dans la région ont plus d’une vingtaine d’années, ce qui les rend moins résistants. De plus en plus de cultivateurs locaux de cacao préfèrent se tourner vers la culture du palmier à huile ou de l’hévéa. Ce constat fait dire à Christophe Eberhart, de chez Ethiquable, que « la production de la Côte d’Ivoire et du Ghana pourrait connaître une phase descendante à l’avenir ».

L’Amérique latine au chevet de la demande mondiale

Une région du monde devrait tirer avantage de cette situation pour gagner des parts de marché. « Les difficultés rencontrées par les géants africains ne devraient faire que renforcer la part relative de l’Amérique latine », estime le cabinet de ­conseil Global Sovereign Advisory (GSA) dans une note, citée par Les Échos.

Ironie de l’histoire, le cacaoyer est une espèce originaire d’Amazonie. Mais à partir des années 1920, le continent africain prend le leadership de la culture d’or brun. Dans les années 1990, le Brésil perd même sa place de deuxième producteur mondial. Ses cacaoyers sont alors dévastés par une maladie surnommée « balai de la sorcière ».

Aujourd’hui, la production brésilienne se rétablit et le gouvernement brésilien prévoit que la production pourrait doubler d’ici 2030. L’Équateur est, lui, déjà le troisième producteur mondial, et affiche des niveaux de production plus élevés d’année en année. Sans tutoyer encore ceux du Ghana et de la Côte d’Ivoire.

Avec Le Point par Nicolas Guarinos

Canada: Le patron de Bombardier a obtenu une rémunération de 6,5 millions $

mars 28, 2024
Le patron de Bombardier a obtenu une rémunération de 6,5 millions $

Le patron de Bombardier a obtenu une rémunération de 6,5 millions $© Fournis par La Presse Canadienne

MONTRÉAL — Le grand patron de Bombardier a touché une rémunération de 6,5 millions $ en 2023, selon des documents réglementaires envoyés aux actionnaires.

Son président et chef de la direction, Éric Martel, a vu sa rémunération diminuer de 2,2 % par rapport à l’an dernier.

Au total, les six plus hauts dirigeants du constructeur de jets privés se sont partagé une rémunération de 17,5 millions $, en baisse de 4,3 % par rapport à l’an dernier. 

Dans ses explications aux actionnaires, la société montréalaise souligne que le bénéfice avant impôts, intérêts et amortissement (BAIIA) ajusté a augmenté de 32 % en 2023 pour s’établir à 1,23 milliard $. Elle souligne que Bombardier a réduit son endettement de 400 millions $ en 2023. 

Membre de la famille Bombardier et ancien chef de la direction, Pierre Beaudoin a touché une rémunération de 734 400 $ pour son rôle à titre de président du conseil d’administration. 

Rejet d’une proposition sur le français 

La société montréalaise a également rejeté à nouveau une proposition du Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires (MÉDAC) sur le français.

Le MÉDAC a soumis une proposition afin de divulguer les langues maîtrisées par ses administrateurs et ses dirigeants. La proposition est mise en pratique dans plusieurs grandes sociétés du Québec inc., notamment la Banque Nationale, Québecor et Power Corporation. 

«Le conseil d’administration estime que les compétences qui figurent actuellement dans notre grille de compétences répondent aux besoins et aux priorités stratégiques de Bombardier et qu’il n’est pas nécessaire d’inclure des compétences linguistiques pour nos administrateurs», répond le conseil d’administration qui recommande aux actionnaires de voter contre la proposition. 

La proposition du MÉDAC avait d’ailleurs obtenu l’appui de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ). 

L’an dernier, le président et chef de la direction, Éric Martel, avait qualifié le dévoilement des compétences linguistiques de geste «symbolique» et avait assuré que la société accordait une importance au français. 

M. Martel avait aussi précisé que six des treize membres du conseil d’administration ont le français comme langue maternelle tandis qu’elle est une multinationale ayant aussi des activités à l’extérieur du Québec.

Avec La Presse Canadienne par Stéphane Rolland

Nigeria: Quand Tinubu somme ses ministres de ne plus voyager

mars 28, 2024

À compter du début du mois d’avril, le président nigérian impose, aux ministres et autres responsables gouvernementaux, une interdiction de trois mois de voyager à l’étranger avec des fonds publics. Des critiques et l’inflation sont passées par là…

© Damien Glez
© Damien Glez

Qui se sent morveux mouche ses ministres. Arrivé au pouvoir il y a moins d’un an, le président nigérian a déjà été critiqué pour la fréquence de ses voyages à l’étranger et surtout pour l’ampleur de ses délégations. En novembre dernier, les réseaux sociaux s’étaient ainsi émus de la validation de 400 accréditations nigérianes pour la COP28, la conférence sur le climat de Dubaï.

Au total, les déplacements nationaux et internationaux de Bola Tinubu auraient atteint 3,4 milliards de nairas (2,2 millions de dollars) pour le seul premier semestre de sa présidence…

Le chef de l’État passe-t-il d’un extrême à l’autre ? Après des mesures visant, en janvier, à une réduction significative de la taille des délégations officielles (25 pour les voyages locaux et 20 pour les voyages internationaux), Bola Tinubu a décidé d’imposer à « tous les fonctionnaires du gouvernement fédéral à tous les niveaux », à compter du 1er avril, une interdiction de voyager à l’étranger avec des fonds publics.

Serrer les cordons de la bourse

Populisme ? Les autorités évoquent les défis économiques auxquels se heurte un Nigeria qui a besoin d’une gestion budgétaire prudente. Elles insistent sur le fait que la mesure est temporaire (d’une durée de trois mois) et que des exonérations pourront être accordées, pour peu qu’un voyage à l’étranger soit jugé « essentiel » sur le plan de l’efficacité politique et après une évaluation présidentielle d’environ deux semaines.

Pris à la gorge par le coût de la vie, le Nigérian moyen a parfois l’impression que les voyages officiels sont autant d’occasions de tourisme ou d’activités parallèles, surtout depuis que la pandémie de Covid-19 a démontré que nombre de dossiers pouvaient être gérés en distanciel.

Le président en exercice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) a pourtant insisté sur le caractère crucial des engagements internationaux au service des intérêts nationaux.

Une tendance continentale

D’autres pays africains ont embouché la même trompette de la réduction des budgets sans cesse croissants des déplacements des agents publics. En septembre, pour donner un répit aux caisses de l’État, c’est le Zimbabwéen Emmerson Mnangagwa qui restreignait les voyages à l’étranger de ses ministres aux « missions essentielles ». Le mois suivant, le Sénégalais Macky Sall interdisait à ses ministres d’effectuer des voyages à l’étranger, sauf en cas de « nécessité absolue ».

Avec Jeune Afrique par Damien Glez, Dessinateur et éditorialiste franco-burkinabè.

RDC-Monnaie : le franc congolais se déprécie depuis début 2024

mars 27, 2024

Le Franc congolais

Le franc congolais (FC) ne cesse de dégringoler sur le marché de change face aux monnaies étrangères. Et ce, en dépit des politiques prudentielles mises en place par la Banque centrale du Congo (BCC) pour la stabilisation monétaire.

 Le dernier rapport publié par l’institution bancaire nationale fait état d’une perte de plus de 26 % de la valeur marchande de la monnaie nationale en une année. « Par rapport à fin mars 2023, la monnaie nationale a enregistré une dépréciation de 26,2 % à l’indicatif et 15,6 % au parallèle« , renseigne la note de conjoncture de la BCC.

 Au 18 mars 2024, la monnaie nationale a enregistré une légère dépréciation hebdomadaire de 0,12 % à l’indicatif, situant le taux à 2.761,12 CDF le dollar américain.

Au marché parallèle de change, le taux s’est établi à 2 750,63 CDF, soit une légère appréciation de 0,16 %. Comparée à fin décembre 2023, la monnaie nationale a connu la perte de sa valeur de 3,34 % à l’indicatif et 2,33 % au parallèle. Dans les grandes villes des provinces, le taux de change moyen s’est situé à 2 750,77 CDF, soit un taux de dépréciation hebdomadaire de 0,07 %. Clairement, la situation de la monnaie nationale ne s’est pas du tout améliorée sur le marché de change.

Avec Adiac-Congo par Martin Enyimo

Afrique : pourquoi les banques françaises accélèrent leur départ

mars 25, 2024

La question est posée alors qu’à son tour la Société générale, la plus implantée des banques françaises en Afrique, accélère son désengagement du continent.

Des gens font la queue pour retirer de l'argent dans un distributeur automatique de billets devant une banque à Yola au Nigeria, le jeudi 23 février 2023.
Des gens font la queue pour retirer de l’argent dans un distributeur automatique de billets devant une banque à Yola au Nigeria, le jeudi 23 février 2023. © Sunday Alamba/AP/SIPA

La rumeur monte ces dernières semaines. La Société générale serait sur le point de quitter le Maroc. Rien n’est encore officiel, personne ne dément ni ne confirme. Et les détails pleuvent. L’accord porterait sur la cession de sa participation de 57 % au capital de sa filiale locale SG Maroc, pour un montant de 732,5 millions d’euros (8 milliards de dirhams). L’acheteur approché serait la holding marocaine Saham, dirigée par l’homme d’affaires Moulay Hafid Elalamy. La Société générale aurait mandaté la banque d’affaires Lazard pour mener à bien l’opération, qui serait soumise bien sûr à l’approbation des autorités marocaines.

Cette rumeur n’est pas infondée dans le sens où elle s’appuie sur une réalité et un contexte général. Depuis près d’une quinzaine d’années, les banques françaises se désengagent peu à peu du continent et le mouvement s’accélère. Présente depuis plus de 100 ans en Afrique, la Société générale est la dernière à entamer ce repli.

Repli stratégique

Depuis juin 2023, le groupe français a annoncé sa volonté de céder six de ses dix-sept filiales sur le continent (Burkina Faso, Congo-Brazzaville, Guinée équatoriale, Mauritanie, Mozambique et Tchad). Elle a même précisé qu’elle étudiait son départ de Tunisie. En revanche, jusqu’à maintenant, rien n’était prévu pour le Maroc.

Cette stratégie se dessine depuis l’arrivée au printemps 2023 du nouveau patron Slawomir Krupa à la tête du groupe Société générale. « 2023 était une année de transition et de transformation », mettait-il en avant à l’occasion de l’annonce des résultats financiers annuels.

Dès novembre, par une nomination en interne, François Bloch a repris la partie activité Afrique. S’il n’a jamais travaillé sur le continent, il est réputé pour son expertise dans la transformation des activités qu’il a menées en Europe de l’Est. Nommé directeur des réseaux bancaires internationaux en Afrique, dans le bassin méditerranéen et en outre-mer, il a donc pour mission « d’optimiser le dispositif et d’en accroître l’efficacité afin d’assurer une rentabilité durable tout en assurant une gestion des risques et de la conformité aux meilleurs standards », selon le communiqué de la Société générale. La Banque s’est aussi engagée dans un vaste plan de réduction des coûts – 1,7 milliard d’euros à l’horizon 2026 –, et près de mille suppressions de postes prévus en France.

Mouvement général

« Le mouvement de désengagement des banques françaises en Afrique a véritablement commencé après la crise financière de 2008. Face à de grosses pertes et au renforcement drastique des normes prudentielles qui ont suivi dès 2010, les établissements européens ont dû revoir leur stratégie. Que la Société générale, qui avait la plus large implantation en Afrique, entame ce process n’a rien d’étonnant », explique Estelle Brack, économiste, spécialiste des questions bancaires et financières.

Le Crédit agricole a été le premier établissement français à se séparer de ses filiales en Afrique de l’Ouest. Le groupe mutualiste BPCE (Banque populaire, Caisse d’Épargne, Natixis) a suivi, en cédant, en 2018, la quasi-totalité de ses filiales africaines. La BNP fait de même et cède nombre de ses participations sur le continent (Gabon, Mali, Comores…) et en 2022, elle se déleste de ses participations en Côte d’Ivoire (BICICI) et au Sénégal (BICIS).

Le constat est implacable. La présence en Afrique des banques françaises fond comme neige au soleil. Plus implantées dans les pays anglophones, les banques britanniques suivent la même route : Standard Bank réduit la voilure tout comme Barclays Bank.

Arbitrage risque-rentabilité

La véritable motivation réside dans la recherche de la rentabilité, dans un contexte économique dégradé et géopolitique tendu. En septembre 2023, dans son discours aux investisseurs, Slawomir Krupa a mis l’accent sur une allocation plus efficace des capitaux propres et une meilleure gestion des risques. « Cet arbitrage entre risque et rentabilité est au cœur du désengagement africain des banques françaises. Cela avait été le cas de BNP Paribas, qui a cédé six de ses filiales sur le continent depuis 2020 », commente Estelle Brack.

En matière de risque, les contraintes liées aux exigences prudentielles des établissements financiers ont été régulièrement renforcées depuis la crise financière de 2008. « Les ratios exigés par Bâle 3 incitent les banques à se concentrer sur le capital de bonne qualité et les activités à moindre risque. Même s’il existe une différence entre risque effectif et risque perçu, vue d’Europe, l’Afrique est considérée comme un continent cher en termes de capital prudentiel », explique Estelle Brack. Ainsi, en annonçant la cession de quatre de ses filiales en juin dernier (Congo, Guinée équatoriale, Mauritanie, Tchad) la Société générale anticipait « un impact positif d’environ 5 points sur le ratio CET1 [un des ratios de solvabilité les plus importants, NDLR] à leur date de finalisation ».

Changement de contexte économique et politique

Ces deux dernières décennies, l’Afrique surfait plutôt sur un trend de croissance dynamique et l’émergence d’une classe moyenne. La pandémie du Covid puis l’impact de la guerre en Ukraine ont bouleversé l’ordre économique mondial, entraînant une flambée de l’inflation et la montée des taux d’intérêt. « Le risque géopolitique est redevenu un facteur prépondérant dans l’analyse globale des risques. Dans certains de ces pays d’Afrique, il a tendance à demeurer plus élevé que sur d’autres marchés », rappelle Rafael Quina, analyste chez Fitch Ratings à l’Agefi. Les risques de conformité y sont également plus élevés. « Ce désengagement… C’est une suite logique », constate Estelle Brack. Il s’agit de répondre à des soucis de rentabilité, en cédant les franchises les plus risquées rentables pour réduire les coûts en capital au niveau de la maison mère, soumise à la supervision de la Banque centrale européenne (BCE).

Concurrence et opportunités

Sur le continent, tout a aussi changé. Les banques locales se sont développées et sont parties à la conquête d’autres marchés pour devenir de véritables institutions panafricaines. « Les banques marocaines ont profité de ces cessions de filiales pour bien se positionner et poursuivre leur implantation sur le continent. Elles ont compris qu’il était plus intéressant de regarder vers le Sud que vers l’Union européenne », constate Estelle Brack. « C’est aussi le bon moment. Sur le continent, de nombreux acheteurs potentiels sont prêts à payer un bon prix. La Société générale profite de l’opportunité de vendre à bon prix, et en même temps, les banques locales en Afrique sont prêtes à saisir un portefeuille clients de qualité au moment où, elles-mêmes en pleine expansion, elles cherchent à gagner de nouveaux marchés », conclut-elle.

Avec Le Point par Sylvie Rantrua